1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine
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Le pape a manifestement ordonné que la lettre soit rendue publique partout dans le monde. Dans le plus lointain des pays d’Orient, aux lisières de l’empire de Chine, un nouveau roi David aurait surgi, héros plus puissant encore que son homonyme. Il serait le petit-fils ou l’arrière-petit-fils du Prêtre Jean. Il aurait appelé un peuple soumis depuis longtemps à se révolter contre le Roi des Rois, le grand souverain musulman de la Perse ; il aurait vaincu le tyran sous l’étendard de la croix et l’aurait emmené en captivité. Sur quoi suivit une longue liste de villes que David a conquises, des mos imprononçables dont je n’ai pu me souvenir. 14 Ces événements, poursuit le narrateur après avoir rapporté d’autres exploits 15 de ce libérateur, auraient été révélés par les chrétiens libérés par ce nouveau David, qui les auraient relatés aux croisés. Overhoff expose ensuite la vision qu’aurait eue le pape Honorius III de ce héros : « Ce roi David serait envoyé par le Ciel, un homme soumis à Dieu et à l’Église. » 16 Voilà Gengis Khan transformé en chrétien venu sauver la chrétienté. Grâce à lui, une nouvelle croisade unira les forces de l’Occident sous la direction de Bonvasier, « l’Occident tout entier avec le roi chrétien David va se mettre en marche, pour prendre les musulmans en tenailles et les détruire ». 17 Dès cette première évocation, l’objectif d’Overhoff est dessiné : dépeindre un phénomène d’après la vision qu’en ont les différents peuples, et faire ressortir les conséquences qu’ils en tirent, ici l’espoir d’une victoire sur l’Islam. Le tableau 5, se déroulant en Syrie, au Krak des chevaliers, est en apparente contradiction avec le tableau 1, où les rumeurs parvenues à Londres provenaient des croisés d’Orient assiégeant Damiette. Damiette, située à 200 km du Caire, et le Krak des Chevaliers, près de Homs (Émèse) n’étaient éloignés que de 700 km. Pourtant, le chevalier-troubadour ne 14 „Offenbar hat der Papst angeordnet, daß der Brief überall in der Welt bekanntgegeben werde. Fern im fernsten Morgenland, am Rande des Reiches China, sei ein neuer König David erstanden, noch gewaltiger als Kriegsheld denn sein Namensvetter, ein Enkel oder Urenkel des christlichen Priesters Johannes. Der habe ein lange unterdrücktes Volk zum Kampf gegen den Cha-Chana, den mahometanischen Großkönig der Perser aufgerufen, den Tyrannen unter der Fahne des Kreuzes besiegt und in die Gefangenschaft weggeführt. Dann wurde eine lange Reihe von Städten hergezählt, welche David eroberte, zungenbrecherische Worte, die konnte ich nicht behalten.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 41). 15 „Der christliche König David nahm die Hauptstadt des Perserkönigs, da gab es fünfhundert Mahomerien, was wohl Kirchen der Ungläubigen sind, ebensoviele Schulen und noch mehr Klöster. […] Plötzlich war da noch ein mahometanischer Herrscher, Chavarism-San oder so ähnlich, gegen den mußte der starke David wieder zu Felde ziehen, obschon der Cha-Chana der Perser ja im Verlies hockte. Natürlich gewann der David. Und dann unterwarf sich ihm freiwillig der Kalif von Baghdad, der schon vierzig Jahre regiert. […] Der König David befreite christliche Gefangene und schenkte sie dem Kalifen. Der Kalif schenkte sie weiter an den Sultan von Babylonien, von da kamen die Befreiten zu den Kreuzfahrern, die Wahrheit der Erzählung bestätigend. […] Ja, es gab da noch viel in dem Brief, von den Georgiern, die mitbesiegt wurden, weil sie als Christen den Mahometanern geholfen. Und das Land Caswin war schon unterworfen, lehnte sich aber auf gegen David, den Enkel Johannis. Da wurde die Hauptstadt durch ein Wunder genommen und 80 000 Leute niedergemacht.“ (Le Monde avec Gengis Khan, pp. 41-42). 16 „Dieser König David sei vom Himmel gesandt, ein Mann, Gott und der Kirche gehorsam.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 42). 17 „[…] das ganze Abendland wird ausrücken, zusammen mit dem christlichen König David, die Muselmänner in die Zange zu nehmen und zu vernichten.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 43). 185
apporte pas les récits concernant le roi David ou le prêtre Jean. Il appelle les Mongols par leur nom et connaît leur chef, Gengis Khan (voir infra). Il en a une perception tout à fait différente, et beaucoup plus proche de la réalité que Jacques de Vitry. On peut invoquer deux raisons à cette divergence : d’une part le Krak des Chevaliers est plus proche des zones ravagées par les hordes mongoles, d’autre part, le chevalier du Krak n’est pas aveuglé par sa foi. Il n’est donc pas tenté de voir dans ce chef asiatique un personnage chrétien qui viendrait anéantir l’Islam. Il se pose en effet en défenseur de la culture islamique. Le dialogue mis en scène dans ce tableau reflète quelques-unes des idées qu’Overhoff exposait dans l’avant-propos du Monde avec Gengis Khan. Les deux commerçants incarnent la propagation des idées dans la pensée des hommes, avec les divergences qu’elles peuvent prendre. L’un des marchands, à l’esprit plus ouvert aux nouveautés, dit : « Depuis que Richard Cœur de Lion est parti pour la Terre sainte, le monde s’ouvre à nous. » L’autre lui rétorque : « Laisse-moi rire ! Nous avons ouvert nos portes à ce prétendu monde et ce qui rentre, ce sont des moulins à vent étrangers ! » 18 Outre la mention des moulins à vent – dont il était question dans l’avant-propos du roman –, ces propos reflètent la découverte de nouveaux horizons pour ceux qui sont en mesure d’appréhender les nouveaux enjeux apparus grâce aux Croisades et à la prise de Constantinople. Ces enjeux seront concrétisés dans une rêverie du premier marchand qui songe à étendre son rayon d’action en commerçant avec l’Orient, mais qui se sent aussi emporté par un nouvel élan, cette « agitation du cœur » qui, de tout temps, pousse les hommes à agir : « Il ne s’agit pas seulement de gagner de l’argent. Mener à bien une grande entreprise, seul, sans aide. » 19 Overhoff nous présente ici une concrétisation de ses remarques concernant les échanges entre Orient et Occident. Ces considérations avaient leur place dans ce tableau d’exposition de la nouvelle perception de l’Orient par l’Occident. 2 Japon, ville de Kamakoura 20 Sous-titre : Une mission échoue sans que le mot « non » soit prononcé Exergue : Saito, moine de la secte Zen, s’adresse à son hôte chinois, Chin-Tchi, moine de l’ordre de la discipline 18 „Seit Richard Löwenherz ins Heilige Land zog, eröffnet sich uns die Welt.“ – „Daß ich nicht lache! Wir haben unsere Tore dieser sogenannten Welt geöffnet und was hereinkommt, sind ausländische Windmühlen!“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 44). 19 „Es ist ja nicht nur das Geldverdienen. Einmal ein ganz großes Unternehmen allein durchführen ohne fremde Hilfe.“ (Le Monde avec Gengis Khan, p. 44). 20 Yoritomo Minamoto avait installé sa capitale à Kamakoura en 1185, lors de la mise en place du shôgunat qui allait durer jusqu’au XIV e siècle, avant que l’empereur ne retrouve sa puissance. 186
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19 „Es ist ja nicht nur das Geldverdienen. Einmal ein ganz großes Unternehmen allein durchführen ohne frem<strong>de</strong><br />
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