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L’Écume <strong>des</strong> <strong>jours</strong> 17<br />
tapis de salle de bains : « le tapis se mit à baver » – et l’on est<br />
presque ici dans la per son ni fi ca tion d’objets inani més qui<br />
ferait son ger au registre fan tas tique si elle ne sus ci tait pas le<br />
rire ou le sou rire du lec teur plu tôt que son inquié tude.<br />
Les actes absur<strong>des</strong> du per son nage sont accom pa gnés par<br />
le choix d’images et de fi gures incongrues dans le lan gage<br />
du nar ra teur. On peut men tion ner à ce titre sa che ve lure<br />
pei gnée « en longs fi lets orange pareils aux sillons que le<br />
gai labou reur trace à l’aide d’une four chette dans de la<br />
confi ture d’abri cots », où l’on remarque l’imbri ca tion de<br />
plu sieurs images curieuses qui ne sont guère compa tibles<br />
entre elles et qui, ici encore, rap pellent l’écri ture auto ma -<br />
tique et les asso cia tions d’idées <strong>des</strong> sur réa listes.<br />
Milieu du per son nage<br />
Comme dans les romans tra di tion nels, le per son nage est<br />
carac té risé par le milieu dans lequel il vit, mais on peut<br />
noter la même étran geté à pro pos du cadre de la scène<br />
qui éva cue, lui aussi, l’uni vers réa liste. À un per son nage<br />
aty pique cor res pond, de fait, un cadre inso lite, un lieu<br />
sur pre nant qui res pire le luxe et la faci lité du milieu bour -<br />
geois, le tra vail en moins (ce qui crée un pre mier déca lage<br />
par rap port à la norme bour geoise du XIX e siècle).<br />
L’uni vers est en effet composé d’élé ments fan tai sistes.<br />
Outre l’abon dance de glaces et de miroirs qui fait du lieu<br />
un monde de refl ets et d’arti fi ces, la <strong>des</strong> crip tion du sys tème<br />
de vidange de la bai gnoire est éton nante, à la fois tech nique<br />
et pro pre ment irréelle puisque l’eau du bain s’écoule chez le<br />
« loca taire de l’étage infé rieur » en tom bant d’abord sur son<br />
« bureau » puis sur son « garde- manger ». Quoique Colin<br />
soit décrit comme « gen til », on peut noter ici son manque<br />
d’empa thie à l’égard de son voi sin qui ne l’a pas pré venu du<br />
chan ge ment – signe d’indif fé rence ou d’anti pa thie…