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'Spécialistes par obligation'Des parents face au handicap mental ...

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tel-00333296, version 1 - 28 Nov 2008<br />

même, préfèrent ne pas s’exprimer <strong>au</strong> vu et <strong>au</strong> su des plus légitimes. Le cas des Courgeon<br />

illustre <strong>par</strong>faitement ces mécanismes. Émilie Courgeon a eu une fille, Anaïs, en 1990. Au<br />

moment de sa grossesse, elle a contracté la listériose et Anaïs est née avec une méningite qui<br />

lui a laissé des séquelles, notamment des troubles du comportement et des difficultés<br />

intellectuelles. Elle a été <strong>par</strong> la suite prise en charge en hôpital de jour, puis en institut<br />

spécialisé. Elle refuse pour l’instant de lire et écrire, sans que l’on sache à quel point elle en<br />

est capable. Émilie Courgeon était une mère célibataire et a rencontré son futur mari<br />

lorsqu’Anaïs avait entre un et deux ans. Ils se sont mariés en 1998 et Jean-Jacques Courgeon a<br />

alors reconnu Anaïs. Émilie est prothésiste dentaire 21 et son mari agent de sécurité incendie (il<br />

était garçon de café quand ils se sont connus). Ils habitent un modeste ap<strong>par</strong>tement dans un<br />

quartier populaire de Paris.<br />

C’est Émilie qui a répondu à mon courrier, envoyé via les Papillons Blancs de Paris.<br />

J’ai donc pris rendez-vous avec elle et suis venu faire un premier entretien en septembre 2004.<br />

Jean-Jacques était présent pendant une bonne <strong>par</strong>tie de l’entretien et faisait quelques rares<br />

commentaires. Comme à mon habitude, j’ai demandé à Émilie si d’<strong>au</strong>tres personnes<br />

pourraient être d’accord pour faire un entretien <strong>au</strong> sujet d’Anaïs.<br />

À la fin de l’entretien, je demande des contacts, mais Jean-Jacques et Émilie<br />

Courgeon sont peu entourés. (…) Je demande si son mari accepterait lui <strong>au</strong>ssi de faire<br />

un entretien. Elle me dit que non, qu’il ne la connaît pas assez bien (« c’est son be<strong>au</strong>père<br />

», me dit-elle, bien qu’il l’ait adoptée) et ne s’en est pas occupé be<strong>au</strong>coup. Il s’en<br />

occupe plus à présent, « mais bon ». (…)<br />

En <strong>par</strong>tant, je vais dire <strong>au</strong> revoir à Jean-Jacques Courgeon. Je lui demande tout<br />

de même s’il voudrait <strong>par</strong>ler d’Anaïs. Il est, à ma grande surprise (et à celle de sa<br />

femme ?) tout de suite <strong>par</strong>tant. Il me prévient qu’il n’est pas du tout d’accord avec sa<br />

femme, que son approche est différente. Émilie confirme. Il me dit que je peux le rappeler<br />

sur son portable, puis ajoute finalement que comme il a son planning d’octobre, on peut<br />

décider d’une date tout de suite, ce que l’on fait. Il me demande ensuite ce que je fais<br />

précisément et ce que je veux faire plus tard. « C’est bien », commente-t-il.<br />

Il commence à m’expliquer en quoi il a une approche différente de celle de sa<br />

femme : lui veut la rendre <strong>au</strong>tonome et pense qu’il f<strong>au</strong>t plus la laisser faire ce qu’elle<br />

veut. Émilie dit qu’elle connaît mieux le <strong>par</strong>cours de sa fille que lui. Il lui répond de ne<br />

pas le couper ; lui ne l’a pas coupée, il f<strong>au</strong>dra qu’elle le laisse <strong>par</strong>ler. Elle dit qu’elle ne<br />

21 Sur commande du dentiste, le prothésiste dentaire fabrique, ré<strong>par</strong>e ou modifie des prothèses. C’est un travail<br />

d’ouvrier-artisan de laboratoire, qui nécessite un CAP (certificat d’aptitude professionnelle) ou un BP (brevet<br />

professionnel).<br />

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