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Sports et pratiques corporelles chez les déportes, prisonniers de ...

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du jeune ado<strong>les</strong>cent qui pénètre dans l’univers concentrationnaire, qui voit, au milieu d’une<br />

gran<strong>de</strong> prairie, un terrain <strong>de</strong> football :<br />

Ce que j’ai vu pendant c<strong>et</strong>te brève marche m’a beaucoup plu. En particulier, je fus ravi <strong>de</strong><br />

voir un terrain <strong>de</strong> football dans la gran<strong>de</strong> clairière, tout <strong>de</strong> suite à droite <strong>de</strong> la route. La<br />

pelouse verte, <strong>les</strong> cages blanches nécessaires au jeu, le tracé blanc <strong>de</strong>s lignes, tout était là,<br />

attirant, frais, bien entr<strong>et</strong>enu <strong>et</strong> en excellent état. Avec <strong>les</strong> gars on s’est dit tout <strong>de</strong> suite<br />

qu’après le travail on y jouerait au football 2146 .<br />

tel-00872295, version 1 - 14 Oct 2013<br />

Si le souhait du jeune Imre Kertész est, durant ces premières heures passées au camp, <strong>de</strong><br />

rejoindre la pelouse du sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> football, force est <strong>de</strong> constater que ce <strong>de</strong>rnier n’est accessible<br />

qu’à une infime minorité <strong>de</strong> détenus privilégiés. Lui-même d’ailleurs écrit par rapport au lieu<br />

dans lequel il est envoyé : « Je ne voyais pas la moindre trace <strong>de</strong> terrain <strong>de</strong> football, <strong>de</strong><br />

potager, <strong>de</strong> pelouse ou <strong>de</strong> fleurs 2147 ». Qui sont <strong>les</strong> détenus alors qui pratiquent le football?<br />

Arrivé à Auschwitz en mai 1944, mé<strong>de</strong>cin juif affecté en tant que mé<strong>de</strong>cin du<br />

Son<strong>de</strong>rkommando 2148 , Miklos Nyisli 2149 apporte quelques éléments :<br />

Je me repose tantôt allongé sur ma couch<strong>et</strong>te, tantôt assis sur <strong>les</strong> gradins du camp F. Car il<br />

existe même un sta<strong>de</strong> dans le camp <strong>de</strong> concentration d’Auschwitz mais réservé<br />

exclusivement aux <strong>prisonniers</strong> allemands du Reich qui sont tous présupposés à <strong>de</strong>s<br />

services divers. Le dimanche, il y règne une activité sportive animée. Les autres jours, le<br />

vaste terrain est calme. Seule une clôture <strong>de</strong> barbelés sépare le reste du sta<strong>de</strong> du<br />

crématorium 1 2150 .<br />

De c<strong>et</strong>te phrase émerge une première catégorie <strong>de</strong> détenus : <strong>les</strong> porteurs <strong>de</strong> brassard, Kapos ou<br />

autres Blockältester allemands. Tandis qu’il témoigne au procès <strong>de</strong> Frankfurt, Jersy Kanal<br />

confirme leur présence dans <strong>les</strong> équipes. Il évoque la participation <strong>de</strong> « vieux détenus », ce<br />

qui dans le langage <strong>de</strong>s camps signifie <strong>de</strong> « vieux numéros » soit <strong>de</strong>s déportés arrivés <strong>de</strong>puis<br />

longtemps <strong>et</strong> qui possè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s places privilégiées. Face à eux, il se souvient, par contre, que<br />

le SS Bar<strong>et</strong>zki avait monté une équipe <strong>de</strong> « jeunes » Hongrois, tout nouvellement arrivés :<br />

2146 Imre Kertész, Etre sans <strong>de</strong>stin, Paris, Acte Sud, 2009, p. 123.<br />

2147 Ibid., p. 139.<br />

2148 « Le Son<strong>de</strong>rkommando était chargé d’ai<strong>de</strong>r <strong>les</strong> SS à faire entrer <strong>les</strong> gens dans <strong>les</strong> locaux <strong>de</strong> déshabillage <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong> gazage. Il <strong>de</strong>vait emporter <strong>les</strong> affaires abandonnées, r<strong>et</strong>irer <strong>les</strong> cadavres, <strong>les</strong> brûler, transporter <strong>les</strong> cendres<br />

pour <strong>les</strong> enfouir ou <strong>les</strong> disperser ». Maurice Pfeffer, « Megilot Auschwitz. Avant propos du traducteur », in<br />

Collectif, Des voix sous la cendre. Manuscrits <strong>de</strong>s Son<strong>de</strong>rkommandos d’Auschwitz-Birkenau, Paris, Calmann-<br />

Levy, 2005, p. 23<br />

2149 Miklos Nyisli écrit à propos du poste qu’il occupe au camp : « Outre mon travail <strong>de</strong> laboratoire <strong>et</strong><br />

d’anatomie, je dois assurer <strong>les</strong> soins médicaux du personnel SS du crématorium, qui est composé d’environ cent<br />

vingt hommes, ainsi que celui du Son<strong>de</strong>rkommando, qui compte à peu près huit cent soixante <strong>prisonniers</strong> ».<br />

Miklos Nyisli, Mé<strong>de</strong>cin à Auschwitz, Genève, Editions Famot, 1976, p. 40-41.<br />

2150 Ibid., p. 36.<br />

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