Journal of Film Preservation - FIAF
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La mémoire des archives<br />
Eric de Kuyper<br />
Ce texte reprend et développe les idées exposées à Bruxelles dans le cadre du<br />
colloque organisé par ARCHIMEDIA à la Cinémathèque Royale de Belgique,<br />
le 28 novembre 1998.<br />
Avoir fait admettre le cinéma comme faisant partie du patrimoine<br />
artistique et culturel n’a pas été chose aisée. Art populaire ; art récent, né<br />
à la fin du dix-neuvième siècle ; art commercial et en plus art faisant<br />
appel avant tout au visuel et non au verbal... autant d’aspects qui ont<br />
freiné la reconnaissance.<br />
Il a fallu pas mal de temps, pas mal d’efforts et d’enthousiasme de la part<br />
des pionniers et de leurs successeurs pour faire admettre que le cinéma<br />
- comme fait de culture - avait sa place dans le réseau des biens<br />
culturels. A présent, le fait semble acquis, le cinéma est de plein droit<br />
admis par la culture <strong>of</strong>ficielle - la preuve en étant que l’état subsidie,<br />
bien qu’en général parcimonieusement, ces institutions que sont les<br />
cinémathèques et les musées du cinéma.<br />
Or c’est précisément au moment même où on pourrait croire le fait<br />
patrimonial du cinéma comme étant acquis, que les institutions<br />
traditionnelles qui ont la charge des biens patrimoniaux sont en crise.<br />
Souvent, en fait, sans qu’elles s’en rendent ouvertement compte. Cela, je<br />
crois, vaut également et plus particulièrement pour nos institutions qui<br />
s’occupent du patrimoine cinématographique. Car la notion même<br />
d’archive est en train de changer et la façon dont les cinémathèques<br />
mettent en valeur leur patrimoine - dans leurs salles de musée, selon des<br />
modalités de programmation classique - n’est plus évidente non plus.<br />
Première partie<br />
La notion de patrimoine<br />
S’il est vrai que “comme la plupart des mots qui désignent des réalités<br />
sociales, idéologiques, culturelles, “la notion d’art n’existe que munie de<br />
sa généalogie” (Aumont), il en va de même pour la notion de<br />
patrimoine. Celle-ci n’est pas si ancienne. En français, elle date du début<br />
du 19ème siècle. En 1979, la notion de patrimoine est comprise par<br />
seulement 12% des Français. Or, une année plus tard, 36% des Français<br />
savent ce qu’est le patrimoine! 1 On peut admettre que de nos jours, la<br />
notion est largement comprise. Que s’est-il passé? Il y a eu l’Année du<br />
Patrimoine, et ce qui, au départ, semblait devoir n’être qu’une<br />
manifestation parmi tant d’autres, s’est avéré avoir eu un impact énorme.<br />
En même temps que la notion de patrimoine semble plus largement<br />
acceptée, son contenu, lui, a également évolué. Au départ, il faut<br />
comprendre patrimoine (en anglais : heritage) dans son sens<br />
17 <strong>Journal</strong> <strong>of</strong> <strong>Film</strong> <strong>Preservation</strong> / 58/59 / 1999