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Sports et pratiques corporelles chez les déportes, prisonniers de ...

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En nous secouant <strong>et</strong> giflant, on nous avait groupées cinq par cinq, puis poussées sur la<br />

route à coups <strong>de</strong> bâton : il fallait marcher vite, courir même 1546 .<br />

Si <strong>les</strong> témoignages <strong>de</strong>s hommes restent, somme toute, assez avares <strong>de</strong> renseignements quant à<br />

leur état d’esprit en pénétrant dans le camp, il n’en est pas <strong>de</strong> même dans <strong>les</strong> ouvrages <strong>de</strong><br />

femmes. Cel<strong>les</strong>-ci ren<strong>de</strong>nt compte, avec <strong>de</strong>s termes souvent i<strong>de</strong>ntiques, <strong>de</strong>s émotions<br />

ressenties en passant le portail <strong>de</strong> Ravensbrück. Denise Dufournier fait allusion à un<br />

« choc 1547 » suivi d’une « panique, une sorte <strong>de</strong> terreur 1548 ». Béatrix <strong>de</strong> Toulouse-Lautrec est<br />

encore plus précise :<br />

tel-00872295, version 1 - 14 Oct 2013<br />

Ceux ou cel<strong>les</strong> qui n’ont pas passé sous le porche sombre d’un camp <strong>de</strong> concentration, au<br />

pas, <strong>les</strong> bras le long du corps, la tête tournée à droite, ne pourront jamais comprendre ce<br />

qu’un cœur libre <strong>et</strong> fier peut éprouver. Je ne sais encore ce qui fut le plus fort, <strong>de</strong> la peur<br />

ou <strong>de</strong> la haine ! Si, je veux être loyale, je dois vous faire un aveu : la peur me coupait <strong>les</strong><br />

jambes 1549 .<br />

L’arrivée <strong>de</strong>s convois en provenance <strong>de</strong> Drancy à Auschwitz mérite une attention toute<br />

particulière. Les premières heures passées dans le camp sont en eff<strong>et</strong> aussi, pour l’immense<br />

majorité <strong>de</strong>s Juifs, <strong>les</strong> <strong>de</strong>rnières <strong>de</strong> leur vie. Dans ce cadre barbare, le corps occupe une place<br />

centrale. Dès l’ouverture <strong>de</strong>s wagons, comme dans <strong>les</strong> autres camps, <strong>les</strong> SS accompagnés <strong>de</strong>s<br />

Kapos emploient la force <strong>et</strong> la violence pour faire sortir <strong>les</strong> hommes, <strong>les</strong> femmes <strong>et</strong> <strong>les</strong> enfants<br />

<strong>de</strong>s trains. Suivant la date d’arrivée du convoi, <strong>de</strong>ux cas <strong>de</strong> figure sont possib<strong>les</strong> : soit <strong>les</strong><br />

déportés débarquent sur un quai situé à quelques 800 mètres du camp, soit ils arrivent<br />

directement sur la rampe d’Auchwitz-Birkenau à l’intérieur même du camp entre <strong>les</strong> secteurs<br />

BI <strong>et</strong> BII 1550 . Dans tous <strong>les</strong> cas, <strong>les</strong> déportés sont rassemblés le plus rapi<strong>de</strong>ment possible sur le<br />

quai, <strong>les</strong> femmes <strong>et</strong> <strong>les</strong> hommes séparés en <strong>de</strong>ux fi<strong>les</strong>. Hermann Langbein souligne combien<br />

le terme allemand Schnell illustre c<strong>et</strong>te entrée dans l’enfer concentrationnaire 1551 . Une fois<br />

c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> panique révolue, débute une secon<strong>de</strong> phase, d’immobilité c<strong>et</strong>te fois. Tous<br />

atten<strong>de</strong>nt, <strong>de</strong>bout, dépossédés <strong>de</strong> leurs bagages, <strong>de</strong> défiler <strong>de</strong>vant <strong>de</strong>ux SS qui <strong>les</strong> répartissent<br />

en <strong>de</strong>ux nouvel<strong>les</strong> fi<strong>les</strong> différentes, <strong>et</strong> ce, en un regard <strong>et</strong> quelques questions. Le témoignage<br />

1545 Micheline Maurel quitte Paris le 29 août 1943 pour Ravensbrück. (Livre-Mémorial, fiche n° I. 126).<br />

1546 Micheline Maurel, Un camp très ordinaire, Paris, Les éditions <strong>de</strong> Minuit, 1957, p. 17.<br />

1547 Denise Dufournier, La maison <strong>de</strong>s mortes, op.cit., p. 24.<br />

1548 Ibid., p. 26.<br />

1549 Béatrix Toulouse-Lautrec, J’ai eu vingt ans à Ravensbrück, op.cit., p. 129.<br />

1550 La voie ferrée <strong>et</strong> la rampe <strong>de</strong> déchargement sont achevées au mois <strong>de</strong> mai 1944. (Voir à ce propos : Mémoire<br />

Vivante, n° 41, op. cit., p. 5 ; Irena Strzelecka, Piotr S<strong>et</strong>kiecwicz, « La construction, l’extension <strong>et</strong> l’évolution du<br />

camp <strong>et</strong> <strong>de</strong> ses filia<strong>les</strong> », in Aleksan<strong>de</strong>r Lasik, Franciszek Piper, Piotr S<strong>et</strong>kiewicz, Irena Strzelecka, Auschwitz<br />

1940-1945. Volume 1. La construction <strong>et</strong> l’organisation du camp, Ośwęcim, Musée d’Etat d’Auschwitz-<br />

Birkenau, 2011, p. 108-109.<br />

1551 Hermann Langbein, Hommes <strong>et</strong> femmes à Auschwitz, Paris, Fayard, 1975, p. 66.<br />

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