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(1986) n°2 - Royal Academy for Overseas Sciences

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sources vives de l’ethnie, des traditions fécondantes. Il ne s’agit pas de s’enfermer<br />

dans un ghetto culturel, mais d’un retour propice au métissage. Il s’agit de retrouver<br />

cet élément de l’identité culturelle sans lequel l’Afrique ne peut que perdre son<br />

âme [6]. Cette prédication de Badian, poétique et on ne peut plus attachante, semble<br />

rompre avec les impératifs du moment : l’Africain actuel a plus besoin de richesses<br />

matérielles que d’un sentiment religieux qui ne lui a jamais fait défaut. Les critiques<br />

de l’identité voient volontiers, dans la pensée de Badian, une sorte de diversion ou<br />

de faite en avant.<br />

Enfin les romancières qui se sont révélées au Sénégal ces dernières années n’ont<br />

pas conféré une place centrale à l’identité culturelle dans leurs oeuvres. Une si longue<br />

Lettre 14] comme La Grève des Battù[ 32], respectivement de Mariama BÂ et<br />

d’Aminata Sow Fa l l, posent des problèmes d’actualité sur le rôle et la place de la<br />

femme dans la société. Si l’identité n’est ni revendiquée, ni contestée, elle reste tout<br />

simplement implicite.<br />

*<br />

* *<br />

Au terme de cette étude, on doit bien constater la diversité des approches du<br />

thème de l’identité culturelle dans le roman. En fait, ses variations sont commandées<br />

par des mutations d’ordre politique et social. Le problème ne se pose pas de la même<br />

manière selon la période envisagée de l’histoire littéraire ou de l’histoire tout court.<br />

Il est singulier qu’au lendemain de la conquête coloniale, aucune voix ne se soit<br />

élevée au nom de l’identité culturelle. Il est vrai que la première élite coloniale<br />

africaine est pour l’essentiel moins acquise au traditionalisme qu’elle ne subit la<br />

séduction des idées nouvelles.<br />

C ’est l’école de la négritude qui a conféré au thème de l’identité culturelle sa<br />

résonance la plus <strong>for</strong>te. Toutefois, les romanciers.se sont vite libérés de ce qui<br />

pouvait passer pour un piège ; ils ont toujours su éviter de donner dans l’immobilisme<br />

par leur promptitude à épouser la moindre évolution de la société ou des<br />

idées ; ils se sont gardés des dangers de l’auto-exaltation et du narcissisme culturel.<br />

S’ils ne rejettent ni ne contestent l’impact de ce problème, ils le relativisent en ce<br />

sens qu’ils ne lui accordent plus une priorité absolue.<br />

Cette attitude peut s’expliquer à la lumière du procès de la négritude conduit dans<br />

le roman de l’Afrique indépendante. L’exploitation du thème de l’identité culturelle<br />

confinant au passéisme, les romanciers se sont tournés vers des préoccupations plus<br />

actuelles.<br />

C ’est peut-être parce que l’identité ne joue plus un rôle de premier plan que le<br />

roman africain est rarement «régionaliste» et que des régions entières, des ethnies<br />

<strong>for</strong>tement enracinées dans le terroir n’y sont pas représentées. Il est clair que le<br />

sentiment d’identification collective se fonde de moins en moins sur le respect de<br />

traditions héritées et sur un passé révolu, et de plus en plus sur l’allégeance aux<br />

nouveaux états issus de la décolonisation. Mais c’est là le sujet d’un autre exposé qui

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