Journal of Film Preservation - FIAF

same phenomenon. The Ledoux ideology
that was intended to be a correction to a
rigid canon has led consequently to a
situation where the guiding lines disappear.
The traditional methods of exhibiting
moving images in special spaces have been
moved into a more open public space. This is
the crisis of the film archives. The legacy in
its contemporary version as memory is no
longer composed of objects, but of an
attitude toward these objects.
One says that all new problems generate
their solutions. Thus the problem of
proliferation of the archivable - how to store
everything - leads to proposals of electronic
and digital means. Since the problem is so
real, the solution may appear inadequate.
But inadequate for whom? For us, archivists,
because the users-consumers seem to find
the solution perfectly adequate. They don’t
even understand the problem. The notions of
authenticity are changing. We may compare
the gradual erosion of the idea of the
original in the plastic arts to the video and
the cd-rom and all the other technical
developments to come. The new technology
is less fragile, more accessible, and much less
expensive than the projection of films in the
archives. This is a strong argument, against
which our anachronistic arguments about
authenticity do not weight heavily.
Unlike music and opera performances,
subsidized because they are considered as
forms of art that disappear, cinema is not
considered ephemeral. It is in an
intermediary position. Why safeguard the
institution of cinema, since it exists
commercially? It seems to exist moreover
since films remain accessible under different
forms: on television, and video or disc copies
which may be rented or purchased. How to
make it understood that the cinema heritage
is and remains in danger? This is the
paradox: heritage that is accessible to all is
our common property and that which is not
accessible is not considered as part of the
heritage. The values have been reversed: the
means of accessibility becomes the end.
In the popular imagination, the archive is an
illusion of inexhaustible abundance. Of
course, the impression of completeness is
false: try to locate certain films in video
form. In fact, the whole silent film period, of
which there remains so little in our archives,
hardly exists at all in video. Already the
American Film Institute’s list of the best
American films of the century only contains
one or two titles from the silent period. One
must not count on memory to safeguard the
heritage. Of course the market demand for
l’archive, par voie électronique, j’en déduis - faussement - que l’original
doit bien se trouver quelque part, qu’il doit bien exister ou, du moins,
qu’il a existé et que ce qui en subsiste est une trace...”. Qu’importe
puisque nous ne consultons plus que des traces. L’archive est donc
devenue une valeur imaginaire.
Ne faut-il pas craindre qu’une archive imaginaire suffise amplement aux
utilisateurs? De là, il n’est pas exagéré d’avancer que les pouvoirs publics
vont conclure que la copie vaut bien l’original, puisqu’elle est porteuse
de bien d’avantages, entre autres : une accessibilité idéale. L’ordinateur
remplace donc parfaitement l’archive traditionnelle.
Une conséquence de la perte de l’original - qui n’est pas la seule - est
que la lecture se fait différemment et donc, son interprétation également.
Arlette Farge remarque que consulter les manuscrits du 18ème siècle,
par le biais de microfiches, transforme considérablement son approche. 10
Du moins, quand elle affirmait cela, les manuscrits existaient encore!
•
Bien entendu, l’authenticité ou l’originalité gardent leur attrait pervers.
Un fétichisme très particulier s’est installé, dont les marchés de l’art font
leur profit. La valeur ajoutée de l’authenticité est d’ailleurs également le
moteur essentiel du tourisme culturel. “Aller voir sur place, ce que l’on
ne connaît que médiatisé.” Que ce soit Florence ou le Musée d’Orsay...
une représentation de la Traviata à l’opéra, ou la Neuvième de Beethoven
en concert, ou plaisir suprême d’authenticités accumulées : assister à une
représentation de Aïda aux pieds des grandes pyramides ou de Turandot
sur la Grande Muraille!
Encore que ce souci pour “l’aura authentique” (pléonasme) n’est peutêtre
que transitoire, n’est qu’un reste d’une civilisation et d’une culture
en train de disparaître. Car, même les arts plastiques, où la notion d’aura
est pourtant la plus fortement acceptée, n’hésitent plus à confronter les
œuvres authentiques à des reproductions. Aberration? J’ai lu dans une
critique que l’exposition Dirk Bouts à Louvain, présente des
reproductions photographiques d’oeuvres manquantes à côté d’ œuvres
originales; de même pour l’exposition à la National Gallery en 1998 sur
le thème du miroir dans la peinture (Mirror, Image; J. Miller on Reflection),
les oeuvres non disponibles étaient montrées en reproduction. Ce qui
m’inquiète, ici, c’est que dans les nombreuses critiques que j’ai lues ayant
trait à ces deux expositions récentes, la remarque n’est faite qu’une seule
fois! C’est dire comment le phénomène est déjà entré dans nos moeurs.
N’ayant pas visité ces expositions, je ne sais pas si c’est vrai ou faux.
Mais ce qui est vrai c’est qu’au Musée de Tournai, la salle Rogier de la
Pasture exhibe fièrement l’œuvre complète du maître au moyen de
reproductions photographiques - aux dimensions exactes, nous précise-ton.
(Les originaux, eux, sont dispersés de par le monde dans différents
musées.)
Evidemment, l’art conceptuel nous a mené dans cette voie, avec parfois
des conséquences assez absurdes. Ainsi le Musée de la Haye vient de
détruire une peinture murale de Sol Lewitt (pour cause de... restauration
22 Journal of Film Preservation / 58/59 / 1999