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60 Dossier pédagogique<br />
au silence pro gres sifs se joint le rétré cis se ment du lieu<br />
jusqu’à sa <strong>des</strong> truc tion complète au cha pitre LXVII, qui<br />
fait, petit à petit, de l’appar te ment un caveau, une tombe<br />
pour Chloé et per met, plus sym bo li que ment, la trans po -<br />
si tion maté rielle de l’angoisse <strong>des</strong> per son nages face à la<br />
pro gres sion de la mala die vers la mort1 .<br />
Enfi n, l’appar te ment subit aussi une dégra da tion en<br />
forme de végétalisation, qui se pour suit jusqu’à ce qu’il<br />
devienne pro pre ment maré ca geux. Cette hybri da tion<br />
végé tale évoque non seule ment le nénu phar qui croît dans<br />
la poi trine de Chloé, mais le nom de Chloé lui- même<br />
qui désigne une « jeune pousse » en grec et est sous- titré,<br />
dans le mor ceau épo nyme de Duke Ellington, Song of the<br />
Swamp (La Chan son du marais), où le marais ren voie au<br />
bayou de la Louisiane, lieu de la nais sance du jazz. Chloé,<br />
qui concen trait pour tant les deux pas sions de Colin, la<br />
femme et la musique, et l’amour intrin sèque que lui porte<br />
le per son nage, seraient donc la source de la dégra da tion<br />
de l’espace – ce qui donne une conno ta tion par ti cu liè re -<br />
ment pes si miste au sen ti ment.<br />
Espace du dehors<br />
À l’appar te ment ini tia le ment confor table et sécu ri -<br />
sant auquel on iden ti fi ait le per son nage dans l’inci pit,<br />
répondent, très tôt dans le roman, <strong>des</strong> espaces exté rieurs<br />
mena çants. Il n’est qu’à se sou ve nir de la <strong>des</strong> crip tion de<br />
la rue tra ver sée par Colin pour se rendre à la fête <strong>des</strong><br />
Ponteauzanne, rue « aux fenêtres à guillo tine » (p. 66)<br />
dont les immeubles ont un « aspect cruel » et dont les<br />
1. D’ailleurs, l’angoisse de Colin au moment où il apprend, à la<br />
pati noire, la syn cope de Chloé se tra duit de la même manière : « Les<br />
parois de la cabine se res ser raient et il sor tit avant d’être broyé »<br />
(p. 169). L’espace se res treint pour sou li gner la mon tée de l’angoisse.