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Les Constructions clivées en ancien français et en moyen ... - ERSS

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<strong>Les</strong> <strong>Constructions</strong> <strong>clivées</strong> <strong>en</strong> anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> <strong>et</strong> <strong>en</strong> moy<strong>en</strong> <strong>français</strong><br />

Magali Rouquier<br />

Université de Toulouse-Le Mirail<br />

Romania 125, 2007, pp. 167-212.<br />

Introduction<br />

Le terme de « clivée, clivage, phrase clivée », désigne le satut particulier des suj<strong>et</strong>s <strong>et</strong> des<br />

complém<strong>en</strong>ts placés <strong>en</strong>tre c’est <strong>et</strong> qu- dans des exemples comme c’est Luc qui a volé mon stylo, c’est<br />

mon stylo que Luc a volé. <strong>Les</strong> élém<strong>en</strong>ts constitutifs de la séqu<strong>en</strong>ce clivée sont c’est X qu- +Verbe.<br />

C’est désigne toutes les réalisations de être (est, fu, estoit), car assez longtemps le verbe est resté<br />

variable <strong>en</strong> temps. C’est n’est pas considéré comme le verbe recteur, mais comme un auxiliaire de<br />

« dispositif » clivé. X représ<strong>en</strong>te l’élém<strong>en</strong>t clivé, il constitue la rection du verbe <strong>et</strong> il est séparé du reste<br />

de la construction verbale. Qu- désigne les différ<strong>en</strong>tes formes du pronom relatif (qui, que, dont…).<br />

Verbe représ<strong>en</strong>te le verbe recteur de la clivée <strong>et</strong> ses élém<strong>en</strong>ts régis (à l’exception du terme clivé). La<br />

construction c’est X qu- + Verbe est attestée dès l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> à la fin du 12 ème siècle :<br />

De monseignor Yvain, ce cuit,<br />

Avez bi<strong>en</strong> oï parler tuit ;<br />

Et ce est il qui me requiert. (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Chevalier au Lion v. 2131)<br />

L’objectif de c<strong>et</strong> article est de voir si ces constructions <strong>en</strong> c’est X que relèv<strong>en</strong>t de la même syntaxe que<br />

les <strong>clivées</strong> du <strong>français</strong> moderne <strong>et</strong> d’<strong>en</strong> r<strong>et</strong>racer l’historique.<br />

La construction clivée n’est pas id<strong>en</strong>tifiée <strong>en</strong> tant que telle dans les grammaires de l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>, ce<br />

qui r<strong>en</strong>d difficile l’établissem<strong>en</strong>t de critères perm<strong>et</strong>tant d’id<strong>en</strong>tifier la clivée <strong>et</strong> de r<strong>et</strong>racer l’historique<br />

de la construction. La grammaire de Foul<strong>et</strong> (1919), ne m<strong>en</strong>tionne pas la construction 1 . <strong>Les</strong> <strong>clivées</strong> ne<br />

sont pas référ<strong>en</strong>cées non plus dans les grammaires plus réc<strong>en</strong>tes de J<strong>en</strong>s<strong>en</strong> (1990) ou Buridant (2000).<br />

Marchello-Nizia (1997) signale les constructions <strong>en</strong> c’est X que, mais plusieurs types sont<br />

représ<strong>en</strong>tés : on y trouve les constructions de type « c’est une belle fleur que la rose » <strong>et</strong> les <strong>clivées</strong>.<br />

Par ailleurs, il existe peu d’études diachroniques évoquant la question des <strong>clivées</strong>. Ritchie (1907),<br />

Kunstmann (1990) Muller (2003) donn<strong>en</strong>t quelques indications <strong>et</strong> des relevés.<br />

Pour le <strong>français</strong> moderne, la description des <strong>clivées</strong> se fonde sur des notions à la fois pragmatiques <strong>et</strong><br />

morpho-syntaxiques. Mais les marques morpho-syntaxiques ne sont pas toujours explicites <strong>et</strong> ne<br />

perm<strong>et</strong>t<strong>en</strong>t pas toujours de distinguer ces constructions d’autres qui ont des réalisations<br />

syntagmatiques proches (relatives, « nexus », conjonctives). Pour recueillir des <strong>clivées</strong> dans des textes<br />

d’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> <strong>et</strong> de moy<strong>en</strong> <strong>français</strong>, il est nécessaire de combiner plusieurs ordres de critères. Mais<br />

il faut se résigner à ne pas toujours pouvoir fournir des interprétations univoques : certains exemples<br />

peuv<strong>en</strong>t être classés dans plusieurs rubriques. Cela complique d’autant la recherche des bonnes<br />

datations pour faire l’histoire des <strong>clivées</strong> <strong>en</strong> anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>. Nous avons donc peu de certitudes quant<br />

à l’id<strong>en</strong>tification de la clivée <strong>en</strong> anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>. Malgré ces obstacles, j’essaierai de proposer une<br />

analyse syntaxique des <strong>clivées</strong> de l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> <strong>et</strong> du moy<strong>en</strong> <strong>français</strong> <strong>et</strong> d’<strong>en</strong> proposer une<br />

diachronie. J’étudierai les données dont je dispose <strong>en</strong> me situant dans une large synchronie : je<br />

pr<strong>en</strong>drai <strong>en</strong> compte les textes d’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>, depuis le X e siècle jusqu’au moy<strong>en</strong> <strong>français</strong> <strong>en</strong> 1500 2 .<br />

Des tableaux récapitulatifs proposeront des « tranches » diachroniques.<br />

1 Bi<strong>en</strong> évidemm<strong>en</strong>t, on ne parle pas de « clivée » dans c<strong>et</strong>te période, j’ai regardé l’index <strong>en</strong> cherchant des r<strong>en</strong>vois<br />

de type « mise <strong>en</strong> relief, mise <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce ».<br />

2<br />

Je me suis servi de la base de données ARTFL disponible sur Intern<strong>et</strong> (http ://www.<br />

lib.uchicago.edu/efts/ARTFL/projects/TLA/). C<strong>et</strong>te base de données de trois millions de mots <strong>en</strong>viron, compr<strong>en</strong>d<br />

des textes d’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> depuis 1150 <strong>en</strong>viron, jusqu’au moy<strong>en</strong> <strong>français</strong>. J’ai égalem<strong>en</strong>t utilisé la base de<br />

données de <strong>français</strong> médiéval (BFM) élaborée par l’ENS-LSH qui conti<strong>en</strong>t trois millions de mots <strong>en</strong>viron.<br />

Certains exemples de moy<strong>en</strong> <strong>français</strong> provi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t de la base de données du DMF (Dictionnaire du moy<strong>en</strong><br />

<strong>français</strong>, ATILF). C<strong>et</strong>te base de six millions de mots <strong>en</strong>viron, conti<strong>en</strong>t des textes de la période 1350 à 1500. La<br />

bibliographie des textes du DMF ne précise pas l’édition de texte utilisée.


Je ferai l’hypothèse que la clivée est une tournure anci<strong>en</strong>ne, attestée dès le XII e siècle. Dans les <strong>clivées</strong><br />

de l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>, l’élém<strong>en</strong>t clivé est souv<strong>en</strong>t un nom propre, ou un nom fortem<strong>en</strong>t déterminé déjà<br />

m<strong>en</strong>tionné dans le contexte précéd<strong>en</strong>t.<br />

L’article s’organise ainsi : dans § 1, j’examinerai les critères d’analyse utilisés, dans § 2 les tournures<br />

autres que les <strong>clivées</strong> ayant des réalisations syntagmatiques apparemm<strong>en</strong>t aux <strong>clivées</strong>, dans § 3 les<br />

<strong>clivées</strong>, dans § 4 les facteurs discursifs <strong>et</strong> syntaxiques qui favoris<strong>en</strong>t l’interprétation d’un énoncé<br />

comme étant une clivée.<br />

1. Critères d’analyse<br />

1. 1. Autonomie de X<br />

Dans la construction clivée c’est X que-Verbe, X l’élém<strong>en</strong>t régi par le verbe est placé <strong>en</strong>tre c’est <strong>et</strong><br />

que, il est séparé du reste de la construction verbale. C’est a perdu une partie de ses propriétés<br />

verbales, il n’est pas le verbe constructeur de la séqu<strong>en</strong>ce, sa flexion <strong>en</strong> temps, mode <strong>et</strong> personne est<br />

fortem<strong>en</strong>t réduite. Pour les énoncés (1) <strong>et</strong> (2) :<br />

(1) c’est Athon qui est v<strong>en</strong>u<br />

(2) c’est Athon que je vois v<strong>en</strong>ir<br />

<strong>en</strong> (1) Athon est suj<strong>et</strong> de v<strong>en</strong>ir, <strong>en</strong> (2) Athon est obj<strong>et</strong> de voir. La séqu<strong>en</strong>ce Qu + Verbe est constituée<br />

du verbe recteur <strong>et</strong> de sa place de rection laissée vide. Le dispositif de clivage n’affecte pas les<br />

relations rectionnelles qu’<strong>en</strong>tr<strong>et</strong>i<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t l’élém<strong>en</strong>t clivé <strong>et</strong> le verbe recteur : nous observons les mêmes<br />

relations rectionnelles <strong>en</strong>tre Athon <strong>et</strong> v<strong>en</strong>ir ou Athon <strong>et</strong> voir dans le dispositif non clivé Athon est v<strong>en</strong>u,<br />

je vois v<strong>en</strong>ir Athon <strong>et</strong> dans le dispositif clivé. C<strong>et</strong>te analyse suppose qu’à la clivée doit correspondre<br />

une « phrase canonique » 3 . Qu- est un élém<strong>en</strong>t qui ne joue aucun rôle dans le syntagme verbal qui suit.<br />

C<strong>et</strong>te propriété est bi<strong>en</strong> connue : à propos d’exemples comme c’est Luc qui a volé mon stylo, c’est<br />

mon stylo que Luc a volé, Jones (1996 : 526), considère que le terme Qu- ne sert pas à id<strong>en</strong>tifier un<br />

stylo particulier ou à faire un comm<strong>en</strong>taire sur Luc. Autrem<strong>en</strong>t dit, la séqu<strong>en</strong>ce Qu- + Verbe ne<br />

fonctionne pas comme une relative. Muller (2003) donne la même caractéristique : « la subordonnée<br />

au contraire <strong>et</strong> à l’opposé des relatives, n’a pas de fonction de caractérisation de l’antécéd<strong>en</strong>t ». Pour<br />

lui, « c<strong>et</strong>te abs<strong>en</strong>ce de caractérisation est un critère fondam<strong>en</strong>tal. » L’élém<strong>en</strong>t X dans la clivée est<br />

autonome, la partie Qu- + Verbe n’est pas liée à X.<br />

J’utiliserai le critère de l’autonomie de X pour différ<strong>en</strong>cier les types clivés des types non-clivés <strong>en</strong><br />

anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> <strong>en</strong> me fondant sur la description proposée par Blanche-B<strong>en</strong>v<strong>en</strong>iste <strong>et</strong> Rouquier (<strong>en</strong><br />

cours) pour le <strong>français</strong> contemporain 4 <strong>et</strong> pour l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>. Dans le type clivé, le terme X peut<br />

apparaître <strong>en</strong> finale absolue, il est autonome <strong>et</strong> forme un constituant, indép<strong>en</strong>damm<strong>en</strong>t de la partie Qu-<br />

+ Verbe qui <strong>en</strong> forme un autre. La séqu<strong>en</strong>ce Qu- + Verbe n’est pas analysable comme modifieur.<br />

L’autonomie de X se vérifie par le fait qu’il peut figurer <strong>en</strong> finale d’énoncé comme dans (3) :<br />

(3) Lors a veüe une tor nueve<br />

Et un blanc chastel aparant ;<br />

De celle part se trait errant,<br />

Car il cuide que ce soit cil<br />

Que cil li anseigna. « C’est il, »<br />

Fait il, <strong>et</strong> lores esperone. (Deuxième continuation de Perceval v. 21076)<br />

La séqu<strong>en</strong>ce c’est il Qu + Verbe de (4) peut s’interpréter comme une clivée :<br />

3 Voir, par exemple Lambrecht (2001, p. 493) : dans la lecture « clivée » de It’s the country that suits her best<br />

« the meaning of the s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>ce is equival<strong>en</strong>t to that of the canonical s<strong>en</strong>t<strong>en</strong>ce « The country suits her best ». Dans<br />

ce travail, je ne parlerai pas de phrase canonique, mais de construction verbale. Cela étant, une clivée peut ne pas<br />

avoir de version « canonique », par ex. : C’est pas parce que c’est pas <strong>en</strong> verre que tu vas pas le casser. (Oral,<br />

Rouquier)<br />

4 Avec une att<strong>en</strong>tion particulière portée au <strong>français</strong> parlé


(4) De mon seignor Yvain, ce cuit,<br />

avez bi<strong>en</strong> oï parler tuit ;<br />

Et ce est il qui me requiert (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Chevalier au Lion v. 2131)<br />

Le pronom il peut apparaître <strong>en</strong> finale absolue, <strong>et</strong> forme donc un constituant autonome. Il peut être<br />

suivi de la séqu<strong>en</strong>ce Qu- + Verbe <strong>et</strong> s’analyse comme clivé avec ce découpage <strong>en</strong> constituants :<br />

(4’) [ce est il] [qui me requiert]<br />

Dans la construction non clivée c’est X que-Verbe, le terme X est lié à la partie Qu + Verbe avec<br />

laquelle il ne forme qu’un constituant : la séqu<strong>en</strong>ce Qu- + Verbe est un modifieur de l’élém<strong>en</strong>t X.<br />

Dans l’énoncé (5) qui comporte un superlatif, le terme X ne peut apparaître <strong>en</strong> finale absolue, il ne<br />

forme pas à lui seul un constituant syntaxique autonome <strong>et</strong> le découpage <strong>en</strong> constituants n’est pas<br />

id<strong>en</strong>tique à (4’) :<br />

(5) La roïne <strong>en</strong> fu lie, qui molt s’<strong>en</strong> vaut p<strong>en</strong>er,<br />

Car c’est la ri<strong>en</strong>s el siecle qu’ele pot plus amer (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre br. 1, v. 532)<br />

1. 2. Critère morphologique<br />

La place de la préposition, devant X ou devant Qu- est utilisé comme critère morpho-syntaxique pour<br />

différ<strong>en</strong>cier la clivée de la relative. C’est un critère classique. Je pr<strong>en</strong>ds ici comme point d’appui<br />

Muller (2003). Dans une construction prépositionnelle avec une « flexion sur le connecteur » la partie<br />

Qu- + Verbe est analysée comme une relative : C’est Montfleury, à qui on fait des misères. (cit.<br />

Muller), tandis qu’une construction avec une « flexion » sur le terme « antécéd<strong>en</strong>t » <strong>en</strong>traîne une<br />

interprétation clivée : C’est à Montfleury qu’on fait des misères (cit. Muller). Ce critère<br />

morphologique <strong>en</strong>traîne des conséqu<strong>en</strong>ces pour l’analyse diachronique de la clivée : Muller distingue<br />

ainsi trois types de <strong>clivées</strong> qu’il étiqu<strong>et</strong>te diachroniquem<strong>en</strong>t. Le type « moderne » dans lequel « la<br />

fonction spécifique n’est marquée que dans le nom antécéd<strong>en</strong>t : c’est à ma mère que tu as parlé »,<br />

s’oppose à un type « anci<strong>en</strong> » où la « fonction spécifique n’est marquée que dans le connecteur : c’est<br />

ma mère à qui tu as parlé ». Le type « redondant » où la « fonction spécifique est marquée deux fois :<br />

c’est ma mère à qui tu as parlé » est plus tardif selon Muller. La diachronie des <strong>clivées</strong> se<br />

caractériserait par le passage d’une « focalisation étroite » sur le terme nominal « concr<strong>et</strong> » (c’est le<br />

type anci<strong>en</strong> de la clivée) à une focalisation large, « fonctionnelle <strong>et</strong> plutôt métalinguistique » (c’est le<br />

type moderne de la clivée).<br />

1. 3. Critère anaphorique<br />

Kunstmann (1991, p. 229 ss.) fait de la valeur anaphorique ou cataphorique de ce un critère qui perm<strong>et</strong><br />

de distinguer la clivée de la relative : « Dans ce type de séqu<strong>en</strong>ce, ce, cataphorique, annonce la relative<br />

qui suit ; il forme avec elle l’élém<strong>en</strong>t thématique de l’énoncé (…) Ainsi la phrase c’estoit Lancelos<br />

dont il parloit a pour présupposition il parlait de quelqu’un <strong>et</strong> comme thème ce dont il parlait ;<br />

Lancelos est le rhème. » Ce critère est utilisé par Muller (2003). La clivée ne se développerait qu’avec<br />

la valeur cataphorique de ce, <strong>et</strong> la relative avec la valeur anaphorique de ce. Dans (6) :<br />

(6) A sa soeur l’a moustré au doi,<br />

belem<strong>en</strong>t li dist <strong>en</strong> secroi :<br />

« Ce est Athes que la voi,<br />

veez com broche a cel tornoi ! (...) » (Thèbes v. 4684)<br />

Ce serait anaphorique 5 , <strong>et</strong> l’énoncé n’est pas une clivée selon Muller. La valeur anaphorique de ce<br />

pousserait l’interprétation de c’est N qu- + Verbe vers une construction à valeur prés<strong>en</strong>tative. En<br />

revanche, les exemples (7) (8) où ce aurait une valeur cataphorique sont analysables comme des<br />

<strong>clivées</strong> :<br />

5 Ici, ce serait plutôt un déictique.


(7) Seingnors, f<strong>et</strong> il, ce sont mi oir<br />

que vous veïstes ci er soir. (Thèbes v. 1021)<br />

(8) Et sachiés que bi<strong>en</strong> vous perchur<strong>en</strong>t v<strong>en</strong>ir, car c’est leur chastel que vous veïstes sur celle haulte<br />

roche avise que vous veistes a destre, (...) (Ysaÿe le Triste § 493)<br />

Il est néanmoins délicat de manipuler les différ<strong>en</strong>ces <strong>en</strong>tre (6) <strong>et</strong> (7). Il est tout à fait possible<br />

d’attribuer à ce une valeur anaphorique dans ces deux exemples. Dans (6) il est fait auparavant<br />

m<strong>en</strong>tion d’un combat <strong>en</strong>tre Athon <strong>et</strong> Garsy, Ysmaine reconnaît Athon à son emblème. Dans (7), le roi<br />

prés<strong>en</strong>te ses filles à des chevaliers avec l’espoir de les marier. En dehors de ces valeurs anaphoriques<br />

ou cataphoriques, on peut objecter que dans ces deux exemples de Thèbes <strong>et</strong> celui d’Ysaÿe le Triste, le<br />

verbe constructeur est veoir <strong>et</strong> il n’y a pas de différ<strong>en</strong>ce dans la construction syntaxique <strong>en</strong>tre les deux<br />

énoncés : Athes, oir, chastel sont analysables comme des élém<strong>en</strong>ts rectionnels de veoir.<br />

Le critère de l’anaphore <strong>et</strong> de la cataphore n’est pas simple à manipuler pour distinguer la clivée de la<br />

« prés<strong>en</strong>tative » : Muller analyse Et ce est il que ge quier (Lancelot pr. II, 88) comme une clivée, bi<strong>en</strong><br />

que ce désigne un chevalier dont il est fait m<strong>en</strong>tion auparavant.<br />

La valeur anaphorique ou cataphorique de ce n’est pas opérante non plus pour distinguer les <strong>clivées</strong><br />

des « phrastiques » : dans c’est signe que, ce est un anaphorique <strong>et</strong> l’énoncé ne s’analyse pas comme<br />

une clivée, dans c’est dommage que, ce est un cataphorique qui annonce la Que-Phrase qui suit,<br />

l’énoncé ne s’analyse pas non plus comme une clivée.<br />

1. 4. La focalisation <strong>et</strong> le contraste<br />

La construction verbale est séparée <strong>en</strong> deux élém<strong>en</strong>ts, avec d’un côté une partie de la construction Qu-<br />

+ Verbe considérée comme présupposée, <strong>et</strong> de l’autre, une partie focalisée qui porte l’assertion de<br />

l’énoncé, ou <strong>en</strong>core l’information nouvelle. (Voir parmi d’autres : Davidse 2000, Lambrecht 2001).<br />

Dans :<br />

(2) c’est Athon que je vois v<strong>en</strong>ir<br />

la partie présupposée implique que quelqu’un est v<strong>en</strong>u, la partie focalisée implique que l’obj<strong>et</strong> du<br />

verbe Athon, est distingué parmi tous les autres obj<strong>et</strong>s possibles appart<strong>en</strong>ant au même paradigme. Le<br />

contraste perm<strong>et</strong> de faire ressortir la focalisation : il m<strong>et</strong> <strong>en</strong> opposition deux termes d’un même<br />

paradigme :<br />

(2’) ce n’est pas Athon, c’est son frère que je vois v<strong>en</strong>ir<br />

<strong>Les</strong> questions qui port<strong>en</strong>t sur un terme de la rection du verbe impliqu<strong>en</strong>t une focalisation de ce type <strong>et</strong><br />

réalis<strong>en</strong>t fréquemm<strong>en</strong>t un contraste :<br />

(9) est-ce par moquerie que tu clignes des yeux ? Ou est-ce par tromperie ?<br />

Mais la clivée ne peut être réduite à n’exprimer qu’un contraste. Pour le <strong>français</strong> moderne, Do<strong>et</strong>jes,<br />

Rebuschi, Rialland (2003) sont conduits à distinguer deux types de <strong>clivées</strong> : les <strong>clivées</strong> « focus<br />

ground » pour lesquelles le focus est constitué par le terme X <strong>et</strong> les <strong>clivées</strong> « broad focus » pour<br />

lesquelles le terme X <strong>et</strong> la séqu<strong>en</strong>ce Qu- + Verbe inclu<strong>en</strong>t le focus. La clivée « focus ground »<br />

correspond à : c’est le p<strong>et</strong>it qui est tombé dans l’escalier, pas ma fille. Comme le montre le contraste,<br />

le terme X, focus, est exhaustif. La clivée « broad focus » correspond à : C’est avec plaisir que je vous<br />

invite à participer à ce séminaire. Dans c<strong>et</strong>te clivée, l’information véhiculée par la séqu<strong>en</strong>ce Qu +<br />

Verbe est une partie du focus. Le terme X n’est pas nécessairem<strong>en</strong>t exhaustif.<br />

En définitive, c’est l’interprétation sémantique <strong>et</strong> pragmatique qui décidera du statut clivé ou non<br />

d’une construction <strong>en</strong> c’est X que Verbe. Pour ce niveau d’interprétation, il importe de replacer<br />

l’énoncé dans un contexte long. Je pr<strong>en</strong>ds un exemple <strong>en</strong> anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> :<br />

(10) Quant la roïne <strong>en</strong>t<strong>en</strong>t q’Antigonus v<strong>en</strong>oit,


Ele li vait <strong>en</strong>contre, tantost comme el le voit<br />

M<strong>en</strong>bra li de l’ymage, lores sot bi<strong>en</strong> <strong>et</strong> croit<br />

Que ce est Alixandres, mais dire ne l’osoit ;<br />

Puis que il son non çoile, bi<strong>en</strong> tost l’<strong>en</strong> peseroit.<br />

Antigonon l’apele, par la main le t<strong>en</strong>oit,<br />

Puis le maine <strong>en</strong> la chambre ou la painture estoit ;<br />

Tres dedevant l’ymage <strong>en</strong> son lit l’asseoit.<br />

Quant voit lui <strong>et</strong> l’ymage, bi<strong>en</strong> s’<strong>en</strong> apercevoit<br />

Que ce iert Alixandres qui aveuc li estoit. (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre br 3 v. 4768,)<br />

C<strong>et</strong> énoncé peut s’interpréter comme une clivée : l’élém<strong>en</strong>t X Alixandres est une instance prélevée<br />

dans un paradigme à deux termes qui comporte un autre nom : Antigonus.<br />

2. C’est X que : autres tournures que les <strong>clivées</strong><br />

Dans c<strong>et</strong>te rubrique, j’examinerai successivem<strong>en</strong>t les relatives, les noms « phrastiques » recteurs de<br />

Que-Phrase <strong>et</strong> les « nexus ».<br />

2. 1. <strong>Les</strong> relatives<br />

2. 1. 1. Le pronom cil<br />

Le pronom cil n’est pas autonome, il n’apparaît jamais <strong>en</strong> finale, il est toujours suivi de la séqu<strong>en</strong>ce<br />

Que + Verbe :<br />

(11) Et li autres chevaliers dist<br />

a la pucele sanz merci:<br />

« Amie, cest chevalier ci<br />

qui vi<strong>en</strong>t armez ancontre nos,<br />

dites moi, conuissiez le vos? »<br />

Et la pucele dit: « N<strong>en</strong>il,<br />

mes ge sai bi<strong>en</strong> que ce est cil<br />

qui hier m’am<strong>en</strong>a ceste part. » (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Conte du Graal v. 8124)<br />

Cil ne forme jamais un constituant à lui seul : un élém<strong>en</strong>t X de ce type ne correspond donc pas à une<br />

clivée. <strong>Les</strong> données morpho-syntaxiques perm<strong>et</strong>t<strong>en</strong>t de prévoir que certains élém<strong>en</strong>ts qui ne sont<br />

jamais autonomes, comme celui, cil ne pourront figurer que dans des relatives.<br />

2. 1. 2. <strong>Les</strong> indéfinis, génériques <strong>et</strong> superlatifs<br />

Je regroupe dans la même rubrique les indéfinis <strong>et</strong> les superlatifs. En eff<strong>et</strong>, l’indéfini ri<strong>en</strong> dans c<strong>et</strong>te<br />

position apparaît le plus souv<strong>en</strong>t modifié par une séqu<strong>en</strong>ce Qu-+verbe qui comporte un superlatif. Ce<br />

type est attesté aussi bi<strong>en</strong> <strong>en</strong> anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> qu’<strong>en</strong> moy<strong>en</strong> <strong>français</strong>:<br />

(12) E ço est le plus recraant<br />

Ki unc portast n’escu ne brant. (Thomas, Tristan v. 470)<br />

(5) La roïne <strong>en</strong> fu liee, qui mout s’<strong>en</strong> vot p<strong>en</strong>er,<br />

Car c’est la ri<strong>en</strong>s el siecle qu’ele pot plus amer. (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre br. 1, v. 532,<br />

ARTFL, ca. 1180)<br />

<strong>Les</strong> noms génériques hom, g<strong>en</strong>t, reçoiv<strong>en</strong>t aussi la séqu<strong>en</strong>ce Qu- + V suivie de superlatif. Ils sont<br />

interprétables comme des relatives :<br />

(13) C’est l’ome el monde qui plus m’a f<strong>et</strong> irier<br />

Mon pere ocist une foldre del ciel :<br />

Toz i fu ars, ne li pot home aidier. (Couronnem<strong>en</strong>t de Louis v. 527)


(14) Or se gart bi<strong>en</strong> Makaires qu’il n’aut cele contree :<br />

Ce est la g<strong>en</strong>t el monde qui onques plus le he<strong>en</strong>t. (Aiol v. 10652)<br />

La base nominale peut égalem<strong>en</strong>t être modifiée par un superlatif, la séqu<strong>en</strong>ce Qu- + Verbe est là aussi<br />

analysable comme modifieur :<br />

(15) C’est bi<strong>en</strong> la plus sote prïere<br />

Que j’ouïsse oncques faire a homme. (Narcissus v. 907)<br />

2. 1. 3. Définitoires<br />

<strong>Les</strong> énoncés définitoires s’analys<strong>en</strong>t comme des relatives. Vi<strong>en</strong>t <strong>en</strong> première position le terme à<br />

définir, puis c’est, puis le terme générique suivi de la séqu<strong>en</strong>ce modifiante <strong>en</strong> Qu + V, qui <strong>en</strong> restreint<br />

le champ d’application :<br />

(16) Si devise comm<strong>en</strong>t on doit escorcher le cerf <strong>et</strong> le desfere. Puis oste le sousgorjon, c’est une char qui<br />

est depuis le bout de la hampe par dessus la gorge jusques au gou<strong>et</strong>ron, (Gaston Phebus, Le Livre de<br />

chasse p. 179)<br />

La relation <strong>en</strong>tre le terme nominal à définir (sousgorgon) <strong>et</strong> le terme générique (char) suivi par la<br />

séqu<strong>en</strong>ce Qu + Verbe modifiante est une relation d’id<strong>en</strong>tité. C<strong>et</strong>te relation d’id<strong>en</strong>tité est assurée par<br />

c’est.<br />

2. 1. 4. Déterminant ø<br />

<strong>Les</strong> termes nominaux avec une détermination zéro :<br />

ce est couleur que, ce est grans duels que, ce est molt grant laidure,<br />

s’analys<strong>en</strong>t le plus souv<strong>en</strong>t comme des constructions relatives :<br />

(17) <strong>Les</strong> eulz ot clers, rianz <strong>et</strong> vers;<br />

mout fu viguereux <strong>et</strong> apers<br />

<strong>et</strong> la face ot assez plus blanche<br />

que n’est la noif desus la branche.<br />

Ce est couleur qui mout m' agree,<br />

blanche, de vermeill couloree ! (Thèbes, 5777)<br />

(18) Il dist a Tholomé: “ Ce est molt grant laidure<br />

Que nos ainsi fuions por ceste g<strong>en</strong>t tafure, (Alexandre de Paris, Roman d'Alexandre, br. 3 v. 6929)<br />

(19) ce est grans dels <strong>et</strong> grans peciés<br />

que vos le dame <strong>en</strong> laid<strong>en</strong>giés ; (Gautier d’Arras, Eracle 6003)<br />

En revanche, les termes nominaux fortem<strong>en</strong>t déterminés t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t à être interprétés comme élém<strong>en</strong>ts<br />

clivés :<br />

(20) Et il prist tantost l’escu <strong>et</strong> i fist de son sanc meisme cele croiz que vos veez ci : <strong>et</strong> bi<strong>en</strong> sachiez que<br />

ce est icel escu meismes que je vos cont. Et quant il ot f<strong>et</strong>e la croiz tele com vos la poez veoir, il li dist :<br />

« Veez ci l’escu que je vos les <strong>en</strong> remembrance de moi. » (Queste p. 34, 17)<br />

Ici, le démonstratif icel <strong>et</strong> l’adjectif meismes contribu<strong>en</strong>t à faire de escu un obj<strong>et</strong> focalisé.<br />

2. 1. 5. Verbes « supports »


<strong>Les</strong> « verbes supports », attestés dès le XI e siècle dans Alexis, avec dem<strong>en</strong>er duel, faire duel sont<br />

toujours construits avec une relative <strong>et</strong> ont une interprétation liée.<br />

(21) Quant il ço sour<strong>en</strong>t qued il fud si al<strong>et</strong><br />

Ço fut granz dols qu<strong>et</strong> il unt dem<strong>en</strong>ét (La Vie de saint Alexis 104)<br />

(22) Ce est grant deul que li rois f<strong>et</strong>;<br />

vers Athon sont tuit si refr<strong>et</strong>,<br />

<strong>et</strong> nel di du roi seulem<strong>en</strong>t ;<br />

tuit li autre font <strong>en</strong>sem<strong>en</strong>t : (Thèbes v. 5985)<br />

Duel ne forme pas un constituant autonome, mais une partie d’un constituant plus large dem<strong>en</strong>er duel,<br />

faire duel.<br />

2. 1. 6. <strong>Les</strong> temporels <strong>en</strong> « ce fu »<br />

Ce fu X que est une forme surtout réservée aux emplois temporels fixant un cadre de récit. Ces<br />

temporels sont réalisés avec la préposition sur X ou bi<strong>en</strong> sans la préposition sur X.<br />

ce fu préposition X qu- Verbe<br />

Dans (23) (24) , X désigne une période de l’année :<br />

(23) Ce fu a une Pantecoste,<br />

que la reïne sist dejoste<br />

le roi Artus au chief d’un dois. (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Conte du Graal v. 2783)<br />

(24) Ce fu aprés esté, si comme yvers <strong>en</strong>tra,<br />

Que li rois Alixandres icele g<strong>en</strong>t trouva, (Alexandre de Paris, Roman d' Alexandre br. 3 v. 2472)<br />

ce fu X qu- + Verbe :<br />

(25) Ce fu un samedi a nuit<br />

qu’il mangier<strong>en</strong>t poissons <strong>et</strong> fruit,<br />

luz <strong>et</strong> perches, saumons <strong>et</strong> truites,<br />

<strong>et</strong> puis poires crües <strong>et</strong> cuites. (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Erec <strong>et</strong> Enide v. 4237)<br />

Ces exemples sont analysables comme des relatives détachées avec une valeur temporelle. Ce ne sont<br />

pas des <strong>clivées</strong>.<br />

2. 2. <strong>Les</strong> « noms phrastiques »<br />

2. 2. 1. signe ; domage, droit, raison<br />

Parmi les « noms phrastiques », il faut distinguer le nominal signe des nominaux domage, droiz,<br />

raison.<br />

Le nominal signe, dépourvu de détermination, n’est pas autonome : il n’apparaît jamais <strong>en</strong> finale <strong>et</strong> est<br />

suivi d’une séqu<strong>en</strong>ce Qu+ Verbe dans (26) ou d’un infinitif dans (27), les deux séqu<strong>en</strong>ces formant<br />

paradigme. Ces énoncés sont analysables comme des Que-Phrases, ce est un anaphorique :<br />

(26) Quant l’orifice de la marris est cloz, c’est signe que la fame est grosse. (Martin de Saint-Gille,<br />

Ypocras, p. 86)<br />

(27) Car avoir la voiz agüe, c’est signe d’estre cont<strong>en</strong>cieux <strong>et</strong> tost aler est signe de homme trop hastif ou<br />

qui se <strong>en</strong>trem<strong>et</strong> de trop de choses. (Nicole Oresme, Ethiques Aristote, p. 256)


Contrairem<strong>en</strong>t à signe, les termes domage, raison, droit, employés sans détermination, peuv<strong>en</strong>t être<br />

autonomes, ils apparaiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> finale absolue :<br />

(28) « Par foi, dist Aristés, ce est droiz <strong>et</strong> raisons. (...) » (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre br. 4 v. 1468)<br />

(29) « Certes, f<strong>et</strong> ele, ce est granz domages. (...) » (Queste p. 18, 27)<br />

Néanmoins, malgré l’autonomie de raison, domage, les séqu<strong>en</strong>ces Qu- + Verbe qui suiv<strong>en</strong>t<br />

s’analys<strong>en</strong>t comme des Que-Phrases suj<strong>et</strong>s « extraposées ». Ce est un cataphorique qui annonce c<strong>et</strong>te<br />

Que-Phrase. Ces énoncés se traduis<strong>en</strong>t par c’est bi<strong>en</strong> légitime que, c’est dommage que :<br />

(30) « Sire, c’est bi<strong>en</strong> raison <strong>et</strong> droiz<br />

Que moy <strong>et</strong> vous donc y alons,<br />

<strong>et</strong> Jhesu, nostre <strong>en</strong>fant, m<strong>en</strong>ons<br />

Avec nous »...(Miracles de Notre Dame par Personnages, t. 1, Miracle de la Nativité v. 615)<br />

(31) C’est grant domaiges <strong>et</strong> grant deus<br />

Que l’<strong>en</strong> ne s<strong>et</strong> qui il estoi<strong>en</strong>t<br />

Ne de quel païs il v<strong>en</strong>oi<strong>en</strong>t. (Deuxième continuation Perceval v. 20892)<br />

La prés<strong>en</strong>ce d’une « Si-phrase » dans le même paradigme que la Que-Phrase extraposée constitue un<br />

argum<strong>en</strong>t pour c<strong>et</strong>te analyse :<br />

(32) « Sire », f<strong>et</strong> il, « quel conseil me donez ? »<br />

Dist l’apostoile : « Dex <strong>en</strong> soit aorez !<br />

Qui conseil quiert l’<strong>en</strong> li doit bi<strong>en</strong> doner :<br />

En p<strong>en</strong>eance vos vueil je commander<br />

Que Looÿs vo segnor secorez.<br />

C’ert grant damages s’il est desheritez. » (Couronnem<strong>en</strong>t de Louis, v. 1394)<br />

L’autre argum<strong>en</strong>t pour c<strong>et</strong>te analyse est fourni par la prés<strong>en</strong>ce de Que-Phrases suj<strong>et</strong>s régies par<br />

domage, droit, raison sans le ce :<br />

(33) Or as la question oïe,<br />

droiz est que tu perdes la vie. » (Thèbes v. 360)<br />

(34) Suivez moy, seigneurs, raison est<br />

Que Dieu soit hui magniffiez<br />

De nous touz, <strong>et</strong> glorifiez... (Miracles de Notre Dame par Personnages, t. 2, Miracle de l’Empereur<br />

Juli<strong>en</strong> v. 1081)<br />

Domage, droit, raison, même s’ils peuv<strong>en</strong>t apparaître <strong>en</strong> finale absolue, ne sont pas autonomes dans<br />

ces exemples. Ce sont des élém<strong>en</strong>ts d’un syntagme plus grand qui <strong>en</strong>globe X <strong>et</strong> Qu- + Verbe comme<br />

le montre le paradigme. Contrairem<strong>en</strong>t aux <strong>clivées</strong>, X ne joue aucun rôle fonctionnel auprès du verbe<br />

de la Que-Phrase.<br />

2. 2. 2. voir, vrai<br />

Deux interprétations sont possibles pour voir. Voir <strong>en</strong>tre dans le dispositif de la clivée dans (35), (36),<br />

(39). C’est un nominal à détermination zéro, il est dans la rection d’un verbe de dire dans une assertive<br />

ou une interrogative <strong>et</strong> peut être traduit par la vérité :<br />

(35) - Ha! cosine, f<strong>et</strong> Percevax,<br />

se ce est voirs que dit m’avez,<br />

dites moi comant le savez. (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Conte du Graal v. 3599)<br />

(36) Vezci douleur <strong>et</strong> meschief grief ;<br />

Miex amasse tout mon avoir


Avoir perdu. Fille, est ce voir<br />

Que je t’oy dire? (Miracles de Notre Dame par Personnages, t. 4, Miracle de une femme que Nostre<br />

Dame garda d’estre arse v. 381)<br />

C<strong>et</strong>te interprétation nominale de voir est celle de (37) : Voir est dans un dispositif non clivé <strong>et</strong><br />

constitue la rection de dire, mais à la différ<strong>en</strong>ce des exemples où voir se trouve <strong>en</strong>tre c’est <strong>et</strong> que, il est<br />

déterminé par un article défini :<br />

(37) « Sire, font il, o vous parlons<br />

de cest afaire ou nous alons ;<br />

ici vous <strong>en</strong> dirons le voir : (Thèbes v. 7039)<br />

Voir peut apparaître à la même place que le nominal verité, verté dans la rection de dire avec une<br />

détermination zéro, il est soit suivi de que + verbe <strong>en</strong> (38) soit <strong>en</strong> finale absolue <strong>en</strong> (39) :<br />

(38) Quant li rois la nouvele oÿ,<br />

form<strong>en</strong>t li plot si s’esjoï ;<br />

bi<strong>en</strong> s<strong>et</strong>, se c’est verté qu’il dit,<br />

cil de Thebes sunt descunfit. (Thèbes 2861)<br />

(39) « Sire, che dist Aiols, c’est verités,<br />

Bi<strong>en</strong> conoi que c’est voir que dit avés (Aiol v. 306)<br />

L’autre interprétation est adjectivale, voir peut se traduire par « vrai », <strong>et</strong> le que qui suit est un<br />

modifieur. Dans (40) <strong>et</strong> (41), voir n’est pas régi par les verbes <strong>en</strong> avoir, ocire, les énoncés ne peuv<strong>en</strong>t<br />

être interprétés comme des <strong>clivées</strong> mais plutôt comme des Que-Phrases suj<strong>et</strong>s extraposées régies par<br />

voir adjectival :<br />

(40) C’est voirs que molt <strong>en</strong> a çai<strong>en</strong>s, (Gautier d’Arras, Eracle 6003)<br />

(41) Vos voulez que ge vos die se ce est voirs que la reïne ait ocis vostre frere ; (La Mort le roi Artu §<br />

67, 37)<br />

C<strong>et</strong>te analyse est confirmée par le fait que voir peut régir une Que-Phrase suj<strong>et</strong> <strong>en</strong> est sans le ce :<br />

(42) Voirs est que morz est vostre sire ;<br />

se vos <strong>en</strong> avez duel <strong>et</strong> ire,<br />

cuidiez vos que je m’an mervoil ? (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Erec <strong>et</strong> Enide v. 4767)<br />

Dans ce type, le verbe de la Que-Phrase n’est jamais un verbe de « dire ». Je propose ici la même<br />

analyse que pour les termes droit, dommages, raison examinés précédemm<strong>en</strong>t : voir est un élém<strong>en</strong>t<br />

d’un syntagme plus grand <strong>et</strong> ne joue aucun rôle fonctionnel auprès du verbe de la Que-Phrase.<br />

2. 3. Le nexus<br />

Le nexus est une relation de solidarité <strong>en</strong>tre deux termes. Eriksson appelle nexus « l’unité syntaxique<br />

qui résulte d’une prédication assurée par une unité autre que le syntagme verbal ». 6 Pour la phrase<br />

suivante citée par Eriksson, je reconstitue son analyse (p. 166) : Mais soudain, une cloche tinta au<br />

loin. C’était la messe qui finissait. La séqu<strong>en</strong>ce la messe qui finissait est un prédicat nominal de<br />

fonction attribut, c<strong>et</strong> attribut est un nexus, comme le montre la relation de solidarité <strong>en</strong>tre la messe <strong>et</strong><br />

qui finissait. La messe est le suj<strong>et</strong> du nexus <strong>et</strong> qui finissait, le prédicat nexuel. D’après Eriksson, un<br />

nexus de ce type « sert à expliquer le cont<strong>en</strong>u de la phrase qui précède » <strong>et</strong> il s’agit « le plus souv<strong>en</strong>t<br />

6 Je repr<strong>en</strong>ds un de ses exemples. Dans je l’ai vue passer dans la rue un sac de provisions à la main, il y a quatre<br />

prédications <strong>et</strong> trois nexus. A l’intérieur de la relation prédicative je-ai vu quelque chose, les trois nexus sont<br />

constitués par elle-passer dans la rue, elle-un sac de provisions à la main, un sac de provisions-à la main.


d’une id<strong>en</strong>tification d’un phénomène accoustique ». Certains énoncés de l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> <strong>en</strong> c’est X<br />

qu- Verbe serai<strong>en</strong>t analysables <strong>en</strong> terme de nexus comme (43) :<br />

(43) La chose que tu vois qui est a mort flaistrie<br />

Ce es tu qui te muers, nel te celerai mie ;<br />

<strong>Les</strong> testes que tu vois qui mostr<strong>en</strong>t felonie<br />

Et que l’une vers l’autre porte si grant <strong>en</strong>vie,<br />

Ce sont les douze per q’as <strong>en</strong> ta compaignie. (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre, br. 4 v. 26)<br />

Il y a une relation de solidarité <strong>en</strong>tre tu-qui te muers, ce nexus est traduisible par c’est toi <strong>en</strong> train de<br />

mourir, avec un eff<strong>et</strong> d’événem<strong>en</strong>tiel. D’un point de vue fonctionnel, ce est attribut, <strong>et</strong> tu doublem<strong>en</strong>t<br />

suj<strong>et</strong> : il est à la fois suj<strong>et</strong> de es <strong>et</strong> suj<strong>et</strong> du nexus tu qui te muers. D’autres énoncés avec un terme X<br />

NPr ou Nom sont interprétables comme des nexus :<br />

Nom :<br />

NPr :<br />

(44) « Or m’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dés, fait il as grans <strong>et</strong> as m<strong>en</strong>ors,<br />

De votre songe espondre serai maistres doctors.<br />

Li oés est vaine chose, p<strong>et</strong>ite est sa vigors ;<br />

Li serp<strong>en</strong>s qu’<strong>en</strong> issoit, fiers <strong>et</strong> de fieres mors<br />

C’est un hom orgellous qui movra maint estors<br />

Et vaudra sormonter rois <strong>et</strong> empereors. (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre, br. 1, v. 286)<br />

(45) « Oiés, segnor, fait il, une raison certaine.<br />

Li oés dont il parol<strong>en</strong>t n’est mie chose vaine,<br />

Le monde s<strong>en</strong>efie <strong>et</strong> la mer <strong>et</strong> l’araine,<br />

Et li moieus ded<strong>en</strong>s est terre de g<strong>en</strong>s plaine,<br />

Del serp<strong>en</strong>t qu’n issoit vous di par sainte Elaine<br />

Que ce est Alixandres qui souffrira grant paine<br />

Et iert sires du mont, ma parole <strong>en</strong> iert saine,<br />

Et si home aprés lui le t<strong>en</strong>ront <strong>en</strong> demaine,<br />

Puis torra mors ou vis <strong>en</strong> terre mascedaine,<br />

Si com fist li serp<strong>en</strong>s qui vint a sa chievaine. » (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre, br. 1, v. 317)<br />

Comme dans (43), nous avons une relation de signification avec une explicitation de ce qui précède,<br />

<strong>en</strong> l’occurr<strong>en</strong>ce un rêve à interpréter.<br />

3. <strong>Les</strong> <strong>clivées</strong><br />

J’examinerai successivem<strong>en</strong>t les <strong>clivées</strong> non-prépositionnelles <strong>et</strong> les <strong>clivées</strong> prépositionnelles.<br />

3. 1. <strong>Les</strong> <strong>clivées</strong> non-prépositionnelles<br />

3. 1. 1. X pronominal<br />

L’exam<strong>en</strong> de X pronominal impose de distinguer les personnes 1 <strong>et</strong> 2 de la personne 3 <strong>et</strong> de faire une<br />

incursion dans le domaine du fameux ce sui je. Je pr<strong>en</strong>drai l’analyse de Skårup comme point d’appui.<br />

Skårup (1975 : 207 ss), réexaminant le problème du passage de ce sui je à c’est moi propose différ<strong>en</strong>ts<br />

schémas fonctionnels. Le problème est posé par des exemples comme ce est Jehans ambigus<br />

syntaxiquem<strong>en</strong>t. C<strong>et</strong> énoncé peut selon Skårup être analysé de deux façons :<br />

1) ce = suj<strong>et</strong>, Jehans = attribut<br />

2) ce = attribut, Jehans = suj<strong>et</strong>


Skårup appelle « autre membre » le terme qui n’est ni ce ni la copule. Il utilise deux critères<br />

d’analyse : l’ordre des élém<strong>en</strong>ts ce, est, X, ainsi que l’accord du verbe, il distingue ainsi plusieurs<br />

cas :<br />

• cas 1 : « l’autre membre » précède la copule, ce est postposé. C’est le cas des interrogatives à mot<br />

Q :<br />

(46) Li quex est ce, savoir le vuel,<br />

qui tant a folie <strong>et</strong> orguel (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Chevalier de la Charr<strong>et</strong>te v. 2579, Skårup : 207)<br />

Dans un énoncé négatif où l’autre membre est nominal, ce occupe la place du suj<strong>et</strong> : il est antéposé à la<br />

borne de la négation :<br />

(47) Dreite haür ne fu ço mie,<br />

Car pur l’amur la reïne<br />

Enama Tristrans la meschine ; (Thomas, Fragm<strong>en</strong>t Sneyd Tristan v. 322 ; Skårup : 207)<br />

sans la négation, par analogie, Skårup interprète ce comme suj<strong>et</strong> :<br />

(48) Certes, fait ele, veritez est ce sanz faille. (Tristan prose 337. 41, Skårup : 207)<br />

Le critère de la place de ce postposé au verbe à la même place 7 que le pronom suj<strong>et</strong> semble ori<strong>en</strong>ter<br />

Skårup vers une analyse selon laquelle ce serait suj<strong>et</strong> <strong>et</strong> l’autre membre attribut.<br />

• cas 2 : Le verbe être est suivi de ce <strong>et</strong> d’un autre membre. On distingue deux cas : le cas où l’autre<br />

membre (X dans ma terminologie) est le pronom il, <strong>et</strong> le cas où X est un pronom tu.<br />

Pronom il :<br />

Dans les exemples pour lesquels l’autre membre est le pronom il au singulier, Skårup analyse ce<br />

comme suj<strong>et</strong> <strong>et</strong> il comme attribut. Le critère utilisé est celui de l’ordre des mots : ce occupe la place du<br />

pronom suj<strong>et</strong>.<br />

(49) « Guillaumes ? – Voire. – Est ce dont il ? (Guillaume de Palerne v. 2491 ; Skårup : 208)<br />

(50) Dist Ysorés : « Por Deu, est ce dont il<br />

Que tant redout<strong>en</strong>t li grant <strong>et</strong> li p<strong>et</strong>it ? (Garin le Loher<strong>en</strong> v. 4702 ; Skårup : 208)<br />

(51) Se il porte .i. escu de sinople a un aigle d’or ?<br />

Oïl, font li chevalier navré, sanz faille. – Dont<br />

est ce il, f<strong>et</strong> la damoisele. (Perlesvaus p. 84, l. 1522, Skårup : 208)<br />

Je résume sous forme de tableau <strong>et</strong> j’ajoute à ce schéma la séqu<strong>en</strong>ce Qu- + Verbe :<br />

est ce suj<strong>et</strong> adverbe X attribut Qu- + Verbe<br />

est ce dont il ?<br />

est ce il ?<br />

est ce dont il que tant redout<strong>en</strong>t li<br />

grant <strong>et</strong> li p<strong>et</strong>it ?<br />

7 Je rappelle la thèse qui sous-t<strong>en</strong>d c<strong>et</strong>te analyse. La « proposition » est divisée par Skårup <strong>en</strong> trois zones. La<br />

zone préverbale, zone verbale <strong>et</strong> zone postverbale. La zone préverbale n’a qu’une place, c<strong>et</strong>te place peut être<br />

occupée par le suj<strong>et</strong> pronominal ou lexical ou bi<strong>en</strong> par un autre membre. Quand la zone préverbale est occupée<br />

par un autre membre, le suj<strong>et</strong> pronominal se postpose au verbe avant la borne de la négation. Dans (47) (48) (49)<br />

li quex, dreite haür, veritez sont dans la zone préverbale, ce est posposé au verbe à la même place que le pronom<br />

suj<strong>et</strong>.


Néanmoins dans (52) <strong>et</strong> (53), ce se trouve postposé au pronom il. Le critère de la place perm<strong>et</strong><br />

d’attribuer la fonction attribut à ce.<br />

(52) est il ce ? (Gréban 31745, Zink : 169)<br />

(53) Est il ce qui de cy s’<strong>en</strong> va<br />

Qui Berthe seule orains trouva<br />

Enmy le bois ? (Miracles de Notre Dame par personnages, t. 5, Miracle de Berthe v. 2608)<br />

C<strong>et</strong> ordre n’est plus possible lors du passage à la graphie esse <strong>en</strong> moy<strong>en</strong> <strong>français</strong> qui agglutine estre <strong>et</strong><br />

ce.<br />

Pronom je, tu <strong>et</strong> vos :<br />

Dans ce cas de figure, Skårup souligne la différ<strong>en</strong>ce de traitem<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tre le pronom il <strong>et</strong> les autres<br />

pronoms. Je, tu, vos reçoiv<strong>en</strong>t le même traitem<strong>en</strong>t : ils occup<strong>en</strong>t la place du pronom suj<strong>et</strong> <strong>et</strong> ce est dans<br />

la zone postverbale, à sa place d’attribut :<br />

(54) Es tu dont che, Greoreas,<br />

Qui la damoisele preïs<br />

A force <strong>et</strong> ton bu<strong>en</strong> <strong>en</strong> feïs ? (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Conte du Graal v. 7118 ; Skårup : 208)<br />

(55) « Ha ! Messires Gavains, estes vos ce ? » Et il dist que ce est il. (Queste p. 259, 11 ; Skårup : 208)<br />

j’ajoute à ces deux exemples (56) <strong>et</strong> (57) :<br />

(56) Es tu ço, fist se il, li huem Deu ki v<strong>en</strong>is de Juda ? Cil respundi : ço sui je (QLR 288)<br />

(57) Iloc me numai je Trantris<br />

Ne sui je ço ? ke vus est vis ? (Folie Tristan Oxford, v. 366, Skårup: 208)<br />

• cas 3 : ce précède le verbe estre, <strong>et</strong> X suit le verbe :<br />

(58) car il cuidera que ce soie je (Tristan prose, 192. 10 ; Skårup: 210)<br />

Pour (58), d’un point de vue fonctionnel, Skårup ne fait pas de distinction <strong>en</strong>tre il <strong>et</strong> les autres<br />

pronoms. L’accord du verbe avec avec « l’autre membre », <strong>en</strong> l’occurr<strong>en</strong>ce je, perm<strong>et</strong> de dire que ce<br />

est attribut, je suj<strong>et</strong>, <strong>et</strong> ce suj<strong>et</strong> occupe sa place : <strong>en</strong> zone verbale avant l’adverbe de négation. Par<br />

analogie, Skårup propose pour ce est il, ce est Jehans, il <strong>et</strong> Jehans suj<strong>et</strong>s <strong>et</strong> ce attribut. D’autant que il<br />

apparaît <strong>en</strong> fin de zone verbale avant l’adverbe de négation :<br />

(59) Ce n’est il pas ? Si est por voir (Gerbert de Montreuil, Perceval v. 4081 ; Skårup : 209)<br />

D’après Skårup (p. 212), la forme ce sui je suivie de Qu- + verbe n’est pas attestée, <strong>en</strong> revanche, la<br />

forme je suis (cil) qui 8 est attestée. Elle peut être traduite par « c’est moi » :<br />

8 Il y a 24 occurr<strong>en</strong>ces de je sui cil qui <strong>et</strong> 9 occurr<strong>en</strong>ces de je sui qui dans la base de données ARTFL, les<br />

occurr<strong>en</strong>ces sont attestées jusqu’à la fin du 14 ème s. Pour Kunstmann (p. 287 sqq.), ces énoncés ne sont pas<br />

traduisibles systématiquem<strong>en</strong>t par « c’est moi ». Il préfère rapprocher ces énoncés des constructions actuelles du<br />

<strong>français</strong> moderne « moi je » avec dislocation à gauche. Pour c<strong>et</strong> exemple : Qui vodra ti<strong>en</strong>ge soi a Pompee, qui<br />

voldra a Cesar. Je sui qui te voil sivre, je sui qui a ton conseil me voil t<strong>en</strong>ir. (Faits des Romains 3.1.20,<br />

Kunstmann : 287 avec la glose ‘quant à moi, je veux te suivre’). On ne peut dégager, selon Kunstmann, un<br />

présupposé « quelqu’un veut te suivre » qui correspondrait à « je sui qui te voil suivre ». Néanmoins pour<br />

l’énoncé déjà cité de la Charr<strong>et</strong>te (v. 2588) Kunstmann dégage un présupposé grâce à l’interrogative qui<br />

précède : « l’interrogation présuppose que quelqu’un p<strong>en</strong>se passer au Pont de l’épée, <strong>et</strong> l’interprétation par une


(60) « Li quez est ce, savoir le vuel,<br />

qui tant a folie <strong>et</strong> orguel,<br />

<strong>et</strong> de cervel la teste vuide,<br />

qu’an cest païs vi<strong>en</strong>t <strong>et</strong> si cuide<br />

au Pont de l’Espee passer ?…<br />

« Je suis qui vuel passer au Pont.<br />

- Tu ? Tu ? Comant l’osas p<strong>en</strong>ser ? (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Chevalier de la Charr<strong>et</strong>e v. 2589, Skårup :<br />

212)<br />

(61) Lors dist Erec : « Vasax, je sui<br />

cil qui an la forest hier fui<br />

avoec la reïne Ganievre, (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Erec <strong>et</strong> Enide v. 1010)<br />

Je citerai néanmoins des exemples de ce sui je qui attestés 9<br />

Rois, interprétables comme des <strong>clivées</strong> :<br />

dans les Quatre Livres des<br />

(62) E ço sui jo ki respundrai verited (QLR 98)<br />

(63) Ço sui jo ki ai ramponed <strong>et</strong> attarié l’ost de Israel (QLR 33)<br />

3. 1. 1. 1. Le pronom il<br />

Le critère de l’autonomie de X perm<strong>et</strong> d’analyser comme élém<strong>en</strong>t clivé le pronom il. Le pronominal il<br />

apparaît <strong>en</strong> finale absolue ou bi<strong>en</strong> suivi de [qui/que + Verbe]. Nous observons une répartition il/cil,<br />

dans laquelle les termes il/cil sont <strong>en</strong> distribution complém<strong>en</strong>taire. Comme nous l’avons vu<br />

précédemm<strong>en</strong>t, cil est toujours modifié par la relative <strong>et</strong> n’est pas attesté <strong>en</strong> finale absolue,<br />

contrairem<strong>en</strong>t à il. C<strong>et</strong>te distribution perm<strong>et</strong> d’analyser c’est cil qui comme une séqu<strong>en</strong>ce à modifieur,<br />

<strong>et</strong> il comme autonome dans c’est il qui. 10 <strong>Les</strong> exemples (64) <strong>et</strong> (65) où les deux types c’est cil qui / que<br />

<strong>et</strong> c’est il <strong>en</strong> finale absolue sont réalisés illustr<strong>en</strong>t c<strong>et</strong>te distribution :<br />

(64) Lors a veüe une tor nueve<br />

Et un blanc chastel aparant ;<br />

De celle part se trait errant,<br />

Car il cuide que ce soit cil<br />

Que cil li anseigna. « C’est il, »<br />

Fait il, <strong>et</strong> lores esperone. (Deuxième continuation de Perceval v. 21076)<br />

(65) <strong>et</strong> li dist: « Biau frere, savez vos qui cist chevaliers est qui si<strong>et</strong> ou Siege Perilleux ? »- « Je nel sai<br />

mie tres bi<strong>en</strong>, f<strong>et</strong> Lyonel, fors tant que ce est cil qui hui a esté noviax chevaliers, que messire Lancelot<br />

fist hui chevalier novel de sa main. Et ce est cil dont <strong>en</strong>tre moi <strong>et</strong> vos avons toute jor parlé, que messire<br />

Lancelot <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dra <strong>en</strong> la fille le Riche Roi Pescheor. »- « Veraiem<strong>en</strong>t le sachiez vos, fait Boorz, que ce<br />

est il, <strong>et</strong> qu’il est nostre cousins prochains. » (Queste p. 9, 27)<br />

(66) <strong>et</strong> (67) prés<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t la même répartition avec ce fust il attesté dans une forme clivée, ou bi<strong>en</strong> avec il<br />

<strong>en</strong> finale absolue :<br />

(66) Et tuit cil l’apel<strong>en</strong>t seignor<br />

Qu’il avoit pris au tornoier,<br />

Mes il lor vialt a toz noier,<br />

clivée paraît naturelle ». Sa conclusion est que ces constructions « étai<strong>en</strong>t assez souples pour se prêter à des<br />

eff<strong>et</strong>s de s<strong>en</strong>s divers selon les contextes. »<br />

9 Muller (2003) les cite égalem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> se référant à Kunstmann.<br />

10 A l’appui de c<strong>et</strong>te distribution on peut noter que cil / cele est suivi d’une relative prépositionnelle : Ce est cele<br />

por qui amor j’ai faites les granz proeces dont toz li monde parole (Queste p. 66 ) Ce qui ne semble pas possible<br />

avec le pronom il : ? ce est il por qui.


Et dit que trestuit quite soi<strong>en</strong>t<br />

De lor foiz, s’il cuid<strong>en</strong>t <strong>et</strong> croi<strong>en</strong>t<br />

Que ce fust il qui les preïst<br />

N’i a un seul qui ne deïst :<br />

« Ce fustes vos, bi<strong>en</strong> le savons » (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Cligès v. 4945)<br />

(67) F<strong>en</strong>ice qui l’esgarde <strong>et</strong> voit<br />

Ne s<strong>et</strong> pas que ce Cligés soit ;<br />

Ele voldroit que ce fust il, (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Cligès v. 3747)<br />

Dans le couple question / réponse, c’est il figure comme réponse réduite, ce qui n’est pas le cas de<br />

c’est cil qui ne peut figurer comme réponse réduite :<br />

(68) ESTIENNE.<br />

N’est ce pas mon frere qui vi<strong>en</strong>t<br />

Devant nous par celle ruelle ?<br />

Il a vestu robe nouvelle,<br />

Ce m’est avis.<br />

LE SERGENT.<br />

Oil, sire, par saint D<strong>en</strong>is ;<br />

C’est il pour voir. (Miracles de Notre Dame par Personnages, t. 2, Miracle d’un prevost v. 97)<br />

Ces différ<strong>en</strong>tes réalisations de c’est il peuv<strong>en</strong>t donc servir d’argum<strong>en</strong>t pour analyser (4) c’est il qui,<br />

discuté par Muller (2003), comme une clivée :<br />

(4) De monseignor Yvain, ce cuit,<br />

Avez bi<strong>en</strong> oï parler tuit ;<br />

Et ce est il qui me requiert. (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Chevalier au Lion v. 2131)<br />

Le clivage des pronominaux est peu fréqu<strong>en</strong>t : je n’ai noté qu’une seule occurr<strong>en</strong>ce de ce fust il qui, <strong>et</strong><br />

deux occurr<strong>en</strong>ces de ce est il qui dans la totalité du corpus ARTFL.<br />

3. 1. 1. 2. Tu, vos<br />

<strong>Les</strong> pronoms de l’interlocution, tu <strong>et</strong> vos 11 , peuv<strong>en</strong>t être analysés comme des élém<strong>en</strong>ts clivés dans les<br />

interrogatives (69) <strong>et</strong> (70) :<br />

(69) Es tu ço qui paroles ? (QLR 95)<br />

(70) Fustes vos ce qui me navrastes ? (La Mort le roi Artu § 46, 19)<br />

dans (69) <strong>et</strong> (70), les verbes être / parler, être / navrer s’accord<strong>en</strong>t avec les suj<strong>et</strong>s tu <strong>et</strong> vos. Ces<br />

pronoms peuv<strong>en</strong>t apparaître <strong>en</strong> finale absolue :<br />

(71) Es tu ço, bels fiz David ? (QLR 51)<br />

(72) estes vos ce ? (Queste p. 259, 11)<br />

(73) Ce es tu li maleüreus<br />

Qui veïs qu’il fu tans <strong>et</strong> leus<br />

de parler a lui, te taüs ! (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Conte du Graal v. 4641)<br />

(74) ce estes vous que je doy remercier de ce que m’avez tresbi<strong>en</strong> batu, (...) (Antoine de la Sale, Jehan<br />

de Saintré p. 120, 9)<br />

3. 1. 2. <strong>Les</strong> noms propres<br />

11 Je n’ai pas d’occurr<strong>en</strong>ce de ce fustes vos qui dans mon corpus.


Dans les textes d’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>, l’élém<strong>en</strong>t clivé est souv<strong>en</strong>t un nom propre ou un terme de par<strong>en</strong>té :<br />

Nom propre :<br />

(75) Mes por ce que ge sui seüre<br />

qu’il vi<strong>en</strong>t por ta male avanture,<br />

ne le te celerai ge pas.<br />

Ce est li niés Greorreas,<br />

qu’il anvoie ça aprés toi,<br />

<strong>et</strong> si te dirai bi<strong>en</strong> por coi,<br />

puis que tu le m’as demandé. (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Conte du Graal v. 7054)<br />

(76) « Athes ! biau sire, tu ne m’oz !<br />

Euvre tes eulz ! por coi les cloz ?<br />

Ce est Ysmaine qui parole ! (Thèbes v. 6075)<br />

(77) Et si font il <strong>en</strong>core, n’<strong>en</strong> pr<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t fin:<br />

«Hé ! Dieus ! li qués fu che qui or cheï ?<br />

«Encor(e) voi tout <strong>en</strong>tier vostre escu bis<br />

«Et sor ses .iiii. piés le bai ronchi.»<br />

Lusiane la bele sot bi<strong>en</strong> <strong>et</strong> vit<br />

Que c’ert Aiols li <strong>en</strong>fes qui jus l’a mis : (Aiol v. 3115)<br />

(78) Et dist R<strong>en</strong>art : « Par la manbrance,<br />

par les plaies, par la mort bieu,<br />

ne sai ou sui ne <strong>en</strong> quel leu.<br />

Es ce Tibert que je voi la ?<br />

Oïl, par ma foi, gel voi la ;... » (R<strong>en</strong>art, br XI v. 11963)<br />

Nom de par<strong>en</strong>té :<br />

(79) A la cort s’<strong>en</strong> vont a grant joie.<br />

Font les g<strong>en</strong>z qui sont <strong>en</strong> la voie :<br />

« Diex ! c’est li freres la roïne<br />

qui ceste voie ci chemine. » (Jean R<strong>en</strong>art, Guillaume de Dole v. 5256)<br />

(80) Quant m’ot mis <strong>en</strong> celle berelle,<br />

Il me mist <strong>en</strong> plus mal desroy,<br />

Qu’il me dist « C’est la fille au roy<br />

Qu’avez honnie, faulx hermites : (Miracles de Notre Dame par Personnages t. 5, Miracle de saint Jehan<br />

le Paulu v. 1204)<br />

Ces noms propres <strong>et</strong> noms de par<strong>en</strong>té apparaiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> finale absolue, confirmant ainsi leur capacité à<br />

être clivé :<br />

(81) Sor sains li a juré a .xxx. chevaliers<br />

Del barnage de Franche de tous les plus prosiés,<br />

Que il li r<strong>en</strong>d[e]ra tout chou que ses drois iert.<br />

Or parlera Aiol[s], li g<strong>en</strong>tiex <strong>et</strong> li fiers.<br />

Encore ne s<strong>et</strong> mie li rois que c’ert ses niés,<br />

Mais de maint<strong>en</strong>ant s’i vaura acointier. (Aiol v. 8081)<br />

Comme nous le verrons plus loin, ces termes apparaiss<strong>en</strong>t le plus souv<strong>en</strong>t dans des contextes de<br />

discours direct.<br />

3. 1. 3. <strong>Les</strong> noms déterminés


<strong>Les</strong> termes nominaux fortem<strong>en</strong>t déterminés t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t à être interprétés comme élém<strong>en</strong>ts clivés. Ils sont<br />

alors fréquemm<strong>en</strong>t utilisés comme complém<strong>en</strong>t d’un verbe de « dire » - conter, dans (20), <strong>et</strong> sont <strong>en</strong><br />

rapport avec un contexte précéd<strong>en</strong>t qui comporte un verbe de perception comme veoir, <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dre :<br />

(20) Et il prist tantost l’escu <strong>et</strong> i fist de son sanc meisme cele croiz que vos veez ci : <strong>et</strong> bi<strong>en</strong> sachiez que<br />

ce est icel escu meismes que je vos cont. (Queste p. 34, 17)<br />

(82) M’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dez vous, maistre p<strong>en</strong>art ?<br />

Par mon ame, il est bi<strong>en</strong> cornart<br />

Et aveugle : c’est son ymaige<br />

Qui au dessus de l’ewe naige ! (Narcissus v. 940)<br />

(83) O meschant fol, plain de rudesse,<br />

Ne vois tu pas que c’est ton umbre,<br />

Qui respl<strong>en</strong>dist <strong>en</strong> la fontaine ? (Narcissus v. 969)<br />

La lecture de (20) comme une clivée est favorisée par l’adjectif meïsmes qui contribue à faire de<br />

l’obj<strong>et</strong> un focus. Dans l’exemple (84), qui prés<strong>en</strong>te une alternance déterminant zéro/déterminant<br />

indéfini, la première séqu<strong>en</strong>ce est néanmoins interprétable comme une clivée, le contraste <strong>en</strong> ce n’est<br />

pas / c’est favorisant c<strong>et</strong>te interprétation :<br />

(84) Que appelle je guerre ? Ce n’est pas guerre qui <strong>en</strong> ce royaume se mayne, c’est une privee roberie,<br />

ung larrecin habandonné, force publique soubz umbre d’armes <strong>et</strong> viol<strong>en</strong>te rapine que faulte de justice <strong>et</strong><br />

de bonne ordonnance fait estre loisibles. (Alain Chartier, Quadrilogue Invectif p. 21)<br />

Le critère de la détermination n’est donc pas <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t discriminant.<br />

3. 1. 5. Bilan : les datations<br />

Je prés<strong>en</strong>te sous forme de tableau les datations des formes relevées.<br />

c’est il quce<br />

sui je quc’est<br />

tu/vos quc’est<br />

NPr, Nom déterminé qu-<br />

3. 2. <strong>Les</strong> <strong>clivées</strong> prépositionnelles<br />

3. 2. 1. Prépositionnels <strong>et</strong> adverbiaux<br />

dernier quart<br />

du XII e<br />

dernier quart<br />

du XII e<br />

dernier quart<br />

du XII e<br />

dernier quart<br />

du XII e<br />

ce est il qui me requiert (Chréti<strong>en</strong> de<br />

Troyes)<br />

ço sui jo ki ai ramponed <strong>et</strong> attarie l’ost de<br />

Israel (QLR)<br />

Es tu ço qui paroles ? (QLR)<br />

ce iert Alixandres qui aveuc li estoit<br />

(Roman Alexandre)<br />

De façon générale, les prépositionnels sont <strong>en</strong> nombre restreint 12 . Ils sont peu attestés dans le corpus<br />

d’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>, <strong>et</strong> il y a une répartition du lexique. Ce sont le plus souv<strong>en</strong>t des prépositionnels avec<br />

X [-hum]. La préposition se trouve avant l’élém<strong>en</strong>t clivé :<br />

(85) Sire Grinbert, je m’<strong>en</strong> mervoil<br />

se ce est par vostre conseil<br />

que dant R<strong>en</strong>art m’a <strong>en</strong>si vil. (Le Roman de R<strong>en</strong>art, br. I v. 946)<br />

(86)- Est ce par ire, ou par despit,<br />

f<strong>et</strong> li rois, qu’aler <strong>en</strong> volez ? (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Le Chevalier de la Charr<strong>et</strong>e v. 104)<br />

12 Muller (2003) souligne qu’il n’a trouvé aucune clivée prépositionnelle dans le premier volume du Lancelot <strong>en</strong><br />

prose.


Ces prépositionnels ont surtout une valeur adverbiale de type “ manière ”. Ils sont <strong>en</strong> liste restreinte <strong>et</strong><br />

le lexique est peu spécifié ; je n’ai r<strong>en</strong>contré que à (bon) droit que, a certes. Ces termes sont<br />

autonomes : ils peuv<strong>en</strong>t apparaître <strong>en</strong> finale ou bi<strong>en</strong> suivis de que + verbe :<br />

a (bon) droit :<br />

(87) Ço ere a dreit qu’<strong>en</strong> haür m’ait,<br />

Quant m’asti<strong>en</strong>c del naturel fait<br />

Ki nos deit lïer <strong>en</strong> amur :<br />

De l’ast<strong>en</strong>ir vi<strong>en</strong>t la haür. (Thomas, Tristan v. 723)<br />

(88) « Di va ! f<strong>et</strong> il, c’est a bon droit<br />

que Diex nous a <strong>en</strong> tel destroit,<br />

car <strong>en</strong>tre nous regne pechiez<br />

<strong>et</strong> couvoitise <strong>et</strong> mauvestiez. (Thèbes v. 5325)<br />

<strong>en</strong> finale absolue :<br />

(89) Certes, Markes, c’est a bon dreit,<br />

Huntage av<strong>en</strong>ir vus <strong>en</strong> deit,<br />

Quant tuz ses bons li cons<strong>en</strong>tez<br />

E sun dru <strong>en</strong>tur li suffrez. (Thomas, Tristan v. 1817)<br />

Mais (90), bi<strong>en</strong> que plus tardif, plaiderait <strong>en</strong> faveur d’une analyse de a bon droit que comme une Quephrase.<br />

C<strong>et</strong> exemple s’analyse comme une Que-phrase régie par un terme nominal, précédée d’un ce<br />

qui ne porte aucune fonction :<br />

(90) Je say bi<strong>en</strong> que c’est a bon droit<br />

ce que je sueffre ci <strong>en</strong>droit. (Miracles de Notre Dame par Personnages, t. 1, Miracle de Saint Jehan<br />

Chrisothomes, v. 752)<br />

La Que-Phrase est similaire à celle de (91) régie par le verbe v<strong>en</strong>gier :<br />

(91) Or ert v<strong>en</strong>gié<br />

Ce que nos avons trop couru (Gautier d’Arras, Ille <strong>et</strong> Galeron v. 479)<br />

a certes :<br />

(92) Et cil le resgarde, qui toz est esbahiz de ceste chose, <strong>et</strong> li dist: « Com<strong>en</strong>t, f<strong>et</strong>-il, Lyonel ? Est ce a<br />

certes que vos le volez ocirre ? » - « Ocirre, f<strong>et</strong> il, le voil je <strong>et</strong> ocirrai, que ja por vos ne por autre nel<br />

lairai : car il m’a tant meff<strong>et</strong> qu’il a bi<strong>en</strong> mort deservie. » (Queste p. 191, 8)<br />

nominal :<br />

(93) « J’<strong>en</strong> ferai <strong>et</strong> chanterai un<br />

Si <strong>en</strong>t<strong>en</strong>dable <strong>et</strong> si commun<br />

Qu’elle pora bi<strong>en</strong> percevoir<br />

Se c’est a faute ou s’est a voir<br />

Que merancolie me touce. » (Froissart, Prison amoureuse v. 532)<br />

Le nominal peut a un emploi adverbial :<br />

(94) Puis que nul ne me voit ne ot,<br />

En l’ostel de ce chastellain<br />

Vueil aler contre le serain.<br />

C’est la nuit que mon seigneur doit


Joïr de sa fille: (Miracles de Notre Dame par Personnages, t. 1, Miracle de la femme du roy de Portigal,<br />

v. 636)<br />

<strong>Les</strong> prépositionnels <strong>et</strong> les adverbiaux sont peu nombreux, <strong>et</strong> les occurr<strong>en</strong>ces qui ont pour base a certes,<br />

a droit pourrai<strong>en</strong>t être reversées dans le domaine des Que-Phrases.<br />

3. 2. 2. Place de la préposition <strong>et</strong> double préposition<br />

Dans son analyse sur le développem<strong>en</strong>t diachronique des <strong>clivées</strong>, Muller (2003) propose trois critères<br />

parmi lesquels celui de la place de la préposition. La préposition peut occuper deux places, ces deux<br />

places correspond<strong>en</strong>t chacune à un type : un type « anci<strong>en</strong> » <strong>et</strong> un type « moderne ». La préposition se<br />

trouverait sur le « connecteur » dans le type anci<strong>en</strong>, <strong>et</strong> la construction aurait une valeur prés<strong>en</strong>tative<br />

avec subordonnée. Il cite :<br />

(95) C’est Montfleury, à qui on fait des misères.<br />

Pour le moy<strong>en</strong> <strong>français</strong>, il donne <strong>en</strong>tre autres c<strong>et</strong> exemple du début du 15 ème siècle :<br />

(96) Je r<strong>et</strong>ourneray avec toy, car ce sont mes maistres a qui tu vas (Ysaÿe le Triste § 514)<br />

Dans le type « moderne » la préposition se trouve sur le terme X « antécéd<strong>en</strong>t » <strong>et</strong> Muller analyse ce<br />

type comme une clivée, puisque « la flexion est sur l’antécéd<strong>en</strong>t » avec pour exemples (98) <strong>et</strong> (99) :<br />

(97) c’est à Montfleury qu’on fait des misères !<br />

(98) ce n’est pas a vraye foi que vous parlez (Ysaÿe le Triste § 141)<br />

La place de la préposition sert donc d’indice pour différ<strong>en</strong>cier la clivée de la relative. Quand l’élém<strong>en</strong>t<br />

X est « extrait » avec sa préposition, la construction s’interprète comme une clivée. Quand la<br />

préposition est devant Qu- c’est une relative. Mais dans l’exemple de Bossu<strong>et</strong> <strong>en</strong> (99), dans les deux<br />

réalisations là que <strong>et</strong> où (analysable comme forme courte de là où dans ce contexte contigu), il est<br />

difficile d’attribuer une différ<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre un là suivi de Qu- + verbe qui serait une clivée contigue à un<br />

là où qui serait une relative.<br />

(99) C’est là que Jesus-Crist vous a précédés <strong>et</strong> où il doit avoir emporté avec lui tous vos désirs.<br />

(Bossu<strong>et</strong>, cit. Haase § 36)<br />

Dans le type dit « redondant » la préposition est placée avant le terme X <strong>et</strong> sur le « connecteur » :<br />

l’exemple cité par Muller est emprunté à Kunstmann (1990, p. 284), c’est un exemple du début du<br />

XIII e siècle avec le locatif ou qui intègre la préposition :<br />

(100) ou fu ce dont ou vous avez esté ? (Lancelot 91, 27)<br />

Ce type dit « redondant », appelé aussi « pléonastique » par d’autres auteurs comme Damour<strong>et</strong>te <strong>et</strong><br />

Pichon ou bi<strong>en</strong> Brunot, est bi<strong>en</strong> connu, <strong>et</strong> il est donné comme fréqu<strong>en</strong>t au XVII e siècle 13 . Ce type est<br />

rare <strong>en</strong> anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> <strong>et</strong> ne se développe qu’<strong>en</strong> moy<strong>en</strong> <strong>français</strong>.<br />

Le type adverbial le plus anci<strong>en</strong> (c’est a bon droit que) ne perm<strong>et</strong> pas d’avoir la préposition sur le<br />

terme Qu- ni bi<strong>en</strong> sûr de double place de la préposition. L’importance de la discussion sur la place de<br />

la préposition - avant le terme X, ou bi<strong>en</strong> avant le terme Qu- est donc démesurée quand on examine<br />

les textes de l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> <strong>et</strong> ce critère n’est peut-être pas fiable pour l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>.<br />

Je distinguerai plusieurs cas dans la répartition de ces trois types. Je distinguerai d’une part les<br />

préposition « légères » à <strong>et</strong> de <strong>et</strong> d’autre part, les prépositions « sémantiquem<strong>en</strong>t lourdes », comme le<br />

dirait Muller, comme par, sur, <strong>et</strong>c.<br />

13 Voir Brunot : HLF, T. III, La formation de la langue classique, 1600-1660, p. 509.


Séqu<strong>en</strong>ce : c’est préposition X Qu- + Verbe<br />

<strong>Les</strong> prépositionnels le plus souv<strong>en</strong>t mis <strong>en</strong> valeur par les différ<strong>en</strong>ts auteurs sont ceux qui sont réalisés<br />

avec des prépositions “ légères ” (à ou de) <strong>et</strong> un terme clivé [+hum]. Or, mis à part un exemple du<br />

13 ème siècle, je n’ai pas relevé dans mon corpus d’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong> de prépositionnels réalisés avec des<br />

prépositions “ légères ” de type à ou de sur un terme clivé [+hum].<br />

Prépositions « lourdes » : por / par<br />

Avec les prépositions par / por, X peut être [+hum] ou [-hum]. Ritchie (p. 21) cite deux exemples de<br />

la fin du XII e siècle, l’un sur un terme [+hum] pronominal, l’autre avec « Dieu » :<br />

(101) Or <strong>en</strong> aiés por Diu merchi,<br />

Que c’est por vos k’ele est <strong>en</strong> paine. (Gautier d’Arras, Ille <strong>et</strong> Galeron v. 6417)<br />

(102) Ce fu de par Diu qu’il vint chi<br />

<strong>et</strong> par la soie grant merchi. (Gautier d’Arras, Ille <strong>et</strong> Galeron v. 3529)<br />

auquel j’ajoute l’énoncé (103) de la fin du XII e siècle où l’élém<strong>en</strong>t clivé est pronominal <strong>et</strong> (106) où X<br />

est lexical :<br />

(103) « Jason, mult estes mal bricon,<br />

Eschapé fols, naïs musars,<br />

Trop par f<strong>et</strong>es maveis regars.<br />

Est ceo pur vus, dites Imaine,<br />

Qe cist musars tel vie meine ? » (Hue de Rotelande, Ipomedon v. 869)<br />

(104) Au chavés de la biere se m<strong>et</strong> a g<strong>en</strong>ollons<br />

Et regr<strong>et</strong>e Alixandre, non mie a conseillons :<br />

« Alixandre, fait il, li sires des Griffons,<br />

Com est por vostre mort li cieus noirs <strong>et</strong> <strong>en</strong>brons,<br />

Li oisel s’atapiss<strong>en</strong>t <strong>et</strong> abaiss<strong>en</strong>t lor sons.<br />

Molt nos avés laissiés <strong>en</strong> grans torblacions ;<br />

C’est par les traïtors qui fir<strong>en</strong>t les poisons<br />

Dont <strong>en</strong> terre est v<strong>en</strong>ue si grans confusions... » (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre br. 4 v. 1382)<br />

A partir de la fin du XIV e siècle, les énoncés avec X [+hum] pronominal, <strong>et</strong> la préposition par sont<br />

plus nombreux :<br />

(105) Tu, Melusine, qui est l’ainznee <strong>et</strong> celle qui deusses estre la plus cognoissans, c’est par toy, car le<br />

scay bi<strong>en</strong>, que ceste dure chartre <strong>et</strong> prison a esté donnee a ton pere, <strong>et</strong> pour ce <strong>en</strong> seras la premiere punie.<br />

(Jean d’Arras, Mélusine p. 12)<br />

(106) Messagier, il me fault savoir<br />

Que vi<strong>en</strong>s tu querre bi<strong>en</strong>veignant<br />

Est ce pour moy qu’es attaingnant<br />

Ces l<strong>et</strong>tres la? (Miracles de Notre Dame par Personnages, t. 2, Miracle de saint Guillaume du desert v.<br />

207)<br />

(107) De guerre a mort je le deffi.<br />

C’est par lui que l’oultraige fi,<br />

Dont il me fault mort recevoir. (Narcissus v. 770)<br />

(108) C’est par moy que mon pere <strong>et</strong> ma mere, qui tant m’aymoi<strong>en</strong>t, <strong>et</strong> m’ont assemblé <strong>et</strong> laissé tant de<br />

bi<strong>en</strong>s, ne sont <strong>en</strong>cores <strong>en</strong> vie. (C<strong>en</strong>t Nouvelles Nouvelles, XX e Nouvelle p. 138)<br />

(109) Et disons que c’est par ly que Driadés est sy mauvais...(Ysaÿe le Triste § 581)


(110) Et Marthe dist : « C’est par ty qu’il n’est fait ! » (Ysaÿe le Triste § 509)<br />

X [– hum], est attesté quand la préposition se trouve avant le terme clivé <strong>et</strong> les prépositions employées<br />

sont sémantiquem<strong>en</strong>t « lourdes » comme par :<br />

(111) Et quant il or<strong>en</strong>t grant piece parlé dou Chevalier <strong>et</strong> de la cort le roi Artus, si li demanda Perceval<br />

par quele achaison ele s’ert mise <strong>en</strong> si sauvage leu <strong>et</strong> avoit lessiee sa terre « Par Dieu, fait ele, ce fu par<br />

poor de mort que je m’<strong>en</strong> afoï ça. (Queste, p. 80, 25)<br />

(112) Croissans l’aveule voit, lors ne s’areste mie :<br />

il broche le chaval, d[es] esporons l’aigrie,<br />

a l’aveule est v<strong>en</strong>us, hautem<strong>en</strong>t li escrie :<br />

«Diva, maleüreus, li solaus te maudie !<br />

Que n’oevres tu tes iex ?» Est che par moquerie<br />

que tu les vas cluignant, ou par truanderie ? (Beaudouin de Sebourc p. 209)<br />

(113) Et par Dieu, je suis bi<strong>en</strong> infame<br />

Et digne de grant honte <strong>et</strong> blasme:<br />

C’est par mon fait qu’elle me lesse. (Narcissus v. 1007)<br />

Prépositions « légères » à, de<br />

A la fin du XIV e siècle , le lexique [- hum] avec préposition à est possible :<br />

(114) Monseigneur, dist Melusigne, puis qu’il ne pu<strong>et</strong> estre autrem<strong>en</strong>t, <strong>et</strong> que je voy que c’est a vostre<br />

plaisir que je lui m<strong>et</strong>te son nom, or ait a nom Lusign<strong>en</strong>. (Jean d’Arras, Mélusine p. 47)<br />

(98) ce n’est pas a vraye foy que vous parlez (Ysaÿe Le Triste § 141)<br />

avec des noms de lieu :<br />

(115) Et ainsi, de ma souv<strong>en</strong>ance, sont mors <strong>en</strong> ces divisions d’Angl<strong>et</strong>erre bi<strong>en</strong> quatre vingts hommes de<br />

la lignee royalle d’Angl<strong>et</strong>erre, dont une partie j’ay congneu ; des autres m’a esté compté par les Angloys<br />

demurans avecques monsr de Bourgongne, tandis que je y estoye. Ainsi, ce n’est pas à Paris ne <strong>en</strong><br />

France seulem<strong>en</strong>t que on s’<strong>en</strong>trebat pour les bi<strong>en</strong>s <strong>et</strong> honneurs <strong>en</strong> ce monde. (Commynes, Mémoires, t.<br />

1, p. 54)<br />

X [+hum] avec la préposition a <strong>et</strong> de 14 est attesté vers la fin du XIII e siècle. Le terme X est<br />

préfér<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t pronominal. <strong>Les</strong> verbes recteurs sont majoritairem<strong>en</strong>t des verbes de dire, <strong>et</strong>, mis à<br />

part (116), ce sont des exemples de moy<strong>en</strong> <strong>français</strong>, :<br />

(116) ch’est des bigames k’il parole (Adam de la Halle, Jeu de la Feuillée v. 517)<br />

(117) Est ce a vous, ne me m<strong>en</strong>tez mie,<br />

Que la doulce vierge Marie<br />

A hui pour norrir apporté<br />

Un p<strong>et</strong>it <strong>en</strong>fant nouviau né ? (Miracles de Notre Dame par Personnages, t. 1, Miracle de l’abbeesse<br />

grosse v. 1217)<br />

(118) Tant ly conta qu’il s’apercheur<strong>en</strong>t tous que c’estoit d’Ysaÿe qu’il parloit. (Ysaÿe Le Triste § 371)<br />

(119) C’est a vous mesme que je parle<br />

Et vous me le r<strong>en</strong>drez par le<br />

Dieu qui voult a Noel estre né ! (La Farce de Maître Pathelin v. 1442)<br />

14 Ce sont les seuls exemples du DMF dont je dispose avec la préposition sur le terme X.


(120) sy l’appeller<strong>en</strong>t <strong>et</strong> luy dir<strong>en</strong>t ce qu’il estoit adv<strong>en</strong>u <strong>en</strong> disant : « C'est de vous, beau sire Philipot,<br />

que cy parlons <strong>et</strong> pour vostre bi<strong>en</strong> <strong>et</strong> avancem<strong>en</strong>t ; (...) (Roman du Comte d’Artois p. 109)<br />

(121) Et c’est a vous que j’ay a faire:<br />

Vous m’avez trompé faulsem<strong>en</strong>t<br />

Et emporté furtivem<strong>en</strong>t<br />

Mon drap par vostre beau langaige. (La Farce de Maître Pathelin v. 1479)<br />

(122) Quand prestes fur<strong>en</strong>t <strong>et</strong> sur piez mises, <strong>et</strong> leur pou de mesnage mis a point, la bonne mere si<br />

demande a sa fille s’elle n’a ri<strong>en</strong> oy <strong>en</strong> ceste nuyt. Et elle luy respond : « Certes, mere, n<strong>en</strong>ny. » « Ce<br />

n’est pas a toy, dit elle aussi, que de prinsault ce doulx message s’adresse, combi<strong>en</strong> qu’il te touche<br />

beaucoup. » (C<strong>en</strong>t Nouvelles Nouvelles, XIII e Nouvelle p. 99)<br />

(123) est ce a moy que vous devez adrecer telles paroles ? (C<strong>en</strong>t Nouvelles Nouvelles, XVIII e Nouvelle<br />

p. 120)<br />

(124) Par mon serm<strong>en</strong>t, il est bi<strong>en</strong> lort.<br />

Il semble a celuy qui estoit<br />

Desus son asne, <strong>et</strong> le queroit.<br />

C’est a lui mesme qu’il parolle,<br />

Car il a la teste si folle<br />

Qu’il cuide qu’el s’<strong>en</strong> soit alee<br />

Pour ce qu’il a l’ewe troublee ; (Narcissus v. 997)<br />

(125) Et ly chevaliers lui conta comm<strong>en</strong>t il fu abatus a le jouste, <strong>et</strong> que il perdy son cheval, <strong>et</strong> ly ungz<br />

d’eulx le r<strong>en</strong>dy. Et Barut dist : « Ce fu a moy que vous joutastes, <strong>et</strong> je vous r<strong>en</strong>voyai vo cheval pour<br />

l’amour d’Isaÿe au quel vous v<strong>en</strong>iés, <strong>en</strong>sy que le me conta ly contes de Zelande qui vint a moy jouster. »<br />

(Ysaÿe Le Triste § 386)<br />

Au XVI e siècle, peu d’occurr<strong>en</strong>ces sont attestées, <strong>en</strong> voici une tirée de FRANTEXT :<br />

(126) « C'est à telles g<strong>en</strong>s que l’on doit bailler dames à garder : ils les laiss<strong>en</strong>t parler sans sçavoir à qui,<br />

<strong>et</strong> puis, adjoustans foy à leurs parolles, vont faire honte aux serviteurs de Dieu. (Marguerite de Navarre,<br />

Heptaméron p. 822)<br />

En (127) la préposition se trouve avant X [+hum], <strong>et</strong> c’est une relative : la préposition de a ici un s<strong>en</strong>s<br />

partitif. Le verbe n’est pas un verbe de dire, contrairem<strong>en</strong>t aux exemples précéd<strong>en</strong>ts :<br />

(127) « Sire, sachiez que le larron qui vostre tresor a emblé est demouré <strong>en</strong> la gluz, mais de tant nous va<br />

malem<strong>en</strong>t que on lui a osté la teste, pour quoy on pu<strong>et</strong> savoir que cellui qui ce a fait a compaignon ».<br />

« Sainte Marie, que a Dieu <strong>en</strong>p<strong>en</strong>sé de faire de moy, quant <strong>en</strong> toutes manieres me courrouce ? C’est de<br />

mes hommes que devant moy voy occiz, que oncques ne leur osay aidier ; aprés c’est de mon nepveu qui<br />

est murdry <strong>et</strong> si ne sçay qui ce a fait. (Bérinus, t. 1 p. 405)<br />

Séqu<strong>en</strong>ce : c’est X préposition Qu- + Verbe<br />

C<strong>et</strong>te séqu<strong>en</strong>ce se trouve dès l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>, dans (128) (129) (130), ce sont des constructions non<strong>clivées</strong><br />

:<br />

(128) Le cyrogrefe al rei li arcevesques pr<strong>en</strong>t ;<br />

As piez a l’apostolie a ses dous mains l’est<strong>en</strong>t.<br />

« C’est la cause pur quei m’estu<strong>et</strong> essil suffrir,<br />

Sire, veez la ci ; bi<strong>en</strong> la devez oïr. (Guernes de Pont Sainte Max<strong>en</strong>ce, La Vie de saint Thomas Beck<strong>et</strong> v.<br />

470)<br />

(129) Ce que tu de la crouiz m’ostas<br />

Et ou sepulchre me couchas,<br />

C’est l' auteus seur quoi me m<strong>et</strong>runt<br />

Cil qui me sacrefïerunt (Robert de Boron, Le Roman de l'Estoire dou Graal, v. 903)


(130) « C’est le chemin par quoy vous cherrés <strong>en</strong> arriere, <strong>et</strong> serés marchés soubz lez piez, <strong>en</strong>lacés, prins<br />

<strong>et</strong> peris par variabl<strong>et</strong>é de conseil <strong>et</strong> par faulte de constance ». (Alain Chartier, Le Livre de l’Espérance p.<br />

81)<br />

L’énoncé (131) du XIII e siècle ainsi que l’énoncé (132) du XV e siècle, avec la préposition à, <strong>et</strong> le<br />

verbe combatre, peuv<strong>en</strong>t s’analyser comme des <strong>clivées</strong> :<br />

(131) Or t’ai tant dit de cele dame que tu doiz bi<strong>en</strong> savoir qui ele est <strong>et</strong> que ele te vint veoir plus por ton<br />

mal que por ton bi<strong>en</strong>.» - «Sire, f<strong>et</strong> Perceval, vos m’avez tant dit de cele dame que je sai bi<strong>en</strong> que ce est li<br />

champions a qui je me devoie combatre.» (Queste p. 114, 25)<br />

(132) Et quant Marc oÿ que c’estoit ses peres a qui combatus s’estoit, toutte se forche <strong>et</strong> se puissance lui<br />

fally (...) (Ysaÿe Le Triste § 518)<br />

Comme nous le verrons plus loin lors de l’exam<strong>en</strong> des contextes, ces énoncés m<strong>en</strong>tionn<strong>en</strong>t un<br />

personnage dont il a été question auparavant ou qui a déjà été m<strong>en</strong>tionné, ce qui constitue un indice<br />

pour les analyser comme des <strong>clivées</strong>.<br />

Séqu<strong>en</strong>ce c’est préposition X préposition Qu- + Verbe :<br />

Ce schéma est rare <strong>en</strong> anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>. L’exemple (100), avec le locatif ou qui intègre la préposition,<br />

date du premier quart du XIII e siècle :<br />

(100) - Biaux doux sire, fait Boorz, ou fu ce dont ou vous avez esté si longtemps <strong>en</strong> prison, <strong>et</strong> <strong>en</strong> quel<br />

lieu ? (Lancelot 91. 27 ; Kunstmann p. 284)<br />

Au XV e siècle, le schéma avec réduplication de la préposition 15 c’est prép X prép qui Verbe est attesté<br />

une fois, <strong>en</strong> (133) avec X pronominal [+hum]. C<strong>et</strong>te occurr<strong>en</strong>ce est bi<strong>en</strong> connue, elle est citée par<br />

toutes les grammaires :<br />

(133) C’est a vous a qui je v<strong>en</strong>di<br />

Six aulnes de drap, maistre Pierre. (La Farce de Maître Pathelin v. 1265)<br />

ou bi<strong>en</strong> à date plus anci<strong>en</strong>ne, au XIV e siècle, avec un terme X infinitif :<br />

(134) Or vous vueilliez du serf li<strong>en</strong> t<strong>en</strong>ir<br />

Ou pluseurs par couvoitise<br />

Ont perdu corps, esperit <strong>et</strong> franchise ;<br />

C’est de servir autrui, dont je me lasse : (Eustache Deschamps, t. 1, Balades de Moralitez, Vivre du si<strong>en</strong>,<br />

sans ri<strong>en</strong> devoir aux autres v. 8)<br />

Ces deux exemples pourrai<strong>en</strong>t s’interpréter comme des <strong>clivées</strong>.<br />

(135) avec un X nom [-hum], est plutôt une relative :<br />

(135) Je doubte que nous ne soyons<br />

Maulditz, car c’est par noz pechez<br />

Parquoy esclandre nous ayons,<br />

Car trop fort sommes <strong>en</strong>tachez,<br />

Nous <strong>en</strong> avons tous les meschiefz<br />

Et les tourm<strong>en</strong>s quë <strong>en</strong>durons. (Jean Regnier, <strong>Les</strong> Fortunes <strong>et</strong> adversitez v. 1858)<br />

15 C<strong>et</strong>te construction avec la double préposition schéma semble un peu plus productif vers le milieu du 16 ème<br />

siècle. D’après les dépouillem<strong>en</strong>ts faits sur FRANTEXT, le terme X dans ce corpus du 16 ème est toujours<br />

pronominal quand la préposition est à : c’est à toy voyrem<strong>en</strong>t à qui j’<strong>en</strong> veulx. (Des Periers, p. 496, 1558 ;<br />

FRANTEXT)


Pour Haase (§ 36) : « dont, où ainsi qu’un relatif accompagné d’une préposition pour rappeler un<br />

substantif ou un pronom régis par une préposition dans une phrase am<strong>en</strong>ée par c’est : c’est à la Cour<br />

où l’on <strong>en</strong> use le moins (Vaugelas), ce n’est point de ma captivité ni de ma blessure dont je suis <strong>en</strong><br />

peine (Fénelon) » se r<strong>en</strong>contr<strong>en</strong>t à la place de que dans les textes jusqu’au XVII e siècle. Au vu du peu<br />

d’exemples <strong>en</strong> moy<strong>en</strong> <strong>français</strong>, il est difficile de dire que la construction s’ét<strong>en</strong>d à c<strong>et</strong>te période. <strong>Les</strong><br />

prépositionnels avec des places de préposition, soit avant le terme clivé c’est prép X que Verbe, soit<br />

avec réduplication de la préposition c’est prép X prép qui Verbe, si souv<strong>en</strong>t mis <strong>en</strong> valeur <strong>et</strong> discutés,<br />

sont <strong>en</strong> fait relativem<strong>en</strong>t tardifs, <strong>et</strong> les attestations éparses <strong>en</strong> moy<strong>en</strong> <strong>français</strong> ou bi<strong>en</strong> répétitives<br />

(comme les occurr<strong>en</strong>ces de Pathelin toujours citées) ne suffis<strong>en</strong>t pas à établir l’importance du<br />

phénomène.<br />

3. 2. 3. Bilan : les datations<br />

Je prés<strong>en</strong>te sous forme de tableau récapitulatif les différ<strong>en</strong>tes constructions r<strong>en</strong>contrées <strong>en</strong> séparant les<br />

prépositionnels à <strong>et</strong> de <strong>et</strong> les prépositionnels <strong>en</strong> por/par.<br />

Avec les préposition a <strong>et</strong> de :<br />

Prépositionnels adverbiaux a droit, a certes milieu du<br />

XII e<br />

préposition à sur Qu-, X [+hum]<br />

c’est X [+hum] à premier<br />

qui<br />

quart du<br />

XIII e<br />

préposition à sur le terme clivé [+hum]<br />

c’est à X [+hum]<br />

que<br />

milieu du<br />

XIV e<br />

c’est a bon droit que Diex<br />

nous a <strong>en</strong> tel destroit (Thèbes)<br />

ce est li champions a qui je<br />

me devoie combatre (Queste)<br />

Est ce a vous (...) que la<br />

doulce vierge Marie a hui por<br />

norrir apporté (...)(Mir.<br />

abbeesse)<br />

ch’est des bigames k’il parole<br />

(Feuillée)<br />

préposition de sur le terme clivé [+hum] c’est de X [+hum]<br />

que<br />

fin du XIII e<br />

préposition à sur le terme clivé [-hum] c’est à X [-hum] que fin du XIV e c’est a vostre plaisir que je lui<br />

m<strong>et</strong>te son nom (Mélusine)<br />

double place de la préposition à, X [+hum] c’est à X [+hum] à milieu du c’est a vous a qui je v<strong>en</strong>di six<br />

qui<br />

XV e aulnes de drap (Pathelin)<br />

double place de la préposition de, X<br />

[Infinitif]<br />

c’est de X [Infinitif]<br />

dont<br />

fin du XIV e<br />

c’est de servir autrui dont je<br />

me lasse (Eustache<br />

Deschamps)<br />

Préposition par/por :<br />

préposition por sur X<br />

[-hum]<br />

c’est por X [-hum] que<br />

premier<br />

quart du<br />

XIII e<br />

ce fu par poor de mort que je m’<strong>en</strong><br />

afoï ça. (Queste)<br />

préposition por sur X [+hum] c’est por X [+hum] que fin du XII e c’est por vos k’ele est <strong>en</strong> paine (Ille)<br />

préposition par sur X [+hum] c’est par X [+hum] que fin du XIV e c’est par toy,(...)que ceste dure<br />

chartre <strong>et</strong> prison a esté donnee a ton<br />

pere (Mélusine)<br />

4. <strong>Les</strong> facteurs favorisant l’interprétation<br />

<strong>Les</strong> facteurs qui favoris<strong>en</strong>t l’interprétation sont contextuels <strong>et</strong> sont de différ<strong>en</strong>tes natures. On relève<br />

des contextes discursifs, sémantiques <strong>et</strong> morpho-syntaxiques. Dans ces contextes discursifs, nous<br />

examinerons successivem<strong>en</strong>t le discours direct <strong>et</strong> les contrastes. Dans les contextes morphosyntaxiques,<br />

les <strong>en</strong>châssem<strong>en</strong>ts de relative dans une clivée. <strong>Les</strong> adverbiaux temporels <strong>et</strong> les


temporelles <strong>en</strong> ce fu seront examinés à la suite des <strong>en</strong>châssem<strong>en</strong>ts : ils sont souv<strong>en</strong>t <strong>en</strong>châssés dans<br />

une clivée.<br />

4. 1. Le discours direct : les premières attestations<br />

<strong>Les</strong> <strong>clivées</strong> apparaîss<strong>en</strong>t préfér<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t dans le discours direct. Voici deux énoncés avec le verbe<br />

dire qui introduit explicitem<strong>en</strong>t le discours direct, li dist, che dist Makaires :<br />

(6) Ele cognut tres bi<strong>en</strong> Athon<br />

a la manche du syglaton<br />

que il avoit par connoissance<br />

lacié el soum<strong>et</strong> de sa lance.<br />

A sa seur l’a moustré au doi,<br />

belem<strong>en</strong>t li dist <strong>en</strong> secroi:<br />

« Ce est Athes que je la voi,<br />

veez com broche a cel tornoi !... » (Thèbes v. 4685)<br />

(136) Makaires li traitre Mibri<strong>en</strong> <strong>en</strong> apele :<br />

« Par foi, » che dist Makaires, « trop i faites grant perte:<br />

« Ce est Aiols [li ber] qui vos fait ceste guerre. » (Aiol v. 10611)<br />

L’élém<strong>en</strong>t clivé est souv<strong>en</strong>t un nom propre (Athon, Aiols) ou un nom de par<strong>en</strong>té (mi oir), c’est presque<br />

toujours un nom désignant un humain. Il a souv<strong>en</strong>t été m<strong>en</strong>tionné dans le contexte précéd<strong>en</strong>t comme<br />

complém<strong>en</strong>t d’un verbe de perception, conoistre, mostrer :<br />

(6’) ele cognut tres bi<strong>en</strong> Athon/ …./ a sa seur l’a moustré / …. / « c’est Athon que je la voi »<br />

Le clivage est donc utilisé ici pour confirmer sous forme de style direct une information déjà<br />

préalablem<strong>en</strong>t fournie. La même disposition est attestée lorsque l’élém<strong>en</strong>t clivé est suj<strong>et</strong> d’un verbe de<br />

parole : Ce est Ysmaine qui parole ! alors que le même référ<strong>en</strong>t a déjà été cité dans le contexte<br />

précéd<strong>en</strong>t comme suj<strong>et</strong> d’un autre verbe de parole : si se compleint.<br />

(76) C<strong>en</strong>z foiz le baise de randon,<br />

les eulz, la bouche <strong>et</strong> le m<strong>en</strong>ton.<br />

Devant le cors si se compleint<br />

<strong>et</strong> son grant deul au cors refreint:<br />

« Athes ! biau sire, tu ne m’oz !<br />

Euvre tes eulz! por coi les cloz ?<br />

Ce est Ysmaine qui parole !<br />

Maleüree, com sui fole !<br />

Il ne m’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t ne ne me voit,<br />

<strong>en</strong> la biere le s<strong>en</strong>t tot froit. » (Thèbes v. 6075)<br />

Dans (137) la confirmation du discours précéd<strong>en</strong>t se fait par une validation de l’id<strong>en</strong>tification des<br />

personnages m<strong>en</strong>tionnés préalablem<strong>en</strong>t, avec dans le contexte précéd<strong>en</strong>t, le verbe veoir :<br />

(137) Cez qui vi<strong>en</strong><strong>en</strong>t ont bi<strong>en</strong> veüez ;<br />

Li s<strong>en</strong>eschax premiers le vit.<br />

A mon seignor Gauvain a dit :<br />

« Sire, f<strong>et</strong> il, mes cuers devine<br />

Que cil vasax qui la chemine,<br />

c’est cil que la reïne dist<br />

Qui hier si grant <strong>en</strong>ui li fist.<br />

Ce m’est avis que il sont troi ;<br />

Le nain <strong>et</strong> la pucele voi.<br />

- Voirs est, f<strong>et</strong> mes sire Gauvains,<br />

C’est une pucele <strong>et</strong> uns nains,<br />

Qui avoec le chevalier vi<strong>en</strong><strong>en</strong>t ;


Vers nos la droite voie ti<strong>en</strong><strong>en</strong>t. (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Erec <strong>et</strong> Enide v. 1100)<br />

Dans quelques cas, l’élém<strong>en</strong>t clivé est suj<strong>et</strong> d’un verbe de parole qui n’a pas été donné tel quel<br />

précédemm<strong>en</strong>t mais qui a été m<strong>en</strong>tionné ; c’est le cas de : ce est li bons qu<strong>en</strong>s Thideüs Qui vint a toi<br />

parler ça sus :<br />

(138) « Mout me sembleroit granz viltez<br />

que fusse par vous afolez,<br />

quant tiex vassal me lessa vivre<br />

qui ne me voult onques ocirre :<br />

ce est li bons qu<strong>en</strong>s Thideüs<br />

qui vint a toi parler ça sus.<br />

Je ne morrai ja par t’espee,<br />

car la moie m’est plus privee. » (Thèbes v. 1941)<br />

Une variante est fournie par des élém<strong>en</strong>ts clivés qui se trouv<strong>en</strong>t complém<strong>en</strong>ts d’un verbe de perception<br />

(conoitre, veoir, moustrer) déjà prés<strong>en</strong>t dans le contexte précéd<strong>en</strong>t :<br />

(7) « Seingnors, f<strong>et</strong> il, ce sont mi oir<br />

que vous veïstes ci er soir. » (Thèbes v. 1021)<br />

(10) Quant la roïne <strong>en</strong>t<strong>en</strong>t q’Antigonus v<strong>en</strong>oit,<br />

Ele li vait <strong>en</strong>contre, tantost comme el le voit<br />

M<strong>en</strong>bra li de l’ymage, lores sot bi<strong>en</strong> <strong>et</strong> croit<br />

Que ce est Alixandres, mais dire ne l’osoit ;<br />

Puis que il son non çoile, bi<strong>en</strong> tost l’<strong>en</strong> peseroit.<br />

Antigonon l’apele, par la main le t<strong>en</strong>oit,<br />

Puis le maine <strong>en</strong> la chambre ou la painture estoit ;<br />

Tres dedevant l’ymage <strong>en</strong> son lit l’asseoit.<br />

Quant voit lui <strong>et</strong> l’ymage, bi<strong>en</strong> s’<strong>en</strong> apercevoit<br />

Que ce iert Alixandres qui aveuc li estoit. (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre br 3 v. 4768)<br />

Ces deux types de verbes, de parole <strong>et</strong> de perception, sont n<strong>et</strong>tem<strong>en</strong>t majoritaires dans les exemples<br />

anci<strong>en</strong>s. Ils repr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t presque toujours tout un énoncé préalable pour le confirmer dans un discours<br />

direct.<br />

4. 2. Contrastes <strong>et</strong> énumération de paradigmes<br />

La clivée a pour caractéristique privilégiée d’exprimer les contrastes. On associe un eff<strong>et</strong> contrastif<br />

<strong>en</strong>tre l’élém<strong>en</strong>t clivé <strong>et</strong> les autres élém<strong>en</strong>ts (réalisés ou non) avec lesquels il <strong>en</strong>tre <strong>en</strong> opposition. Pour<br />

Jones (p. 526) « The typical effect of clefting is to give a contrastive emphasis to the elem<strong>en</strong>t which is<br />

pres<strong>en</strong>ted as the object of c’est. ». Givon (2002, II) consacre un chapitre aux outils perm<strong>et</strong>tant le<br />

contraste, les <strong>clivées</strong> y sont désignées comme un des procédés typiques. Il considère (p. 224) que la<br />

clivée est un outil grammatical pour exprimer le contraste au même titre que l’acc<strong>en</strong>t sur le focus<br />

(stress-focus) <strong>et</strong> que la pseudo-clivée : « (…) a language may have a vari<strong>et</strong>y of contrastive<br />

grammatical devices. These constructions may be functionally related, but they are by no means<br />

interchangeable. ». Il lie le contraste à la valeur anaphorique de la clivée (p. 229 ss): le référ<strong>en</strong>t de la<br />

clivée doit être anaphoriquem<strong>en</strong>t accessible. D’après lui, l’une des caractéristiques est que la clivée ne<br />

peut apparaître <strong>en</strong> début de discours ou <strong>en</strong> début de paragraphe sauf si l’élém<strong>en</strong>t NP contrasté a déjà<br />

été topicalisé précédemm<strong>en</strong>t. Il oppose ainsi <strong>en</strong> début de discours la pseudo-clivée : What we’re going<br />

to talk about today is love <strong>et</strong> la clivée It’s love that we’re going to talk about today donnée comme<br />

douteuse <strong>en</strong> début de discours. En revanche, la clivée peut être <strong>en</strong> position « médiane »: You thought<br />

we were going to speak of charity, but it’s love that we’re going to talk about today.<br />

Comme je l’ai signalé précédemm<strong>en</strong>t, la clivée ne peut se réduire au seul contraste. Dans la clivée<br />

« broad focus » citée par Do<strong>et</strong>jes, Rebuschi, Rialland (2003) C’est avec plaisir que je vous invite à<br />

participer à ce séminaire, le terme X avec plaisir n’est pas exhaustif, il ne s’oppose pas à d’autres<br />

instances d’un paradigme év<strong>en</strong>tuel <strong>et</strong> peut apparaître à l’initiale d’un texte.


Le contraste est un cas particulier de phénomène d’exploitation de paradigme. Le terme X est extrait<br />

d’une série paradigmatique qui compr<strong>en</strong>d d’autres élém<strong>en</strong>ts. <strong>Les</strong> phénomènes d’exploitation de<br />

paradigmes se répartiss<strong>en</strong>t <strong>en</strong> deux types : les disjonctions – analysables comme des énumérations de<br />

paradigmes - <strong>et</strong> les contrastes. Ces phénomènes d’énumération de paradigmes sont anci<strong>en</strong>s, ils<br />

apparaiss<strong>en</strong>t dès l’anci<strong>en</strong> <strong>français</strong>, sous forme de disjonction :<br />

(86) - Est ce par ire, ou par despit,<br />

f<strong>et</strong> li rois, qu’aler <strong>en</strong> volez ? (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Charr<strong>et</strong>te v. 104)<br />

(139) Je ne sçay se c’est un bourgois<br />

Ou un clerc que voy la aler; (Miracles de Notre Dame par personnages, t. 2, Miracle d’un marchant <strong>et</strong><br />

d’un larron v. 252)<br />

En revanche, les attestations de contraste qui signal<strong>en</strong>t l’appart<strong>en</strong>ance de l’élém<strong>en</strong>t clivé à un<br />

paradigme sont plus tardives. Elles sont attestées <strong>en</strong> moy<strong>en</strong> <strong>français</strong> à la fin du XIV e siècle, <strong>et</strong> sont très<br />

peu fréqu<strong>en</strong>tes. <strong>Les</strong> exemples que je donne ici constitu<strong>en</strong>t la totalité des contrastes relevés dans le<br />

DMF. Je r<strong>et</strong>i<strong>en</strong>s dans mon classem<strong>en</strong>t les <strong>clivées</strong> dans lesquelles le contraste est réalisé par une<br />

« forme longue » constituée par la séqu<strong>en</strong>ce c’est X Qu- + Verbe puis par une « forme<br />

courte » 16 contigüe c’est X :<br />

(140) Il se peut dire a grant confusion de toy <strong>et</strong> dampnacion de tes prelas <strong>et</strong> conseilliers que ce n’est pas<br />

l’office divin qui ce celebre devant toy parlant moralem<strong>en</strong>t mais c’est une foire ord<strong>en</strong>ee <strong>en</strong> la quelle on<br />

v<strong>en</strong>t <strong>et</strong> achate <strong>en</strong> pourchassant les dons les graces <strong>et</strong> les offices (…) (Songe du Vieil Pelerin, Ms Ars<strong>en</strong>al<br />

2682-3, édité par A. De Wolf, f° 113 r°a)<br />

(141) En l’eure vinr<strong>en</strong>t au lit la ou Ysaÿe avoit geu. « Ce n’est pas la qu’il gist, par Dieu, fait Trons,<br />

c’est <strong>en</strong> le cambre de la. (Ysaÿe Le Triste § 69)<br />

L’exemple (84) prés<strong>en</strong>te une alternance <strong>en</strong>tre le déterminant zéro dans la forme longue <strong>et</strong> la prés<strong>en</strong>ce<br />

d’un déterminant dans la forme courte :<br />

(84) Que appelle je guerre ? Ce n’est pas guerre qui <strong>en</strong> ce royaume se mayne, c’est une privee roberie,<br />

ung larrecin habandonné, force publique soubz umbre d’armes <strong>et</strong> viol<strong>en</strong>te rapine que faulte de justice <strong>et</strong><br />

de bonne ordonnance fait estre loisibles. (Alain Chartier, Quadrilogue Invectif p. 21)<br />

Une forme courte peut être suivie d’une forme longue :<br />

(142) Lors vindr<strong>en</strong>t dire a Gioffroy : « Sire ce sont d’un costé Sarrasins, <strong>et</strong> d’autre costé, Cresti<strong>en</strong>s qui<br />

cri<strong>en</strong>t Lusegn<strong>en</strong> <strong>et</strong> Saint Jehan de Rodes. Mais certainem<strong>en</strong>t ce n’est pas le roy Urii<strong>en</strong> monseigneur,<br />

mais croy que ce soit le roy Guion d’Arm<strong>en</strong>ie, son frere, <strong>et</strong> le grant maistre de Rodes qui ont <strong>en</strong>contré<br />

Sarrasins sur la mer. (Jean d’Arras, Mélusine p. 217)<br />

(143) Par Mahon, dist le soudant, ce n’est pas uns homs, mais est un mauffez ou c’est le dieu des<br />

cresti<strong>en</strong>s qui cy est v<strong>en</strong>us pour destruire nostre loy. (Jean d’Arras, Melusine p. 232)<br />

<strong>Les</strong> contrastes sont souv<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tés par des exemples fabriqués avec une polarité positive suivie<br />

d’une polarité négative. L’exam<strong>en</strong> des corpus montre que le contraste se prés<strong>en</strong>te d’abord sous une<br />

polarité négative avec l’exclusion d’un terme du paradigme, puis sous une polarité positive 17 .<br />

16 Contrairem<strong>en</strong>t à Muller (2003), je n’accepterai comme « ellipse » que les « formes courtes » qui suiv<strong>en</strong>t une<br />

« forme longue » dans un contexte contigu. C’est pourquoi je n’analyse pas comme clivés les énoncés analysés<br />

comme tel par Muller : Et li niés Phari<strong>en</strong> faisoit m<strong>en</strong>gier Bohort, mais c’estoit a mout grant angoisse (Lancelot<br />

du Lac, 200 ; Muller : 2003). Je n’ai pas dans mon corpus de contraste <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t développé (ce n’est pas X<br />

qui, c’est Y qui).<br />

17 C<strong>et</strong>te même t<strong>en</strong>dance se r<strong>et</strong>rouve dans les corpus de <strong>français</strong> moderne.


4. 3. <strong>Les</strong> <strong>en</strong>châssem<strong>en</strong>ts<br />

En anci<strong>en</strong> <strong>et</strong> <strong>en</strong> moy<strong>en</strong> <strong>français</strong>, la relative peut s’intégrer dans la construction clivée. La séqu<strong>en</strong>ce X<br />

<strong>et</strong> Qu- + Verbe relative est <strong>en</strong>châssée dans une clivée <strong>et</strong> cela peut constituer un critère d’id<strong>en</strong>tification<br />

de la clivée. Dans les exemples (144), (145), les <strong>en</strong>châssem<strong>en</strong>ts sont à base nominale : le terme<br />

nominal est d’abord modifié par la relative qui suit, le deuxième élém<strong>en</strong>t Qu- suivi du verbe n’est pas<br />

analysable comme une relative mais comme la deuxième partie de la clivée.<br />

(144) « Beals fiz », f<strong>et</strong> ele, « avez oï<br />

cum Deus nus a am<strong>en</strong>ez ci !<br />

C’est vostre pere ki ci gist,<br />

que cist villarz a tort ocis. (Marie de France, Lais, Yonec v. 536)<br />

(145) Bruns li ors te demandera,<br />

por ce qu’il se merveillera,<br />

qui ce est qui tel noise fait<br />

<strong>et</strong> tu li diras <strong>en</strong>tresait<br />

(n’aies mie de mantir honte);<br />

« Ce est la misnie le conte<br />

qui ce bois est <strong>et</strong> ceste terre,<br />

qui v<strong>en</strong>uz est v<strong>en</strong>oison querre... » (R<strong>en</strong>art, br. X v. 9825)<br />

Dans l’interrogative (146) qui porte sur un terme de rection focalisé, l’<strong>en</strong>châssem<strong>en</strong>t se fait sur une<br />

base cil qui ne peut constituer un élém<strong>en</strong>t autonome. Il est donc modifié par la relative qui suit, <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te<br />

relative est <strong>en</strong>châssée dans la deuxième partie clivée qui est tous seins <strong>et</strong> heitiez :<br />

(146) « N’est ce cil qui seoit oan<br />

En l’iglise <strong>et</strong> m<strong>en</strong>diest<br />

Et queroit aumones, qui est<br />

Tous seins <strong>et</strong> heitiez or<strong>en</strong>droit ? (...) (Jean le Marchant, Miracles de Notre-Dame de Chartres v. 78)<br />

L’indéfini un <strong>en</strong> (147) est « pris » dans un <strong>en</strong>châssem<strong>en</strong>t, dans un discours indirect :<br />

(147) « Gabriel, a Josaphat dire<br />

Vas qu’il laisse son dueil ester<br />

Et que Barlaam sanz doubter<br />

N’est emprisonnez ne pris, non,<br />

Mais c’est un qui Nachor a non,<br />

Qui li ressemble. (...) (Miracles de Notre Dame par Personnages, t. 3, Miracle de Barlaam <strong>et</strong> Josaphat v.<br />

1058)<br />

L’exemple (147) prés<strong>en</strong>te une élaboration de paradigme à deux élém<strong>en</strong>ts : Barlaam <strong>et</strong> Nachor, dans<br />

lequel on prélève un exemplaire unique. Le contraste passe d’abord par une polarité négative puis<br />

positive. Le contexte est celui d’un discours indirect avec le verbe dire.<br />

Pour ces exemples à base nominale, ou avec le démonstratif cil ou <strong>en</strong>core avec l’indéfini, je proposerai<br />

ce découpage <strong>en</strong> constituants :<br />

[[ce est [la maisnie le conte qui ce bois est <strong>et</strong> ceste terre] qui v<strong>en</strong>uz est v<strong>en</strong>oison querre]]<br />

[[c’est [un qui Nachor a non,] qui li ressemble]]<br />

la maisnie le conte qui ce bois est <strong>et</strong> ceste terre ; un qui Nachor a non constitu<strong>en</strong>t les élém<strong>en</strong>ts X<br />

clivés qui comport<strong>en</strong>t une relative, <strong>et</strong> qui v<strong>en</strong>uz est v<strong>en</strong>oison querre ; qui li ressemble sont les<br />

séqu<strong>en</strong>ces qu- + verbe de la clivée.<br />

Cela étant, toute séqu<strong>en</strong>ce qui se prés<strong>en</strong>te sous la forme [[c’est [X qu- Verbe] qu- Verbe]] ne s’analyse<br />

pas automatiquem<strong>en</strong>t comme une relative <strong>en</strong>châssée dans une clivée. Dans (148), avec une base <strong>en</strong> cil,<br />

deux analyses sont disponibles :


(148) Et ce est cil dont <strong>en</strong>tre moi <strong>et</strong> vos avons toute jor parlé, que messire Lancelot <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dra <strong>en</strong> la fille<br />

le Riche Roi Pescheor. (Queste p. 9, 24)<br />

(a) le démonstratif cil est modifié par la relative <strong>en</strong>châssée dans la clivée <strong>et</strong> le découpage <strong>en</strong><br />

constituants serait :<br />

[[Et ce est [cil dont <strong>en</strong>tre moi <strong>et</strong> vos avons toute jor parlé,] que messire Lancelot <strong>en</strong>g<strong>en</strong>dra <strong>en</strong> la fille le<br />

Riche Roi Pescheor.]]<br />

(b) ou bi<strong>en</strong> deux relatives qui se suiv<strong>en</strong>t, ce que semble confirmer la traduction de Baumgartner (2003<br />

: 25) : c’est celui dont nous avons nous-même parlé toute la journée, le fils de Lancelot <strong>et</strong> de la fille du<br />

Roi Pêcheur.<br />

L’énoncé (149) avec une base nominale modifiée par une relative <strong>en</strong>châssée dans la deuxième partie<br />

de la clivée, pourrait aussi être interprété comme un nexus :<br />

(149) Et maint<strong>en</strong>ant le revesti Nostre Sires <strong>et</strong> sez tu de quoi ? De paci<strong>en</strong>ce <strong>et</strong> d’umilité : ce fu la robe<br />

qu’il li dona qui estoit pleine de fr<strong>en</strong>gons, ce est la haire qui est aspre come fr<strong>en</strong>gons. Puis le monta sus<br />

un asne, ce est la beste d’umilité (Queste, p. 158, 19)<br />

il fait suite à un rêve d’Hestor raconté bi<strong>en</strong> auparavant :<br />

Maint<strong>en</strong>ant se departoi<strong>en</strong>t <strong>et</strong> erroi<strong>en</strong>t mainte jornee, <strong>et</strong> tant que Lancelot chaoit de son cheval ; si l’<strong>en</strong><br />

abatoit uns hons qui tout le despoilloit. Et quant il l’avoit despoillé, il li vestoit une robe qui toute ert<br />

pleine de fr<strong>en</strong>gons, <strong>et</strong> si le montoit sus un asne. (Queste, p. 150, 5)<br />

<strong>et</strong> c’est une interprétation de ce rêve avec une reprise du segm<strong>en</strong>t de pati<strong>en</strong>ce <strong>et</strong> d’umilité <strong>et</strong> une<br />

relation de solidarité établie <strong>en</strong>tre la robe <strong>et</strong> pleine de fr<strong>en</strong>gons. Plus largem<strong>en</strong>t, l’énoncé <strong>en</strong> c’est<br />

repr<strong>en</strong>d un fragm<strong>en</strong>t <strong>en</strong>tier de texte.<br />

La disposition syntagmatique [[c’est [X qu- Verbe] qu- Verbe]] ne suffit donc pas à constituer un<br />

critère discriminant pour distinguer une clivée d’une relative.<br />

4. 4. <strong>Les</strong> temporels<br />

J’examinerai successivem<strong>en</strong>t les adverbiaux temporels <strong>en</strong>châssés ou non dans une clivée <strong>et</strong><br />

les temporelles <strong>en</strong> ce fu avec le terme X temporel <strong>en</strong>châssé.<br />

4. 4. 1. <strong>Les</strong> adverbiaux temporels<br />

<strong>Les</strong> adverbiaux temporels sont peu attestés. Ritchie (1907 : 78) cite l’adverbial de temps hui. <strong>Les</strong><br />

exemples (150) (151) (152) s’analys<strong>en</strong>t comme des <strong>clivées</strong> :<br />

(150) Wistasces s’escria : « Hui ! Hui !<br />

- Tu dis bi<strong>en</strong>, dist li qu<strong>en</strong>s, c’ert hui<br />

Que je l’ocirai a mes mains,<br />

Se je le puis t<strong>en</strong>ir as mains. » (Li Romans de Witasse le Moine v. 1163)<br />

(151) Et il dit: « Dame, ce n’iert hui<br />

que je me remaingne an cest point<br />

tant que ma dame me pardoint<br />

son mautalant <strong>et</strong> son corroz. (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Chevalier au Lion v. 4580)<br />

(152) Et il dist: « Bele, ce n’iert hui<br />

que je autre ostel voise querre,


einz avrai tote vostre terre<br />

mise an peis, se je onques puis. (Chréti<strong>en</strong> de Troyes, Conte du Graal v. 2094)<br />

L’adverbial autrier peut se trouver <strong>en</strong>tre c’est <strong>et</strong> que, ici, pris dans un <strong>en</strong>châssem<strong>en</strong>t :<br />

(153) Ce fu l’autrier que je fui a Charlon,<br />

Que il t<strong>en</strong>oit sa cort a Mont Loon,<br />

Moi dist uns mires, qui iert de Besanson (...) (Ami <strong>et</strong> Amile v. 1193)<br />

L’exemple (153) s’analyse de deux manières. Dans une première analyse, autrier est l’élém<strong>en</strong>t clivé,<br />

que je fui a Charlon constitue la deuxième partie de la clivée. La possibilité pour autrier d’être <strong>en</strong><br />

finale absolue comme dans (154) :<br />

(154) Por quoi haéz Amile le baron ?<br />

- Sire, dist elle, <strong>et</strong> noz le voz dirons,<br />

Que ja un mot ne voz <strong>en</strong> m<strong>en</strong>tirons.<br />

Ce fu l’autrier, plainne fu ta maisons,<br />

A une feste c’on dist <strong>en</strong> Rouvisonz,<br />

Li cu<strong>en</strong>s Amiles, cui li cors Deu mal donst,<br />

Ded<strong>en</strong>s mes chambres me requist a bandon,<br />

Si me leva mon hermin pelison. (Ami <strong>et</strong> Amile v. 1206)<br />

justifierait ce découpage <strong>en</strong> constituants :<br />

[[ce fu [l’autrier] [que je fui a Charlon] que il t<strong>en</strong>oit sa cort]]<br />

Dans la deuxième analyse, l’élém<strong>en</strong>t X est formé par la séqu<strong>en</strong>ce l’autrier que je fui a Charlon. La<br />

séqu<strong>en</strong>ce que je fui a Charlon joue le rôle de modifieur <strong>et</strong> elle est <strong>en</strong>châssée dans la clivée. Le<br />

découpage <strong>en</strong> constituants est différ<strong>en</strong>t :<br />

[[ce fu [l’autrier que je fui a Charlon] que il t<strong>en</strong>oit sa cort]]<br />

4. 4. 2. Temporelles <strong>et</strong> <strong>en</strong>châssem<strong>en</strong>t<br />

Dans les emplois temporels <strong>en</strong> ce fu déjà examinés précédemm<strong>en</strong>t, le terme X temporel est souv<strong>en</strong>t<br />

suivi d’une relative <strong>en</strong>châssée dans la clivée :<br />

(155) Ce fu a Pasques que on dit <strong>en</strong> avril,<br />

Que li oisel chant<strong>en</strong>t cler <strong>et</strong> seri (Ami <strong>et</strong> Amile v. 537)<br />

(156) Ce fu el mois de mai, que li tans r<strong>en</strong>ovele,<br />

Que li viellart ont dit au roi ceste novele (...) (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre, br. 3 v. 3017)<br />

(157) Ce fu un samedi, que li soirs les apresse,<br />

Q’Alixandres fu mors qui tantes terres lesse (...) (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre, br. 4 v. 687)<br />

(158) Ce fu el mois de may, un poi devant l’issue,<br />

Que l’erbe reverdist <strong>et</strong> ele point m<strong>en</strong>ue,<br />

Q’ Alixandres li rois a sa g<strong>en</strong>t esmeüe<br />

Por aler deseur Dayre a la teste ch<strong>en</strong>ue. (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre, br. 3 v. 117)<br />

Dans (155) par exemple, la relative que on dit <strong>en</strong> avril vi<strong>en</strong>t modifier le terme X <strong>et</strong> est <strong>en</strong>châssée dans<br />

la deuxième partie de la clivée que li oisel chant<strong>en</strong>t cler. Le découpage <strong>en</strong> constituants serait :<br />

[[Ce fu [a Pasques que on dit <strong>en</strong> avril], Que li oisel chant<strong>en</strong>t cler <strong>et</strong> seri]]<br />

[[Ce fu [el mois de mai, que li tans r<strong>en</strong>ovele,] Que li viellart ont dit au roi ceste novele]]<br />

[[Ce fu [un samedi, que li soirs les apresse,] Q’Alixandres fu mors qui tantes terres lesse; ]]


Ces élém<strong>en</strong>ts temporels s’analys<strong>en</strong>t comme des rections dép<strong>en</strong>dantes du verbe de la séqu<strong>en</strong>ce Qu- +<br />

Verbe <strong>et</strong> leur emploi privilégié dans une structure <strong>en</strong>châssée perm<strong>et</strong> de les analyser comme des<br />

constructions <strong>clivées</strong>.<br />

dans (156) :<br />

(156) Ce fu el mois de may qu’il se sont combatu,<br />

Que li rois Alixandres ot Dayre <strong>en</strong> champ vaincu (Alexandre de Paris, Roman d’Alexandre br. 3, v.<br />

596)<br />

Deux analyses sont possibles : el mois de may constitue l’élém<strong>en</strong>t X clivé, qu’il se sont combatu la<br />

deuxième partie de la clivée, avec ce découpage :<br />

[[ce fu [el mois de may] [qu’il se sont combatu ] que li rois Alixandre (…)]]<br />

ou alors l’élém<strong>en</strong>t X est constitué de la séqu<strong>en</strong>ce el mois de may qu’il se sont combatu, <strong>et</strong> que li rois A.<br />

est la deuxième partie de la clivée.<br />

5. Conclusion<br />

Il apparaît que la clivée est une tournure anci<strong>en</strong>ne, dont les premières attestations « sûres » dat<strong>en</strong>t du<br />

XII e siècle avec le clivage des élém<strong>en</strong>ts pronominaux comme je, tu, vos <strong>et</strong> il, ou bi<strong>en</strong> avec le clivage<br />

des noms propres ou des noms de par<strong>en</strong>té. Néanmoins dans des textes plus anci<strong>en</strong>s, certaines<br />

occurr<strong>en</strong>ces de c’est X que Verbe pourrai<strong>en</strong>t s’interpréter comme des <strong>clivées</strong>. Dans la Vie de saint<br />

Léger (X e siècle), l’occur<strong>en</strong>ce avec estre au passé simple <strong>et</strong> le relatif u qui intègre la préposition<br />

locative, pourrait être une clivée :<br />

(157) Enviz lo fist, non voluntiers ;<br />

laisse . l intrar in u monstier.<br />

Cio fud Lusos ut il intrat ; (La Vie de saint Léger v. 99)<br />

La Vie de saint Alexis au XI e siècle conti<strong>en</strong>t sept séqu<strong>en</strong>ces de c’est X Qu-+Verbe, une seule de ces<br />

séqu<strong>en</strong>ce est interprétable comme une clivée, elle est à base nominale :<br />

(158) « Ci devant tei estunt dui pech<strong>et</strong>huor,<br />

Par la Deu grace vocét amperedor ;<br />

Ço’st sa merci qu’il nus cons<strong>en</strong>t l’onor. (La Vie de saint Alexis v. 363)<br />

<strong>Les</strong> indices morpho-syntaxiques qui perm<strong>et</strong>t<strong>en</strong>t de reconnaître les types non-clivés <strong>et</strong> les types clivés<br />

sont donc assez peu nombreux ; je les récapitule sous forme de tableau :<br />

Modèle non-clivé<br />

cil qu-<br />

Ø signe que<br />

Ø dommage, droit, raison<br />

superlatif<br />

la ri<strong>en</strong>s qu-<br />

Exemples<br />

ce est cil qui hier m’am<strong>en</strong>a ceste<br />

part<br />

c’est signe que la fame est<br />

grosse<br />

c’est raison <strong>et</strong> droiz que moy <strong>et</strong><br />

vous donc y alons<br />

ço est le plus racraant ki unc<br />

portast n’escu ne brant<br />

c’est la ri<strong>en</strong>s el siecle qu’ele pot<br />

plus amer


Ces indices sont <strong>en</strong>core moins nombreux pour le type clivé :<br />

Modèle clivé<br />

il quje<br />

qu-<br />

Exemples<br />

ce est il qui me requiert<br />

ço sui jo ki ai ramponed l’ost de<br />

Israel.<br />

tu qu- Es tu ço qui paroles ?<br />

c’est préposition X qu- + Verbe Est che par moquerie que tu les<br />

vas cluignant (…) ?<br />

ch’est des bigames k’il parole<br />

<strong>Les</strong> autres indices qui perm<strong>et</strong>t<strong>en</strong>t d’analyser les énoncés comme clivés ou non clivés sont diffusés<br />

dans le contexte. Dans la plupart des cas, il est donc nécessaire d’avoir recours à des contextes longs<br />

pour être <strong>en</strong> mesure de discuter des interprétations possibles. Mais ce recours au contexte ne perm<strong>et</strong><br />

pas toujours de lever des interprétations équivoques.<br />

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