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L’Écume <strong>des</strong> <strong>jours</strong> 57<br />
toiles d’arai gnées balaient leurs fi gures. Dans ce manège,<br />
la reli gion est un monde à l’envers dans lequel le « Reli -<br />
gieux » frappe le sol avec sa tête. La compa rai son du bâti -<br />
ment avec « l’abdo men d’une énorme guêpe cou chée, vue<br />
de l’inté rieur » (p. 123) déva lo rise le lieu en intro dui sant<br />
le motif du « bas cor po rel ».<br />
Le Reli gieux manque aussi à sa tâche : « il ne se rap -<br />
pe lait plus les for mules », il reluque Chloé comme un<br />
homme. La men tion <strong>des</strong> « frag ments de prières » qui leur<br />
« reve naient à la mémoire » dénonce éga le ment une fer -<br />
veur feinte. De plus, ce retour de la prière est asso cié à la<br />
frayeur, ce qui sug gère une dimen sion répres sive de la reli -<br />
gion dont témoigne le Dieu « qui avait un œil au beurre<br />
noir et l’air pas content ». En outre, le même Che vêche,<br />
qui « som no lait dou ce ment », donne un coup de canne à<br />
Chick. Enfi n, l’allu sion au coût exor bi tant du mariage est<br />
une façon de sou li gner qu’il s’agit plus, pour l’Église, d’un<br />
commerce que d’un sacre ment.<br />
Une nou velle fois, la fan tai sie est une façon de por ter<br />
un regard cri tique sur l’homme et le monde. La nar ra tion<br />
de ce mariage et la <strong>des</strong> crip tion <strong>des</strong> élé ments qui struc -<br />
turent cette céré mo nie sont le vec teur d’une paro die sacri -<br />
lège et Boris Vian tourne le sacre ment en déri sion. Mais il<br />
dénonce éga le ment avec force une reli gion mer can tile et<br />
répres sive, qui repose sur la crainte – dénon cia tion dont<br />
se feront l’écho, avec une bien plus nette bru ta lité, les<br />
cha pitres concer nant l’enter re ment pathé tique de Chloé<br />
où la reli gion ajoute à la souf france.