Naguib Mahfouz et Michel Houellebecq: deux romanciers face au ...

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Cet attentat, qui a révolté l’Égypte entière, non seulement le prive de l’usage de la main droite, mais le rend mal entendant et mal voyant pour le restant de ses jours. En plein cœur du Caire, le 14 octobre 1994, les ennemis de la vie et de la beauté tirèrent sur le prix Nobel de littérature, Naguib Mahfouz. Ce jour-là, l’écrivain échappa par miracle à un attentat islamiste. Deux intégristes poignardèrent le romancier pour le punir d’avoir écrit Les Fils de la Médina. 297 tel-00831353, version 1 - 6 Jun 2013 Le romancier qui a toujours lutté pour la liberté d’expression et sans cesse milité contre l’obscurantisme a été très affecté par ce drame et s’oppose au projet de réédition de son roman sans avoir l’accord de la grande autorité sunnite de l’islam. Ce roman allégorique est considéré aux yeux des docteurs d' Al- Azhar comme le sommet du tabou dont personne n’a le droit de s’approcher. Dans une interview parue au journal hebdomadaire Al-Aḥrām (A) juillet 1993 298 , Maḥfūz (M) explique pourquoi il a nommé le clan de Qasim " les Gerboises ", qui est en arabe le pluriel du mot Jarbū’ (rat). A-Les ulémas d’Al-Azhar ont été remontés, entre autres, à cause du nom péjorativement connoté en arabe que vous aviez attribué au clan de Qasim : les Gerboises, pourquoi ce nom et non pas d’autre? M-Ce sont les autres clans qui les appelaient les Gerboises pour la simple raison qu’à cette époque, avant Qasim, ils se sentaient perdus; ils étaient 297 Zaoui, Amin, La Cculture du sang, Fatwas, femmes, tabous et pouvoirs, op.cit., p. 49. 298 Aboul- Fotouh, Anas, La Réception de la littérature arabe traduite en français après le prix Nobel 1988, op.cit., p. 475. 158

privés de leur moindre droit et n’avaient déjà pas de défenseurs qui protégeaient leurs droits aux legs de Gabalawi: le fait qu’ils s’appelaient ainsi est une glorification de celui qui est venu les défendre, celui qui les a rendus ensuite maîtres de la ruelle. tel-00831353, version 1 - 6 Jun 2013 Comme Maḥfūẓ, lui, a osé outrepasser le tabou religieux, il a été classé sur la liste des impies par les religieux. Beaucoup de lecteurs arabes ne prennent pas la peine de pénétrer le livre pour découvrir ses mystères et ses arrière-plans, mais se contentent d’en lire le titre ou la table des matières pour le juger ou le critiquer. Par contre, un lectorat nombreux d’Arabes et de Français apprécie ce roman. Pour Maḥfūẓ, il faut sortir de son silence, il faut oser parler et non pas baisser les bras. La personne qui se tait alimente le terrorisme. Ceux qui se mettent une muselière et qui choisissent de se taire renforcent le terrorisme. 299 Aux yeux de Maḥfūẓ, les religions sont les dépositaires des messages d’Amour et de Tolérance. Pour lui, la violence et le terrorisme dépendent de plusieurs conditions et facteurs sociaux et politiques. Il insiste sur l’idée qu’aucune religion ne prône la violence, ni le terrorisme, et en tant que musulman, il place l’islam en tête de ces religions. Dieu n’a-t-il pas dit: " il n’y a pas de contrainte en religion". Et " Croit en Dieu celui qui veut, et nie, celui qui veut". 300 Dans cette interview avec Moḥammad Salamāwī (S), Maḥfūẓ (M) exprime ses sentiments à la suite de l’attentat dont il a été l'objet : 299 La parole de Maḥfūẓ, parue comme épigraphe dans l’essai d’Amin Zaoui, La Culture du sang, op.cit., p. 7. 300 Mahfouz, Naguib, Mon Egypte, op.cit., p. 70 159

C<strong>et</strong> attentat, qui a révolté l’Égypte entière, non seulement le prive de<br />

l’usage de la main droite, mais le rend mal entendant <strong>et</strong> mal voyant<br />

pour le restant de ses jours.<br />

En plein cœur du Caire, le 14 octobre 1994, les<br />

ennemis de la vie <strong>et</strong> de la be<strong>au</strong>té tirèrent sur le prix<br />

Nobel de littérature, <strong>Naguib</strong> <strong>Mahfouz</strong>. Ce jour-là,<br />

l’écrivain échappa par miracle à un attentat<br />

islamiste. Deux intégristes poignardèrent le<br />

romancier pour le punir d’avoir écrit Les Fils de la<br />

Médina. 297<br />

tel-00831353, version 1 - 6 Jun 2013<br />

Le romancier qui a toujours lutté pour la liberté d’expression <strong>et</strong><br />

sans cesse milité contre l’obscurantisme a été très affecté par ce drame<br />

<strong>et</strong> s’oppose <strong>au</strong> proj<strong>et</strong> de réédition de son roman sans avoir l’accord de<br />

la grande <strong>au</strong>torité sunnite de l’islam.<br />

Ce roman allégorique est considéré <strong>au</strong>x yeux des docteurs d' Al-<br />

Azhar comme le somm<strong>et</strong> du tabou dont personne n’a le droit de<br />

s’approcher.<br />

Dans une interview parue <strong>au</strong> journal hebdomadaire Al-Aḥrām (A)<br />

juill<strong>et</strong> 1993 298 , Maḥfūz (M) explique pourquoi il a nommé le clan de<br />

Qasim " les Gerboises ", qui est en arabe le pluriel du mot Jarbū’ (rat).<br />

A-Les ulémas d’Al-Azhar ont été remontés, entre<br />

<strong>au</strong>tres, à c<strong>au</strong>se du nom péjorativement connoté en<br />

arabe que vous aviez attribué <strong>au</strong> clan de Qasim : les<br />

Gerboises, pourquoi ce nom <strong>et</strong> non pas d’<strong>au</strong>tre?<br />

M-Ce sont les <strong>au</strong>tres clans qui les appelaient les<br />

Gerboises pour la simple raison qu’à c<strong>et</strong>te époque,<br />

avant Qasim, ils se sentaient perdus; ils étaient<br />

297 Zaoui, Amin, La Cculture du sang, Fatwas, femmes, tabous <strong>et</strong> pouvoirs, op.cit., p. 49.<br />

298 Aboul- Fotouh, Anas, La Réception de la littérature arabe traduite en français après le prix<br />

Nobel 1988, op.cit., p. 475.<br />

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