1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine
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Overhoff a choisi l’Angleterre comme cadre pour présenter la première perception <strong>de</strong>s<br />
Mongols en Occi<strong>de</strong>nt. La rumeur venant d’Égypte, il aurait pu se servir du siège <strong>de</strong> Damiette<br />
comme localisation. La lettre <strong>de</strong> Jacques <strong>de</strong> Vitry et le rapport du légat Pélage étant adressés<br />
au pape, il aurait pu prendre Rome. Mais cela aurait été aller contre la structure <strong>de</strong> l’ouvrage<br />
et la démarche d’Overhoff. Dans ce premier chapitre, Au bord <strong>de</strong> la sphère d’action, il voulait<br />
montrer la perception <strong>de</strong>s zones les plus éloignées <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> Gengis Khan. Il a donc<br />
choisi trois îles « <strong>de</strong>s bouts du mon<strong>de</strong> » ; c’est dans cette zone éloignée <strong>de</strong> la réalité <strong>de</strong> Gengis<br />
Khan que les rumeurs trouvaient leur meilleur terrain : c’est là que la distance entre réalité et<br />
les imaginations qu’elle suscite est la plus gran<strong>de</strong>.<br />
Il s’agit dans ce tableau d’un dialogue entre <strong>de</strong>ux marchands d’étoffes et <strong>de</strong> teintures<br />
lors d’un repas où le vin coule à flots. L’un <strong>de</strong>s marchands représente le conservatisme,<br />
prônant le protectionnisme (refus <strong>de</strong>s marchandises étrangères), ne jugeant la politique qu’à<br />
l’aune <strong>de</strong> son intérêt et voyant dans la possibilité d’une nouvelle croisa<strong>de</strong> la promesse<br />
d’affaires lucratives. Dès ce dialogue, Overhoff montre son art d’introduire <strong>de</strong>s vérités ou <strong>de</strong>s<br />
faits historiques dans son texte. Après avoir rapporté le contenu <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> Jacques <strong>de</strong><br />
Vitry, son personnage Eyre évoque une autre interprétation que celle <strong>de</strong> l’Église : celle <strong>de</strong>s<br />
Juifs, qui voyaient le Messie en ce roi David : « Ils croient qu’il vient pour les libérer, comme<br />
le fils <strong>de</strong>s peuples perdus, ils frappent dans leurs mains et sautillent dans les rues, ils se sont<br />
concertés pour lui envoyer <strong>de</strong>s vivres et <strong>de</strong>s armes. ». 10 Cette espérance <strong>de</strong>s juifs est consignée<br />
dans les Annales Marbacenses 11 et avait été étudiée par différents auteurs <strong>de</strong> la fin du XIX e<br />
siècle et du début du XX e , – par Ernst Kantorowicz 12 – dont Overhoff avait dû lire les<br />
travaux. 13 Une autre rumeur contenue dans les Annales est évoquée dans le dialogue du<br />
tableau 10 (voir infra).<br />
Perception <strong>de</strong>s Mongols<br />
Gengis Khan apparaît pour la première fois dans le récit du marchand. Le fait que son<br />
nom ne soit pas cité reflète bien qu’il est à prendre ici comme un phénomène, comme une<br />
entité dont la nature est encore floue :<br />
10 „Die glauben, er nahe zu ihrer Befreiung, als Sohn <strong>de</strong>r verloren gegangenen Stämme, die klatschen in die<br />
Hän<strong>de</strong> und hüpfen auf offener Straße, sie berieten, ihm Lebensmittel und Waffen zu schicken.“ (Le Mon<strong>de</strong> avec<br />
Gengis Khan, p. 43).<br />
11 Cf. Gian Andri Bezzola : Die Mongolen in abendländischer Sicht [1220-1270]. Ein Beitrag zur Frage <strong>de</strong>r<br />
Völkerbegegnungen, Berne/Munich, 1974, p. 34. Annales Marbacenses, in : Monumenta Germaniae historica,<br />
Scriptores XVII, Hanovre/Leipzig, 1826, pp. 142-180.<br />
12 „Die Ju<strong>de</strong>n aber, die ihrer Freu<strong>de</strong> über das Nahen König Davids freien Lauf ließen, ja ihm Waffen, Schwerter<br />
und Schil<strong>de</strong> zuführen wollten, […].“ (Ernst Kantorowicz : Kaiser Friedrich <strong>de</strong>r Zweite, Berlin, 1928, p. 503).<br />
13 Par exemple : Friedrich Zarncke : Der Priester Johannes. Abhandlungen <strong>de</strong>r phil. Klasse <strong>de</strong>r sächsischen<br />
Aka<strong>de</strong>mie <strong>de</strong>r Wissenschaften zu Leipzig, 7 et 8, Leipzig, 1879/1880 ; Harry Bresslau : Ju<strong>de</strong>n und Mongolen<br />
1241, in : Zeitschrift <strong>de</strong>r Geschichte <strong>de</strong>r Ju<strong>de</strong>n in Deutschland 1, Brunswick, 1887, pp. 99-102.<br />
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