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'Spécialistes par obligation'Des parents face au handicap mental ...

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tel-00333296, version 1 - 28 Nov 2008<br />

administrative, voire politique) est un moyen de lutter à la fois contre la culpabilité liée <strong>au</strong><br />

<strong>handicap</strong> lui-même et contre l’image négative des <strong>par</strong>ents laxistes ou « démissionnaires » 4 .<br />

Les « m<strong>au</strong>vais <strong>par</strong>ents » sont en effet ceux qui élèvent mal, voire pas du tout (les deux<br />

critiques se rejoignant fréquemment, car une éducation qui n’obéit pas à ses propres normes<br />

d’éducation est souvent vue comme une non-éducation) leurs enfants, ou bien ceux qui<br />

« baissent les bras » devant le « <strong>par</strong>cours du combattant » imposé <strong>au</strong>x <strong>par</strong>ents d’enfants<br />

<strong>handicap</strong>és ment<strong>au</strong>x. Comme on l’a vu <strong>au</strong> chapitre 4, ce sont les mères qui sont les plus<br />

perméables à ces attaques, réelles ou supposées, et qui culpabilisent le plus facilement de se<br />

sentir de « m<strong>au</strong>vaises mères ».<br />

L’image des « m<strong>au</strong>vais <strong>par</strong>ents », ou de « m<strong>au</strong>vaise mère » est à la fois floue et<br />

complexe. D’une <strong>par</strong>t, elle est en <strong>par</strong>tie <strong>par</strong>tagée <strong>par</strong> les <strong>par</strong>ents d’enfants <strong>handicap</strong>és ment<strong>au</strong>x<br />

et <strong>par</strong> les <strong>au</strong>tres ; mais d’<strong>au</strong>tre <strong>par</strong>t, pour les <strong>par</strong>ents d’enfants <strong>handicap</strong>és ment<strong>au</strong>x, les<br />

m<strong>au</strong>vais <strong>par</strong>ents sont à la fois coupables et victimes (deux positions non enviables qu’ils<br />

cherchent à éviter), du fait de la difficulté des épreuves qu’ils ont à affronter. C’est bien cette<br />

ambiguïté qui ressort des propos de Claire Lambois (employée de banque), qui est la mère<br />

d’un adolescent né en 1990, Benoît, <strong>au</strong> physique <strong>par</strong>ticulier et à la voix suraiguë, qui se<br />

montre à la fois très timide et très enclin à la communication. Il a d’importantes difficultés de<br />

compréhension et a péniblement appris à lire et à écrire. Il est également assez g<strong>au</strong>che dans<br />

ses gestes. Le père de Benoît, P<strong>au</strong>l Lambois, occupe un poste d’encadrement dans un<br />

organisme semi-public. Ils vivent dans un pavillon en banlieue <strong>par</strong>isienne avec <strong>au</strong>ssi leur fils<br />

aîné, Nicolas, né en 1980. Lorsque Claire com<strong>par</strong>e leur façon de « faire évoluer Benoît » et<br />

celle de la mère d’un de ses camarades de maternelle, elle souligne une différence qui lui<br />

semble essentielle, bien qu’elle ait quelques difficultés à l’exprimer :<br />

« Et en maternelle, y’avait d’<strong>au</strong>tres enfants qui avaient des retards <strong>au</strong>ssi ?<br />

(réfléchit) Y’avait un <strong>au</strong>tre petit garçon, d’ailleurs qui est à l’institut où on n’a pas voulu<br />

mettre [Benoît], mais lui c’est <strong>au</strong>tre chose, c’est qu’il (cherche ses mots) est né en Algérie<br />

et il a eu une naissance difficile, il a eu la boîte crânienne enfoncée. Donc bon là, les<br />

<strong>par</strong>ents ap<strong>par</strong>emment ont accepté (cherche ses mots) qu’il aille en IME et puis bon, c’est<br />

vrai que c’était complètement différent de nous, bon, y’avait be<strong>au</strong>coup plus d’enfants<br />

dans la famille et la maman n’était pas comme nous. Nous, il f<strong>au</strong>t vraiment que Benoît<br />

soit malade ou qu’il y ait un problème quelconque dans la famille pour qu’il ait pas ses<br />

séances. (…) Cette maman-là, elle venait, elle venait pas, elle prévenait pas, enfin bon.<br />

Y’avait pas un suivi… (s’arrête) Peut-être que le petit garçon non plus ne pouvait pas<br />

4 Je renvoie de nouve<strong>au</strong> <strong>au</strong> travail de Bernard Lahire et à sa critique du « mythe de la démission<br />

<strong>par</strong>entale » [Lahire, 1995].<br />

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