alsace - Ministère de la Culture et de la Communication

sion. Six bassins boisés encastrés dans le sol servaient
au prélavage au tamis. À côté, le banc de concassage manuel
supportait 15 mortiers en pierre. Le lavage s’effectue
d’abord dans deux auges allongées cloisonnées, en pente
d’un peu moins de trois degrés. À l’aval, les schlamms se
décantent dans des auges boisées plantées dans le sol
(la dernière couche s’y trouvait encore).
Quelques investigations moins complètes ont mis au jour
des structures de lavage : au Neuenberg (1984), les trois
bacs de la laverie et quatre bassins du «labyrinthe» du
bocard des Treyer (une coupe stratigraphique sur 52 m en
bordure de rivière !), à Fertrupt (1989 et 1993) deux bacs
de décantation et leurs structures annexes, le bac amont
masquant même une authentique couche de schlicks de
galène concentrée. Le seul bocard fouillé à ce jour (Goergler
1990) est celui situé à l’aval de la mine Chrétien, au
Neuenberg (début XVIII e s.) ; il s’agit d’un bocard à smalt
(verre au bleu de cobalt) dont on a retrouvé les grains à
divers stades de concassage ; seule subsiste du bocard
son infrastructure. Pour les temps plus contemporains, signalons
un sondage ponctuel dans la halde stratifiée de
schlamms et schlicks déposés au niveau de la laverie (fin
XVIII e et premier quart du XIX e s.) des Mines de plomb
(rapport de fouille programmée Haut-Altenberg 1986).
Au Donnerloch à Steinbach, le carreau minier, correspondant
à la reprise du site au XV e s., a livré un atelier rudimentaire
de traitement du minerai, en bordure de la partie
terminale de la voie de roulage : un amas de minerai plus
ou moins calibré était disposé par-dessus le remplissage
argilo-sablonneux finement lité d’un bac de lavage, juste
à côté d’une table de concassage. Celle-ci est constituée
d’un simple bloc roulé de grauwacke, montrant des traces
d’usure en cupule sur deux de ses faces : ces ustensiles
rudimentaires se rencontrent sur beaucoup de sites..., à
condition de savoir les reconnaître comme tels parmi les
nombreux blocs livrés par les fouilles.
Un site hors pair, dans la partie méridionale du district, au
quartier dit Bluttenberg (commune de Lapoutroie) n’a été
reconnu que par ses affleurements : il s’agit d’un alignement
d’indices de boues de lavage sur 200 m en bordure
du ruisseau, assurément un champ d’investigation à venir
qui pourra éclairer l’organisation dans l’espace d’un complexe
industriel de montagne. De plus, toute une minéralogie
des sables et limons reste à mettre en œuvre, tout
comme la sédimentologie de ces dépôts, et même, à la
clé, une archéologie appliquée à la pollution des sols par
le plomb. Le site du Bluttenberg apparaît le plus approprié
pour ces études à venir.
III.2.2. La métallurgie
La métallurgie de réduction de la triade plomb-cuivre- argent
Vers le milieu du XVI e s., un événement de nature technologique
est venu changer le cours de l’histoire économique
: il s’agit de la mise en pratique de la liquation,
qui a bouleversé la métallurgie de l’argent par l’extraction
de ce métal à partir des cuivres argentifères, par le
biais d’addition de plomb. Dès lors, l’avenir pouvait sourire
aux secteurs géographiques (comme Sainte-Marie-aux-
Mines) hébergeant concurremment le plomb, le cuivre
et l’argent. L’éclosion de cette technologie nouvelle devait
constituer pour la recherche une problématique pertinente,
au-delà de la curiosité de mettre au jour différents
types de fours et de comprendre à quoi ressemblait réellement
une fonderie. Mais d’abord, il convenait de localiser
les sites que l’examen des documents d’archives permettait
de pressentir.
Conduite en 1989, une première prospection stratégique
le long du réseau hydrographique a permis de débusquer
pas moins de 55 fonderies d’époque Renaissance
pour l’ensemble des Vosges centrales, dans un rayon de
20 km autour de Sainte-Marie-aux-Mines et de La Croixaux-Mines.
Il est à remarquer que cette recherche s’inscrit
dans une enveloppe interrégionale, circonscrite naturellement
aux limites de la «délocalisation» de ce type
d’industrie pour des raisons d’approvisionnement en combustible.
Cette paléo-industrie s’insère plus que discrètement
dans le paysage actuel : seul un œil exercé détectera
les canaux d’amenée de la force hydraulique ; quant
aux sites eux-mêmes, composés d’accumulations de scories,
ils nécessitent des sondages ou des affouillements
de berges de ruisseaux pour qu’en soit livrée l’ampleur.
Certains de ces sites ont fait l’objet de prospections détaillées
et de sondages dès 1991. La prospection géophysique
a été systématisée : 27 prospections magnétiques,
10 prospections électriques, 3 prospections électromagnétiques
et une prospection radar, tout comme
les sondages-diagnostics au droit des diverses anomalies
mises en évidence (qui peuvent signifier des fours).
Les dernières en dates ont été coordonnées par Claude
(1997-1999) sur les sites de la commune de Ban-de-
Laveline (Vosges). Un site a été choisi pour y implanter
une fouille programmée : la fonderie F3 du Bonhomme
(1995-1996 ; Fluck, Florsch 1996 ; Fluck, Florsch 1997).
Cette fouille a dévoilé l’organisation d’un des trois ateliers
de la fonderie F3 : un espace construit cloisonné en
pièces, une batterie de deux fours semi-enterrés enrobés
dans une puissante maçonnerie de pierres sèches, enfin
la fosse de la roue hydraulique. L’un des fours, coiffé
d’une cheminée de briques, a été interprété comme fourneau
de fusion plombeuse, l’autre comme fourneau de liquation.
Les matériaux archéométallurgiques mis au jour
(du minerai au métal, en passant par les déchets) constituent
un réservoir inépuisable d’études archéométriques
(Fluck 1993). L’enjeu est à présent de comprendre les mécanismes
physico-chimiques de cette métallurgie si complexe,
que des textes d’archives ou de traités encyclopédiques
ne parvenaient pas à expliquer, du fait de l’opacité
des connaissances préchimiques d’alors. Un crédit
d’analyses accordé en 2004 a récemment relancé cette
recherche (avec l’appui de l’équipe de Nancy).
Pour les Vosges méridionales, une découverte fortuite a
permis de localiser le site de la fonderie des mines d’argent
de Wegscheid, la seule sans doute en Alsace à avoir
fait l’objet d’une description contemporaine avec un souci
du détail poussé à un tel degré.
Un autre univers est celui que composent les fonderies
médiévales. Elles apparaissent très présentes à Sainte-
Marie-aux-Mines, où leur dissémination au voisinage immédiat
des sites d’extraction – tout au contraire des installations
du bas-Moyen Âge et de la Renaissance, inféodées
au réseau hydrographique – a fait l’objet d’une
cartographie assortie de prospections géophysiques. Une
campagne archéométrique, réalisée sur divers matériaux
(scories fayalitiques, litharges, datations 14 C...) et confron-
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