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Analyse des Manuscrits des Trois contes: la transcendance des ...

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tel-00790321, version 1 - 19 Feb 2013<br />

et j'ai envie d'aller en confesse » 172 [Corr. II, p. 297]. Cette lettre est écrite au moment de <strong>la</strong><br />

rédaction de <strong>la</strong> scène dans <strong>la</strong>quelle Emma se tourmente de son amour pour Léon et décide<br />

d’aller à l’église. Entrer « dans <strong>des</strong> peaux » signifie qu’il s’identifie à Emma elle-même et<br />

s’assimile complètement à elle avec tout son corps. « à toute minute » suggère que du point<br />

de vue temporel, il voit comme un personnage de roman pendant qu’il écrit. F<strong>la</strong>ubert a<br />

aussi essayé de s’identifier aux oiseaux : « Savez-vous qui j’ai devant moi sur ma table,<br />

depuis trois semaines ? un perroquet empaillé. Il y reste à poste fixe. Sa vue commence<br />

même à m’embêter. Mais je le garde, pour m’emplir <strong>la</strong> cervelle de l’idée perroquet. » 173<br />

[Corr. V, p. 86].<br />

Cependant, F<strong>la</strong>ubert n’a pas seulement essayé de s’identifier à ses personnages en<br />

écrivant ses romans. Lorsqu’il baignait dans les souvenirs de Louise Colet, tout seul dans sa<br />

pièce à Croisset pendant <strong>la</strong> nuit, il écrivit dans une lettre :<br />

[...], je me livre à toi, je t’aspire et ça me rafraîchit, et ça m’égaye, ainsi que ces bonnes brises<br />

nocturnes qui vous pénètrent l’âme de vie et de jeunesse. On ouvre sa fenêtre, on ouvre son<br />

cœur, pour s’emplir de ce quelque chose d’innommé qui est si doux et si grand. Il me semble<br />

que <strong>la</strong> nuit est faite pour un ordre d’idées tout particulier et autre que celui où nous vivons tout<br />

le jour ; c’est le moment <strong>des</strong> soupirs, <strong>des</strong> désirs, du souvenir et de l’espoir ; c’est là que, seule et<br />

éveillée, <strong>la</strong> pensée p<strong>la</strong>ne à l’aise entre <strong>la</strong> terre et le ciel, comme ces oiseaux qui vivent dans les<br />

nuages. Le corps aussi y a <strong>des</strong> joies plus violentes. 174 [Corr. I, p. 379]<br />

La scène dans <strong>la</strong>quelle un personnage rêve d’un autre, tout seul, <strong>la</strong> nuit, est récurrente dans<br />

les romans de F<strong>la</strong>ubert. Il est fréquent que ce<strong>la</strong> soit décrit sous <strong>la</strong> forme d’un enivrement<br />

plus que comme un événement réel. Dans cette lettre, en écrivant « je me livre à toi, je<br />

t’aspire », F<strong>la</strong>ubert élève ses sentiments et veut y baigner. Autrement dit, il peut être ivre de<br />

bonheur même quand l’autre personne n’existe pas devant lui. Pour ce<strong>la</strong>, il a<br />

nécessairement besoin de temps, <strong>la</strong> nuit, lorsque <strong>la</strong> vie quotidienne s’arrête et que<br />

l’obscurité l’entoure.<br />

De fait, c’est <strong>la</strong> nuit que Saint Antoine est séduit par le diable et se perd dans une<br />

illusion qui ne finit qu’avec l’aube. Emma aussi <strong>la</strong>isse aller son imagination pendant <strong>la</strong> nuit.<br />

172 Lettre à Louise Louise Colet, le 6 avril 1853.<br />

173 Lettre à Léonie Brianne, le 28 juillet 1876.<br />

174 Lettre à Louise Louise Colet, le 8 avril 1846.<br />

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Ohashi, Eri. <strong>Analyse</strong> <strong>des</strong> <strong>Manuscrits</strong> <strong>des</strong> <strong>Trois</strong> <strong>contes</strong> : <strong>la</strong> <strong>transcendance</strong> <strong>des</strong> hommes, <strong>des</strong> lieux et <strong>des</strong> choses chez F<strong>la</strong>ubert - 2013

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