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Journal of Film Preservation - FIAF

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Le cinéma colonial : patrimoine emprunté<br />

Cinéma colonial: patrimoine emprunté<br />

Colonial Cinema: A Borrowed Heritage<br />

Cine colonial: un patrimonio en préstamo<br />

Abdelkader Benali<br />

Le terme de “cinéma colonial” fait-il encore carillonner les mélodies<br />

folkloriques de l’Atlas, les danses enflammées sous le soleil fiévreux<br />

de l’Afrique, les chants des prières ou les courbes chatoyantes des<br />

mosaïques ? L’imaginaire cinématographique colonial fut, très vite<br />

après les indépendances, pensé soit en terme de condamnation ou de<br />

refus, soit comme un imaginaire de pacotille. Jusqu’au début des<br />

années 80, l’aphorisme de “cinéma exotique” permettait encore de<br />

déjouer toute la charge émotionnelle qu’une telle production est<br />

amenée à dissimuler. Il a fallu attendre les années 90 pour qu’une<br />

nouvelle génération de chercheurs, particulièrement en France, mais<br />

aussi aux Etats-Unis et en Afrique, manifeste ouvertement son intérêt<br />

pour le cinéma colonial. Un intérêt qui relie le regard scientifique et<br />

froid de l’analyse au sentiment de culpabilité et de malaise du<br />

partisan. Par ailleurs, ne répondant pas aux critères esthétiques<br />

édifiés par l’histoire du cinéma, les films coloniaux furent reconnus<br />

comme une production de propagande et, par conséquent, relégués<br />

dans la catégorie des “genres mineurs”.<br />

Malgré l’intérêt scientifique qu’on leur a accordé ces dernières années,<br />

la majorité des films coloniaux constitue encore actuellement ce que<br />

nous pourrions nommer un cinéma d’archives, représentatif d’une<br />

époque révolue et dont les implications formelles et idéologiques ne<br />

sont plus d’actualité. Il est évident que l’héritage conceptuel - d’ordre<br />

historiographique - auquel le cinéma colonial s’est trouvé affilié exige<br />

une vigilance méthodologique et une rigueur analytique sans<br />

lesquelles le film ne jouerait qu’un rôle d’illustration à des idées<br />

préconçues, et ne serait qu’un simple sismographe permettant<br />

d’évaluer visuellement une période historique.<br />

Ce constat étant établi, faudrait-il continuer à considérer l’ensemble<br />

des films coloniaux seulement à partir de leurs implications dans la<br />

pensée coloniale, et dans le processus formel qu’ils établissent en vue<br />

d’intégrer le colonisé dans un système de représentation ? Car,<br />

parallèlement à ce cheminement apparent, le cinéma élabore une<br />

lecture qui échappe à la mécanique pragmatique de l’époque. Les<br />

cinéastes n’ont pas toujours gagné les colonies africaines et asiatiques<br />

dans le seul but de répondre à des attentes <strong>of</strong>ficielles, ils n’ont pas<br />

réalisé que des films de commande, et n’avaient pas pour seul<br />

objectif de créer chez les peuples européens l’idée d’un impérialisme<br />

déjà largement consacré. C’est la raison pour laquelle les films<br />

coloniaux présentent un double discours qui se situe dans deux<br />

strates différentes de leur contenu, qu’il soit fictionnel ou à caractère<br />

documentaire. Lorsque l’on pousse l’analyse au-delà des effets<br />

immédiats qu’ils comportent, on constate que la vision propagandiste<br />

2 <strong>Journal</strong> <strong>of</strong> <strong>Film</strong> <strong>Preservation</strong> / 63 / 2001

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