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alsace - Ministère de la Culture et de la Communication

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constitue en soi une première approche <strong>de</strong> leur quotidien,<br />

<strong>de</strong> leur mentalité. Une autre passe par les sources documentaires<br />

: ordonnances, comptes <strong>et</strong> rapports <strong>de</strong> toute<br />

nature les sortent <strong>de</strong> leur anonymat (listes <strong>de</strong> noms) <strong>et</strong><br />

ren<strong>de</strong>nt compte <strong>de</strong> leur statut social (sa<strong>la</strong>ires, système<br />

<strong>de</strong> protection sociale...) ; <strong>la</strong> fouille enfin constitue une troisième<br />

approche, que nous développerons ici. Une première<br />

synthèse sur ce suj<strong>et</strong> a été présentée à <strong>la</strong> fin <strong>de</strong>s<br />

années 1980 (Bohly 1990b). Depuis, le suj<strong>et</strong> n’a que peu<br />

évolué.<br />

La présence <strong>de</strong> p<strong>la</strong>tes-formes aménagées <strong>de</strong>vant l’entrée<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s galeries d’une certaine importance, associée<br />

à <strong>la</strong> découverte <strong>de</strong> céramique en surface, a suggéré<br />

dès les années 1970 <strong>la</strong> présence d’habitats liés à<br />

l’exploitation. Aussi, dès les débuts <strong>de</strong> l’archéologie minière<br />

dans notre massif, plusieurs opérations ont porté sur<br />

ces habitats ; elles n’ont malheureusement livré que <strong>de</strong>s<br />

traces ténues <strong>et</strong> difficilement lisibles dans <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s<br />

cas, témoignant <strong>de</strong> constructions légères, ayant souvent<br />

fait l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>structions ou <strong>de</strong> remaniements.<br />

La première opération, qui a porté sur une construction<br />

exceptionnellement bien conservée, a malheureusement<br />

été menée sans <strong>la</strong> rigueur qui s’imposait <strong>et</strong> n’a <strong>la</strong>issé quasiment<br />

aucun document : il, s’agit <strong>de</strong> l’habitat (fin XVI e s.)<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> mine n˚12 du Bluttenberg, district <strong>de</strong> Sainte-Marieaux-Mines.<br />

D. Martin <strong>et</strong> son équipe y ont exhumé <strong>la</strong> base<br />

en bois intacte du p<strong>et</strong>it bâtiment, avec le socle en briques<br />

du poêle. Un riche mobilier associé a heureusement été<br />

conservé.<br />

Dans les vingt <strong>de</strong>rnières années, une vingtaine d’habitats<br />

miniers <strong>de</strong> <strong>la</strong> Renaissance ont fait l’obj<strong>et</strong> d’investigations<br />

plus ou moins poussées dans l’ensemble <strong>de</strong>s Vosges.<br />

Seuls quatre d’entre eux présentaient une structure en<br />

pierres.<br />

Un bel exemple est fourni par l’habitat V du Champ Brêch<strong>et</strong>é<br />

à Urbeis. La base <strong>de</strong>s murs (qui supportait peutêtre<br />

<strong>de</strong>s parois en bois) y délimite une pièce unique<br />

(5,50 × 4,80 m), au sol <strong>de</strong> terre battue. La base monolithe<br />

d’un poêle, taillée avec soin, était prise dans l’appareil du<br />

mur (M<strong>et</strong>zger 1986). Mais l’habitat le plus spectacu<strong>la</strong>ire<br />

est sans conteste celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> mine du Samson,<br />

district <strong>de</strong> Sainte-Marie-aux-Mines ; <strong>de</strong>ux pièces totalisant<br />

33 m 2 , séparées par un mur <strong>de</strong> refend communiquant<br />

par un seuil intérieur : elles étaient pourvues d’un p<strong>la</strong>ncher<br />

<strong>et</strong> <strong>la</strong> pièce d’entrée conservait <strong>la</strong> base d’un poêle.<br />

La céramique culinaire abondante démontre bien <strong>la</strong> fonction<br />

d’habitation ; aucun indice par contre ne prouve que<br />

les ouvriers y dormaient (Gran<strong>de</strong>mange 1993). Le carreau<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> mine Eisenthür au Neuenberg a également<br />

révélé <strong>de</strong>s bases <strong>de</strong> mur en pierres, hé<strong>la</strong>s perturbées,<br />

<strong>et</strong> son fort recouvrement a limité l’emprise <strong>de</strong> <strong>la</strong> fouille<br />

(Ancel 1998). Le quatrième site fouillé est une gran<strong>de</strong><br />

construction arasée en pierres, au p<strong>la</strong>n complexe, <strong>de</strong>vant<br />

l’entrée <strong>de</strong> <strong>la</strong> mine Saint-Jean à Fertrupt. D’une surface<br />

totale <strong>de</strong> près <strong>de</strong> 100 m 2 , ce bâtiment comporte 7 pièces<br />

dont certaines conservent encore <strong>de</strong>s <strong>la</strong>mbeaux <strong>de</strong> dal<strong>la</strong>ge<br />

en briques. Son interprétation est difficile <strong>et</strong> fait ressortir<br />

plusieurs états successifs al<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> <strong>la</strong> Renaissance<br />

au XVIII e s. ; il est probable que <strong>la</strong> <strong>de</strong>rnière occupation ne<br />

soit pas en rapport avec l’activité extractive. Un abondant<br />

mobilier montre l’usage d’habitation mais <strong>la</strong> découverte<br />

<strong>de</strong> scories <strong>de</strong> forge <strong>et</strong> d’une fosse à charbon <strong>de</strong> bois indique<br />

également une fonction artisanale.<br />

Les autres fouilles d’habitats ont mis au jour <strong>de</strong>s constructions<br />

plus légères dont les traces discrètes ne révèlent<br />

que très rarement p<strong>la</strong>ns <strong>et</strong> surfaces. Ainsi au Silberwald<br />

(vallée <strong>de</strong> Munster), le carreau minier comprend un p<strong>et</strong>it<br />

habitat entièrement en bois, dont le p<strong>la</strong>ncher disparu a<br />

pu être détecté par les traces finement imprimées dans le<br />

sol sablonneux, m<strong>et</strong>tant en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> minces cloisons<br />

en bois ; dans un espace d’environ 30 m 2 prenaient p<strong>la</strong>ce<br />

un âtre en quart <strong>de</strong> cercle pour <strong>la</strong> cuisson <strong>de</strong>s aliments<br />

<strong>et</strong> un poêle dont subsistait <strong>la</strong> base en pierres. La découverte<br />

<strong>de</strong> fragments <strong>de</strong> verre p<strong>la</strong>t indique <strong>la</strong> présence <strong>de</strong><br />

fenêtres équipées <strong>de</strong> vitres. L’abondance <strong>de</strong> poteries <strong>de</strong><br />

fonte <strong>de</strong> <strong>la</strong> stibine (sulfure d’antimoine) indique ici aussi<br />

une fonction artisanale associée à l’habitat (Bohly, Martin<br />

1998).<br />

Nombreux sont les habitats <strong>de</strong> structure légère à avoir fait<br />

l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> fouilles. À Sainte-Marie-aux-Mines, on peut citer<br />

celui du Vieux-Saint-Guil<strong>la</strong>ume qui montre <strong>de</strong>ux époques<br />

successives d’occupation, <strong>et</strong> celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> mine Sainte-Anne<br />

à Fertrupt, détruit à <strong>la</strong> veille <strong>de</strong> sa fouille. À Steinbach<br />

<strong>de</strong>ux habitats ont fait l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> fouilles : celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> mine<br />

du Bru<strong>de</strong>rthal n’a conservé que <strong>de</strong>s structures illisibles<br />

alors que celui <strong>de</strong> <strong>la</strong> mine Saint-Nico<strong>la</strong>s supérieure était<br />

encore pourvu <strong>de</strong> <strong>la</strong> base <strong>de</strong> son poêle. Sur le site voisin<br />

<strong>de</strong> l’Erzgrubenthal à Wattwiller, les <strong>de</strong>ux habitats contemporains<br />

établis sur les <strong>de</strong>ux hal<strong>de</strong>s superposées n’ont<br />

<strong>la</strong>issé qu’un dépotoir très riche, qui nous renseigne sur<br />

les conditions d’existence <strong>de</strong>s mineurs ayant vécu dans<br />

ce lieu isolé. Dans <strong>la</strong> vallée <strong>de</strong> <strong>la</strong> Doller enfin, le long<br />

du G<strong>la</strong>senbach a été fouillée une construction appuyée<br />

contre un amas <strong>de</strong> pierres, qui a également livré céramique<br />

culinaire <strong>et</strong> carreaux <strong>de</strong> poêle ; un peu plus haut, <strong>la</strong><br />

découverte <strong>de</strong> céramique i<strong>de</strong>ntique indique <strong>la</strong> présence<br />

d’au moins un <strong>de</strong>uxième habitat contemporain.<br />

De ce grand nombre <strong>de</strong> maisons qui ont fait l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

fouilles <strong>de</strong>vant les entrées <strong>de</strong> galeries d’époque Renaissance,<br />

rares sont celles qui ont livré <strong>de</strong>s résultats significatifs.<br />

L’appel<strong>la</strong>tion <strong>de</strong> «maison du poêle» qui résulte <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

découverte systématique <strong>de</strong> fragments <strong>de</strong> céramique <strong>de</strong><br />

poêle à leur emp<strong>la</strong>cement nous semble inadaptée, dans<br />

<strong>la</strong> mesure où <strong>la</strong> plupart <strong>de</strong>s habitations <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te époque<br />

en étaient équipées, aussi lui préférons-nous celle, plus<br />

spécifique, <strong>de</strong> «maison du porche». Si certaines avaient<br />

réellement une fonction d’habitat, au moins temporaire,<br />

notamment dans les sites les plus reculés, celles-ci servaient<br />

le plus souvent d’abris pour le stockage du suif <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong>s outils <strong>et</strong> rendaient plus confortables les pauses pendant<br />

<strong>la</strong> journée <strong>de</strong> travail. L’iconographie <strong>et</strong> les sources<br />

écrites les décrivent parfois avec précision. Les habitats<br />

permanents, <strong>la</strong> plupart du temps intégrés aux localités<br />

voisines, fussent-elles créées <strong>de</strong> toutes pièces par l’activité<br />

minière, n’ont fait, pour l’heure, l’obj<strong>et</strong> que <strong>de</strong> recensements<br />

(district <strong>de</strong> Sainte-Marie-aux-Mines).<br />

Toutes ces fouilles ont livré un mobilier abondant <strong>et</strong> diversifié,<br />

qui nous renseigne sur les vies <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te popu<strong>la</strong>tion<br />

au quotidien : alimentation, mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> cuisson, chauffage,<br />

décor... Autre intérêt, plusieurs dépotoirs correspon<strong>de</strong>nt<br />

à <strong>de</strong>s occupations bien individualisées <strong>et</strong> bien datées, <strong>de</strong><br />

durée courte, <strong>et</strong> re<strong>la</strong>tives à une popu<strong>la</strong>tion restreinte. Mise<br />

à part une première synthèse sur <strong>la</strong> céramique <strong>de</strong> poêle<br />

(Fluck, Bohly 2001) qui montre <strong>la</strong> diversité <strong>et</strong> <strong>la</strong> qualité <strong>de</strong>s<br />

décors se r<strong>et</strong>rouvant parfois sur différents sites éloignés,<br />

l’étu<strong>de</strong> du mobilier se cantonne le plus souvent au <strong>de</strong>s-<br />

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