06.03.2014 Views

Les actes des rencontres d'Evreux.pdf - Irma

Les actes des rencontres d'Evreux.pdf - Irma

Les actes des rencontres d'Evreux.pdf - Irma

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Cette division de l'action publique en dispositifs de<br />

traitement séparé <strong>des</strong> populations sonne le glas de pratiques<br />

démocratiques encombrantes. On ne peut pas<br />

reconstruire politiquement le problème du “qui on est ?"<br />

et du “pourquoi on en est là ?" dans cette société, si<br />

immédiatement on nous met dans un secteur, sous une<br />

étiquette et qu'on nous propose de faire de la musique et<br />

rien d'autre. Comment permettre à <strong>des</strong> jeunes de se<br />

construire comme sujets politiques quand on les traite<br />

comme <strong>des</strong> objets sociaux ? Qu'est-ce que la citoyenneté,<br />

si ce n'est la confrontation politique avec <strong>des</strong> gens qui ne<br />

partagent pas la même vision que soi ? Confiner les jeunes<br />

avec les jeunes pour se livrer à <strong>des</strong> pratiques de jeunes est<br />

le fantasme vichyste-pétainiste par excellence. Le citoyen<br />

n'est plus celui dont la volonté produit du droit, mais celui<br />

dont la soumission lui ramène un sampler. Si la musique<br />

peut aider à amener <strong>des</strong> jeunes vers le politique, c'est<br />

effectivement parce que le secteur associatif se sera posé<br />

la question du politique dans sa façon de proposer de la<br />

musique. Sinon, autant se passer de la musique et aller<br />

directement au politique !<br />

Dans un cas, l'objectif est de calmer <strong>des</strong> “objets<br />

sociaux" en les séparant <strong>des</strong> adultes, et en agglomérant les<br />

jeunes sur <strong>des</strong> sujets qui les rassemblent, ce qui les amène à<br />

être considérés, de plus en plus souvent, comme <strong>des</strong> clients.<br />

Dans l'autre cas, il s'agit d'aider à la construction de sujets<br />

politiques en organisant la re ncontre contra dictoire avec<br />

<strong>des</strong> adultes sur <strong>des</strong> sujets qui les divisent. La démocratie ne<br />

se résume pas à la liberté d'expression qui n'est que le premier<br />

temps d'un processus démocratique. Une société est<br />

démocratique quand elle se reconnaît divisée et qu'elle se<br />

Comment permettre à <strong>des</strong> jeunes de se construire<br />

comme sujets politiques quand on les traite comme<br />

<strong>des</strong> objets sociaux ? Qu'est-ce que la citoyenneté, si ce<br />

n'est la confrontation politique avec <strong>des</strong> gens qui ne<br />

partagent pas la même vision que soi ?<br />

fixe comme objectif d'associer toutes ses composantes à<br />

part égale dans l'expression de ses divisions, dans leur mise<br />

en délibération pour arriver à un arbitrage. <strong>Les</strong> ra peurs s'expriment,<br />

mais dans une société qui permet massivement la<br />

liberté d'expression, cela n'a strictement aucun intérêt si<br />

cela n'est pas suivi d'effet, d'une confrontation avec le politique.<br />

On peut conchier les institutions dès lors que cellesci<br />

l'autorisent. Le rock et les musiques émergentes sont-ils<br />

un moyen d'aller vers le politique ou de s'en extra ire ? Il me<br />

semble que la responsabilité du secteur associatif est plutôt<br />

proche de la pre mière alternative…<br />

Bruno Colin, directeur d’Opale (Organisation pour les<br />

Projets Alternatifs d’Entreprises) : L'association Opale<br />

s'est beaucoup occupée <strong>des</strong> “cafés-musique”, dont on<br />

vient de parler, en publiant notamment un guide et une<br />

évaluation de fonctionnement ainsi qu’un essai de mise en<br />

réseaux de porteurs de projets et de gens qui développaient<br />

<strong>des</strong> activités. Depuis un an maintenant, nous<br />

éditons une revue, “Culture et Proximité”, qui essaie de<br />

proposer la philosophie de notre travail. A savoir que nous<br />

n'avons rien de spécial à dire si ce n'est de nous présenter<br />

comme un outil de restitution, aussi fidèle que possible,<br />

de la parole <strong>des</strong> gens qui essaient, aujourd'hui, d'inventer<br />

de nouvelles réponses aux besoins divers. Recherche de<br />

sens, de vision du futur, d'organisation de la vie en communauté<br />

dans l'espace local.<br />

On m'a demandé d'intervenir sur la notion d'économie<br />

solidaire parce que nous y avons fait et y faisons<br />

encore référence dans un certain nombre de cas. Nous<br />

avons <strong>des</strong> relations privilégiées avec <strong>des</strong> chercheurs qui<br />

évangélisent dans les colloques sur ces notions-là et nous<br />

essayons d'organiser <strong>des</strong> re ncontres inter-réseaux de<br />

“l'économie solidaire", bien que cette notion soit floue et<br />

qu'elle ait <strong>des</strong> acceptions différentes. Certains réseaux se<br />

réunissent pour essayer d'organiser <strong>des</strong> échanges d'idées<br />

et d'expériences pour faire en sorte que, sur un territoire,<br />

<strong>des</strong> forces qui théoriquement vont dans <strong>des</strong> directions différentes<br />

aient de plus en plus envie de se croiser, de se<br />

confronter pour imaginer <strong>des</strong> choses ensemble. J'essaierai<br />

donc de vous dire, avec mes mots à moi, ce que l'on<br />

entend par là.<br />

“Économie solidaire”, c'est pour moi, en fait, associer<br />

une sorte de principe de la réalité à une utopie. C'est,<br />

en tout cas, essayer de refuser la séparation qui est habituelle<br />

entre l'économie libérale, enfin l'économie<br />

de Marché - avec un “m” majuscule dans les textes<br />

maintenant - et d'un autre côté, la Solidarité, que<br />

l'on écrit également avec un “s” majuscule. On<br />

aurait donc, d'un côté, une organisation tout à<br />

fait libre et sans contrainte de l'échange dans la<br />

communauté humaine et, de l'autre côté, une<br />

réparation <strong>des</strong> dégâts et la re distribution.<br />

Il s'agit de s'intéresser à l'organisation d'activités<br />

qui ne soient pas complètement dépendantes de la re d i s-<br />

tribution et de voir le lien avec les usagers auxquels elles<br />

s ' a d ressent. Pour une part, ceux qui organisent ces activités<br />

sont dans le principe de réalité de l'économie, dans<br />

une certaine forme de marché en tout cas, où <strong>des</strong> pre s-<br />

tations se vendent en fonction <strong>des</strong> re s s o u rces <strong>des</strong> personnes<br />

auxquelles elles s'adressent. Tout cela avec une<br />

part de redistribution et une valorisation <strong>des</strong> apports<br />

v o l o n t a i res qui sont réalisés dans ces secteurs associatifs.<br />

On rejoint là, avec d'autres mots, ce que disait Fra n c k<br />

Lepage tout à l'heure en parlant de secteurs délégataire s ,<br />

de mission de service public.<br />

15

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!