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'Spécialistes par obligation'Des parents face au handicap mental ...

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tel-00333296, version 1 - 28 Nov 2008<br />

Pascal Desesquelles est le père de Julie, qui est née en 1986. Elle a de grandes<br />

difficultés scolaires mais s’exprime assez facilement. Elle est souvent anxieuse et peut être<br />

agressive <strong>par</strong> moments. Ses <strong>par</strong>ents n’ont obtenu <strong>au</strong>cun diagnostic médical et penchent pour<br />

une origine psychologique inconnue de ses troubles. Ils ont tous deux été longtemps<br />

commerçants, avant de déménager en 2004 pour refaire leur vie en Normandie. Avant ce<br />

dé<strong>par</strong>t, Julie a été scolarisée dans une CLIS privée, puis plusieurs années à ABC École. Dans<br />

les propos de Pascal Desesquelles rapportés ci-dessus, on voit que les loc<strong>au</strong>x de l’école sont<br />

cette fois-ci associés à l’idée d’intégration sociale. Pour lui, le fait qu’ABC École ressemble<br />

effectivement à une école permet de normaliser la situation de sa fille, de lui donner une place<br />

légitime dans la société.<br />

Cette réflexion permet de revenir sur la notion clef de la politique actuelle en matière<br />

de scolarisation des enfants <strong>handicap</strong>és, celle d’intégration scolaire. Éric Plaisance [1999] a<br />

déjà clairement montré combien cette expression pouvait recouvrir des situations<br />

extrêmement différentes les unes des <strong>au</strong>tres, <strong>au</strong> sein d’un même pays et encore plus d’un pays<br />

européen à l’<strong>au</strong>tre, et comment une véritable politique d’intégration scolaire ne pouvait<br />

s’accomplir qu’en s’appuyant sur des équipes professionnelles déjà constituées et bien<br />

organisées.<br />

Cette critique peut être prolongée en s’appuyant sur les propos de Pascal Desesquelles.<br />

L’intégration scolaire n’a de prix <strong>au</strong>x yeux des <strong>par</strong>ents que si elle représente une véritable<br />

intégration sociale de l’enfant <strong>handicap</strong>é, c’est-à-dire si elle lui permet une <strong>par</strong>ticipation et<br />

une reconnaissance sociales jugées suffisantes et non stigmatisantes. On pourrait sur ce point<br />

faire un <strong>par</strong>allèle avec l’analyse que fait Abdelmalek Sayad [1994 et 1999] des politiques de<br />

l’intégration non plus des élèves en grande difficulté scolaire, mais des immigrés. Il montre<br />

que derrière les changements terminologiques en matière de politique de l’immigration<br />

(assimilation, insertion ou intégration), la question fonda<strong>mental</strong>e est celle de la socialisation<br />

des immigrés via les institutions majeures que sont l’école, l’entreprise, l’église, les syndicats<br />

etc. Et de même qu’Abdelmalek Sayad pointe les déceptions des immigrés devant la réalité<br />

quotidienne de « l’intégration », les <strong>par</strong>ents d’enfants <strong>handicap</strong>és ment<strong>au</strong>x ayant milité pour<br />

l’intégration scolaire sont eux <strong>au</strong>ssi souvent déçus lorsqu’ils <strong>par</strong>viennent à leurs fins. C’est le<br />

cas de Danièle Tessard (publiciste, son mari est directeur administratif), la mère d’Arn<strong>au</strong>d<br />

(trisomique, difficultés de compréhension), qui se décrit elle-même comme une « déçue de<br />

l’intégration ». Lorsqu’elle trouve une place pour Arn<strong>au</strong>d dans une école Montessori qui<br />

amène les enfants jusqu’<strong>au</strong> nive<strong>au</strong> CM 1, elle pense avoir trouvé l’endroit dont son fils sortira<br />

en sachant se débrouiller dans la vie quotidienne, qui lui permettra donc d’éviter de passer <strong>par</strong><br />

le circuit spécialisé. Quatre ans plus tard, lorsqu’il sort de cette école avec très peu<br />

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