Négocier la justice ? Droits humains et accords de paix - The ICHRP
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<strong>et</strong>rouver dans une situation encore plus dangereuse que durant le conflit. Ils<br />
risquent, en eff<strong>et</strong>, d’être pris pour cible par <strong>de</strong>s acteurs militaires qui peuvent<br />
les accuser d’être <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> l’opposition afin d’éviter d’avoir l’air <strong>de</strong><br />
s’attaquer à « l’autre partie ».<br />
Les droits <strong>humains</strong> sont compris <strong>de</strong> façon restrictive comme ne<br />
s’appliquant qu’aux questions <strong>et</strong> aux groupes impliqués dans le conflit.<br />
Des questions importantes ayant <strong>la</strong> capacité <strong>de</strong> rendre <strong>la</strong> <strong>paix</strong> effective,<br />
comme l’égalité <strong>de</strong> genre ou les droits <strong>de</strong>s minorités autres que les minorités «<br />
principales » (notamment les peuples autochtones) risquent d’être <strong>la</strong>issées <strong>de</strong><br />
côté du fait d’une interprétation restrictive <strong>de</strong>s dynamiques du conflit. Si le lien<br />
entre les droits <strong>humains</strong> <strong>et</strong> le conflit conduit à p<strong>la</strong>cer les c<strong>la</strong>uses re<strong>la</strong>tives aux<br />
droits <strong>humains</strong> au cœur d’un accord <strong>de</strong> <strong>paix</strong>, ce<strong>la</strong> peut également conduire<br />
à limiter leur champ d’application. En particulier, les besoins <strong>de</strong>s femmes<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong>s minorités - qui n’ont pas été au cœur du conflit ou du processus <strong>de</strong><br />
négociations -, pourront ne pas être prioritaires au moment <strong>de</strong> <strong>la</strong> mise en œuvre<br />
ou risquent <strong>de</strong> ne pas être abordés du tout. Ce<strong>la</strong> peut conduire au déni <strong>de</strong><br />
droits d’acteurs-clés <strong>de</strong> <strong>la</strong> société <strong>et</strong> alimenter une interprétation restrictive <strong>de</strong>s<br />
droits <strong>humains</strong> comme ne s’appliquant qu’aux clivages principaux au sein <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> société – ce qui peut entraîner ces groupes-clés à s’opposer à ces droits. La<br />
terminologie <strong>de</strong>s droits <strong>humains</strong> vise, cependant, à l’inclusion. Les processus<br />
<strong>de</strong> <strong>paix</strong> représentent une opportunité importante <strong>de</strong> répondre aux besoins <strong>de</strong>s<br />
groupes exclus. Inversement, <strong>la</strong> capacité d’un processus <strong>de</strong> <strong>paix</strong> <strong>de</strong> prendre en<br />
compte les besoins <strong>de</strong> ces groupes peut démontrer que <strong>la</strong> « <strong>paix</strong> » représente<br />
une réalité vécue. Le fait <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong>s institutions <strong>de</strong>s droits <strong>humains</strong><br />
<strong>de</strong> façon à ce qu’elles prennent en compte les besoins <strong>de</strong> ces groupes peut<br />
également être utile pour dépasser l’idée selon <strong>la</strong>quelle les droits <strong>humains</strong> «<br />
n’appartiendraient qu’à une seule <strong>de</strong>s parties ».<br />
Réforme <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> droit - Un défi particulier<br />
Ces problèmes d’ordre général prennent un caractère particulier en ce qui<br />
concerne <strong>la</strong> réforme <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> droit qui vise à reconstruire ou établir les<br />
institutions chargées <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>justice</strong> pénale <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’application <strong>de</strong>s lois <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
institutions nationales <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> l’homme. Les institutions liées à l’état <strong>de</strong><br />
droit sont essentielles pour faire en sorte que les engagements inscrits dans<br />
un accord <strong>de</strong> <strong>paix</strong> <strong>de</strong>viennent une réalité. Certains <strong>accords</strong> <strong>de</strong> <strong>paix</strong> incluent<br />
<strong>de</strong>s c<strong>la</strong>uses très précises re<strong>la</strong>tives à ces réformes (Afrique du Sud, Guatéma<strong>la</strong>,<br />
Salvador) ; alors que d’autres ne les évoquent qu’en termes généraux (Haïti,<br />
Cambodge, Sierra Leone). En Bosnie, l’Accord <strong>de</strong> <strong>paix</strong> <strong>de</strong> Dayton prévoyait<br />
un cadre global pour les droits <strong>humains</strong> <strong>et</strong> <strong>la</strong> mise en p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong> multiples<br />
institutions, internationales, nationales <strong>et</strong> « hybri<strong>de</strong>s » pour sa mise en œuvre,<br />
mais il n’évoquait que peu <strong>la</strong> réforme <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>justice</strong>. Récemment, <strong>de</strong>s résolutions<br />
du Conseil <strong>de</strong> sécurité ont prévu <strong>de</strong>s mesures substantielles en matière <strong>de</strong><br />
réforme <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> droit, même lorsqu’elles ne sont pas abordées dans<br />
l’accord <strong>de</strong> <strong>paix</strong> auquel <strong>la</strong> Résolution fait référence. 170<br />
124 <strong>Négocier</strong> <strong>la</strong> <strong>justice</strong> ? <strong>Droits</strong> <strong>humains</strong> <strong>et</strong> <strong>accords</strong> <strong>de</strong> <strong>paix</strong>