1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine
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La Descente du Gange s’inscrit dans trois traditions : 1. la tradition du journal de voyage 2. la tradition du récit de voyage 3. la méditation sur les civilisations V.6.1 La tradition du journal de voyage La première intention d’Overhoff était de façonner un ouvrage à partir des lettres envoyées à sa famille lors de son voyage, dans lesquelles il décrit ses étapes ainsi que les visites et les découvertes auxquelles chacune a donné lieu. Ce procédé, l’eût-il utilisé, l’eût inscrit dans la tradition des écrivains-voyageurs du XIX e siècle à l’instar d’un Stendhal. Mais en commençant la rédaction d’un journal de voyage à partir de ces lettres, auxquelles il aurait suffit de supprimer les allusions personnelles ou toute indication dévoilant un destinataire, est apparue à Overhoff la nécessité d’un travail plus approfondi, allant au-delà d’une compilation de type impressionniste faite d’anecdotes et de descriptions sur le mode chronologique. En voulant s’adresser à un public autre que sa famille et lui-même, l’idée qu’il se fait de son ouvrage va ainsi évoluer du journal de voyage vers le récit de voyage, tout en contenant des éléments caractéristiques du journal de voyage, comme la relation d’événements ponctuels observés par le voyageur et susceptibles de rendre l’atmosphère d’un pays, d’une région, d’un peuple, d’une communauté, d’anecdotes visant à divertir le lecteur et à lui restituer l’ambiance dans laquelle s’est déroulé le voyage lui-même, de détails concernant les péripéties du voyage. Le voyageur prend le pouls de l’endroit traversé et, à l’aide de cas concrets, en rend les pulsations. Il faut toutefois noter que du point de vue de la forme, La Descente du Gange ne respecte pas les usages du journal de voyage. Le livre n’est pas structuré par dates, au jour le jour. Le lecteur suit la progression du voyage chapitre par chapitre, dont les intitulés lui donnent des repères géographiques : Aden, Ceylan, Pakistan oriental, La Perse du nord au sud. Ces intitulés contiennent d’ailleurs souvent, outre une indication géographique, un commentaire les caractérisant de façon générale (Delhi, trop d’histoire ; Bombay, autrefois Gateway of India ; Jordanie, Petra. Existe-t-il encore des hommes heureux ?), ou une précision se référant à un événement vécu (Bûcher à Bénarès) ou à l’état actuel du pays (Troubles en Birmanie, Paix en Thaïlande). Ce sont les seules indications que l’auteur livre au lecteur. Le déroulement chronologique du voyage n’est jamais dévoilé. V.6.2 La tradition du récit de voyage 59
La Descente du Gange s’inscrit non seulement dans la tradition du journal de voyage, mais également dans la tradition du récit de voyage, car l’ouvrage représente bien autre chose qu’une compilation de notes n’ayant de sens que pour l’auteur. Overhoff s’adresse à un public, ce qui nécessite tout un travail de structure que ne réclame pas le journal. C’est là que réside la différence essentielle entre journal, destiné au seul rédacteur, et récit de voyage, destiné à un public de lecteurs. On peut dater, environ, du milieu du XVII e siècle la vogue du récit de voyage. Certes, les antécédents ne manquent pas, à commencer par Homère, Hérodote et Pausanias, en passant par Le Devisement du Monde au Moyen Âge, où Marco Polo retrace son périple de Venise jusqu’en Chine. Dès 1650, du moins, le récit de voyage devient un genre à succès. 152 Le récit de voyage prend autant de formes qu’il y a de voyages et de voyageurs. On ne visite pas l’Italie comme on découvre le Nouveau Monde. Dans le premier cas, l’originalité est de porter un regard nouveau sur un objet déjà connu du voyageur et des lecteurs par des récits antérieurs ; dans l’autre, le but est de décrire ce qui n’a fait l’objet d’aucun récit, qui est donc inconnu aussi bien pour le voyageur que pour ses lecteurs. Dans le récit de voyage, le monde est saisi à travers la conscience de l’auteur, mais aussi celle de son époque. Overhoff l’exprime parfaitement lorsqu’il évoque le temps où certaines régions qu’il traverse ou survole n’étaient pas même cartographiées ; nul besoin de remonter à un passé éloigné : il l’a vécu dans les atlas de son enfance ! 153 Au XX e siècle, le récit de voyage ne prétend plus décrire des pays lointains, inconnus, ou nouveaux. L’intérêt s’est porté vers la description d’une réalité actuelle, qui peut toutefois équivaloir à un voyage dans le passé. L’histoire des civilisations ayant peuplé les territoires qu’il traverse est certes d’une importance capitale aux yeux d’Overhoff, 154 mais il n’est toutefois pas à la recherche d’une « authenticité » des cultures traversées, il n’en déplore pas la disparition. Il se situe à l’opposé de Claude Lévy-Strauss, qui haïssait les voyages et regrettait de n’avoir vécu « au temps des vrais voyages, quand s’offrait dans toute sa splendeur un spectacle non gâché, contaminé et maudit ». 155 Que la Terre n’offre plus matière à rêver à des paradis lointains, signifie pour Overhoff qu’il faut une fois de plus repousser les 152 Cf. Claude Burgelin : Dictionnaire des genres et notions littéraires, Paris, 1997, pp. 587-599. 153 „Auf den Karten unserer Schulatlanten gab’s den Ort Anchorage noch nicht, führte unser weiterer Kurs geradenwegs durch den weißen Flecken ‚Unerforscht‘, der auf der Nord-Hemisphäre noch offen war.“ (La Descente du Gange, p. 443). 154 Lettre d’Overhoff à Jürgensmeyer des éditions Hegner du 31.12.1963 : „Denn jedes einzelne Volk hat seine Geschichte, sein durch die eigene Geschichte geformtes Gesicht und damit sein Schicksal. Wer immer an den Problemen unserer Epoche mitarbeiten will, muß sich, soll er nicht Schiffbruch erleiden, in dieses Gesicht der Völker, in das Wesen der geschichtlichen Erscheinungen durch zehntausend Jahre vertiefen, einen billigeren, bequemeren Weg gibt es nicht.“ 155 Claude Lévy-Strauss : Tristes tropiques, Paris, 1955, p. 32. 60
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V.6.1 La tradition du journal <strong>de</strong> voyage<br />
La première intention d’Overhoff était <strong>de</strong> façonner un ouvrage à partir <strong>de</strong>s lettres<br />
envoyées à sa famille lors <strong>de</strong> son voyage, dans lesquelles il décrit ses étapes ainsi que les<br />
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voulant s’adresser à un public autre que sa famille et lui-même, l’idée qu’il se fait <strong>de</strong> son<br />
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observés par le voyageur et susceptibles <strong>de</strong> rendre l’atmosphère d’un pays, d’une région, d’un<br />
peuple, d’une communauté, d’anecdotes visant à divertir le lecteur et à lui restituer l’ambiance<br />
dans laquelle s’est déroulé le voyage lui-même, <strong>de</strong> détails concernant les péripéties du<br />
voyage. Le voyageur prend le pouls <strong>de</strong> l’endroit traversé et, à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> cas concrets, en rend<br />
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Il faut toutefois noter que du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la forme, La Descente du Gange ne<br />
respecte pas les usages du journal <strong>de</strong> voyage. Le livre n’est pas structuré par dates, au jour le<br />
jour. Le lecteur suit la progression du voyage chapitre par chapitre, dont les intitulés lui<br />
donnent <strong>de</strong>s repères géographiques : A<strong>de</strong>n, Ceylan, Pakistan oriental, La Perse du nord au<br />
sud. Ces intitulés contiennent d’ailleurs souvent, outre une indication géographique, un<br />
commentaire les caractérisant <strong>de</strong> façon générale (Delhi, trop d’histoire ; Bombay, autrefois<br />
Gateway of India ; Jordanie, Petra. Existe-t-il encore <strong>de</strong>s hommes heureux ?), ou une<br />
précision se référant à un événement vécu (Bûcher à Bénarès) ou à l’état actuel du pays<br />
(Troubles en Birmanie, Paix en Thaïlan<strong>de</strong>). Ce sont les seules indications que l’auteur livre au<br />
lecteur. Le déroulement chronologique du voyage n’est jamais dévoilé.<br />
V.6.2 La tradition du récit <strong>de</strong> voyage<br />
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