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Sports et pratiques corporelles chez les déportes, prisonniers de ...

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Raymond est à l’extrême limite <strong>de</strong> ses forces. J’entends son souffle saccadé comme celui<br />

d’un jeune chien après une longue course. Il n’en peut plus. […]. Plus que cinq cents<br />

mètres, plus que cent, plus que dix. Enfin 1540 .<br />

Arrivé à Weimar en septembre 1943 1541 , Aimé Bonifas connaît lui-aussi c<strong>et</strong>te succession <strong>de</strong><br />

rythmes déroutants. Dans la cohue, la précipitation <strong>et</strong> sous <strong>les</strong> coups, <strong>les</strong> détenus doivent<br />

sauter du wagon, former <strong>de</strong>s rangs. S’en suit, sans explication <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s geôliers, une<br />

longue pério<strong>de</strong> d’attente, « jusqu’à la fin <strong>de</strong> l’après-midi », <strong>de</strong>bout, à jeun, en rang <strong>et</strong> en<br />

colonne. Puis, brusquement, <strong>les</strong> hommes sont invités à prendre la route, d’abord en marchant,<br />

puis en courant, pieds nus, leurs chaussures leur ayant été enlevées pour prévenir <strong>les</strong> risques<br />

d’évasion.<br />

tel-00872295, version 1 - 14 Oct 2013<br />

Ils nous pressent, distribuant à tour <strong>de</strong> bras <strong>de</strong>s coups <strong>de</strong> crosses. Nous sommes contraints<br />

<strong>de</strong> courir, marchant sur <strong>les</strong> talons <strong>de</strong> ceux qui nous précè<strong>de</strong>nt, soutenant ceux qui<br />

défaillent. […]. Nous faisons ainsi neuf kilomètres en moins d’une heure, toujours pieds<br />

nus sur <strong>les</strong> pierres qui nous mâchent terriblement 1542 .<br />

Bien que <strong>les</strong> Françaises soient dans la plupart <strong>de</strong>s cas transférées à Ravensbrück, <strong>les</strong><br />

premières heures qu’el<strong>les</strong> passent sur le sol allemand varient parfois d’un convoi à l’autre.<br />

Cependant, <strong>les</strong> SS leur infligent <strong>de</strong>s tourments ressemblant fortement à ceux <strong>de</strong>s hommes.<br />

Toutes découvrent la violence, <strong>les</strong> cris, <strong>et</strong> toutes sont envahies d’une véritable terreur une fois<br />

le portail du camp franchi. Si el<strong>les</strong> ne subissent pas <strong>de</strong> courses effrénées en direction du camp,<br />

el<strong>les</strong> doivent tout <strong>de</strong> même parcourir en marche rapi<strong>de</strong>, sous la menace <strong>de</strong>s coups, <strong>les</strong> trois<br />

kilomètres qui séparent la gare <strong>de</strong>s barbelés. D’aucunes sont mêmes contraintes à courir en<br />

portant tant bien que mal leurs valises. Ce traj<strong>et</strong> est parfois précédé d’une longue attente sur<br />

<strong>les</strong> quais. Béatrix Toulouse-Lautrec quitte la France en août 1944. De son arrivée à<br />

Ravensbrück, elle évoque une très longue attente, <strong>de</strong>bout, en rang sur le quai en plein<br />

soleil 1543 . Après plusieurs heures, le groupe est enfin autorisé à se diriger vers le camp.<br />

L’ancienne déportée se souvient :<br />

Nous sommes très fatiguées <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te marche supplémentaire, trois kilomètres, est<br />

éprouvante pour nos membres engourdis par l’inaction <strong>et</strong> la prison 1544 .<br />

Micheline Maurel 1545 arrive sur le quai un an plus tôt, au début du mois <strong>de</strong> septembre 1943.<br />

L’accueil est <strong>de</strong>s plus brutaux <strong>et</strong> très rapi<strong>de</strong>ment, <strong>les</strong> femmes sont conduites dans l’enceinte<br />

du camp.<br />

1540 Ibid., p. 103.<br />

1541 Aimé Bonifas quitte Compiègne par le transport du 2 septembre 1943 (Livre-Mémorial, fiche n° I. 131).<br />

1542 Aimé Bonifas, Détenu 20801, op.cit., p. 43-44.<br />

1543 Béatrix Toulouse-Lautrec, J’ai eu vingt ans à Ravensbrück, op.cit., p. 126.<br />

1544 Ibid., p. 126.<br />

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