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LE MONSTRE, OU LE SENS DE L'ECART ESSAI SUR UNE ...

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tel-00846655, version 1 - 19 Jul 2013<br />

toutes les anomalies complexes sont congéniales » 1 . En effet, les métamorphoses subies par<br />

l’organisme lorsqu’il est touché par une monstruosité ne peuvent intervenir, à ce haut degré de<br />

gravité, que dans la période intra-utérine, précisément au moment où l’organisme se<br />

métamorphose. L’anomalie fait prendre une autre direction à la métamorphose nécessaire de<br />

l’organisme. Toutefois, il faut bien prendre garde de ne pas penser que toute déviation<br />

congéniale est complexe. Nous tombons là sur une autre asymétrie : toute déviation complexe<br />

est congéniale, mais l’inverse n’est pas forcément vrai. Nous verrons tout à l’heure quelles<br />

sont les conséquences de cette asymétrie entre le fond et la forme, entre la complexité de<br />

l’anomalie et son caractère congénial pour la portée et le sens de cette définition de la<br />

monstruosité. Pour le moment, tentons d’embrasser l’ensemble des caractères de la<br />

monstruosité et les liens intrinsèques qui les unissent les uns aux autres :<br />

Ainsi, parce que les monstruosités sont des anomalies très graves, elles exercent une<br />

influence très générale sur l’organisation ; parce qu’elles exercent une influence très générale,<br />

elles sont à la fois intérieures et extérieures, et par conséquent apparentes au dehors ; enfin,<br />

parce qu’elles sont toujours apparentes, elles sont toujours nuisibles aux individus qui les<br />

présentent. 2<br />

Désormais que nous avons vu que définir la monstruosité comme une anomalie très<br />

grave n’est pas reconduire une définition floue et subjective, mais, au contraire, tenter d’en<br />

saisir les contours de la manière la plus précise qui soit en tenant fermement à l’écart les<br />

réactions spontanées et affectives, il nous faut examiner en quoi elle permet une approche<br />

scientifique des phénomènes monstrueux. C’est-à-dire : en quel sens est-elle une définition<br />

rendant possible la classification en mettant au jour les caractères pertinents de classification ?<br />

En d’autres termes, est-elle scientifiquement applicable ?<br />

La classification des monstruosités<br />

Pour qu’une classification soit possible, il faut trois conditions : 1) un ordre, 2) une<br />

appréhension de la totalité de l’être vivant en question, 3) la possibilité d’établir des groupes<br />

de ressemblance et d’analogie. La définition de la monstruosité donne-t-elle accès à ces trois<br />

conditions ? Premièrement, comme nous n’avons pas cessé de le voir, Geoffroy Saint-Hilaire<br />

s’est plus qu’appesanti sur l’idée que les monstruosités ne signalaient pas une absence<br />

d’ordre, mais relevaient d’un ordre suivant des règles et des lois.<br />

Les modifications organiques qui méritent réellement le nom de monstruosités, sont<br />

soumises à des lois certaines et précises. 3<br />

Répétons ce que nous avons dit dans les deux chapitres précédents : si les monstres<br />

sont soumis à des lois, non seulement l’ordre de la nature s’étend jusqu’à eux, mais ils sont<br />

produits par des causes qui peuvent être en droit accessibles à la raison. Deuxièmement, la<br />

définition de la monstruosité a fortement mis l’accent sur son caractère complexe ; il ne s’agit<br />

1 Ibid., I, p. 52.<br />

2 Ibid., I, p. 51.<br />

3 Ibid., I, p. 104.

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