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1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine

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l’autre. Puis, pour mesurer le sens que cette entreprise <strong>de</strong> résurrection <strong>de</strong> l’histoire revêtait<br />

aux yeux d’Overhoff, il faudra considérer l’époque qui a donné naissance au Mon<strong>de</strong> avec<br />

Gengis Khan, c’est-à-dire l’Europe <strong>de</strong>s années 50, donc examiner en quoi le XIII e siècle,<br />

auquel vécut Gengis Khan (1162-1227), pouvait en être rapproché. Ces présupposés<br />

permettront enfin l’analyse proprement dite <strong>de</strong> l’œuvre.<br />

V.1 Une philosophie <strong>de</strong> l’histoire<br />

Le mon<strong>de</strong> avec Gengis Khan découle d’une philosophie <strong>de</strong> l’histoire propre à son auteur,<br />

selon lequel la « perspective linéaire d’une époque historique donnée est une illusion<br />

flatteuse, pour le romancier comme pour la science ». 71<br />

Seule la connaissance <strong>de</strong> sa<br />

conception historique fondée sur la critique <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> linéaire, révèle l’intention<br />

d’Overhoff et le cheminement <strong>de</strong> sa réflexion.<br />

Au terme <strong>de</strong> l’avant-propos du Mon<strong>de</strong> avec Gengis Khan, conçu comme une étu<strong>de</strong><br />

impressionniste, par touches, <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong>s idées au XIII e siècle, Overhoff prévient le<br />

lecteur du contenu et <strong>de</strong> la structure du livre, <strong>de</strong> son montage tout à fait particulier, qui le<br />

place hors <strong>de</strong>s genres littéraires codifiés, qu’il justifie par une vision <strong>de</strong> l’histoire qu’il expose<br />

directement :<br />

L’histoire ne s’accomplit pas dans une juxtaposition linéaire d’événements et <strong>de</strong> personnages<br />

importants, […] <strong>de</strong> temps <strong>de</strong> paix et <strong>de</strong> guerres, <strong>de</strong> révolutions, <strong>de</strong> dynasties, <strong>de</strong> généraux et <strong>de</strong><br />

révolutionnaires, <strong>de</strong> peuples et d’États, elle s’accomplit dans la coexistence <strong>de</strong> centres <strong>de</strong><br />

forces. 72<br />

Cette notion <strong>de</strong> « centre <strong>de</strong> force » (« Kraftzentrum ») est capitale. C’est, avec l’idée <strong>de</strong><br />

« champ <strong>de</strong> tension » (« Spannungsfeld »), qui en est l’une <strong>de</strong>s conséquences, un élément<br />

fondamental <strong>de</strong> la conception d’Overhoff. Entre les centres <strong>de</strong> force présents se créent <strong>de</strong>s<br />

champs <strong>de</strong> tension qui constituent le champ d’action <strong>de</strong>s individus, l’espace où ils ont liberté<br />

d’agir. Overhoff rejoint ici l’historien Emmanuel Berl, qui dès 1945, disait dans l’introduction<br />

<strong>de</strong> son Histoire <strong>de</strong> l’Europe qu’il faut appréhen<strong>de</strong>r l’histoire comme « <strong>de</strong>s concordances <strong>de</strong><br />

chronologie » et que cela ne peut se faire qu’en substituant « à ces histoires verticales [où<br />

71 Lettre d’Overhoff à Suhrkamp du 31.07.1957 : „‚Die ‚Linearperspektive‘ einer bestimmten Geschichtsepoche<br />

ist eine schöne Illusion, für <strong>de</strong>n Romancier wie für die Wissenschaft.“<br />

72 „Geschichte vollzieht sich nicht im fa<strong>de</strong>nförmigen Nacheinan<strong>de</strong>r von Ereignissen und be<strong>de</strong>uten<strong>de</strong>n Menschen,<br />

[…] von Frie<strong>de</strong>nszeiten, Kriegen und Revolutionen, von Fürstenhäusern, Heerführern und Umstürzlern, von<br />

Völkern und von Staaten, son<strong>de</strong>rn im Zugleich von Kraftzentren.“ (Le Mon<strong>de</strong> avec Gengis Khan, avant-propos,<br />

p. 31). Overhoff avait déjà exprimé cette opinion dans les Inscriptions européennes : „Nichts ist <strong>de</strong>m Gefühl für<br />

geschichtliche Zusammenhänge abträglicher als das linienhafte Nachschreiten von Entwicklung <strong>de</strong>s Einzelnen:<br />

<strong>de</strong>r I<strong>de</strong>en, Dynastien, Län<strong>de</strong>r. Es hat seinen Lehr- und Fin<strong>de</strong>wert nur, wenn Überschau ihm die Waage hält. Die<br />

Wirklichkeit ist ein dichter Stoff; wer Fä<strong>de</strong>n zieht, <strong>de</strong>m fällt es auseinan<strong>de</strong>r, er gelangt endlich zum Trugschluß,<br />

das Verbin<strong>de</strong>n<strong>de</strong> seien die Zwischenräume, das Leere. Nur Erkenntnis <strong>de</strong>s Gemeinsamen erweist Unterschie<strong>de</strong><br />

und läßt die Musterung ganz.“ (Inscriptions européennes, pp. 123-124).<br />

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