Peter Knoepfel Mirta Olgiati Politique de la mémoire ... - IDHEAP

MUSEE NATIONAL SUISSE 27
Depuis une dizaine d’années, l’institution a d’ailleurs renforcé ses efforts de collection
pour la période contemporaine qui, comme la collection archéologique, obéit à une logique de
collection propre. A côté des activités de collection axées sur des objets (fonction et
matériaux), les champs de collection thématiques pour la même période ont été intensifiés :
des thèmes comme la culture de masse, les mouvements sociaux, les événements historiques
sont mis en scène dans les expositions. Sont collectionnés des objets qui ont bénéficié d’une
grande diffusion, comme par exemple des produits confectionnés industriellement, car ils sont
souvent représentatifs pour des groupes entiers de population. Mais pour faire face à la
pression exercée par le potentiel amoncellement des objets, un ultérieur critère de sélection
ciblée est appliqué : la stratégie dite des produits émergents. Il s’agit d’objets représentatifs
des modifications sociales ou formelles intervenues dans les techniques de production. Ils
témoignent du quotidien au sein de systèmes politiques et sociaux différents, ils montrent le
changement des styles, des formes et des situations, ils illustrent le changement intervenu
dans la compréhension qu’une époque a d’elle-même ou présentent l’antagonisme existant
entre les images à travers lesquelles cette époque se représente. Ils marquent enfin le passage
de la société productiviste à une société de services, de consommation et d’informations
(réalité médiatique qui se situe au dessus de l’histoire personnelle ou du vécu subjectif). Pour
assurer une coordination optimale avec les autres musées, l’Association des musées suisses a
créé un groupe de travail, sous l’égide du MNS, qui a pour but de faciliter l’échange
d’informations et de coordonner les différentes activités dans ce domaine.
Le Musée national poursuit une politique de collecte mixte, c’est-à-dire à la fois active
(achats visant à combler de manière prévisible les différentes collections) et passive
(acceptation de dons, legs, etc. qui s’insèrent dans les collections existantes) selon le type de
collection dont il s’agit. La collection d’automates à musique, par exemple, poursuit une
politique d’achat active car il s’agit d’un domaine très restreint et spécialisé ; par contre, les
collections photographiques profitent souvent de dons ou de legs importants. Actuellement les
collections sont composées à 50% d’objets achetés et à 50% d’objets légués ou offerts. Les
dons ou les legs, s’ils sont acceptés, ils le sont après évaluation et éventuellement tri
préalables, suivant une procédure formelle bien établie. Les achats, quant à eux, s’effectuent
souvent dans des ventes aux enchères. La tendance actuelle est de favoriser une politique
d’achat de plus en plus active, afin de mieux sélectionner les objets qui sont appelés à faire
partie du patrimoine national helvétique.
La procédure qui amène à la décision d’accepter ou non un objet ou un groupe d’objets
dans une collection déterminée suit une démarche claire : chaque conservateur·trice
responsable d’une collection présente les objets amenés à faire potentiellement partie de sa
collection à la réunion trimestrielle prévue pour ça : il·elle argumente en faveur de son choix.
La décision est prise à l’unanimité par l’ensemble des conservateurs·trices présents, sauf pour
les achats qui dépassent les 20'000 francs : dans ce cas c’est la direction du musée qui prend la
décision définitive. La responsabilité de chaque conservateur·trice par rapport à la collection
dont il·elle est en charge est grande : il existe des listes qui déterminent quels sont les critères
de choix à appliquer, mais c’est à lui·elle de se familiariser avec sa collection et de la
compléter ou de la faire croître suivant une certaine logique ou cohérence. Sa marge
d’appréciation est donc relativement importante et dépend effectivement de ses compétences
en la matière (connaissances effectives de l’époque et de la catégorie d’objet en question,
ainsi que de l’ensemble de la collection). Les connaissances substantielles des
collaborateurs·trices du musée apparaissent donc comme étant essentielles. Le montant de
l’achat joue bien évidemment un rôle important dans la décision.