LES TRAPPS DU DECCAN, DES TRAPPES À CO2 - CNRS

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22.02.2014 Views

R E C H E R C H E E N D I R E C T C N R S I N F O • N ° 3 9 6 S E P T E M B R E 2 0 0 1 Pour expliquer ce phénomène, les chercheurs du LMTG et de l’IPGP ont déterminé une loi simple qui permet d'estimer la quantité de CO 2 consommée lors de l'altération des basaltes. Cette loi a été établie à partir de données obtenues sur les rivières drainant les trapps du Deccan et d'autres régions basaltiques. Deux paramètres sont fondamentaux : la quantité d'eau qui circule dans les sols et la température atmosphérique. Ces deux facteurs jouent dans le même sens car ils favorisent tous les deux la mise en solution des sols et des roches : plus ces paramètres sont élevés, plus l'altération est importante. Les chercheurs ont également rassemblé des données bibliographiques. Ainsi la quantité de CO 2 d é g a z é e dans l'atmosphère durant la mise en place des trapps est estimée à 1,6 x 10 18 moles, soit environ la moitié de ce qui est contenu sous forme dissoute dans l'océan à l’heure actuelle. Quant à la durée de cet événement, elle est évaluée à moins d’un million d’années par de nombreux auteurs. À partir de toutes ces estimations, les chercheurs du LTMG ont modélisé les évolutions climatiques qui se sont produites à l’époque de la mise en place des trapps du Deccan. La modélisation montre que l'augmentation de CO 2 dans l'atmosphère a été très importante (1050 ppmv, soit 3 fois la teneur actuelle 3 ) et s’est accompagnée d’un rapide réchauffement de la Terre (+ 4 °C). Grâce à l’efficacité du phénomène d'altération continentale, il a fallu seulement 1,5 millions d'années pour résorber l'excès de CO 2 émis dans l'atmosphère, avec pour conséquence une baisse de température de 4,55 °C, soit un refroidissement global de 0,55 °C. Cette modélisation a permis de détecter des variations des cycles géochimiques du carbone et du strontium au sein de l'océan. Le modèle prédit un arrêt, lié à une forte acidification de l’eau de mer par le CO 2 , de la sédimentation des carbonates marins pendant une période de 20 000 ans après la mise en place des trapps. Cet arrêt prévu par le modèle est également observé dans les carbonates marins à la limite Crétacé/Tertiaire. Le modèle prévoit également un pic du rapport isotopique de strontium ( 87 Sr/ 86 Sr) d'une durée de 4 millions d'années dans l’eau de mer à la suite de la mise en place des trapps (voir figure ci-dessus). Pendant les périodes où l’altération continentale est forte, le flux des rivières, avec un rapport isotopique haut, est prédominant comparé au flux hydrothermal dont le rapport isotopique est faible. D’où un pic du rapport isotopique de l’eau de mer, résultant d’un mélange des deux flux. Le modèle indique que de grands épanchements volcaniques conduisent à des changements globaux du climat et de la chimie des océans. Bien que cette étude ne permette pas d’expliquer la disparition des dinosaures, elle permet d’affirmer que, quelle que soit la cause de cette extinction, la mise en place des trapps du Deccan a largement amplifié le phénomène. Référence : • C. Dessert, B. Dupré, L. M. François, J. Schott, J. Gaillardet, G. Chakrapani and S. Bajpai. (2001) Erosion of Deccan Traps determined by river [Image] geochemistry. Impact on global climate and 87 Sr/ 86 Sr ratio of seawater. Earth Planet. Sci. Lett. 188, pp. 459-474. 3 ppmv : unité scientifique internationale qui caractérise la concentration volumique d’un gaz. 1 ppmv = 10 -3 cm 3 /dm 3 (teneur du gaz considéré dispersé dans un volume d’un litre de gaz). Contacts chercheurs : Laboratoire de mécanismes de transfert en géologie (LMTG), CNRS-Université Toulouse 3, • Céline DESSERT, tél. : 05 61 55 84 05 mél : dessert@lmtg.ups-tlse.fr • Bernard DUPRÉ, tél. : 05 61 55 87 84 mél : dupre@lmtg.ups-tlse.fr Contact Observatoire Midi-Pyrénées : Dominique D’Arabian, tél. : 05 61 33 28 67 Contact département Sciences de l’Univers du CNRS/INSU : • Océan/Atmosphère : Hélène DOCO, tél. : 01 44 96 42 74 mél : doco@cnrs-bellevue.fr • Sciences de la Terre : Christiane GRAPPIN, tél. : 01 44 96 43 37 mél : christiane.grappin@ cnrs-dir.fr 30

R E C H E R C H E E N D I R E C T C N R S I N F O • N ° 3 9 6<br />

S E P T E M B R E 2 0 0 1<br />

Pour expliquer ce phénomène, les chercheurs du LMTG et de l’IPGP ont déterminé une loi<br />

simple qui permet d'estimer la quantité de CO 2 consommée lors de l'altération des basaltes. Cette<br />

loi a été établie à partir de données obtenues sur les rivières drainant les trapps du Deccan et<br />

d'autres régions basaltiques. Deux paramètres sont fondamentaux : la quantité d'eau qui circule<br />

dans les sols et la température atmosphérique. Ces deux facteurs jouent dans le même sens car<br />

ils favorisent tous les deux la mise en solution des sols et des roches : plus ces paramètres sont<br />

élevés, plus l'altération est importante.<br />

Les chercheurs ont également rassemblé des données<br />

bibliographiques. Ainsi la quantité de CO 2 d é g a z é e<br />

dans l'atmosphère durant la mise en place des trapps<br />

est estimée à 1,6 x 10 18 moles, soit environ la moitié de<br />

ce qui est contenu sous forme dissoute dans l'océan<br />

à l’heure actuelle. Quant à la durée de cet événement,<br />

elle est évaluée à moins d’un million d’années par de<br />

nombreux auteurs. <strong>À</strong> partir de toutes ces estimations,<br />

les chercheurs du LTMG ont modélisé les évolutions<br />

climatiques qui se sont produites à l’époque de la mise<br />

en place des trapps du Deccan.<br />

La modélisation montre que l'augmentation de CO 2<br />

dans l'atmosphère a été très importante (1050 ppmv, soit<br />

3 fois la teneur actuelle 3 ) et s’est accompagnée d’un<br />

rapide réchauffement de la Terre (+ 4 °C). Grâce à l’efficacité<br />

du phénomène d'altération continentale, il a fallu seulement 1,5 millions d'années pour<br />

résorber l'excès de CO 2 émis dans l'atmosphère, avec pour conséquence une baisse de température<br />

de 4,55 °C, soit un refroidissement global de 0,55 °C.<br />

Cette modélisation a permis de détecter des variations des cycles géochimiques du carbone<br />

et du strontium au sein de l'océan. Le modèle prédit un arrêt, lié à une forte acidification de l’eau<br />

de mer par le CO 2 , de la sédimentation des carbonates marins pendant une période de 20 000 ans<br />

après la mise en place des trapps. Cet arrêt prévu par le modèle est également observé dans les<br />

carbonates marins à la limite Crétacé/Tertiaire. Le modèle prévoit également un pic du rapport<br />

isotopique de strontium ( 87 Sr/ 86 Sr) d'une durée de 4 millions d'années dans l’eau de mer à la<br />

suite de la mise en place des trapps (voir figure ci-dessus). Pendant les périodes où l’altération<br />

continentale est forte, le flux des rivières, avec un rapport isotopique haut, est prédominant<br />

comparé au flux hydrothermal dont le rapport isotopique est faible. D’où un pic du rapport<br />

isotopique de l’eau de mer, résultant d’un mélange des deux flux.<br />

Le modèle indique que de grands épanchements volcaniques conduisent à des changements<br />

globaux du climat et de la chimie des océans. Bien que cette étude ne permette pas d’expliquer<br />

la disparition des dinosaures, elle permet d’affirmer que, quelle que soit la cause de cette extinction,<br />

la mise en place des trapps du Deccan a largement amplifié le phénomène.<br />

Référence :<br />

• C. Dessert, B. Dupré, L. M. François, J. Schott, J. Gaillardet, G. Chakrapani and S. Bajpai.<br />

(2001) Erosion of Deccan Traps determined by river [Image] geochemistry. Impact on global climate<br />

and 87 Sr/ 86 Sr ratio of seawater. Earth Planet. Sci. Lett. 188, pp. 459-474.<br />

3 ppmv : unité scientifique<br />

internationale qui caractérise<br />

la concentration volumique<br />

d’un gaz.<br />

1 ppmv = 10 -3 cm 3 /dm 3 (teneur<br />

du gaz considéré dispersé dans<br />

un volume d’un litre de gaz).<br />

Contacts chercheurs :<br />

Laboratoire de mécanismes<br />

de transfert en géologie<br />

(LMTG),<br />

<strong>CNRS</strong>-Université Toulouse 3,<br />

• Céline <strong>DES</strong>SERT,<br />

tél. : 05 61 55 84 05<br />

mél : dessert@lmtg.ups-tlse.fr<br />

• Bernard <strong>DU</strong>PRÉ,<br />

tél. : 05 61 55 87 84<br />

mél : dupre@lmtg.ups-tlse.fr<br />

Contact Observatoire<br />

Midi-Pyrénées :<br />

Dominique D’Arabian,<br />

tél. : 05 61 33 28 67<br />

Contact département Sciences<br />

de l’Univers du <strong>CNRS</strong>/INSU :<br />

• Océan/Atmosphère :<br />

Hélène DOCO,<br />

tél. : 01 44 96 42 74<br />

mél : doco@cnrs-bellevue.fr<br />

• Sciences de la Terre :<br />

Christiane GRAPPIN,<br />

tél. : 01 44 96 43 37<br />

mél : christiane.grappin@<br />

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