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'Spécialistes par obligation'Des parents face au handicap mental ...

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Ben je suis allé chez ma sœur, après (cherche ses mots) j’ai habité le VI ème , après je suis<br />

<strong>par</strong>ti à Amiens, je suis remonté à Charenton, je suis <strong>par</strong>ti en Champagne. (se reprend)<br />

Enfin j’ai déménagé deux fois d’Amiens et puis maintenant, (cherche ses mots) j’ai<br />

trouvé un point en banlieue <strong>par</strong>isienne, j’ai une amie, mais bon disons, c’est pas de la<br />

même façon. Puis je suis un nomade ! (cherche ses mots) Enfin c’est pas lié <strong>au</strong> <strong>handicap</strong>.<br />

J’ai eu envie de sortir du carcan. J’ai une voiture, c’est ma vie. »<br />

D’après Sylvie, Jeanne elle-même <strong>au</strong>rait en quelque sorte tiré un trait sur sa lignée<br />

paternelle, à grands renforts de gestes symboliques :<br />

tel-00333296, version 1 - 28 Nov 2008<br />

« Et là, compte tenu de tout ce qu’elle a subi maintenant, elle-même, elle a dit à son père :<br />

‘Je ne veux plus te voir et je ne veux plus te <strong>par</strong>ler, ça n’est plus la peine de m’écrire, ça<br />

n’est plus la peine de me téléphoner.’ Et elle a jeté – c’était impressionnant, ça date d’y’a<br />

pas très longtemps – elle a jeté toutes les cartes postales qu’elle avait reçues de son père à<br />

diverses occasions, comme il voyage be<strong>au</strong>coup. Et elle a donné des petits bijoux qu’il lui<br />

avait offerts, elle a planqué – enfin elle m’a demandé, elle voulait les donner, puis je lui ai<br />

dit : ‘Non, <strong>par</strong>ce que tu peux peut-être un jour t’en resservir’ – des CD. Enfin je veux dire<br />

elle a coupé les ponts. »<br />

Du côté maternel, l’affiliation de Jeanne à la lignée n’a cependant pas non plus été<br />

évidente et a nécessité un véritable travail qui, comme souvent avec les enfants trisomiques,<br />

s’est en <strong>par</strong>tie joué <strong>au</strong>tour de la question des ressemblances. La trisomie 21 engendrant<br />

certains traits physiques caractéristiques, be<strong>au</strong>coup de <strong>par</strong>ents d’enfants trisomiques ont du<br />

mal à voir les ressemblances entre eux et leur enfant. Ce travail d’interprétation des<br />

ressemblances, comme l’a bien montré Bernard Vernier [1989], fait entièrement <strong>par</strong>tie de<br />

l’affiliation à une lignée. L’exemple de Sylvie est frappant car le travail de construction des<br />

ressemblances entre elle et sa fille est rendu <strong>par</strong>ticulièrement visible <strong>par</strong> la confection d’un<br />

livre-photos, qu’elle veut me montrer à la fin de notre entretien :<br />

Journal de terrain, septembre 04 : entretien avec Sylvie<br />

En fin d’entretien, elle tient à me montrer des photos de sa fille. Elle me montre plusieurs<br />

albums, ainsi que ses photos de classe, puis <strong>au</strong>ssi celles de Geoffroy. Elle va ensuite<br />

chercher son ordinateur portable pour me montrer un livre qu’elle pré<strong>par</strong>e sur sa fille.<br />

Le livre devrait se composer de photos en noir et blanc de Jeanne, <strong>par</strong>fois colorisées <strong>par</strong><br />

endroit en rouge, <strong>par</strong>fois mises en perspective avec des photos de sa mère. Elle cherche à<br />

mettre en évidence la ressemblance entre elles deux. Je lui dis que je trouve qu’Alexis<br />

ressemble à Jeanne. Elle reprend ça peu de temps après en disant que les gens sont<br />

souvent étonnés de constater des ressemblances, alors que c’est normal puisqu’il s’agit<br />

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