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(1986) n°2 - Royal Academy for Overseas Sciences

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(Tu es un pauvre diable de païen,<br />

Mais un guerrier de première classe!)<br />

*<br />

* *<br />

1er janvier 1985. Le maréchal-président Nimeiri célèbre le vingt-neuvième anniversaire<br />

de l’indépendance du Soudan. Une indépendance agitée à laquelle il a<br />

imposé quinze ans et demi de dictature, après treize ans et demi d’anarchie. Car les<br />

passions politiques contredisent l’unité géographique de la vallée du Nil : le sud du<br />

pays est en révolte et beaucoup dans le nord se raccrochent aux liens historico-<br />

culturels avec l’Égypte. Pour se maintenir au pouvoir, ce militaire de carrière a<br />

déployé d’inattendus talents d’acrobate politique. Après s’être appuyé sur les<br />

communistes pour éliminer les Ashraf (devenus parti de l’Umma, c’est-à-dire de<br />

l’indépendance par la rupture avec l’Égypte), il a fait la paix avec le sud au détriment<br />

des communistes mais s’est brouillé avec le sud en lui imposant la Sharia, la loi<br />

coranique. Pour ce faire, Nimeiri s’est rapproché des «Frères Musulmans», une<br />

invention égyptienne étrangère aux traditions soudanaises de tolérance et d’organisation<br />

en confréries de caractère religieux plutôt que politique.<br />

Le 5 janvier, c’est le délire chez les «Frères» ; aux cris de «Mort aux ennemis<br />

d’Allah», on pend Mahmoud Mohammed Taha, vieillard de septante-six ans et<br />

ingénieur de son état, auquel les nouveaux amis du dictateur reprochent de prêcher<br />

la tolérance et une certaine émancipation des femmes. La télévision aidant, l’événement<br />

suscite un malaise chez beaucoup de gens qui commencent à réfléchir sur le<br />

coût croissant de la vie, sur les bruits de famine possible, sur la charge pesant sur<br />

leurs épaules de contribuables d’une dette de neuf milliards de dollars contractée<br />

pour de gros travaux dont on espère de moins en moins l’achèvement. Le dictateur<br />

court chercher secours à Washington et apprend sur l’aérodrome du Caire que sa<br />

propre armée lui interdit de rentrer chez lui.<br />

C ’est le 6 avril que le général Suwar El-Dahab annonce la prise du pouvoir par<br />

une junte bientôt dénommée «Conseil militaire transitoire» (CMT) et flanquée d’un<br />

ministère auquel des civils participent. Il proclame le non-alignement sur le plan<br />

international et, sur le plan intérieur, invite à se joindre à lui le «colonel» John<br />

Garang, chef des rebelles du «mouvement de Libération du Peuple soudanais». De<br />

Tripoli, Kadafi s’empresse de venir saluer le CMT et de lui promettre d’arrêter toute<br />

assistance aux rebelles, mais Garang ne l’entend pas de cette oreille. Il continuera<br />

la guerre sur la base de son refuge éthiopien et cela coûtera au nouveau gouvernement<br />

un million de livres sterling par jour.<br />

Le mois n’est pas encore terminé que se pose une autre question. Depuis<br />

novembre 1984, le monde entier s’est ému de la famine qui règne en Ethiopie sans<br />

trop tenir compte du fait que près d’un million de ces affamés se sont réfugiés au<br />

Soudan et que c’est peut-être au Soudan où ils sont qu’il conviendrait d’envoyer de<br />

l’aide, plutôt qu’en Ethiopie où ils ne sont plus. Or, voici que le CMT doit faire face<br />

à un autre danger. Constatant que pas moins de quarante organisations différentes

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