19.10.2013 Views

Un Dieu impartial ? Jugement sur les œuvres et justification par la foi

Un Dieu impartial ? Jugement sur les œuvres et justification par la foi

Un Dieu impartial ? Jugement sur les œuvres et justification par la foi

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

62<br />

théologie évangélique vol. 2, n° 1, 2003<br />

divine est-elle atteinte <strong>par</strong> le privilège du Juif instruit <strong>par</strong> <strong>la</strong> Loi ? Même s’il<br />

<strong>par</strong>aît juste que chacun soit évalué en fonction de sa condition <strong>par</strong>ticulière<br />

(« avec <strong>la</strong> Loi » ou « sans <strong>la</strong> Loi »), le fait que <strong>les</strong> Juifs le soient à <strong>par</strong>tir de <strong>la</strong> Loi<br />

mosaïque, alors que <strong>les</strong> païens le sont différemment, pourrait <strong>la</strong>isser entrevoir<br />

une certaine inégalité. Paul s’expliquera <strong>sur</strong> ce point dans <strong>les</strong> vers<strong>et</strong>s 14-16. <strong>Un</strong>e<br />

autre différence a trait à l’issue prévue ou au moins à sa présentation : <strong>les</strong><br />

pécheurs « sans <strong>la</strong> Loi » périront, alors que ceux qui disposent de <strong>la</strong> Loi seront<br />

jugés. Mais le verbe passif krithèsonthaï peut, à lui seul, impliquer un jugement<br />

négatif, une condamnation (cf. Rm 3.6-7 ; 2 Th 2.12). La différence est donc<br />

plus ap<strong>par</strong>ente que réelle.<br />

Le vers<strong>et</strong> 13, où l’intention manifeste de Paul est de critiquer <strong>la</strong> fausse<br />

as<strong>sur</strong>ance de Juifs estimant qu’honorer <strong>la</strong> Loi en l’écoutant (en récitant le<br />

Shema : « Écoute, Israël !) suffit à garantir <strong>la</strong> faveur divine, débouche <strong>sur</strong> une<br />

formule <strong>sur</strong>prenante chez Paul : ceux qui m<strong>et</strong>tent en pratique <strong>la</strong> Loi seront justifiés.<br />

Les Juifs accepteraient volontiers c<strong>et</strong> énoncé, mais sans donner à l’expression<br />

« m<strong>et</strong>tre en pratique <strong>la</strong> Loi » toute <strong>la</strong> portée que Paul lui accorde. Certains<br />

d’entre eux estimaient, en fonction de c<strong>et</strong>te « pratique » telle qu’ils <strong>la</strong> comprenaient<br />

<strong>et</strong> des <strong>œuvres</strong> auxquel<strong>les</strong> elle donnait naissance, acquérir une position <strong>les</strong><br />

m<strong>et</strong>tant à l’écart des autres hommes <strong>et</strong> leur perm<strong>et</strong>tant d’envisager le jugement<br />

ultime sereinement14 . U. Wilckens rassemble des textes montrant que, dans <strong>la</strong><br />

ligne de l’apocalyptique, se développait l’attente, lors de « l’ouverture des cieux »<br />

à <strong>la</strong> fin des temps, d’une révé<strong>la</strong>tion de trésors d’<strong>œuvres</strong> bonnes pour <strong>les</strong> justes15 .<br />

Ainsi II Baruch 14.12 : « Les justes, au contraire, attendent <strong>la</strong> fin de bon cœur <strong>et</strong><br />

sortent sans crainte de c<strong>et</strong>te demeure, car ils ont près de toi <strong>la</strong> force des <strong>œuvres</strong><br />

qui est gardée dans des trésors ». Le contraste deviendra alors évident : « Les<br />

14. Nous n’entrons pas dans le grand débat re<strong>la</strong>tif au nomisme d’alliance ouvert <strong>par</strong> E.P. Sanders qui récuse l’idée selon<br />

<strong>la</strong>quelle le judaïsme promouvait un légalisme, une religion d’<strong>œuvres</strong> bonnes as<strong>sur</strong>ant le salut. Les travaux de Sanders,<br />

de N.T. Wright, dans une me<strong>sur</strong>e ceux de J.D.G. Dunn, ont rappelé que l’alliance avec Israël était une alliance de<br />

grâce <strong>et</strong> que, si l’obéissance était requise des membres de l’alliance, c’était pour honorer le cadre de c<strong>et</strong>te alliance <strong>et</strong><br />

pour exprimer une reconnaissance ; le fidèle pouvait en outre faire appel à <strong>la</strong> miséricorde divine. C<strong>et</strong>te réaction à<br />

l’égard d’une vue trop étroite <strong>sur</strong> le « légalisme » juif est tombée dans l’extrême opposé. En réalité, le judaïsme est<br />

divers, <strong>les</strong> accents varient selon <strong>les</strong> textes. Paul ne dénonce pas un fantôme qu’il aurait lui-même créé : le repos <strong>sur</strong><br />

l’élection <strong>et</strong> <strong>sur</strong> l’œuvre méritoire ont existé, même si ce<strong>la</strong> ne représente pas <strong>la</strong> totalité de <strong>la</strong> piété juive au premier siècle.<br />

<strong>Un</strong> ouvrage important <strong>et</strong> nuancé a <strong>par</strong>u <strong>sur</strong> le suj<strong>et</strong> : Justification and Variegated Nomism. Vol. I : The Complexities<br />

of Second Temple Judaism, sous dir. D.A. Carson, P. O’Brien, M. Seifrid, WUNT, Tübingen, Mohr Siebeck, Grand<br />

Rapids, Baker, 2001. Plusieurs auteurs y soulignent que l’apôtre ne vise pas tant dans ce passage de l’épître aux<br />

Romains le « légalisme », <strong>la</strong> religion des <strong>œuvres</strong> méritoires, mais <strong>la</strong> confiscation <strong>par</strong> Israël de <strong>la</strong> faveur divine (ainsi<br />

D.B. Darlington, op. cit., p. 56 ; N.T. Wright, op. cit., p. 148, <strong>et</strong>c.).<br />

15. U. WILCKENS, Der Brief an die Römer ; Römer 1-5, E.K.K., Zûrich, Einsiedeln, Köln, Benziger Ver<strong>la</strong>g, Neukirchener<br />

Ver<strong>la</strong>g, 1978, p. 130.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!