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'Spécialistes par obligation'Des parents face au handicap mental ...

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l’évidence opèrent, qui permettent <strong>au</strong> personnel soignant d’organiser une activité<br />

thérapeutique fondée. » [Ogien, 1992, p. 75]<br />

tel-00333296, version 1 - 28 Nov 2008<br />

Les soignants du CMPP s’appuient donc sur ce qu’Albert Ogien appelle à la page<br />

suivante un « savoir pratique » pour mener leur action thérapeutique. Je fais l’hypothèse que<br />

les <strong>par</strong>ents s’appuient eux <strong>au</strong>ssi, en l’absence d’un diagnostic médical satisfaisant, sur de tels<br />

savoirs pratiques pour orienter leur comportement envers leur enfant. J’ajoute cependant que<br />

d’une <strong>par</strong>t, même lorsqu’ils ont accès à des discours professionnels précis, voire à un<br />

diagnostic médical, ils produisent des théories diagnostiques en les réinterprétant, les<br />

combinant à d’<strong>au</strong>tres éléments, éventuellement d’<strong>au</strong>tres diagnostics si leur quête diagnostique<br />

les a conduits à en obtenir plusieurs. Et d’<strong>au</strong>tre <strong>par</strong>t, il ne s’agit pas uniquement de savoirs<br />

pratiques <strong>au</strong> sens de manières de faire élaborées instinctivement <strong>au</strong> contact de l’enfant, mais<br />

bien de théories diagnostiques, c’est-à-dire de constructions intellectuelles qui, si elles sont<br />

orientées vers la pratique, n’en restent pas moins des réflexions explicitables, <strong>par</strong> exemple<br />

dans le cadre d’un entretien avec un sociologue. Le cas de Frédéric (borderline, troubles du<br />

comportement, angoisses) illustre <strong>par</strong>faitement ces mécanismes. Son père, Marc Patole<br />

(informaticien), expose clairement les réticences des « psy » rencontrés à poser un diagnostic<br />

et les conséquences pour eux :<br />

« Ben (cherche ses mots) les psy, on a passé des années à essayer d’avoir un diagnostic.<br />

Jamais on nous a dit qu’est-ce qu’il y avait, pourquoi c’était comme ça. C’était : ‘Ah !<br />

ben oui, y’a des difficultés. Il est malade ; oui, non mais il est pas malade.’ (léger rire)<br />

Enfin c’était jamais clair ! (cherche ses mots) Du côté de l’hôpital de jour, ça jouait plutôt<br />

du côté d’une approche psychanalytique et culpabilisation, surtout de la mère, à fond. Et<br />

puis jamais vraiment un diagnostic, donc… (s’arrête) Après, dans les professionnels,<br />

l’aspect dysharmonique, oui, (cherche ses mots) on leur disait… (s’arrête) C’est plutôt<br />

nous, on dit quelque chose, ils disent oui. Typiquement, on avait eu – ben c’était à<br />

l’hôpital de jour – un psychiatre : ‘Dites-moi ce que vous pensez qu’il a et je vous<br />

répondrai.’ (léger rire) Enfin bon, c’est à nous de faire… (s’arrête) Parce que le<br />

professionnel veut pas poser quelque chose <strong>par</strong>ce que si elle pose quelque chose, ça va<br />

s’ancrer dans les… (s’arrête) ça va arrêter la position. C’est un peu bizarre mais…<br />

(hésite) oui, c’est un petit peu bizarre. Alors nous, ben après, on lit plein de choses et puis<br />

on se fait un film, quoi. »<br />

« Se faire un film », c’est-à-dire en d’<strong>au</strong>tres termes élaborer une théorie diagnostique.<br />

Cette théorie n’a pas pu dans leur cas s’appuyer sur un diagnostic médical après lequel ils ont<br />

longtemps couru, mais Marc Patole indique tout de même des éléments de discours<br />

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