1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine
1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine
1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
<strong>de</strong> l’Occi<strong>de</strong>nt comme un fait acquis, déclin qui n’est qu’une conséquence <strong>de</strong> la croyance au<br />
progrès. Et si Julius Overhoff s’oppose à quelque chose, c’est bien à la ‹magie du déclin› ». 84<br />
Overhoff partage donc les idées <strong>de</strong> Spengler et Toynbee qui refusent le linéarisme, sans<br />
toutefois adhérer à leurs théories cycliques <strong>de</strong> l’histoire, car au fond l’histoire ne peut être<br />
l’objet d’une analyse véritablement scientifique, c’est-à-dire en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toute interprétation.<br />
L’histoire s’écrit différemment selon l’angle <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> celui qui l’observe : c’est la pensée<br />
qu’il a développée dans sa lettre à Suhrkamp, quand il parle d’interprétation. 85 Dans cette<br />
même lettre à Suhrkamp du 31 juillet 1957, Overhoff prend aussi l’exemple <strong>de</strong> l’histoire<br />
récente, qui sera vue différemment <strong>de</strong> la part d’un Américain, d’un Russe, d’un Allemand ou<br />
d’un Chinois : « Leurs quatre visions n’ont absolument rien en commun et pourtant elles font<br />
partie d’un seul et même mon<strong>de</strong>. » 86 C’est ce paradoxe – la coexistence <strong>de</strong> visions différentes,<br />
voir opposées – qu’Overhoff tente <strong>de</strong> surmonter dans Le Mon<strong>de</strong> avec Gengis Kahn et c’est ce<br />
paradoxe qui est à la base <strong>de</strong> la technique <strong>de</strong> mosaïque qu’il utilise.<br />
Overhoff justifie et explique sa technique <strong>de</strong> mosaïque par ces réflexions sur<br />
l’interprétation <strong>de</strong> l’histoire. Il distingue les différents niveaux <strong>de</strong> la perception <strong>de</strong>s<br />
événements historiques. L’histoire change dans tous ces aspects à chaque génération, chacune<br />
se faisant une nouvelle image du passé. Il en a précisé les raisons : d’une part apparaissent<br />
constamment, grâce à l’étu<strong>de</strong> ou par hasard, <strong>de</strong> nouveaux faits, ignorés jusque-là, pendant que<br />
d’autres passent à l’arrière-plan. D’autre part, nous changeons nous-mêmes, si bien qu’en<br />
raison <strong>de</strong> notre expérience propre, nous discernons d’autres choses que nos parents et nos<br />
ancêtres. 87<br />
Observer l’histoire comme au travers d’un prisme, la retourner dans tous les sens pour<br />
discerner l’effet <strong>de</strong> distorsion <strong>de</strong> ses foyers fragmentés, observer sa projection sur les<br />
événements, permet une réflexion sur les aspects que prend la réalité, sur les images que nous<br />
nous faisons d’elle. Cela met en évi<strong>de</strong>nce le principe selon lequel les hommes ne déterminent<br />
pas leurs actes selon la vérité, mais selon l’idée qu’ils se font d’elle. Car la « réalité » est<br />
84 Arthur Hospelt : Texte sur les Inscriptions européennes, script, p. 1 : „Aber das [sich <strong>de</strong>r Finsternis<br />
verschrieben] hiesse schon <strong>de</strong>n Untergang <strong>de</strong>s Abendlan<strong>de</strong>s als sicher annehmen, <strong>de</strong>r doch nur die Folge eines<br />
Forstschrittglaubens ist, und wenn Julius Overhoff sich gegen etwas wen<strong>de</strong>t, so ist es gera<strong>de</strong> gegen <strong>de</strong>n<br />
‚Untergangszauber‘“.<br />
85 Cf. supra partie « Une philosophie <strong>de</strong> l’histoire ».<br />
86 Lettre d’Overhoff à Suhrkamp du 31.07.1957 : „Die vier Vorstellungen haben schlechterdings nichts<br />
miteinan<strong>de</strong>r gemein und doch gehören sie einer Welt zu.“<br />
87 Cf. introduction à une lecture le 9 juillet 1965 <strong>de</strong>vant la société Humboldt : „Historie än<strong>de</strong>rt sich in allen<br />
Aspekten für je<strong>de</strong> neue Generation, je<strong>de</strong>s Geschlecht formt sich ein neues Bild <strong>de</strong>r Vergangenheit. Das hat zwei<br />
Grün<strong>de</strong>: zum einen treten durch Forschertätigkeit o<strong>de</strong>r Zufall ständig neue, bisher übersehene o<strong>de</strong>r unbekannt<br />
gebliebene Fakten ans Licht, während an<strong>de</strong>re in <strong>de</strong>n Hintergrund rücken: zum zweiten än<strong>de</strong>rn wir uns selbst, so<br />
daß uns aufgrund eigenere Erlebnisse an<strong>de</strong>res in die Augen fällt und wichtig scheint, als unseren Eltern und<br />
Vorfahren.“ (Script).<br />
96