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Le phrasème exclamatif « strafe sie Gott » est attribuable au personnage de Frau Stuht : il est un indice de la subjectivité de ce personnage dans le discours du narrateur. L’énoncé est interprété grâce à cela comme un erlebte Rede. Cette représentation de discours second est resserrée autour du pôle de l’émetteur et de sa subjectivité évaluative et affective. Les conditions de production de l’énonciation représentée sont moins importantes : les seuls paramètres sont le temps et l’espace, vaguement déterminés dans le cotexte de l’erlebte Rede. Le deuxième exemple montre une autre sélection des informations dans le discours rapporté : (4) „He, Hauke“, sagte der Hausherr, „komm herein [...]“ „Uns’ Weert“, entgegnete dieser ; - denn so nennen hier die Leute ihre Herrschaft - „ich soll aber erst das Jungvieh füttern!“ (Storm, Der Schimmelreiter : 30) En plus de la représentation de la subjectivité des énonciateurs seconds, notamment au travers du sociolecte, et de celle de la subjectivité déictique, ce discours direct livre des informations sur la valeur pragmatique de l’énoncé avec le choix d’un verbe introducteur (entgegnen) et des informations d’ordre discursif : le terme d’adresse « uns’ Weert » est motivé par les paramètres historiques et diatopiques de la situation d’énonciation seconde, et le narrateur du texte, dans le discours cadre, prend soin d’éclairer l’allocuté du premier cadre d’énonciation, le lecteur du texte narratif, sur l’emploi de ce terme, afin de renforcer l’illusion narrative. Ces deux exemples de DR offrent une représentation différente des faits énonciatifs. Pour reprendre la distinction de Kerbrat-Orecchioni, les faits énonciatifs du premier exemple relèvent principalement du champ d’une énonciation restreinte, puisque le DR se concentre sur l’émetteur. Ceux du deuxième exemple au contraire couvrent des faits relevant du champ de l’énonciation étendue. Il nous faut maintenant opérer une distinction entre le discours rapporté et quelques formes de reprise qui, malgré la proximité avec le DR, sont des formes que nous choisissons de ne pas intégrer dans le champ du DR. Nous empruntons principalement à Authier-Revuz et à Ducrot les analyses qui nous permettent de délimiter les formes de discours rapporté. Deux types en particulier sont à distinguer du discours rapporté : la modalisation en discours - 32 -

second (Authier-Revuz) ou reprise montrée (Ducrot) et la modalisation autonymique (Authier-Revuz). Authier-Revuz structure les manifestations de l’hétérogénéité montrée du dire en fonction de la nature du discours référencé, qui est soit le moyen soit l’objet du dire : 1) L’énoncé repris est utilisé pour modaliser l’énoncé produit, il est le moyen du dire : 1a) la modalisation porte sur le contenu de l’assertion : c’est la modalisation en discours second, avec, en français, des formes comme selon x, d’après x, dixit x, c’est x qui le dit, paraît-il, il paraît que, et le conditionnel. Jean a fait, selon untel, une longue promenade. (Authier-Revuz 1992 : 39) Cette forme de discours pluriel est une forme dans laquelle un autre discours est identifié comme étant la source de l’information. L’énoncé est une « assertion modalisée par renvoi à un autre discours, c’est-à-dire se caractérisant elle-même comme « seconde », dépendante de cet autre discours […] » (Authier-Revuz 1992 : 39). Le discours second est l’objet et la visée du discours rapporté, tandis que le discours second est utilisé dans les discours modalisés. Lorsque l’on relève dans une énonciation la présence de telle parole ou de tel point de vue, il faut préciser si cette parole et ce point de vue sont rapportés, mentionnés, si donc leur existence est l’objet d’une affirmation, ou bien s’ils sont exprimés, si donc l’énonciation est donnée comme leur manifestation. (Ducrot 1989 : 190) Ducrot parle dans ce cas de reprise montrée. Selon son analyse, les énoncés a) et b) relèvent de la reprise montrée, et l’énoncé c) du discours rapporté : a) Il paraît que je vais être élu b) Selon Pierre, je suis malade c) On dit que je vais être élu En empruntant à Wittgenstein et à la philosophie du langage la distinction vorweisen, to show (montrer) et sagen, to tell, to say (asserter), Ducrot décrit les énoncés a) et b) comme des énoncés qui montrent, expriment un point de vue, et qui relèvent de la polyphonie au sens strict. Dans ces énoncés, « on emploie un je tout en exprimant (je dis bien exprimant, et non rapportant) le point de vue d’un autre » (Ducrot 1989 : 189). « Il paraît […] sert […] à montrer des énonciateurs assertant la proposition p » (Ducrot 1984 : 154). Au contraire, - 33 -

second (Authier-Revuz) ou reprise montrée (Ducrot) et la modalisation autonymique<br />

(Authier-Revuz).<br />

Authier-Revuz structure les manifestations <strong>de</strong> l’hétérogénéité montrée du dire en fonction <strong>de</strong><br />

la nature du discours référencé, qui est soit le moyen soit l’objet du dire :<br />

1) L’énoncé repris est utilisé pour modaliser l’énoncé produit, il est le moyen du dire :<br />

1a) la modalisation porte sur le contenu <strong>de</strong> l’assertion : c’est la modalisation en discours<br />

second, avec, en français, <strong>de</strong>s formes comme selon x, d’après x, dixit x, c’est x qui le dit,<br />

paraît-il, il paraît que, et le conditionnel.<br />

Jean a fait, selon untel, une longue promena<strong>de</strong>. (Authier-Revuz 1992 : 39)<br />

Cette forme <strong>de</strong> discours pluriel est une forme dans laquelle un autre discours est i<strong>de</strong>ntifié<br />

comme étant la source <strong>de</strong> l’information. L’énoncé est une « assertion modalisée par renvoi à<br />

un autre discours, c’est-à-dire se caractérisant elle-même comme « secon<strong>de</strong> », dépendante <strong>de</strong><br />

cet autre discours […] » (Authier-Revuz 1992 : 39). Le discours second est l’objet et la visée<br />

du discours rapporté, tandis que le discours second est utilisé dans les discours modalisés.<br />

Lorsque l’on relève dans une énonciation la présence <strong>de</strong> telle parole ou <strong>de</strong> tel point <strong>de</strong> vue, il faut<br />

préciser si cette parole et ce point <strong>de</strong> vue sont rapportés, mentionnés, si donc leur existence est l’objet<br />

d’une affirmation, ou bien s’ils sont exprimés, si donc l’énonciation est donnée comme leur<br />

manifestation. (Ducrot 1989 : 190)<br />

Ducrot parle dans ce cas <strong>de</strong> reprise montrée. Selon son analyse, les énoncés a) et b) relèvent<br />

<strong>de</strong> la reprise montrée, et l’énoncé c) du discours rapporté :<br />

a) Il paraît que je vais être élu<br />

b) Selon Pierre, je suis mala<strong>de</strong><br />

c) On dit que je vais être élu<br />

En empruntant à Wittgenstein et à la philosophie du langage la distinction vorweisen, to<br />

show (montrer) et sagen, to tell, to say (asserter), Ducrot décrit les énoncés a) et b) comme<br />

<strong>de</strong>s énoncés qui montrent, expriment un point <strong>de</strong> vue, et qui relèvent <strong>de</strong> la polyphonie au<br />

sens strict. Dans ces énoncés, « on emploie un je tout en exprimant (je dis bien exprimant, et<br />

non rapportant) le point <strong>de</strong> vue d’un autre » (Ducrot 1989 : 189). « Il paraît […] sert […] à<br />

montrer <strong>de</strong>s énonciateurs assertant la proposition p » (Ducrot 1984 : 154). Au contraire,<br />

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