1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine

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Chapitre IV Au centre 25 Lettre Exergue : De datation incertaine, du campement de Gengis Khan aux abords de l’Hindoukouch ou en Afghanistan, adressée aux mouvements de résistance dans la Chine du nord, dissimulée sous l’apparence d’une étude consacrée au Yi Jing, le Livre des transformations. L’expéditeur doit donc appartenir aux cercles taoïstes réunis autour de Tch’ang-tch’ouen, appelé auprès du Khan pour le conseiller mais surtout pour lui révéler le secret de la longévité. Éléments de datation La présence de Tch’ang-tch’ouen, religieux taoïste, alchimiste et astrologue chinois au campement de Gengis Khan permet de dater cette lettre de 1222. Grousset précise dans L’Empire des steppes 206 que Gengis Khan séjourna assez longtemps en Afghanistan, au sud de l’Hindou-kouch, où en mai 1222 il reçut Tch’ang-tch’ouen. Une autre rencontre eu lieu en septembre de la même année, au sud de Balkh, au pied de l’Hindou-kouch, précise Grousset dans Le Conquérant du monde. 207 Le religieux prit définitivement congé de Gengis Khan au printemps 1223. Le tableau est incompréhensible sans la connaissance du Yi Jing. Le Yi Jing est considéré par les Chinois comme le plus antique monument de leur littérature. Richard Wilhelm, dans son introduction à sa traduction du Yi Jing, qu’Overhoff a utilisée comme il l’indique dans la postface, déclarait : Le Livre des Transformations, en chinois Yi Jing, appartient incontestablement aux livres les plus importants de la littérature universelle. Ses origines remontent à une antiquité mythique. Il occupe aujourd’hui encore [dans les années vingt] l’attention des plus éminents lettrés de la Chine. Presque tout ce qui a été pensé de grand et d’essentiel pendant plus de 3000 ans d'histoire de la Chine, ou bien a été inspiré par ce livre, ou bien, inversement, a exercé une influence sur son interprétation, au point que l’on peut affirmer en toute tranquillité que le Yi Jing contient le fruit de la sagesse la plus achevée de plusieurs millénaires. Il ne faut donc pas s’étonner si, en outre, les deux branches de la philosophie chinoise, le confucianisme et le taoïsme, ont ici leurs communes racines. 208 206 René Grousset : L’Empire des steppes, Paris, 1939, p. 305. 207 René Grousset : Le Conquérant du monde. Vie de Gengis Khan, Paris, 1944, p. 329. 208 „Das Buch der Wandlungen, chinesisch I Ging, gehört unstreitig zu den wichtigsten Büchern der Weltliteratur. Seine Anfänge reichen in mythisches Altertum zurück. Bis auf den heutigen Tag beschäftigt es die bedeutendsten Gelehrten Chinas. Fast alles, was in der über 3000 Jahre alten chinesischen Geschichte an großen und wichtigen Gedanken gedacht wurde, ist teils angeregt durch dieses Buch, teils hat es rückwirkend auf die Erklärung des Buches Einfluß ausgeübt, so daß man ruhig sagen kann, daß im I Ging die reifste Weisheit von Jahrtausenden verarbeitet ist. So ist es denn auch kein Wunder, daß beide Zweige der chinesischen Philosophie, der Konfuzianismus und der Taoismus, ihre gemeinsamen Wurzeln hier haben.“ (I Ging. Das Buch der Wandlungen. Erstes und zweites Buch. Aus dem chinesischen verdeutscht und erläutert von Richard Wilhelm, Düsseldorf/Cologne, 1924, p. III). 237

La substance primitive est une série de soixante-quatre hexagrammes ; ces hexagrammes sont formés avec deux sortes de traits : un trait plein ——— et un trait brisé — —. Les Chinois considèrent le Yi Jing comme un livre de divination et c’est dans ce sens qu’il est commenté et expliqué. Khong Tse composa plusieurs commentaires particuliers qu’on désigne sous le nom de Dixième Aile. « Elle donne un éclairage brut qui fonctionne parfois comme rappel utile d’un élément de base qu’il convient de ne pas négliger. » 209 Les autres textes accompagnant les hexagrammes sont le « Jugement » (appréciation globale qui peut comprendre plusieurs éléments : des formules mantiques, une symbolique spécifique à l’hexagramme, des conseils par rapport aux mouvements en cours), et la « Grande image », qui apporte des informations utiles quand au comportement adéquat. 210 Ce tableau est une lettre contenant des informations qui doivent restées inaperçues. Elles sont dissimulées sous forme de nouveaux apports aux commentaires des hexagrammes du Livre des transformations. Overhoff a utilisé les commentaires appelés « Das Urteil » « Jugement » et « Das Bild », « Grande image », auxquels il a associé les instructions secrètes de l’auteur de la lettre. Ne devant pas être repérées, celles-ci sont insérées dans les commentaires usuels, sans qu’aucune césure ne permette de distinguer les commentaires d’origine à ceux ajoutés par le moine. L’exemple de l’hexagramme 39 « Obstruction » illustrera le procédé qu’utilise Overhoff. « Le trente-neuvième signe du Livre des transformations est Jian, l’obstruction, en haut, l’insondable, l’eau, en bas, la tranquillité, la montagne. Le jugement dit : Obstruction : Profitable le Sud-Ouest Pas profitable le Nord-Est Profitable d’aller voir quelqu’un d’envergure Présage d’ouverture 211 […] Le Sud-Ouest est la région de la retraite, le Nord-Est la région de l’avancée. » 212 Ces lignes sont littéralement tirées du Livre des transformations. Overhoff exploite cet hexagramme parlant d’un « grand homme » dans la traduction de Wilhelm („den großen Mann“) pour camoufler les révélations sur les décisions de Gengis Khan et la tactique qui doit en découler pour la résistance. Le moine poursuit sa missive par ces mots, qui sont de sa 209 Cyrille J.-D. Javary/Pierre Faure : Yi Jing. Le Livre des Changements, Paris, 2002, p. 36. 210 Cf. ibid., p. 35. 211 Traduction du « Jugement » tirée de : Cyrille J.-D. Javary/Pierre Faure : Yi Jing. Le Livre des Changements, Paris, 2002, p. 625. 212 „Das neununddreißigste Zeichen des Buches der Wandlungen ist Giän, das Hemmnis oben Kan, das Abgründige, das Wasser, unten Gen, das Stillehalten, der Berg. Das Urteil lautet: Das Hemmnis: Fördernd ist der Südwesten. Nicht fördernd ist der Nordosten. Fördernd ist es, den großen Mann zu sehen. Beharrlichkeit ist von Heil. […] Südwesten ist die Gegend des Rückzuges, Nordosten die Gegend des Vordringens.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 296). 238

Chapitre IV Au centre<br />

25 Lettre<br />

Exergue : De datation incertaine, du campement <strong>de</strong> Gengis Khan aux abords <strong>de</strong> l’Hindoukouch<br />

ou en Afghanistan, adressée aux mouvements <strong>de</strong> résistance dans la Chine du<br />

nord, dissimulée sous l’apparence d’une étu<strong>de</strong> consacrée au Yi Jing, le Livre <strong>de</strong>s<br />

transformations. L’expéditeur doit donc appartenir aux cercles taoïstes réunis<br />

autour <strong>de</strong> Tch’ang-tch’ouen, appelé auprès du Khan pour le conseiller mais surtout<br />

pour lui révéler le secret <strong>de</strong> la longévité.<br />

Éléments <strong>de</strong> datation<br />

La présence <strong>de</strong> Tch’ang-tch’ouen, religieux taoïste, alchimiste et astrologue chinois au<br />

campement <strong>de</strong> Gengis Khan permet <strong>de</strong> dater cette lettre <strong>de</strong> 1222. Grousset précise dans<br />

L’Empire <strong>de</strong>s steppes 206 que Gengis Khan séjourna assez longtemps en Afghanistan, au sud<br />

<strong>de</strong> l’Hindou-kouch, où en mai 1222 il reçut Tch’ang-tch’ouen. Une autre rencontre eu lieu en<br />

septembre <strong>de</strong> la même année, au sud <strong>de</strong> Balkh, au pied <strong>de</strong> l’Hindou-kouch, précise Grousset<br />

dans Le Conquérant du mon<strong>de</strong>. 207 Le religieux prit définitivement congé <strong>de</strong> Gengis Khan au<br />

printemps 1223.<br />

Le tableau est incompréhensible sans la connaissance du Yi Jing. Le Yi Jing est<br />

considéré par les Chinois comme le plus antique monument <strong>de</strong> leur littérature. Richard<br />

Wilhelm, dans son introduction à sa traduction du Yi Jing, qu’Overhoff a utilisée comme il<br />

l’indique dans la postface, déclarait :<br />

Le Livre <strong>de</strong>s Transformations, en chinois Yi Jing, appartient incontestablement aux livres les<br />

plus importants <strong>de</strong> la littérature universelle. Ses origines remontent à une antiquité mythique. Il<br />

occupe aujourd’hui encore [dans les années vingt] l’attention <strong>de</strong>s plus éminents lettrés <strong>de</strong> la<br />

Chine. Presque tout ce qui a été pensé <strong>de</strong> grand et d’essentiel pendant plus <strong>de</strong> 3000 ans d'histoire<br />

<strong>de</strong> la Chine, ou bien a été inspiré par ce livre, ou bien, inversement, a exercé une influence sur<br />

son interprétation, au point que l’on peut affirmer en toute tranquillité que le Yi Jing contient le<br />

fruit <strong>de</strong> la sagesse la plus achevée <strong>de</strong> plusieurs millénaires. Il ne faut donc pas s’étonner si, en<br />

outre, les <strong>de</strong>ux branches <strong>de</strong> la philosophie chinoise, le confucianisme et le taoïsme, ont ici leurs<br />

communes racines. 208<br />

206 René Grousset : L’Empire <strong>de</strong>s steppes, Paris, 1939, p. 305.<br />

207 René Grousset : Le Conquérant du mon<strong>de</strong>. Vie <strong>de</strong> Gengis Khan, Paris, 1944, p. 329.<br />

208 „Das Buch <strong>de</strong>r Wandlungen, chinesisch I Ging, gehört unstreitig zu <strong>de</strong>n wichtigsten Büchern <strong>de</strong>r<br />

Weltliteratur. Seine Anfänge reichen in mythisches Altertum zurück. Bis auf <strong>de</strong>n heutigen Tag beschäftigt es die<br />

be<strong>de</strong>utendsten Gelehrten Chinas. Fast alles, was in <strong>de</strong>r über 3000 Jahre alten chinesischen Geschichte an großen<br />

und wichtigen Gedanken gedacht wur<strong>de</strong>, ist teils angeregt durch dieses Buch, teils hat es rückwirkend auf die<br />

Erklärung <strong>de</strong>s Buches Einfluß ausgeübt, so daß man ruhig sagen kann, daß im I Ging die reifste Weisheit von<br />

Jahrtausen<strong>de</strong>n verarbeitet ist. So ist es <strong>de</strong>nn auch kein Wun<strong>de</strong>r, daß bei<strong>de</strong> Zweige <strong>de</strong>r chinesischen Philosophie,<br />

<strong>de</strong>r Konfuzianismus und <strong>de</strong>r Taoismus, ihre gemeinsamen Wurzeln hier haben.“ (I Ging. Das Buch <strong>de</strong>r<br />

Wandlungen. Erstes und zweites Buch. Aus <strong>de</strong>m chinesischen ver<strong>de</strong>utscht und erläutert von Richard Wilhelm,<br />

Düsseldorf/Cologne, 1924, p. III).<br />

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