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Untitled - Instytut Książki

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32 FILIP SPRINGER<br />

FILIP SPRINGER (1982), JOURNALISTE AUTODIDACTE,<br />

TRAVAILLE COMME REPORTER ET PHOTOGRAPHE DEPUIS<br />

2006. IL DÉBUTA EN 2012 PAR UN LIVRE DE REPORTAGES<br />

KUPFERBERG VS MIEDZIANKA.<br />

Les mal nés<br />

Les livres et les expositions tel le « Cold war modern » de David Crowley,<br />

montrent que l’architecture et l’idéologie de la fin de l’époque moderne<br />

étaient une ligne de front importante de la guerre idéologique qui opposa<br />

les pays situés des deux côtés du rideau de fer. Au cours des dernières<br />

décennies, l’architecture des pays de l’ancien bloc soviétique a été reléguée<br />

sur le talus des rebuts de l’histoire.<br />

Fascinés qu’ils sont par le capitalisme et dénués de tout esprit critique le<br />

concernant, les Polonais détruisent plus que d’autres, aujourd'hui encore,<br />

les souvenirs du passé communiste avec une passion de néophytes. Les<br />

ruines de la première grande surface de Varsovie appelée Supersam, ou de la<br />

gare ferroviaire au style brutaliste de Katowice ont pourtant ému une jeune<br />

génération de militants, d'historiens de l'art, d'artiste ou d'écrivains.<br />

Leurs expositions, publications et livres successifs défendent ou, plus<br />

simplement, décrivent l'art créé du temps du communisme et, notamment<br />

l'art moderne socialiste qui est si « mal né » comme le signale avec<br />

pertinence le titre du livre de Filip Springer. Ce journaliste et photographe,<br />

au regard innocent de la génération née à peine sept ans avant les premières<br />

élections libres en Pologne, regarde les monuments de l'époque révolue et<br />

constate que c'était pourtant de la « bonne architecture. »<br />

Les mal nés est le titre d'un album photographique composé de précieux<br />

documents d'archives, d'autres actuels dus à Springer, mais aussi de<br />

reportages sur les bâtiments-bâtards.<br />

Pour illustrer ce que fut la réalité de la République Populaire Polonaise dans<br />

toute la richesse de ses nuances, le destin des architectes apparaît comme<br />

étant plus signifiant que les constructions dénigrées. L'auteur présente le<br />

sort de la génération des architectes de l'immédiat après-guerre qui, à la<br />

suite de la victoire que remporta le communisme, se mit en quête d’une<br />

version locale de la modernité. Ses jeux de contournements des injonctions<br />

du pouvoir politique nous semblent particulièrement passionnants.<br />

À l'époque stalinienne, alors que le style historicisant du réalisme socialiste<br />

est imposé par le pouvoir avec un sérieux mortel, Marek Leykam construit<br />

pour le gouvernement des immeubles qui sont une copie éclectique des<br />

monuments de la renaissance italienne. Jerzy Hryniewiecki se moque<br />

publiquement des autorités et de ses supérieurs, mais cela n'empêche<br />

pas qu'il soit en charge de la majorité des réalisations importantes et<br />

ambitieuses dont il fait valider les projets grâce à ses relations qui datent<br />

de son internement en camp de détention allemand.<br />

Dans son livre, Filip Springer n’en évoque pas moins le devenir des bâtiments<br />

communistes après 1989, la transformation des quartiers ou leur destruction<br />

par de nouveaux investisseurs. La question de savoir s’il est possible de<br />

vivre dans ces symboles modernes du style officiel du « socialisme à visage<br />

humain » reste posée, néanmoins.<br />

Max Cegielski

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