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ègles en vigueur de l'OMC prévoient en outre que n'importe quel producteur américain peut déposer comme marque de commerce la mention "Manchego fabriqué aux Etats-Unis". À titre d'exemple, les producteurs argentins ont enregistré plus de 150 indications géographiques de l'UE comme marques de commerce. La multiplication des acronymes, des expressions et des logos sur les étiquettes des produits mis sur le marché, tels que AOC, IG, AB, « produits du terroir méditerranéen » contribue à accentuer les risques de confusion pour le consommateur. Suite aux crises alimentaires des années 1990 (crise de la vache folle), une nouvelle série de signes émerge sur le marché, tels que « Bœuf sélectionné par » ou « Nature’s Choice » selon la stratégie du distributeur 51 . Ce processus de signalisation des produits a également été accompagné par des producteurs cherchant à différencier leurs produits via des labels biologiques ou équitables. Leurs démarches amorcées dès les années 1985 se sont accélérées afin d’aboutir à des certifications au niveau national et international qui leurs garantissent notamment l’accès à la grande distribution (un même produit a un attribut, du style : AB et Commerce Equitable). Par voie de conséquence, la différenciation pour le consommateur devient difficile et l’information fournie au consommateur est nécessairement imparfaite. Ce dernier ne peut optimiser ses choix. Les efforts successifs de précision d’information via les publicités, les signes de qualité, les certificats de garantie et les IG et les politiques de labels répondent aux exigences de communication, mais participent de la confusion. L’asymétrie de l’information a des conséquences pour le consommateur, mais également pour les producteurs. Une entreprise engagée dans la dynamique de produits de qualité répondant à des critères de traçabilité suppose un investissement dans la réputation 52 ; il doit renforcer son image et choisir d’investir dans la communication et dans des accords contractuels pour certifier des produits. Dans un marché où les produits et les services ne sont pas uniformes, mais où les responsabilités désignent chaque segment de la chaîne, la décision de vendre un produit de haute qualité suppose de lourds investissements en terme d’infrastructure et d’image de marque. Les efforts conjoints du secteur privé et des administrations pour faciliter la lisibilité de l’information sont permanents. Les entreprises se lancent dans des campagnes publicitaires, des certificats de garantie et des signalisations accrues via les marques. Les gouvernements et les collectivités territoriales mènent des politiques d’information et de traçabilité (agences alimentaires en France puis en UE en 2001), ou dans des campagnes de promotion (les vins en Languedoc Roussillon, par exemple). Des coûts croissants en information doivent être couverts, ce qui explique le niveau de prix élevé des produits de terroir. Les capacités d’investissement en matière d’information deviennent une question majeure pour les producteurs. L’aptitude à créer des résumés d’information lisibles et pertinents induit des coûts particuliers (recherche, conditionnement, publicité etc.). Comme l’indique le modèle de Shapiro sur la réputation, pendant la période d’investissement la firme établit un prix incluant les coûts additionnels de l’information 53 . La formation du prix des produits 51 Voir Codron J.M ; Giraud-Héraud E. Soler L.G « Minimum quality standards, premium private labels and European Meat and Fresh Produce Retailing » Forthcoming in Food Policy, 23 p. 52 Les producteurs qui ne sont pas à même d’investir dans les mutations techniques et la communication (promotion, marque etc.) ont du mal à préserver la réputation liée à l’origine géographique ou à un attribut particulier d’un terroir. Une IG ou d’une AOC peut perdre sa fonction de création de valeur, si la stratégie de promotion du produit ne suffit pas à affronter la concurrence. Elle gardera alors uniquement sa fonction de protection juridique. 53 Le modèle de Shapiro de 1983 analyse avec un modèle d’équilibre les problèmes de réputation. Une critique de ce travail a été faite par les économistes de l’OCDE en 2000 dans le rapport intitulé « Appellations of origin and geographical indications in OEC countries : economic and legal implications ». 33 CIHEAM-IAMM Juin 2005

d’origine de qualité se fait en fonction des contraintes de production matérielles et immatérielles. La fixation d’un prix additionnel est donc déterminée par l’offre. Ce niveau de prix élevé (très supérieur au coût marginal) est supposé inciter les entreprises à garantir une offre de qualité pour les produits d’origine vis à vis du consommateur. Le recours à des marques et à leur effet de réputation peut aider à contourner le dilemme de l’asymétrie de l’information qui est d’autant plus prononcé que les producteurs et les consommateurs sont localisés dans différents pays. L’effet de réputation lorsqu’il est assuré au niveau mondial facilite l’identification et les échanges de produits. Cependant ce choix correspond à des stratégies de firmes capables d’investir et de défendre les marques à l’échelle internationale. Cohabitation IG-Marque ? Les marques et les IG sont deux types différents d’instruments de propriété intellectuelle obéissant, soit à une stratégie de défense des intérêts privés, soit à une défense d’un titre collectif. Le panel de l’OMC a conclu à la cohabitation des marques et des IG. Les conclusions du rapport Dolphins estiment qu’il n’existe pas de concurrence entre ces deux instruments de propriété intellectuelle. Ces deux systèmes doivent pouvoir se compléter, car ils remplissent des fonctions différentes. L’un permet à un groupe de producteurs d’une région donnée de protéger leur produit en prouvant son lien au terroir, l’autre permet à une entreprise de développer des stratégies particulières de marketing. Cependant cette apparente complémentarité de fonctions n’élude pas les antagonismes structurels qui sous-tendent les choix pour l’un ou l’autre de ces instruments : les indications géographiques organisent la filière en amont, tandis que les marques sont d’avantage compatibles avec les exigences de la capitalisation des entreprises et de la grande distribution. Pour les Indications Géographiques, l’enjeu est d’organiser la filière en amont pour que les producteurs accèdent à un titre de propriété intellectuelle en s’accordant sur un cahier de charges précis réglant les pratiques d’un groupe et reconnu par les autorités nationales. Le coût d’une protection par une IG est donc lié au temps nécessaire pour coordonner les activités des différentes branches impliquées dans la fabrication d’un produit. Même si aucun investissement financier n’est réalisé pour commercialiser le produit, l’existence d’une IG garantit la protection et permet d’anticiper sur une possible revendication émise par un tiers sur un produit donné. La reconnaissance nationale d’une IG lui confère une assise juridique. Cette protection évite donc une usurpation qui pourrait être faite par un tiers. Il s’agit pour les producteurs d’une région donnée de préserver l’accès au marché de leurs produits locaux. Les IG sont un instrument utile pour les petits producteurs et les moyennes entreprises (Lamy, 2003). Cette stratégie de long terme est actuellement suivie par des pays, comme la Turquie ou l’Inde, qui, ,après avoir mis en place des législations nationales cherchent à protéger des produits potentiellement qualifiables par une IG. L’antériorité dans la désignation d’un produit de terroir protégeable, en vue de préserver l’accès au marché pour des producteurs ou des moyennes, correspond donc à une stratégie défensive de protection de valeur, même si elle n’est pas potentialisée immédiatement dans les circuits de commercialisation. Considérées comme un outil de développement rural, les Indications géographiques sont supposées créer de la valeur pour la production locale. Les produits tels que le thé, le café ou le chocolat sont les produits qui peuvent déboucher sur la commercialisation y compris par les distributeurs. Les autres produits, sont considérés comme des marchés de niche encourageant les pratiques et les savoir faire traditionnels. Cependant, il faut noter que les indications géographiques ne protègent pas la connaissance qui serait inclue dans la fabrication d’un produit : elle n’est ni une garantie contre l’usurpation des savoirs traditionnels, ni une stratégie de protection des savoirs traditionnels. CIHEAM-IAMM Juin 2005 34

ègles en vigueur de l'OMC prévoient en outre que n'importe quel producteur américain peut déposer<br />

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marché, tels que AOC, IG, AB, « produits du terroir méditerranéen » contribue à accentuer les risques<br />

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« Nature’s Choice » selon la stratégie du distributeur 51 . Ce processus de signalisation des produits a<br />

également été accompagné par des producteurs cherchant à différencier leurs produits via des labels<br />

biologiques ou équitables. Leurs démarches amorcées dès les années 1985 se sont accélérées afin<br />

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l’accès à la grande distribution (un même produit a un attribut, du style : AB et Commerce Equitable).<br />

Par voie de conséquence, la différenciation pour le consommateur devient difficile et l’information<br />

fournie au consommateur est nécessairement imparfaite. Ce dernier ne peut optimiser ses choix. Les<br />

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garantie et les IG et les politiques de labels répondent aux exigences de communication, mais<br />

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L’asymétrie de l’information a des conséquences pour le consommateur, mais également pour les<br />

producteurs. Une entreprise engagée dans la dynamique de produits de qualité répondant à des critères<br />

de traçabilité suppose un investissement dans la réputation 52 ; il doit renforcer son image et choisir<br />

d’investir dans la communication et dans des accords contractuels pour certifier des produits. Dans un<br />

marché où les produits et les services ne sont pas uniformes, mais où les responsabilités désignent<br />

chaque segment de la chaîne, la décision de vendre un produit de haute qualité suppose de lourds<br />

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Les efforts conjoints du secteur privé et des administrations pour faciliter la lisibilité de l’information<br />

sont permanents. Les entreprises se lancent dans des campagnes publicitaires, des certificats de<br />

garantie et des signalisations accrues via les marques. Les gouvernements et les collectivités<br />

territoriales mènent des politiques d’information et de traçabilité (agences alimentaires en France puis<br />

en UE en 2001), ou dans des campagnes de promotion (les vins en Languedoc Roussillon, par<br />

exemple). Des coûts croissants en information doivent être couverts, ce qui explique le niveau de prix<br />

élevé des produits de terroir. Les capacités d’investissement en matière d’information deviennent une<br />

question majeure pour les producteurs. L’aptitude à créer des résumés d’information lisibles et<br />

pertinents induit des coûts particuliers (recherche, conditionnement, publicité etc.).<br />

Comme l’indique le modèle de Shapiro sur la réputation, pendant la période d’investissement la firme<br />

établit un prix incluant les coûts additionnels de l’information 53 . La formation du prix des produits<br />

51 Voir Codron J.M ; Giraud-Héraud E. Soler L.G « Minimum quality standards, premium private<br />

labels and European Meat and Fresh Produce Retailing » Forthcoming in Food Policy, 23 p.<br />

52 Les producteurs qui ne sont pas à même d’investir dans les mutations techniques et la<br />

communication (promotion, marque etc.) ont du mal à préserver la réputation liée à l’origine<br />

géographique ou à un attribut particulier d’un terroir. Une IG ou d’une AOC peut perdre sa fonction de<br />

création de valeur, si la stratégie de promotion du produit ne suffit pas à affronter la concurrence. Elle<br />

gardera alors uniquement sa fonction de protection juridique.<br />

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Le modèle de Shapiro de 1983 analyse avec un modèle d’équilibre les problèmes de réputation. Une<br />

critique de ce travail a été faite par les économistes de l’OCDE en 2000 dans le rapport intitulé<br />

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