Impact de la libéralisation commerciale sur le marché du ... - Femise
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5.4. Libéralisation commerciale, emploi et inégalités salariales : une relation fragile Plusieurs raisons incitent à la prudence quand on veut quantifier empiriquement la relation entre la libéralisation commerciale, l’emploi (et les salaires) et les inégalités salariales dans le cas tunisien. i) La taille de l’échantillon demeure très faible. 230 observations (10 secteurs pour la période 1975-1998) dans le cas de Ghazali (2009) et 200 (8 secteurs pour la période 1971-1996) dans le cas de Haouas et Yagoubi (2001). Mouelhi (2007) a cependant utilisé un échantillon plus important avec des données individuelles (660 firmes durant la période 1983-1994). Les changements fréquents dans le choix des secteurs sondés pour les salaires relatifs empêchent d’avoir des séries comparables. De même, la disparition de plusieurs individus de l’échantillon relatif aux firmes (importance des taux de non réponse) ne permet pas d’avoir des données fiables. ii) Les coefficients relatifs aux inégalités salariales sont relativement faibles. Une hausse de 10% du ratio des imports sur la valeur ajoutée engendre une augmentation des inégalités salariales de 2,5%. De même, une réduction de 10% des droits de douane implique une hausse des inégalités de 5% (Ghazali, 2009). Si l’on considère l’impact de la libéralisation commerciale sur l’emploi, on trouve qu’une hausse du tpe de 10% engendre une diminution de l’emploi de l’ordre de 0,2% (Mouelhi 2007). Dans tous les cas, ces coefficients sont très faibles. iii) L’une des explications phare que l’on trouve dans pratiquement l’ensemble des études portant sur la Tunisie, est la complémentarité entre l’intensité capitalistique et le travail qualifié. Cette explication doit être plus discutée car on peut avoir des secteurs intensif en capital mais où le travail est très peu qualifié (le secteur de la sidérurgie, par exemple). iv) Dans les différentes études citées précédemment, il semble qu’il existe une relation de causalité entre la libéralisation commerciale et le progrès technique. Or, il est légitime de se demander s’il n’existe pas, dans le cas tunisien, une sorte de progrès technique autonome, ou du moins, embryonnaire. Ceci est d’autant plus plausible que ce pays a connu une évolution très favorable en termes d’indicateurs technologiques (inputs et outputs technologiques). En effet, si l’on considère la dépense intérieure de recherche et développement (DIRD), qui correspond aux travaux de recherche et développement (R&D) exécutés sur le territoire national, on trouve que la Tunisie s’en sort plutôt bien et se place largement devant plusieurs tous les pays africains et même devant plusieurs pays européens. La DIRD en pourcentage du PIB était de 1,05% en 2006 4 . De même, le nombre de chercheurs et d’ingénieurs montre que ce pays est sur la bonne voie. Concernant les outputs technologiques (publications scientifiques et brevets), les résultats sont aussi encourageants. Tout ceci milite pour l’apparition d’un progrès technique interne, que les études qui traitent de l’ouverture commerciale semblent ignorer. 4 Les prévisions pour 2009 sont de 1,25% du PIB (MRSTDC). Libéralisation commerciale et marché du travail au Maroc et en Tunisie sept 2010 Page 94 sur 113
Ceci est d’autant plus important que les inégalités salariales, que les modèles économétriques utilisés n’arrivent pas à mettre suffisamment en exergue, peuvent provenir du progrès technique (et non de l’ouverture). v) Le développement des métiers dans l’offshoring et l’outsoursing en Tunisie, comme au Maroc, peut aussi être un facteur d’inégalité. Car ces métiers, considérés dans le Nord comme étant intensifs en main d’œuvre peu qualifiée, emploient le plus souvent des travailleurs qualifiés (bac plus 3 ou même bac plus 5) 5 . Ce qui peut là aussi exacerber les inégalités salariales. vi) L’une des explications avancées dans les études précédentes pour expliquer l’invalidité du modèle d’Edwards (1988) est l’arrivée massive des femmes dans le marché du travail. Cette question relative au genre mériterait d’être traitée de manière plus rigoureuse, en tenant compte de l’accès des femmes à l’éducation, de l’évolution des mentalités… bref des normes socio-culturelles. En tout cas, un effort important doit être fourni de la part des autorités afin de mettre en place un appareil statistique fiable, tout en permettant aux chercheurs l’accès aux données. 5 Ces travailleurs sont payés 2 à 3 fois le Smig dans le cas du Maroc. Libéralisation commerciale et marché du travail au Maroc et en Tunisie sept 2010 Page 95 sur 113
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fragi<strong>le</strong><br />
Plusieurs raisons incitent à <strong>la</strong> pru<strong>de</strong>nce quand on veut quantifier empiriquement <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion<br />
entre <strong>la</strong> <strong>libéralisation</strong> <strong>commercia<strong>le</strong></strong>, l’emploi (et <strong>le</strong>s sa<strong>la</strong>ires) et <strong>le</strong>s inégalités sa<strong>la</strong>ria<strong>le</strong>s<br />
dans <strong>le</strong> cas tunisien.<br />
i) La tail<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’échantillon <strong>de</strong>meure très faib<strong>le</strong>. 230 observations (10 secteurs pour <strong>la</strong><br />
pério<strong>de</strong> 1975-1998) dans <strong>le</strong> cas <strong>de</strong> Ghazali (2009) et 200 (8 secteurs pour <strong>la</strong> pério<strong>de</strong><br />
1971-1996) dans <strong>le</strong> cas <strong>de</strong> Haouas et Yagoubi (2001). Mouelhi (2007) a cependant utilisé<br />
un échantillon plus important avec <strong>de</strong>s données indivi<strong>du</strong>el<strong>le</strong>s (660 firmes <strong>du</strong>rant <strong>la</strong> pério<strong>de</strong><br />
1983-1994). Les changements fréquents dans <strong>le</strong> choix <strong>de</strong>s secteurs sondés pour <strong>le</strong>s<br />
sa<strong>la</strong>ires re<strong>la</strong>tifs empêchent d’avoir <strong>de</strong>s séries comparab<strong>le</strong>s. De même, <strong>la</strong> disparition <strong>de</strong><br />
plusieurs indivi<strong>du</strong>s <strong>de</strong> l’échantillon re<strong>la</strong>tif aux firmes (importance <strong>de</strong>s taux <strong>de</strong> non réponse)<br />
ne permet pas d’avoir <strong>de</strong>s données fiab<strong>le</strong>s.<br />
ii) Les coefficients re<strong>la</strong>tifs aux inégalités sa<strong>la</strong>ria<strong>le</strong>s sont re<strong>la</strong>tivement faib<strong>le</strong>s. Une<br />
hausse <strong>de</strong> 10% <strong>du</strong> ratio <strong>de</strong>s imports <strong>sur</strong> <strong>la</strong> va<strong>le</strong>ur ajoutée engendre une augmentation <strong>de</strong>s<br />
inégalités sa<strong>la</strong>ria<strong>le</strong>s <strong>de</strong> 2,5%. De même, une ré<strong>du</strong>ction <strong>de</strong> 10% <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong> douane<br />
implique une hausse <strong>de</strong>s inégalités <strong>de</strong> 5% (Ghazali, 2009).<br />
Si l’on considère l’impact <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>libéralisation</strong> <strong>commercia<strong>le</strong></strong> <strong>sur</strong> l’emploi, on trouve qu’une<br />
hausse <strong>du</strong> tpe <strong>de</strong> 10% engendre une diminution <strong>de</strong> l’emploi <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 0,2% (Mouelhi<br />
2007). Dans tous <strong>le</strong>s cas, ces coefficients sont très faib<strong>le</strong>s.<br />
iii) L’une <strong>de</strong>s explications phare que l’on trouve dans pratiquement l’ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong>s<br />
étu<strong>de</strong>s portant <strong>sur</strong> <strong>la</strong> Tunisie, est <strong>la</strong> complémentarité entre l’intensité capitalistique et <strong>le</strong><br />
travail qualifié. Cette explication doit être plus discutée car on peut avoir <strong>de</strong>s secteurs<br />
intensif en capital mais où <strong>le</strong> travail est très peu qualifié (<strong>le</strong> secteur <strong>de</strong> <strong>la</strong> sidérurgie, par<br />
exemp<strong>le</strong>).<br />
iv) Dans <strong>le</strong>s différentes étu<strong>de</strong>s citées précé<strong>de</strong>mment, il semb<strong>le</strong> qu’il existe une<br />
re<strong>la</strong>tion <strong>de</strong> causalité entre <strong>la</strong> <strong>libéralisation</strong> <strong>commercia<strong>le</strong></strong> et <strong>le</strong> progrès technique. Or, il est<br />
légitime <strong>de</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r s’il n’existe pas, dans <strong>le</strong> cas tunisien, une sorte <strong>de</strong> progrès<br />
technique autonome, ou <strong>du</strong> moins, embryonnaire. Ceci est d’autant plus p<strong>la</strong>usib<strong>le</strong> que ce<br />
pays a connu une évolution très favorab<strong>le</strong> en termes d’indicateurs technologiques (inputs<br />
et outputs technologiques). En effet, si l’on considère <strong>la</strong> dépense intérieure <strong>de</strong> recherche<br />
et développement (DIRD), qui correspond aux travaux <strong>de</strong> recherche et développement<br />
(R&D) exécutés <strong>sur</strong> <strong>le</strong> territoire national, on trouve que <strong>la</strong> Tunisie s’en sort plutôt bien et<br />
se p<strong>la</strong>ce <strong>la</strong>rgement <strong>de</strong>vant plusieurs tous <strong>le</strong>s pays africains et même <strong>de</strong>vant plusieurs<br />
pays européens. La DIRD en pourcentage <strong>du</strong> PIB était <strong>de</strong> 1,05% en 2006 4 . De même, <strong>le</strong><br />
nombre <strong>de</strong> chercheurs et d’ingénieurs montre que ce pays est <strong>sur</strong> <strong>la</strong> bonne voie.<br />
Concernant <strong>le</strong>s outputs technologiques (publications scientifiques et brevets), <strong>le</strong>s résultats<br />
sont aussi encourageants. Tout ceci milite pour l’apparition d’un progrès technique<br />
interne, que <strong>le</strong>s étu<strong>de</strong>s qui traitent <strong>de</strong> l’ouverture <strong>commercia<strong>le</strong></strong> semb<strong>le</strong>nt ignorer.<br />
4 Les prévisions pour 2009 sont <strong>de</strong> 1,25% <strong>du</strong> PIB (MRSTDC).<br />
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