Les fonctions assurées par des inspecteurs et contrôleurs du travail ...

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26.01.2014 Views

Pourtant, il semble en pratique que des usages sociaux perdurent dans de nombreux pays alors même qu’administration et juridiction du travail auraient tendance à les nier, ne serait-ce que parce que le droit du travail lui-même ne prend pas en compte certaines réalités culturelles africaines 33 . De fait, si des interférences entre droit coutumier et droit du travail apparaissent, elles se résolvent, sans bruit, dans une abstention ou suspension de l’application du droit du travail. On peut rappeler avec certains que «les relations de travail coutumières seraient fondées sur la confiance réciproque, la solidarité et un certain code d’honneur». Ceci a, en pratique, un effet sur la gestion des absences (ex. évènements familiaux et sociaux), l’organisation des horaires et du temps de travail (prise en compte des activités extra-salariales, …), l’étendue des responsabilités sociales de l’employeur, … 34 . Des organisations professionnelles et syndicales présentes au plan national S’il arrive que l’on signale l’intervention des organisations professionnelles et syndicales dans le secteur informel (ex. Bénin) 35 , il est certain que ces dernières tiennent une place importante dans la plupart des pays d’Afrique francophone subsaharienne étudiés, notamment dans la régulation économique et sociale (ex. Burundi, République centrafricaine) et la gestion des relations professionnelles (ex. Tchad) 36 . Dans certains pays, leur implication dans les diverses politiques des ministères en charge du travail en tant que «partenaires sociaux» est soulignée (ex. Mali, Rwanda, Sénégal) 37 . Si dans certains cas, ceci les conduit ponctuellement à participer à l’élaboration de programmes et à divers mécanismes de concertation (ex. Rwanda), dans d’autres cas, elles interviennent en tant que partenaires à toutes les étapes de préparation, de discussion et de mise en œuvre des politiques d’emploi, de travail, de formation professionnelle et de protection sociale (ex. Mali). Ailleurs, elles apparaissent comme de véritables partenaires sociaux de l’Etat, allant jusqu’à une coopération stratégique et une animation du dialogue social (ex. Sénégal). Des organisations professionnelles et syndicales sont présentes, de façon générale, au plan national, dans tous les pays étudiés. Il n’en va pas toujours de même à un niveau inférieur; même lorsque c’est le cas (ex. Bénin, Mali, République centrafricaine, Rwanda, Tchad) 38 , les employeurs comme les travailleurs y sont manifestement moins organisés. Par ailleurs, des organisations professionnelles et syndicales de secteur ou de branche n’existent véritablement que dans quelques pays (ex. Côte d’Ivoire, Sénégal) 39 . Enfin, hormis certains pays signalant une présence syndicale systématique au niveau de l’entreprise (ex. Rwanda), celle-ci apparaît le plus souvent restreinte à quelques grandes entreprises ou à des secteurs particuliers, tel celui du pétrole (ex. Gabon) 40 . Une place variable pour la négociation collective La plupart des pays d’Afrique francophone subsaharienne étudiés affirment un réel développement de la négociation collective. Quelques pays s’inscrivent toutefois en sens 33 Sidibé O. remarque qu’on «ne trouve pas encore de constructions juridiques cohérentes qui reflèteraient les réalités africaines. Il s’agit certainement là d’un des grands défis du droit du travail africain», idem: Quels modèles d’inspiration pour le droit du travail malien depuis le code de 1952? (Bulletin de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, Pessac, 2005), sp. p. 163. 34 Cf. not. Auvergnon Ph.: Réalités, espace et avenir du droit du travail en Afrique noire francophone (Bulletin de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, Pessac, 1999), p. 118. Sidibé O.: Réalités africaines et enjeux pour le droit du travail, Ibid. (Pessac, 1999), p. 130. 35 Source: réponse au questionnaire d’enquête concernant le Bénin. 36 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant le Burundi, la République centrafricaine et le Tchad. 37 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant le Mali, le Rwanda et le Sénégal. 38 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant le Bénin, le Mali, la République centrafricaine, le Rwanda et le Tchad. 39 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant la Côte d’Ivoire et le Sénégal. 40 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant le Gabon et le Rwanda. 6

inverse; une régression de la négociation est ainsi parfois signalée (ex. Burundi) 41 alors qu’elle n’aurait ailleurs, malgré sa consécration légale et la mise en place d’institutions ad hoc, aucune réalité (ex. Rwanda) 42 . En règle générale, la négociation collective se déroule de façon bipartite ou tripartite. Le droit du travail national est rarement silencieux sur ce point; lorsque c’est le cas cependant, en pratique, le bipartisme s’impose au moins au niveau des négociations d’entreprise (ex. Gabon). C’est souvent en fonction précisément des niveaux et thèmes de négociation que le droit national retient le bipartisme ou le tripartisme (ex. Côte d’Ivoire). Cette dernière option est celle des Codes du travail précisant expressément la structure tripartite des instances de négociation (ex. Bénin, République centrafricaine). Dans d’autres cas, la présence de l’Etat aux négociations se traduit simplement par la prévision normative d’une participation du ministre en charge du Travail ou de son représentant (ex. Burundi, Rwanda) 43 . On semble ainsi glisser vers une troisième option caractérisée par une sorte de bipartisme accompagné par l’Etat. Certaines législations prévoient ainsi que le ministre en charge du Travail ou son représentant préside la commission de négociation (ex. Tchad) 44 . Dans d’autres pays, le ministre est uniquement à l’initiative de la réunion de la commission en vue de la conclusion de la convention collective ou de la validation de celle-ci après sa négociation par les partenaires sociaux (ex. Sénégal) 45 . D’autres législations nationales précisent également que le texte négocié est soumis obligatoirement au visa du ministre qui peut exiger le retrait des dispositions contraires à la réglementation du travail en vigueur (ex. Mali) 46 . Les niveaux de la négociation collective sont très variables d’un Etat à un autre; il convient de parvenir à faire la part des choses entre les dispositifs juridiques en vigueur et leur mise en œuvre en pratique. Au regard des dispositions nationales des pays étudiés et des informations recueillies sur les pratiques professionnelles, des négociations collectives se déroulent, dans certains pays, à tous niveaux (ex. Mali 47 , Rwanda 48 , Sénégal 49 ). Dans d’autres pays, la négociation collective est théoriquement envisagée ou effective au plan national (ex. Côte d’Ivoire 50 , Gabon 51 , République centrafricaine 52 , Tchad 53 ), au plan régional (ex. Côte d’Ivoire 54 , Gabon 55 ), au niveau local (ex. Côte d’Ivoire 56 , Gabon 57 ), voire dans les branches d’activité (ex. Bénin 58 , Burundi 59 , Côte d’Ivoire 60 , République centrafricaine 61 , Tchad 62 ), au niveau de l’entreprise ou d’un groupe d’entreprises (ex. Bénin 63 , Burundi 64 , Tchad 65 , Gabon 66 , République 41 Malgré la ratification par le Burundi en 1997 de la convention (n o 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949. 42 Malgré la ratification par le Rwanda en 1988 de la convention n o 98. 43 Article 227 du Code du travail du Burundi et article 112 du Code du travail du Rwanda. 44 Article 344 du Code du travail du Tchad. 45 Article L. 85 du Code du travail du Sénégal. 46 Article L.73 du Code du travail du Mali. 47 Article L.70 et suivants du Code du travail du Mali. 48 Dont le Code du travail ne délimite pas expressément de cadre de concertation et laisse ainsi supposer que tous les niveaux sont concernés. 49 Article L.80 du Code du travail du Sénégal. 50 Article 71-3 du Code du travail de la Côte d’Ivoire. 51 Article 119 du Code du travail du Gabon. 52 Source: réponse au questionnaire d’enquête concernant la République centrafricaine. 53 Source: réponse au questionnaire d’enquête concernant le Tchad. 54 Article 71-3 du Code du travail de la Côte d’Ivoire. 55 Article 119 du Code du travail du Gabon. 56 Article 71-3 du Code du travail de la Côte d’Ivoire. 57 Article 119 du Code du travail du Gabon. 58 Article 122 du Code du travail du Bénin. 59 Article 224 du Code du travail du Burundi. 60 Article 71-3 du Code du travail de la Côte d’Ivoire. 61 Source: réponse au questionnaire d’enquête concernant la République centrafricaine. 62 Article 340 du Code du travail du Tchad. 63 Article 122 du Code du travail du Bénin. 64Article 224 du Code du travail du Burundi. 65 Article 340 du Code du travail du Tchad. 66 Source: réponse au questionnaire d’enquête concernant le Gabon. 7

Pourtant, il semble en pratique que <strong>des</strong> usages sociaux per<strong>du</strong>rent dans de nombreux<br />

pays alors même qu’administration <strong>et</strong> juridiction <strong>du</strong> <strong>travail</strong> auraient tendance à les nier,<br />

ne serait-ce que <strong>par</strong>ce que le droit <strong>du</strong> <strong>travail</strong> lui-même ne prend pas en compte certaines<br />

réalités culturelles africaines 33 . De fait, si <strong>des</strong> interférences entre droit coutumier <strong>et</strong> droit<br />

<strong>du</strong> <strong>travail</strong> ap<strong>par</strong>aissent, elles se résolvent, sans bruit, dans une abstention ou suspension<br />

de l’application <strong>du</strong> droit <strong>du</strong> <strong>travail</strong>. On peut rappeler avec certains que «les relations<br />

de <strong>travail</strong> coutumières seraient fondées sur la confiance réciproque, la solidarité <strong>et</strong> un<br />

certain code d’honneur». Ceci a, en pratique, un eff<strong>et</strong> sur la gestion <strong>des</strong> absences<br />

(ex. évènements familiaux <strong>et</strong> sociaux), l’organisation <strong>des</strong> horaires <strong>et</strong> <strong>du</strong> temps de <strong>travail</strong><br />

(prise en compte <strong>des</strong> activités extra-salariales, …), l’éten<strong>du</strong>e <strong>des</strong> responsabilités sociales de<br />

l’employeur, … 34 .<br />

Des organisations professionnelles <strong>et</strong> syndicales<br />

présentes au plan national<br />

S’il arrive que l’on signale l’intervention <strong>des</strong> organisations professionnelles <strong>et</strong><br />

syndicales dans le secteur informel (ex. Bénin) 35 , il est certain que ces dernières tiennent<br />

une place importante dans la plu<strong>par</strong>t <strong>des</strong> pays d’Afrique francophone subsaharienne<br />

étudiés, notamment dans la régulation économique <strong>et</strong> sociale (ex. Burundi, République<br />

centrafricaine) <strong>et</strong> la gestion <strong>des</strong> relations professionnelles (ex. Tchad) 36 . Dans certains<br />

pays, leur implication dans les diverses politiques <strong>des</strong> ministères en charge <strong>du</strong> <strong>travail</strong> en<br />

tant que «<strong>par</strong>tenaires sociaux» est soulignée (ex. Mali, Rwanda, Sénégal) 37 . Si dans<br />

certains cas, ceci les con<strong>du</strong>it ponctuellement à <strong>par</strong>ticiper à l’élaboration de programmes <strong>et</strong><br />

à divers mécanismes de concertation (ex. Rwanda), dans d’autres cas, elles interviennent<br />

en tant que <strong>par</strong>tenaires à toutes les étapes de pré<strong>par</strong>ation, de discussion <strong>et</strong> de mise en œuvre<br />

<strong>des</strong> politiques d’emploi, de <strong>travail</strong>, de formation professionnelle <strong>et</strong> de protection sociale<br />

(ex. Mali). Ailleurs, elles ap<strong>par</strong>aissent comme de véritables <strong>par</strong>tenaires sociaux de l’Etat,<br />

allant jusqu’à une coopération stratégique <strong>et</strong> une animation <strong>du</strong> dialogue social<br />

(ex. Sénégal).<br />

Des organisations professionnelles <strong>et</strong> syndicales sont présentes, de façon générale, au<br />

plan national, dans tous les pays étudiés. Il n’en va pas toujours de même à un niveau<br />

inférieur; même lorsque c’est le cas (ex. Bénin, Mali, République centrafricaine,<br />

Rwanda, Tchad) 38 , les employeurs comme les <strong>travail</strong>leurs y sont manifestement moins<br />

organisés. Par ailleurs, <strong>des</strong> organisations professionnelles <strong>et</strong> syndicales de secteur ou de<br />

branche n’existent véritablement que dans quelques pays (ex. Côte d’Ivoire, Sénégal) 39 .<br />

Enfin, hormis certains pays signalant une présence syndicale systématique au niveau de<br />

l’entreprise (ex. Rwanda), celle-ci ap<strong>par</strong>aît le plus souvent restreinte à quelques gran<strong>des</strong><br />

entreprises ou à <strong>des</strong> secteurs <strong>par</strong>ticuliers, tel celui <strong>du</strong> pétrole (ex. Gabon) 40 .<br />

Une place variable pour la négociation collective<br />

La plu<strong>par</strong>t <strong>des</strong> pays d’Afrique francophone subsaharienne étudiés affirment un réel<br />

développement de la négociation collective. Quelques pays s’inscrivent toutefois en sens<br />

33 Sidibé O. remarque qu’on «ne trouve pas encore de constructions juridiques cohérentes qui reflèteraient les réalités<br />

africaines. Il s’agit certainement là d’un <strong>des</strong> grands défis <strong>du</strong> droit <strong>du</strong> <strong>travail</strong> africain», idem: Quels modèles d’inspiration<br />

pour le droit <strong>du</strong> <strong>travail</strong> malien depuis le code de 1952? (Bull<strong>et</strong>in de droit com<strong>par</strong>é <strong>du</strong> <strong>travail</strong> <strong>et</strong> de la sécurité sociale,<br />

Pessac, 2005), sp. p. 163.<br />

34 Cf. not. Auvergnon Ph.: Réalités, espace <strong>et</strong> avenir <strong>du</strong> droit <strong>du</strong> <strong>travail</strong> en Afrique noire francophone (Bull<strong>et</strong>in de droit<br />

com<strong>par</strong>é <strong>du</strong> <strong>travail</strong> <strong>et</strong> de la sécurité sociale, Pessac, 1999), p. 118. Sidibé O.: Réalités africaines <strong>et</strong> enjeux pour le droit <strong>du</strong><br />

<strong>travail</strong>, Ibid. (Pessac, 1999), p. 130.<br />

35 Source: réponse au questionnaire d’enquête concernant le Bénin.<br />

36 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant le Burundi, la République centrafricaine <strong>et</strong> le Tchad.<br />

37 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant le Mali, le Rwanda <strong>et</strong> le Sénégal.<br />

38 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant le Bénin, le Mali, la République centrafricaine, le Rwanda <strong>et</strong><br />

le Tchad.<br />

39 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant la Côte d’Ivoire <strong>et</strong> le Sénégal.<br />

40 Sources: réponses aux questionnaires d’enquête concernant le Gabon <strong>et</strong> le Rwanda.<br />

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