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De nouveaux métiers ? Gaby Bizien, responsable Musiques actuelles de Domaine Musiques, Nord-Pas-de-Calais : To u t d ’ a b o rd, il me paraît fondamental de dire qu’il n'existe pas de nouveaux métiers sans de nouvelles formations. Nous sommes confrontés à des porteurs de projets qui ont des initiatives mais qui n'arrivent pas à qualifier suffisamment leur projet pour être des interl o c u t e u rs au niveau des pouvoirs publics. En effet, quand on parle de “formation", on pense souvent à des formations techniques comme la formation des musiciens pour l'encadrement de locaux de répétition, de techniciens du spectacle... mais il faut aussi penser à la formation des porteurs de projets qui peut leur permettre de devenir des interlocuteurs pour obtenir des soutiens publics. Mon parc o u rs a tra v e rsé le milieu musical puisque j'ai été musicien professionnel pendant quinze ans et ensuite, j'ai été à l'origine de la création d'un c e n t re de formation aux musiques actuelles sous forme associative (ARA, Roubaix). Aujourd’hui, je suis re s p o n- sable du pôle régional des musiques actuelles en Nord - Pas-de-Calais, qui est un département de l'association régionale, donc à l'intérieur d'une institution. Mon point de vue vient donc du croisement de ces différe n t e s e x p é r i e n c e s . La précarité des structures a tra v e rsé les débats des tables rondes précédentes. Les structures de diffusion de proximité, d'accompagnement des pratiques, de développement local, vivent depuis plus de dix ans grâce au militantisme de passionnés. Ce militantisme, sur les actions de proximité, interpelle la fil i è re culturelle telle qu'on la connaît. Cette fil i è re est souvent sclérosée par des cadres trop rigides qui ne permettent pas de liberté d'initiative favorisant la mise en œuvre d'une réelle d é m o c ratie culturelle. D'un autre côté, nous connaissons le re v e rs de la médaille : précarité des emplois, très bas s a l a i res, C.E.S., objecteurs de conscience, C.E.C... Bref, le lot quotidien des “c afés-musique", des structure s a s s ociatives de formation, des collectifs d'artistes qui se montent pour aider à la création et à la diffusion de leur p roduction. En introduction, je voudrais faire un bref ra p p e l historique des rapports entre le secteur des musiques actuelles et l'intervention publique, parce que ce ra p- port est révélateur de l'apparition de nouvelles activités. Nouvelles activités en matière de médiation culture l l e , nouvelle manière d'envisager la médiation culture l l e , nouvelles activités en matière d'accompagnement des pratiques et nouvelles activités par la spé- sans de nouvelles formations Il n'existe pas de nouveaux métiers cificité même de ces musiques. Ce secteur est représentatif d'une mutation de la réflexion en matière de politique culturelle. Je crois même que le secteur des musiques actuelles a largement contribué, par ses pratiques, par la mise en œuvre de ses projets, de sa réflexion, à la mutation de cette réflexion sur les politiques culturelles. À l'évidence, les liens qu'entretiennent ces musiques - aussi bien avec l'industrie musicale qu’avec ce qu'on a appelé à une époque Gaby Bizien, MODÉRATEUR : la recomposition du lien social - ont souvent empêché une vision claire du secteur, RESPONSABLE MUSIQUES ACTUELLES DE DOMAINE MUSIQUES NORD-PAS-DE-CALAIS. notamment chez les élus et même chez certains techniciens au sein des institutions INTERVENANTS : c u l t u relles. La réalité artistique de ces Laure Chailloux, p ratiques a souvent été masquée derrière A.R.A. - ROUBAIX, l'opacité des débats entre secteur privé, Thierry Duval, s e cteur public, showbiz et pratiques artist i q u e s . COORDINATEUR DU C.R.Y. POUR LA MUSIQUE, La prise en compte des musiques Philippe Audubert, RESPONSABLE DU SECTEUR actuelles dans le cadre des politiques FORMATION DE TREMPOLINO publiques est assez récente puisqu’elle commence dans les années 80. Ces années-là Bruno Ponge, NANTES, privilégient surtout la diffusion et le développement des artistes dans le cadre de l'in- Christian Roux, GÉRANT DE T.R.I.P.S., dustrie musicale. En parallèle aux aides pour DIRECTEUR DU CENTRE DE CRÉATION MUSICALE - BREST, les salles de spectacle identifiées “musiques actuelles" et apparues à cette époque, il y a Jean-Louis Sautreau, 57 la loi de 1985 qui induit un certain nombre (EX-AGENCE DES LIEUX d'aides au secteur professionnel à partir de MUSICAUX, AINTÉGRÉ DEPUIS LA D.M.D.T.S. DU MINISTÈRE la reconnaissance de nouveaux droits pour DE LA CULTURE), les interprètes, pour les pro d u c t e u rs. Ces Jean-Claude aides sont gérées par les nouvelles sociétés Pe rrot, civiles et par la création d'organismes tels DIRECTEUR MCL DE METZ.
5 8 que le Fonds de Création Musicale ou le Fonds de Soutien. Nous nous apercevons maintenant que les subventions accordées aux lieux de diffusion n'ont pas atténué le prix des places. On vérifie ainsi, et ce n'est pas nouveau, que les volontés de démocratisation culturelle, d'accès aux œuvres, profitent surtout aux publics qui ont déjà une démarche culturelle, une démarche de consommation culturelle. Les aides au développement de carrière d'artistes ont souvent également été critiquées dans la m e s u re où elles sont accordées à un producteur pour qu'il développe l'artiste avec toutes les réserves d'usage sur le formatage d'artistes par l'industrie. Nous ne pouvons pas dire que de nouveaux métiers soient apparus dans les années 80. Il y a des luttes syndicales pour la reconnaissance de certaines pro f e s s i o n s comme les interprètes et les pro d u c t e u rs qui ont, par la loi de 1985, obtenu le bénéfice de droits spécifiq u e s , mais pas vraiment de nouveaux métiers. En re v a n c h e , une deuxième génération de porteurs de projets appara î t dans les années 1990 avec la montée en puissance d'une a u t re conception du service public en direction des musiques actuelles, notamment face à la demande re p é- rée des populations dites “en diffic ulté”. C'est le célèbre couple culture et lien social qui fait son apparition. La c u l t u re en général et les musiques actuelles, en particulier le rap et les musiques qui y sont associées, sont appelées sur le front du social. On espère que la culture va Les volontés de démocratisation culturelle pro fit e n t surtout aux publics qui ont déjà une démarche culture l l e repousser les limites qui n'arrivent pas à être comblées par l'école et par l'ensemble des stages d'insertion que l'on met en place et qui sont balayés par la folie économique. Au niveau du service public, il n'existe aucun c a d rage institutionnel. Les pro f e s s e u rs de l'enseignement spécialisé, du réseau des conservatoires et des écoles de musique, sont complètement démunis face à ces musiques qui, d’une part, privilégient la pratique collective, utilisent des instruments amplifiés, font appel aux technologies de l'enre g i s t rement, de l'informatique, et, d ' a u t re part, à des demandes qui arrivent souvent, non pas en formation initiale, mais après une pratique autodidacte. Souvent, ces musiciens vont répéter dans leur local, vont jouer sur scène et même enre gistrer, éventuellement dans un studio, une maquette “démo", et ensuite se retournent vers des opéra t e u rs spécialisés en formation pour combler certaines lacunes qu'ils re s s e n- tent, ou pour acquérir de nouveaux savoirs. Au cours des années 80, il y a un certain nombre de centres de formations qui se sont créés. Ce sont des formations spécifiques souvent orientées vers le jazz et qui se sont créées sous forme associative. Ces centres de formation sont financés à la marge par la culture et surtout par la formation professionnelle avec des sociétés civiles d'artistes. D ' a u t res centres de formation sont mis en place à la fin des années 80. Ceux-ci ont été plus orientés sur le rock, avec comme objectif de pouvoir accueillir la p ratique amateur et de lui offrir un éventail de formations destinées à qualifier ces pratiques. Dans le même temps, il y a des lieux de diffusion qui développent des locaux de répétition pour accueillir les groupes et mettent en place également des actions de formation. Ce sont des initiatives qui sont, comme les “cafésmusique" et d'autres structures, portées à bout de bra s par des convaincus de cette idée de démocratie culturelle. C'est en tout cas de l'expérience de ces acteurs que naissent les réflexions et les services offerts aux pra t i- quants pour l'accompagnement et la qualification aux musiciens amateurs. Cela s'adresse à des musiciens a m a t e u rs mais aussi à des musiciens en voie de pro f e s- sionnalisation parce que la fro n t i è re est assez souvent f ranchie, d'un côté comme de l'autre d'ailleurs. E n fin, arrêtons-nous quelques instants sur les termes “a mateur", “professionnel", “en développement", “en voie de professionnalisation", qui sont des termes utilisés régulièrement dans notre secteur. Pa r m i la grande majorité des “musiciens actuels" - j'utilise ce terme bien qu'il ne me satisfasse pas non plus - on tro u v e ra ra rement de véritables amateurs et de véritables professionnels et c'est ce qui fait que nous naviguons entre les deux mondes. Juridiquement, l'amateur est défini par le d é c ret de 1953 : c'est quelqu'un qui ne tire pas de bénéfice de son art et qui a d'autres moyens de subsistance. C'est donc assez clair. Pour le professionnel, c'est plus d i f ficile. Est-ce que c'est celui qui a fait 45 cachets déclarés sur 12 mois et qui à ce titre peut obtenir les r é m u n é rations ASSEDIC d'intermittent du spectacle ? Est-ce que c'est celui qui a fait 24 cachets et qui peut b é n é ficier de la formation professionnelle AFDAS ? Estce que c'est celui qui consacre tout son temps à la musique, mais qui n'arrive pas à avoir de cachets déclarés et qui vit au RMI avec des contrats au “black" à côté ? Est-ce que c'est celui qui a signé dans une maison de disques, sachant que la signature dans une maison de disques n'est pas forcément la garantie de moyens de subsistance et encore moins d'une pérennisation de l’emploi ? Une chose est certaine : le passage au niveau p rofessionnel, c'est un choix personnel, c'est un choix de vie de la part du musicien et sur lequel nous n'avons pas f o rcément à re v e n i r. Il faut savoir que ce musicien vit souvent du cumul de cachets, de droits, de ro y a l t i e s
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