Négocier la justice ? Droits humains et accords de paix - The ICHRP
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continue en matière <strong>de</strong> surveil<strong>la</strong>nce du processus ou même <strong>de</strong> participation<br />
dans <strong>de</strong>s institutions « locales », comme <strong>de</strong>s tribunaux. Cependant, c<strong>et</strong>te<br />
intervention internationale n’a pas forcément un eff<strong>et</strong> bénéfique sur les droits<br />
<strong>humains</strong>. Les organisations <strong>et</strong> institutions internationales peuvent parfois jouer<br />
un rôle potentiellement négatif durant <strong>la</strong> phase <strong>de</strong> post-conflit. En particulier,<br />
comme il a été mentionné ci-avant, les institutions financières internationales<br />
sont souvent critiquées parce qu’elles imposent <strong>de</strong>s réformes économiques<br />
d’inspiration libérale qui limitent les dépenses publiques sociales, alors que<br />
celles-ci sont essentielles pour <strong>la</strong> reconstruction. 168 De même, étant donné que<br />
l’importance du rôle joué par les acteurs internationaux dépend <strong>de</strong> leur capacité<br />
à promouvoir les normes internationales, lorsque <strong>la</strong> base normative <strong>de</strong> leur<br />
intervention ou les mécanismes assurant l’obligation <strong>de</strong>s acteurs internationaux<br />
<strong>de</strong> rendre compte <strong>de</strong> leurs actes manquent <strong>de</strong> c<strong>la</strong>rté (par exemple en Irak,<br />
<strong>et</strong> dans une moindre mesure, dans le cas <strong>de</strong>s gouvernements transitoires<br />
intérimaires <strong>de</strong> l’ONU), ce<strong>la</strong> peut réduire leur efficacité <strong>et</strong> engendrer au niveau<br />
local un certain cynisme face aux droits <strong>humains</strong>.<br />
La société civile est faible, son action est limitée ou elle souffre <strong>de</strong><br />
dysfonctionnements consécutifs au processus <strong>de</strong> <strong>paix</strong>. Le rôle <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
société civile est essentiel pour <strong>la</strong> mise en œuvre <strong>de</strong>s droits <strong>humains</strong> au niveau<br />
national sur le long terme, ainsi que pour <strong>la</strong> légitimation <strong>et</strong> l’appropriation <strong>de</strong><br />
ces droits. Sur le plus long terme, <strong>la</strong> mise en œuvre continue <strong>de</strong>s mesures<br />
re<strong>la</strong>tives aux droits <strong>humains</strong> va dépendre du <strong>de</strong>gré d’internalisation tant<br />
<strong>de</strong>s normes re<strong>la</strong>tives aux droits <strong>humains</strong> que <strong>de</strong>s mécanismes mis en p<strong>la</strong>ce<br />
pour leur application au niveau national. Le cas du Cambodge montre que<br />
même une intervention internationale <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> ampleur peut n’avoir que<br />
<strong>de</strong>s résultats limités, lorsque <strong>la</strong> relève n’est pas assurée par <strong>de</strong>s processus<br />
nationaux (même si, en fait, les mesures les plus importantes ne portaient pas<br />
sur <strong>la</strong> protection <strong>de</strong>s droits <strong>humains</strong>). La réforme institutionnelle ne suffit pas<br />
pour garantir <strong>la</strong> mise en œuvre <strong>de</strong>s mesures au niveau national : pour que<br />
le respect <strong>de</strong>s droits <strong>humains</strong> <strong>de</strong>vienne une réalité au niveau national, il est<br />
essentiel que les citoyens jouent un rôle actif, qu’ils soient conscients <strong>de</strong> leurs<br />
droits <strong>et</strong> puissent en bénéficier. Si <strong>la</strong> société civile est inexistante ou si elle<br />
n’a que peu d’expertise ou d’expérience sur les questions re<strong>la</strong>tives aux droits<br />
<strong>humains</strong>, il pourra être nécessaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> soutenir. Lorsque les sociétés ont peu<br />
d’expérience ou éprouvent peu <strong>de</strong> confiance à l’égard <strong>de</strong> solutions « fondées<br />
en droit », il sera essentiel d’é<strong>la</strong>borer diverses approches en matière <strong>de</strong> droits<br />
<strong>humains</strong> adaptées à <strong>la</strong> culture locale. Des recherches ont également montré<br />
que, paradoxalement, <strong>la</strong> société civile <strong>et</strong>, en particulier, les ONG nationales<br />
<strong>de</strong> défense <strong>de</strong>s droits <strong>humains</strong> sont confrontées à certaines difficultés<br />
d’organisation qui sont générées par les <strong>accords</strong> <strong>de</strong> <strong>paix</strong>. 169 Elles doivent, en<br />
général, modifier leurs mandats conformément aux <strong>accords</strong> <strong>de</strong> <strong>paix</strong>, trouver <strong>de</strong><br />
nouvelles sources <strong>de</strong> financement (lorsque les bailleurs <strong>de</strong> fonds internationaux<br />
considèrent que le conflit est « résolu »). De plus, elles peuvent perdre un<br />
nombre extrêmement important <strong>de</strong> membres <strong>de</strong> leur personnel qui rejoignent<br />
les structures étatiques, comme le montre le cas <strong>de</strong> l’Afrique du Sud. Si le<br />
processus <strong>de</strong> <strong>paix</strong> échoue, les défenseurs <strong>de</strong>s droits <strong>humains</strong> peuvent se<br />
<strong>Négocier</strong> <strong>la</strong> <strong>justice</strong> ? <strong>Droits</strong> <strong>humains</strong> <strong>et</strong> <strong>accords</strong> <strong>de</strong> <strong>paix</strong> 123