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'Spécialistes par obligation'Des parents face au handicap mental ...

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Chapitre VI.<br />

Face <strong>au</strong>x discours professionnels<br />

tel-00333296, version 1 - 28 Nov 2008<br />

La quête diagnostique que mènent à un moment ou à un <strong>au</strong>tre tous les <strong>par</strong>ents que j’ai<br />

rencontrés consiste donc à rechercher des discours professionnels et, si possible, un diagnostic<br />

ferme qui puisse leur permettre de donner du sens <strong>au</strong>x difficultés de leur enfant, de normaliser<br />

sa situation ou d’avoir accès à certaines aides. Malgré la forte ambivalence qui caractérise une<br />

telle démarche, qui peut <strong>au</strong>ssi conduire à de très fortes désillusions, celle-ci est généralement<br />

entreprise de manière volontariste puisqu’il f<strong>au</strong>t souvent aller chercher l’information médicale<br />

<strong>au</strong> prix d’efforts importants, les professionnels n’étant pas toujours disposés à <strong>par</strong>tager<br />

facilement leur savoir et à exprimer leurs doutes et leurs hypothèses [Fainzang, 2006]. Le<br />

caractère « actif » de cette démarche ne s’applique d’ailleurs pas seulement <strong>au</strong>x efforts fournis<br />

pour accéder à des informations, mais <strong>au</strong>ssi à la manière dont ces informations sont reçues,<br />

c’est-à-dire interprétées, adoptées ou suspectées, considérées comme essentielles ou<br />

secondaires etc.<br />

Ce chapitre vise à prolonger l’examen de la quête diagnostique en analysant la<br />

réception de l’information fournie <strong>par</strong> les professionnels (médic<strong>au</strong>x et <strong>au</strong>tres). Que font les<br />

<strong>par</strong>ents des informations <strong>au</strong>xquelles ils <strong>par</strong>viennent à accéder ? Quand sont-ils suffisamment<br />

satisfaits pour mettre fin à leur quête diagnostique ? Selon quels critères et quelles références<br />

peuvent-ils juger les discours professionnels ? Peuvent-ils, et à quelles conditions, les<br />

critiquer, voire s’y opposer ?<br />

Comme le montre le travail de Sylvie Fainzang [2006], de telles interrogations<br />

amènent à mettre <strong>au</strong> jour les rapports de force entre les professionnels et leurs patients (et<br />

l’entourage de ces derniers). Dans ce jeu social <strong>par</strong>ticulier, les professionnels ont l’immense<br />

avantage de pouvoir s’appuyer sur des compétences qui leur sont reconnues du fait de leur<br />

statut, du « mandat », pour reprendre le terme d’Everett Hughes [1996a], que la société leur a<br />

confié. Globalement, le rapport de forces actuel est le résultat d’une longue et lente évolution,<br />

que décrit Nicolas Dodier [2004], qui va du « paternalisme de la tradition clinique » (le<br />

malade s’en remet entièrement à son médecin) à la « médecine des preuves », qui repose sur<br />

des dispositifs d’évaluation des traitements tendant à « déposséder le clinicien de son <strong>au</strong>torité<br />

traditionnelle » et qui prône la <strong>par</strong>ticipation des malades 1 . Ce passage s’est progressivement<br />

produit dans la deuxième moitié du XX ème siècle et n’est peut-être pas achevé, d’<strong>au</strong>tant que<br />

l’Ordre des médecins prône toujours un « paternalisme tempéré » et qu’une <strong>par</strong>tie de la<br />

médecine des preuves s’appuie selon Nicolas Dodier sur un « nouve<strong>au</strong> paternalisme ». En<br />

1 Pour davantage de précisions sur les caractéristiques de la « médecine fondée sur les preuves », cf.<br />

Pouvourville, 2002.<br />

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