1 couverture - Bibliothèques de l'Université de Lorraine
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attendent. Le conquérant ? Il est prêt, comme toujours, au nord, et presque tout le reste de l’Asie lui est déjà soumis ». 150 « Il est certes possible de pousser la Grande-Bretagne à se retirer sans violence, […] mais qu’apporterait une grève de la faim contre les gens aux nerfs solides, là-bas dans le nord, qui viennent juste d’écraser le peuple tibétain et sa culture comme une colonie de fourmis importunes? » 151 Il faut ajouter une dernière remarque concernant le contexte de la création du Monde avec Gengis Khan. Les troupes d’assaut soviétiques qui pénétrèrent en Allemagne en 1945 comptaient des Mongols parmi elles. La littérature nous le rappelle : dans le roman Les Eaux mêlées (prix Goncourt 1955) de Roger Ikor, un prisonnier français en Allemagne raconte ses rencontres avec les troupes russes juste après sa libération : « Enfin bref, continuait Fernand, les Popov nous ont rattrapés, c’étaient des tankistes. Pour ça, il faut être juste, ils ont été chics, ces Popov-là. […] Voilà qu’au bout de vingt ou trente kilomètres, on tombe sur des Mongols. Oh ! alors pardon, plus question de vodka ou de cigarettes avec ceux-là. Ils ont pris la charrette, puis aussi nos ceinturons. » 152 Ce sont ces troupes mongoles qui ont fait en grande partie régner la terreur dans l’Allemagne envahie. Les lecteurs d’Overhoff, pour qui ces souvenirs étaient encore très présents, assimilaient aisément péril mongol d’autrefois et menace soviétique contemporaine. VI L’œuvre VI.1 Présentation thématique « Son empire fut quatre ou cinq fois plus vaste que celui d’Alexandre, sept à huit fois plus vaste que celui de Napoléon », 153 rappelait Emmanuel Berl évoquant Gengis Khan. À sa mort, l’empire mongol s’étendait de la mer Caspienne à l’ouest jusqu’au Pacifique à l’est, jusqu’à l’Inde au sud et au plateau de Sibérie au nord, englobant la Transoxiane, l’empire Kin, la Perse, le Kharezm, les villes de Pékin, de Samarcande, de Boukhara, d’Hérat, de Nichapour. 154 L’empire créé par Gengis Khan et dont les successeurs allaient repousser les 150 „Was tun die Massen [les pauvres]? Sie warten. Auf den Eroberer? Er steht wie immer im Norden bereit, fast das ganze übrige Asien gehorcht ihm schon.“ (La Descente du Gange, p. 96). 151 „Gewaltlos mag man Großbritannien zum Weichen bringen [dans les affaires indiennes], […] was aber hülfe schon Hungerstreik gegen die Leute mit den starken Nerven droben im Norden, die eben das tibetische Volk zusamt seiner Kultur austreten wie einen Zug lästiger Ameisen?“ (Ibid., p. 110). 152 Roger Ikor : Les Eaux mêlées, Paris, 1955, p. 329. 153 Emmanuel Berl : Histoire de l’Europe, Paris, 1945, t. 1, p. 206. Krause exprime la même idée : „Die Eroberungszüge der Mongolen waren die weitgreifendsten und folgenschwersten der ganzen Weltgeschichte. Das Reich des Cingis Hân und Hubilai umfaßte wohl die Hälfte der gesamten damaligen Menschheit.“ Friedrich Ernst August Krause : Die Epoche der Mongolen. Ein Kapitel aus der Geschichte und Kultur Asiens, in : Mitteilungen des Seminars für Orientalische Sprachen zu Berlin 26/27, Erste Abteilung, Ostasiatische Studien, Berlin, 1924, p. 6. 154 Voir carte en annexe. 114
frontières jusqu’en Corée, jusqu’à la mer de Chine et jusqu’au cœur de l’Europe sur les rives de l’Adriatique, a de quoi fasciner : en l’espace d’une vingtaine d’années, au début du XIII e siècle, les jalons du plus grand empire ayant jamais existé ont été posés par la seule volonté d’un homme surgi de la steppe. Stefan Zweig a comparé les conquêtes de Gengis Khan aux prouesses des conquistadors portugais : « seule dans l’Histoire la conquête de toute l’Asie, de l’Inde et de la Russie par Gengis Khan me paraît comparable à cette expansion sans précédent de la volonté humaine. » 155 Aucun ouvrage traitant des relations entre Orient et Occident, sur le plan des idées, sur celui du commerce, et, plus généralement sur celui des relations qu’on appellerait aujourd’hui internationales, ne peut passer sous silence l’empire de Gengis Khan. Cet imperium ex machina, comme on pourrait l’appeler tant la soudaineté avec laquelle il a surgi est surprenante, a naturellement suscité l’intérêt de grands historiens orientalistes jusqu’au XX e siècle. En Allemagne, les spécialistes éminents contemporains d’Overhoff étaient Bertold Spuler et Erich Haenisch. La bibliographie de Spuler (1911-1990), qui occupa après la Seconde Guerre mondiale la chaire d’études islamiques à l’université de Hambourg, compte une quarantaine de monographies et de nombreux articles. Die Mongolen in Iran (Berlin, 1935) de Spuler fait toujours référence aujourd’hui, et est régulièrement réédité, 156 tout comme Die goldene Horde. Die Mongolen in Rußland 1223-1502, (Leipzig, 1943). 157 Overhoff a bénéficié des conseils de Spuler, le plus grand spécialiste allemand du monde mongol selon lui, lors de la rédaction de son Gengis Khan, pour ce qui est de la transcription des noms. 158 À Erich Haenisch, sinologue et mongoliste (1880-1966) revient le mérite d’avoir traduit en allemand Mangholun niuca tobca'an, sous le titre d’Histoire secrète des Mongols (Die geheime Geschichte der Mongolen) à Leipzig en 1941. Le traducteur français de l’Histoire secrète des Mongols, (d’après sa transcription chinoise Yuan-tch’ao piche), Paul Pelliot (1878-1945), est l’orientaliste et sinologue spécialiste de la Mongolie du 155 „[…] daß eine winzige Nation […] mit einer Handvoll klägliche Schiffe erst ganz Indien, halb Afrika und dieses unabsehbare Brasilien sich eroberte, und mit Bewunderung träumt man diesen kühnen Konquistadoren nach, die […] ein Reich eroberten, das tausendmal größer war als ihre eigene Heimat: nur die Eroberung ganz Asiens und Indiens und Rußlands durch Dschingis Kahn scheint mir in der Geschichte dieser beispiellosen Expansion menschlichen Willens vergleichbar.“ (Stefan Zweig : Begegnungen mit Menschen, Büchern, Städten, Berlin, 1955, p. 277). 156 La dernière réédition date de 1985. 157 La dernière réédition date de 1965. Autres ouvrages de Bertold Spuler : Die Mongolenzeit, Wissenschaftliche Editionsgesellschaft, Berlin, 1948, traduit en français sous le titre Histoire des Mongols, Paris, 1961 ; Geschichte der Mongolen nach östlichen und europäischen Zeugnissen des 13. und 14. Jahrhundert, Geschichte der islamischen Lände. Die Mongolenzeit, Cologne, 1953. 158 Bertold Spuler avait écrit une recension sur La Trahison d’Afschin, parue en 1951 dans la Zeitschrift der deutschen Morgenländischen Gesellschaft, n° 101, p. 405. Après des critiques portant sur la transcription des noms utilisée dans le roman et le manque de références à certaines études, Spuler conclut : „Gerade weil ich die behandelte Zeit sehr gut kenne, habe ich das Buch mit besonderer Anteilnahme gelesen. Ich möchte wünschen, dass alle historischen Romane bei der Sichtung des Materials so sorgfältig angelegt wären, wie das bei Overhoff der Fall ist. Dann wird auch der Historiker ihnen ihre Berechtigung in ihrem Rahmen nicht absprechen können.“ 115
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« Son empire fut quatre ou cinq fois plus vaste que celui d’Alexandre, sept à huit fois<br />
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la Perse, le Kharezm, les villes <strong>de</strong> Pékin, <strong>de</strong> Samarcan<strong>de</strong>, <strong>de</strong> Boukhara, d’Hérat, <strong>de</strong><br />
Nichapour. 154 L’empire créé par Gengis Khan et dont les successeurs allaient repousser les<br />
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das ganze übrige Asien gehorcht ihm schon.“ (La Descente du Gange, p. 96).<br />
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schon Hungerstreik gegen die Leute mit <strong>de</strong>n starken Nerven droben im Nor<strong>de</strong>n, die eben das tibetische Volk<br />
zusamt seiner Kultur austreten wie einen Zug lästiger Ameisen?“ (Ibid., p. 110).<br />
152 Roger Ikor : Les Eaux mêlées, Paris, 1955, p. 329.<br />
153 Emmanuel Berl : Histoire <strong>de</strong> l’Europe, Paris, 1945, t. 1, p. 206. Krause exprime la même idée : „Die<br />
Eroberungszüge <strong>de</strong>r Mongolen waren die weitgreifendsten und folgenschwersten <strong>de</strong>r ganzen Weltgeschichte.<br />
Das Reich <strong>de</strong>s Cingis Hân und Hubilai umfaßte wohl die Hälfte <strong>de</strong>r gesamten damaligen Menschheit.“ Friedrich<br />
Ernst August Krause : Die Epoche <strong>de</strong>r Mongolen. Ein Kapitel aus <strong>de</strong>r Geschichte und Kultur Asiens, in :<br />
Mitteilungen <strong>de</strong>s Seminars für Orientalische Sprachen zu Berlin 26/27, Erste Abteilung, Ostasiatische Studien,<br />
Berlin, 1924, p. 6.<br />
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