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Analyse des Manuscrits des Trois contes: la transcendance des ...

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Sans reconnaître son image, Julien se rappe<strong>la</strong>it confusément une figure ressemb<strong>la</strong>nt à celle-là.<br />

Tout à coup, il poussa un cri. C’était son père, et il ne pensa plus à se tuer. [TC, p. 103]<br />

tel-00790321, version 1 - 19 Feb 2013<br />

Julien n’est plus lui-même, il devient son propre père. Mettre fin à ses jours signifie donc<br />

qu’il tue son père une nouvelle fois. Lui qui pensait avoir tué son père parvient à<br />

comprendre que tuer son père c’est se tuer soi-même. En résumé, à l’occasion de <strong>la</strong> mort de<br />

ses parents, il devient lui-même un mort vivant et devient son propre père. Par ce<br />

phénomène de renversement, Julien coïncide pour <strong>la</strong> première fois avec ses parents sur les<br />

p<strong>la</strong>ns spirituel et physique.<br />

Après ce<strong>la</strong>, Julien ne tente plus de mettre fin à ses jours et décide d’accepter son <strong>des</strong>tin.<br />

Il tente de sauver <strong>des</strong> gens au bord de <strong>la</strong> rivière en passant avec son bateau. Cette action est<br />

très symbolique. En effet, <strong>la</strong> rivière où Julien, mort vivant, passe en bateau, est celle qui<br />

coule entre deux mon<strong>des</strong> : celui <strong>des</strong> vivants et celui <strong>des</strong> morts. Dans le brouillon, quand il<br />

s’allonge dans son lit, fatigué, Julien est ramené dans le passé sans en avoir conscience :<br />

tous les trois vivaient dans une<br />

bonté<br />

atmosphère de richesse, d’innocence […]<br />

& de vertu<br />

au milieu <strong>des</strong> loisirs & d’opulence<br />

[NAF23663, f o 466 r o (extrait)]<br />

Ici, le passé et le présent se mé<strong>la</strong>ngent, et <strong>la</strong> conscience du temps qui passe s’efface<br />

complètement. Le monde où Julien vit est celui, ambigu, qui n’appartient à aucun <strong>des</strong> deux<br />

mon<strong>des</strong> : c’est un monde où le temps et l’espace sont particuliers. Ce monde symbolise<br />

l’essence de <strong>la</strong> douleur de Julien.<br />

Cette ambiguïté est symbolisée par un lépreux qui appelle Julien pendant une nuit de<br />

tempête. Les caractéristiques physiques de cet homme sont décrites avec insistance. Il est<br />

décrit comme un mort sorti du tombeau dont le corps est « plus froid qu’un serpent » [TC,<br />

p. 107] et « ses lèvres bleuâtres dégageait une haleine épaisse comme du brouil<strong>la</strong>rd, et<br />

nauséabonde » [TC, p. 107]. Rappelons-nous une phrase sur Julien du f o 438 v o : « Ses mains,<br />

quand il les portait à sa bouche, narines avaient l’odeur <strong>des</strong> charniers ». Il est évident que<br />

cet homme est en réalité Julien, qui vit au seuil de <strong>la</strong> mort.<br />

Enfin, le nombre <strong>des</strong> personnages de ce conte est très limité : il s’agit de Julien, de ses<br />

parents, de sa femme et du lépreux. Mais il n’y a que Julien qui ait son propre nom : les<br />

145<br />

Ohashi, Eri. <strong>Analyse</strong> <strong>des</strong> <strong>Manuscrits</strong> <strong>des</strong> <strong>Trois</strong> <strong>contes</strong> : <strong>la</strong> <strong>transcendance</strong> <strong>des</strong> hommes, <strong>des</strong> lieux et <strong>des</strong> choses chez F<strong>la</strong>ubert - 2013

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