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LE MONSTRE, OU LE SENS DE L'ECART ESSAI SUR UNE ...

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CHAPITRE II<br />

LA TERATOLOGIE, <strong>OU</strong> L’AMBITION D’<strong>UNE</strong> SCIENCE<br />

tel-00846655, version 1 - 19 Jul 2013<br />

1. La tératologie, ou la légitimité d’une science<br />

Isidore Geoffroy Saint-Hilaire est connu pour avoir inventé le mot « tératologie » à<br />

défaut de la chose même 1 . Ce terme dit bien l’ambition qui l’anime : constituer une véritable<br />

science des monstres se proposant, à ce titre, d’en livrer une classification – classification qui<br />

exige une nouvelle approche de l’ordre de la nature. Cependant, le titre même de l’ouvrage,<br />

Histoire générale et particulière des anomalies de l’organisme chez l’homme et les animaux<br />

semble placer le travail de Geoffroy Saint-Hilaire sous la filiation de Buffon. Dans les deux<br />

cas, il s’agit d’une histoire générale et particulière, pour l’un de la nature, pour l’autre des<br />

anomalies. Il est à relever également que Geoffroy Saint-Hilaire ne s’est pas contenté dans ses<br />

descriptions des êtres anomaux de noter le plus fidèlement possible leurs traits anatomiques et<br />

physiologiques, mais autant que possible, leur mode de vie, les conditions de leur venue au<br />

1 C’est à son père, Etienne Geoffroy Saint-Hilaire, que la tératologie doit tous ses principes et la définition de son<br />

champ – nous y reviendrons. I. Geoffroy Saint-Hilaire ne cesse, du reste, de rappeler que c’est son père qui fonde<br />

véritablement la tératologie. Dans les trois chapitres suivants, nous avons eu tendance à analyser la tératologie<br />

comme étant le « bien commun » du père et du fils. Ce dernier semble toutefois avoir pris ses distances avec son<br />

père, lorsqu’à la fin de sa vie celui-ci « s’exprimait d’une façon de plus en plus vague, presque mystique, et son<br />

insistance sur ses propres mérites était souvent irritante et embarrassante pour ses amis, et même pour son fils »,<br />

Pietro Corsi, Lamarck. Genèse et enjeux du transformisme. 1770-1830, Paris, CNRS éditions, 2001, p. 323. Le<br />

fils se désolidarise du père, non sur le fond, mais avec son comportement institutionnel. Pietro Corsi cite le<br />

témoignage de Moquin-Tendon, Un naturaliste à Paris. 1834. Notes sur mon séjour à Paris en 1834, du 4<br />

septembre au 23 octobre, Fischer J.-L. (éd.), Paris, SenS, 1999, p. 53 : « Il [Etienne Geoffroy Saint-Hilaire] a le<br />

feu de la jeunesse, mais non pas la réserve de l’âge mûr. Son fils s’aperçoit des bizarreries paternelles ; il en<br />

souffre. Dernièrement, à l’Institut, il sortit de la salle quand son père commença sa longue et assommante<br />

homélie sur les milieux et leur vertu modifiante ; M. Isidore fait son possible pour arrêter son père ; M. Serres<br />

aussi ; mais l’ardeur du vieux Geoffroy ne connaît pas de bornes ».

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