1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine
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nostalgie de la beauté, de la révélation de l’amour. 197 Overhoff a choisi de représenter les deux faces d’une même civilisation et avec le personnage de Rûmî représentant d’une spiritualité tolérante et ouverte, il marque l’opposition avec le sort qui est fait au jeune prince David. Le disciple, sans nom, apparaissant dans le tableau doit être Burhân-od-Dîn Muhaqqîq Trimidhî. Il fut l’élève de Baha-al-Dîn (le père) et revint à Konya après la mort de celui-ci et resta auprès de Djalâl-od-Dîn et devint son maître spirituel, ainsi que le lui ordonne Baha-al- Dîn dans le tableau. 198 Cette initiation à la magie blanche de la mystique est construite autour du prologue de Mathnawî, qui prend la flûte de roseau pour emblème de l’âme du mystique se lamentant d’être éloignée du monde spirituel. Voici ce prologue : Écoute la flûte de roseau raconter une histoire et se lamenter de la séparation : Depuis qu’on m’a coupée de la jonchaie, ma plainte fait gémir l’homme et la femme. Je veux un cœur déchiré par la séparation pour y verser la douleur du désir. Quiconque demeure loin de sa source aspire à l’instant où il lui sera réuni. Moi, je me suis plaint en toute compagnie, m’associant à ceux qui se réjouissent comme à ceux qui pleurent. Chacun m’a compris selon son cœur ; mais nul n’a cherché mes secrets. Mon secret, pourtant, n’est pas loin de ma plainte, mais l’oreille et l’œil ne savent le percevoir. Le corps n’est pas voilé à l’âme, ni l’âme au corps ; cependant nul ne peut voir l’âme. C’est du feu, non du vent, le son de la flûte : que s’anéantisse celui à qui manque cette flamme ! Le feu de l’Amour est dans le roseau, l’ardeur de l’Amour fait bouillonner le vin. La flûte est la confidente de celui qui est séparé de l’Ami ; ses accents déchirent nos voiles. 199 Les voiles dont il est question dans le prologue rappellent le rideau qui se déchire à la fin des deux tableaux. Ils symbolisent l’obtention de la vérité par le cheminement de la connaissance, et la séparation entre le monde des hommes et le monde de l’esprit. Overhoff introduit le prologue de Matnawi sur deux plans : celui de la mise en scène et celui des paroles du dialogue. La mise en scène du tableau s’inspire de ce prologue en incorporant certains de ses éléments constitutifs : Rûmî joue de la flûte, à côté d’une source pendant que son père et le disciple s’entretiennent. Cette source représente la source à laquelle quiconque aspire à être réuni s’il en est séparé. On retrouve dans les propos échangés entre le maître, son disciple et son fils des références au prologue, faisant intervenir là aussi la flûte 197 Cf. Miguel Cruz Hernández : Histoire de la pensée en terre d’Islam, Paris, 2005, pp. 754- 755. 198 Cf. Eva de Vitray-Meyerovitch : Rûmî et le soufisme, Paris, 1977, p. 11. 199 Mathnawî, I. I S. Cité dans Eva de Vitray-Meyerovitch : Rûmî et le soufisme, Paris, 1977, p 44. „Hörst du die Flötentöne gemischt mit dem Rauschen der Quelle? Da ist Frage und Antwort in einem.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 283). 235
symbolisant la séparation, 200 et la source symbolisant l’aspiration à la réunion. 201 C’est pour cette raison que le disciple reviendra à Konya auprès de Rûmî, après la nécessaire séparation. 202 En s’unissant, la source et la flûte apportent questions et réponses. 203 Dans le tableau souterrain, un jeune garçon est lui aussi initié. Malheureusement, c’est à ses dépens. Il doit apprendre à son corps défendant que la politique est affaire de soumission au plus fort, de compromis et que garder une âme pure ne se peut. Ce garçon, c’est le prince David de Géorgie, dont il avait été question au tableau 12, lors du récit de la défaite des Géorgiens face aux Mongols. 204 Alors que le disciple de Baha-al Din est élevé aux mystères de la mystique, le jeune David est contraint de signer sa soumission au sultan Kaïkobad sous la menace de la torture. Par peur que la Géorgie ne se soumette aux forces mongoles, le sultan seldjoucide veut garder le prince géorgien en otage. En un seul tableau, Overhoff applique sa théorie de l’idée d’une pluralité des réalités : les grands penseurs d’une culture ne sont pas incompatibles avec une politique menée sans scrupules et les philosophes ne sauraient être garants d’une politique « pure » ; sous le même monarque, on voit l’épanouissement de la mystique seldjoucide et de son système de répression politique, afin de protéger ses intérêts. Kaïkobad n’hésite pas à utiliser le prince David pour parer à une invasion mongole. Toutes les nuances de la politique, de la diplomatie sont ici évoquées, l’art de jouer avec les apparences, d’avancer ses pions sur l’échiquier international, les moyens de pression sur les individus. Le prince David découvre les rouages et les intrigues de l’art de la politique : la raison d’État qui justifie tout, le refus de toute responsabilité d’actes peu glorieux, l’importance de tromper les autres. 205 Les deux tableaux se terminent par les mêmes mots : „Gelobt sei der Allmächtige“ « Loué soit le seigneur » : au nom de Dieu sont appliquées les politiques et les philosophies les plus différentes et les plus opposées. 200 „Weshalb muß ich immer wieder klagen über den Schmerz der Trennung wie die Flöte, aus ihrem Röhricht abgeschnitten, klagt?“ ; „Die Flöte ist der Gefährte der Glücklichen und der Unglücklichen.“ ; „Dann wird die Flöte der Gefährte dessen sein, der vom Geliebten getrennt ist.“ (Le Monde avec Gengis Khan, pp. 286-288). 201 „Die Stimme der Quelle und die Stimme der Flöte durchdringen sich erst für den Heimkehrenden.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 285). 202 „Doch findet den Rückweg nur, wer sich auf den Weg gemacht hat.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 286). 203 „Hörst du die Flötentöne gemischt mit dem Rauschen der Quelle? Da ist Frage und Antwort in einem.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 283). 204 „Der Prinz David als Geisel in Konia“ ; „Der Prinz gefangen bei den Seldschuken.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 150 et p. 152). 205 „Die Wohlfahrt unseres Reiches, unseres großen Sultan Káikobad gebietet, daß Ihr Euren Sinn bald ändert [ne pas essayer de fuir de Konya] oder wenigstens unterschreibt. Denn Euch lange gefangen zu halten, empfiehlt sich nicht, es fiele auf, der so wichtige Anschein der Freiwilligkeit ginge verloren. Versteht doch, nicht wir haben dies zu Eurem Tort ersonnen, die Lage zwingt uns.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 287). 236
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Khan, p. 150 et p. 152).<br />
205 „Die Wohlfahrt unseres Reiches, unseres großen Sultan Káikobad gebietet, daß Ihr Euren Sinn bald än<strong>de</strong>rt [ne<br />
pas essayer <strong>de</strong> fuir <strong>de</strong> Konya] o<strong>de</strong>r wenigstens unterschreibt. Denn Euch lange gefangen zu halten, empfiehlt<br />
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