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Nous sommes consciente de la proximité du DR avec d’autres formes et nous veillerons à souligner dans notre définition quels sont les traits discriminants du DR. La distinction que nous opérerons entre les formes de discours rapporté et les autres formes qui marquent la présence d’un discours autre n’est pas pensée comme une frontière hermétique, car ces dernières interagissent dans les textes avec les formes du DR et peuvent être employées comme traduction du discours rapporté, comme la section III le montrera. Cette distinction doit néanmoins être opérée afin que nous puissions analyser les relations d’équivalence traductologiques. Le cadre d’analyse que nous retenons est emprunté aux travaux d’Authier-Revuz sur la représentation du discours autre et à la théorie de la polyphonie de Ducrot. Ces théories présentent à la fois des points de convergence et de divergence que nous exposerons dans la partie qui va suivre. 1.3 Le cadre d’analyse du discours rapporté Les modèles explicatifs d’Authier-Revuz et de Ducrot sont tous deux construits autour de la question de l’identité du sujet de l’énonciation. Ils posent la non-unicité du sujet et la multiplicité des voix qui en découle comme une loi fondamentale du langage. Les travaux d’Authier-Revuz (dès Authier et Meunier 1977) ont marqué le tournant énonciatif dans la recherche sur le discours rapporté et ont montré les limites des modèles traditionnels. Nous rappellerons quelles sont ces limites (1.3.1) avant de présenter les outils que fournissent les modèles énonciatifs (1.3.2). L’opposition entre les modèles morpho-syntaxiques et les modèles énonciatifs est une opposition qui structure le champ de la recherche, que les travaux portent sur la théorie générale du discours rapporté (Scherner 1976 ; von Roncador 1988 ; Gather 1994 ; Rosier 1999 ; Authier-Revuz 2004), un aspect ou un type particulier (les verbes introducteurs, le discours indirect libre, l’emploi du mode Konjunktiv, la dérivation de l’indirect à partir du direct, …), ou encore une application (didactique, traduction du discours rapporté), ou enfin l’emploi du discours rapporté en relation avec les genres de discours. Il n’existe pas toujours une répartition exclusive des traits des deux catégories, et certains ouvrages combinent une approche morpho-syntaxique à une approche énonciative et discursive. - 26 -

1.3.1 Approches morpho-syntaxiques L’approche que nous qualifions de morpho-syntaxique s’inscrit dans la tradition antique. Dans certains cas, d’autre part, elle est encouragée par un souci de simplicité didactique, lequel conduit souvent à une « Idealisierung » (von Roncador 1988 : 2) des formes de discours rapporté. Nous décrirons cette approche sur trois niveaux : la définition du DR, la description de ses caractéristiques pragmatiques, sa typologie. Concernant la nature du discours rapporté, cette approche structure le discours rapporté en un système binaire (discours direct / discours indirect) se caractérisant par des différences au plan déictique, syntaxique, temporel et modal. Le discours indirect est présenté comme une forme née de la transposition du discours direct - forme la plus simple - et caractérisée par : 1) un statut de phrase complexe, 2) la transposition des déictiques de lieu et de temps en anaphorique, 3) la transposition des personnes, 4) la transposition des temps (en français) ou des modes verbaux. Privée d’une base énonciative, cette approche ne couvre pas tous les phénomènes du discours rapporté. Ainsi, la « chute » des interjections, des appréciatifs, des exclamations et des langues étrangères, lors d’une reformulation d’un discours direct en un discours mode indirect n’est pas expliquée, ni certaines fois même évoquée (Heidolph et al. 1984 17 ; Helbig und Buscha 1998 ; Engel 2004). De plus, la transposition des déictiques est posée comme règle absolue, ce qui interdit l’existence de formes graduées. Enfin, le discours indirect libre et le discours indirect non introduit sont présentés comme des discours indirects sans subordination (Helbig und Buscha 1998 : 149 et 197). Sur le plan pragmatique, les formes virtuelles et d’autocitation sont souvent occultées. La fonction première, sinon exclusive, serait de rapporter des paroles prononcées dans le passé par autrui (Helbig und Buscha 1998 : 194) 18 . Pour Engel (2004 : 65), de même, on est en présence d’un DR lorsque « ein geschriebener oder gesprochener Text [wird] zu einem späteren Zeitpunkt wieder aufgenommen und, sei es auch in veränderter Form, in einem anderen Text eingebettet. » 17 La grammaire de Heidolph et al. (1984) illustre la valeur relative de notre classification : par certains traits, cette grammaire a une approche énonciative, définissant le discours rapporté comme la mise en relation de deux actes d’énonciation (Redeakte), mais certains traits de sa description la rapprochent de la vision traditionnelle. Cette grammaire semble ne pas tirer toutes les conclusions de sa définition. La grammaire de Dethloff et Wagner (2002) oscille également entre une définition énonciative et syntaxique. 18 Cela revient à ériger au rang de règle et de définition ce qui n’est qu’une généralité observable (Golato 2002). - 27 -

1.3.1 Approches morpho-syntaxiques<br />

L’approche que nous qualifions <strong>de</strong> morpho-syntaxique s’inscrit dans la tradition antique.<br />

Dans certains cas, d’autre part, elle est encouragée par un souci <strong>de</strong> simplicité didactique,<br />

lequel conduit souvent à une « I<strong>de</strong>alisierung » (von Roncador 1988 : 2) <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong><br />

discours rapporté. Nous décrirons cette approche sur trois niveaux : la définition du DR, la<br />

<strong>de</strong>scription <strong>de</strong> ses caractéristiques pragmatiques, sa typologie.<br />

Concernant la nature du discours rapporté, cette approche structure le discours rapporté en<br />

un système binaire (discours direct / discours indirect) se caractérisant par <strong>de</strong>s différences au<br />

plan déictique, syntaxique, temporel et modal. Le discours indirect est présenté comme une<br />

forme née <strong>de</strong> la transposition du discours direct - forme la plus simple - et caractérisée par :<br />

1) un statut <strong>de</strong> phrase complexe, 2) la transposition <strong>de</strong>s déictiques <strong>de</strong> lieu et <strong>de</strong> temps en<br />

anaphorique, 3) la transposition <strong>de</strong>s personnes, 4) la transposition <strong>de</strong>s temps (en français) ou<br />

<strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s verbaux. Privée d’une base énonciative, cette approche ne couvre pas tous les<br />

phénomènes du discours rapporté. Ainsi, la « chute » <strong>de</strong>s interjections, <strong>de</strong>s appréciatifs, <strong>de</strong>s<br />

exclamations et <strong>de</strong>s langues étrangères, lors d’une reformulation d’un discours direct en un<br />

discours mo<strong>de</strong> indirect n’est pas expliquée, ni certaines fois même évoquée (Heidolph et al.<br />

1984 17 ; Helbig und Buscha 1998 ; Engel 2004). De plus, la transposition <strong>de</strong>s déictiques est<br />

posée comme règle absolue, ce qui interdit l’existence <strong>de</strong> formes graduées. Enfin, le discours<br />

indirect libre et le discours indirect non introduit sont présentés comme <strong>de</strong>s discours<br />

indirects sans subordination (Helbig und Buscha 1998 : 149 et 197).<br />

Sur le plan pragmatique, les formes virtuelles et d’autocitation sont souvent occultées. La<br />

fonction première, sinon exclusive, serait <strong>de</strong> rapporter <strong>de</strong>s paroles prononcées dans le passé<br />

par autrui (Helbig und Buscha 1998 : 194) 18 . Pour Engel (2004 : 65), <strong>de</strong> même, on est en<br />

présence d’un DR lorsque « ein geschriebener o<strong>de</strong>r gesprochener Text [wird] zu einem<br />

späteren Zeitpunkt wie<strong>de</strong>r aufgenommen und, sei es auch in verän<strong>de</strong>rter Form, in einem<br />

an<strong>de</strong>ren Text eingebettet. »<br />

17 La grammaire <strong>de</strong> Heidolph et al. (1984) illustre la valeur relative <strong>de</strong> notre classification : par certains traits,<br />

cette grammaire a une approche énonciative, définissant le discours rapporté comme la mise en relation <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>ux actes d’énonciation (Re<strong>de</strong>akte), mais certains traits <strong>de</strong> sa <strong>de</strong>scription la rapprochent <strong>de</strong> la vision<br />

traditionnelle. Cette grammaire semble ne pas tirer toutes les conclusions <strong>de</strong> sa définition. La grammaire <strong>de</strong><br />

Dethloff et Wagner (2002) oscille également entre une définition énonciative et syntaxique.<br />

18 Cela revient à ériger au rang <strong>de</strong> règle et <strong>de</strong> définition ce qui n’est qu’une généralité observable (Golato<br />

2002).<br />

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