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« Ce roman «n'est pas de la Reonde Table». - Université Rennes 2

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ACTES DU 22 e CONGRÈS DE LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE ARTHURIENNE, RENNES, 2008<br />

PROCEEDINGS OF THE 22 nd CONGRESS OF THE INTERNATIONAL ARTHURIAN SOCIETY, 2008<br />

tant en vers qu’en prose 21) comme les plus surprenantes (Le Bel Inconnu, La<br />

Vengeance Ragui<strong>de</strong>l, La Chanson d’Audigier et Meraugis <strong>de</strong> Portlesguez 22).<br />

Pour qu’il y ait hypertextualité, <strong>la</strong> mécanique intertextuelle doit<br />

cependant dérailler. Conformément à <strong>la</strong> dynamique freudienne du rêve ou<br />

du mot d’esprit, toute con<strong>de</strong>nsation se paie d’une succession <strong>de</strong><br />

dép<strong>la</strong>cements, ce dont arrive à rendre compte <strong>la</strong> polysémie du terme contrait,<br />

qui désigne certes le paralytique mais aussi le difforme ou le contrefait,<br />

participe <strong>pas</strong>sé adjectival issu du bas <strong>la</strong>tin contrafacere et formé sous<br />

l’influence <strong>de</strong> contrait. Bien plus qu’une simple contraction, l’écriture<br />

<strong>roman</strong>esque apparaît donc comme un travail <strong>de</strong> contrefaçon qui suppose<br />

d’abord, conformément au sens du verbe contrefaire (< bas <strong>la</strong>t. contrafacere),<br />

que l’on reproduise en imitant 23 et, dès le XIII e siècle, que l’on déforme ou<br />

que l’on déguise (comme on contrefera Renart au siècle suivant 24). Enfin,<br />

l’homonymie parfaite entre le verbe contraire (< contrahere) et le substantif<br />

issu du <strong>la</strong>tin contrarium dit bien le désir d’opposition qui anime le <strong>roman</strong>cier<br />

et que résume <strong>la</strong> rime judicieuse <strong>de</strong>s vers 10645-10646 : <strong>«</strong> Mais mains hom,<br />

ch’ai oï retraire, / Va lïement a son contraire ». La rime entre retraire et contraire<br />

doit cette fois être lue par rapport au couple formé par les verbes (es)traire et<br />

retraire, principes ordonnateurs du <strong>roman</strong> arthurien :<br />

<strong>«</strong> Reconter d’Arthur, <strong>de</strong> Gauvain…, retraire une aventure <strong>de</strong>…,<br />

re<strong>pas</strong>ser sur les traces déjà existantes mais en imprimant sa<br />

marque, mais en dévoyant subtilement les chemins <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

21 Sur <strong>la</strong> lecture intertextuelle <strong>de</strong> <strong>la</strong> Continuation <strong>de</strong> Gerbert <strong>de</strong> Montreuil, voir entre autres<br />

Keith V. Sinc<strong>la</strong>ir, <strong>«</strong> Gerbert <strong>de</strong> Montreuil and the Parody Audigier », Romance Notes, vol. 17, n o 2, 1976-<br />

1977, p. 208-211 ; Antoinette Saly, <strong>«</strong> Le Perlesvaus et Gerbert <strong>de</strong> Montreuil », dans Jean-C<strong>la</strong>u<strong>de</strong> Faucon<br />

(dir.), Miscel<strong>la</strong>nea Mediaevalia. Mé<strong>la</strong>nges offerts à Philippe Ménard, Genève, S<strong>la</strong>tkine, 1998, p. 1163-1182 ;<br />

Philippe Ménard, <strong>«</strong> L’histoire du Chevalier au Cygne dans La Continuation du Perceval <strong>de</strong> Gerbert », dans<br />

Maurice Accarie et al. (dir.), Marginalité et littérature. Hommage à Christine Martineau-Génieys, ILF-CNRS,<br />

<strong>Université</strong> <strong>de</strong> Nice-Sophia Antipolis, 2001, p. 249-262 et Sébastien Douchet, <strong>«</strong> Une esthétique <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

diversité : <strong>la</strong> Quatrième Continuation <strong>de</strong> Gerbert <strong>de</strong> Montreuil, Étu<strong>de</strong>s médiévales, vol. 7, 2005, p. 88-101.<br />

22 Héros loufoque d’une chanson <strong>de</strong> geste à ce point burlesque que Joseph Bédier suggérait <strong>de</strong> parler, à<br />

son sujet, d’<strong>«</strong> épopée scatologique » (Les Fabliaux, Paris, E. Bouillon, 1893), Audigier est cité au vers<br />

4416. Les allusions au <strong>roman</strong> <strong>de</strong> Meraugis <strong>de</strong> Portlesguez se remarquent quant à elles dans <strong>la</strong> double<br />

mention du héros éponyme et <strong>de</strong> son compagnon, Gorvain Cadru (v. 3794, 4267 et 4504) et trahissent<br />

elles aussi <strong>la</strong> sympathie <strong>de</strong> l’auteur pour le courant parodique qui traverse les récits en vers à partir <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

fin du XII e siècle.<br />

23 Le sens est attesté dans Erec et Eni<strong>de</strong>, par exemple : <strong>«</strong> Tant bele chose faire sot [Nature] / Ne puis tant<br />

pener ne se pot / Qu’ele peüst son examp<strong>la</strong>ire / En nule guise contrefaire » (v. 417-420).<br />

24 Le Roman <strong>de</strong> Renart le Contrefait, édition Guy Raynaud et Henri Lemaître, 2 vol., Genève, S<strong>la</strong>tkine<br />

Reprints, 1975 [1914].<br />

18 JUILLET, SESSION 2-L3 VARIA<br />

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