Un cheminement de guérison : Le rétablissement du mieux-être

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60 chapitre cinq Presque le quart (23,3 %) des projets ayant répondu au questionnaire de détermination des pratiques de guérison prometteuses font référence à une langue autochtone. Dans bien des cas, la langue a été identifiée comme un facteur ayant contribué directement à la réussite du projet. L’utilisation de la langue autochtone par les équipes de projet a augmenté leurs chances de rejoindre les Aînés et d’assurer la liaison avec eux. Le fait de pouvoir offrir aux clients de s’exprimer dans leur langue d’origine a permis aux équipes d’accroître le choix comme langue de service. En s’établissant comme modèles d’utilisation de la langue ancestrale, les équipes ont incité les gens à l’utiliser pour la préserver. Comme l’interdiction de parler leur langue était tellement radicale dans les pensionnats, les Survivants ont parfois eu besoin d’une permission expresse pour le faire. Pour la Première Nation de Kettle et Stony Point, la langue est devenue le thème central de leur projet de guérison. [traduction] « C’est tout à fait à l’opposé de ce qui se faisait dans les pensionnats. Nous sommes récompensés du fait que nous parlons notre langue au lieu d’être punis. » 156 Dans sa publication, A Time to Listen and the Time to Act, l’Assemblée des Premières Nations cite l’Aîné feu Eli Taylor qui a tenu les propos suivants au sujet du rôle de la langue dans la compréhension des concepts et des relations : [traduction] Notre langue autochtone donne corps à tout un système de valeurs lié à nos obligations en matière de conduite, de façon de vivre et de rapports avec les autres ... Elle attribue un nom à nos liens de parenté, à nos rapports familiaux, aux rôles et responsabilités à l’égard des membres de notre famille, à nos liens au sein du plus grand groupe, de notre clan ... Il n’existe pas de mots anglais (ou français) pour exprimer ces rapports. 157 5.10.3 Mets traditionnels et activités en milieu naturel Dans son étude à long terme sur les perceptions des Cris en matière de santé – fondée sur des entretiens avec des Aînés – Naomi Adelson a conclu que la santé est indissociable de l’identité des Cris et de leur culture inspirée par la nature. 158 La phrase miyupimaatisiim ou « être vivant et bien » saisit bien cette dimension de la santé : [traduction] « En réalité, selon la perspective des Cris, la santé est autant une question qui se rapporte aux rapports sociaux, à la terre (la nature) et à l’identité culturelle qu’à la physiologie d’une personne. » 159 La chaleur, les aliments traditionnels des Cris et la force constituent l’essence même de « être vivant et bien. » La nourriture chez les Inuits joue un rôle similaire dans le maintien de la santé physique et mentale. En effet, une étude sur la santé mentale a permis de constater une association irréfutable entre le manque de nourriture traditionnelle et le sentiment général d’un état de santé déficient, entre autres une sensation de faiblesse, de lassitude, de fatigue, d’irritabilité, de peu de serviabilité, d’entêtement, de désintéressement à l’égard du quotidien, de l’indifférence envers les enfants et de la dépression généralisée. 160 Bien des activités culturelles rapportées par les projets tournent autour de la nourriture – la cueillette, la récolte, la préparation et le partage d’aliments traditionnels. Le Conseil des Montagnais à Natashquan au Québec a rapporté que l’approche mise de l’avant par les Aînés est ancrée dans les enseignements innus se rapportant à la nourriture traditionnelle, aux plantes médicinales et à la nature, de même qu’à la famille et à l’histoire de la tribu. D’autres projets ont offert des cours de préparation d’aliments volume i : un cheminement de guérison : le rétablissement du mieux-être

chapitre cinq traditionnels; des Aînés, des jeunes et la communauté au complet se sont réunis pour prendre le thé une fois par mois. Également, on a organisé des activités liées à la cueillette, à la préparation/à l’utilisation de mets traditionnels et de plantes médicinales. Bon nombre de projets ont dit avoir célébré les réalisations en organisant un repas communautaire. La cueillette et la préparation de mets constituent généralement le thème central des activités en milieu naturel qui mettent à contribution les jeunes, favorisent l’acquisition d’habiletés par la pratique, des relations familiales positives et le partage; elles permettent également le renforcement de l’estime de soi qui prend sa source dans des accomplissements valorisés par soi et les autres. Par exemple, le centre d’amitié Kikinahk Friendship Centre à La Ronge en Saskatchewan fait participer des jeunes à des activités traditionnelles, notamment la façon de découper et de préparer la viande d’orignal, de sécher et de fumer le poisson et faire la cueillette de baies. Les Aînés ont ramassé des plantes médicinales et ils ont enseigné aux jeunes la façon traditionnelle de s’en servir. Les adolescents apprennent à faire des tâches traditionnelles avec les grands-parents rattachés au centre, notamment installer un filet de pêche sur la glace, [traduction] « se servir d’une turlutte, d’une corde et de leurs muscles. Pour faire un trou dans la glace, ils apprennent à se servir d’un ciseau à glace – il faut faire deux trous. » 161 Les responsables du projet rapportent que la grande majorité des jeunes n’ont jamais rien appris de leur culture et c’est pourquoi ceux qui participent au programme sont très désireux d’apprendre. Dans un milieu urbain, mettre sur pied un cercle de guérison en y intégrant le partage de nourriture permet d’atteindre des objectifs du programme : [traduction] La soirée commence par un repas, les hommes arrivant vers 17h30. Prendre un repas, c’est en partie parce que ce moment de partage correspond aux valeurs traditionnelles autochtones et qu’il suscite des sentiments associés aux repas en commun (une fête). Manger ensemble permet aussi d’atteindre des objectifs du programme liés à l’établissement de relations de groupe et à la satisfaction de besoins fondamentaux. Le fait d’offrir un repas stimule au départ les gens à participer à la séance jusqu’à ce que le groupe atteigne un point où leur engagement et leur motivation seront suffisamment développés pour les inciter à venir participer. 162 En résumé, les interventions culturelles ont été pleinement et consciemment intégrées aux programmes de guérison. Les activités culturelles ont été identifiées comme pratiques de guérison prometteuses plus souvent que n’importe quelle autre intervention ou approche, sauf les méthodes traditionnelles. Bien que la culture soit de toute évidence un bon moyen de guérison, la démarche holistique – particulièrement en fonction du rétablissement à la suite de traumatisme – nécessite que les interventions soient davantage ciblées, dirigées. Dans la section suivante, nous examinons la façon dont les projets ont appliqué les méthodes thérapeutiques de guérison. volume i : un cheminement de guérison : le rétablissement du mieux-être 6

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La cueillette et la préparation <strong>de</strong> mets constituent généralement le thème central <strong>de</strong>s activités en<br />

milieu naturel qui mettent à contribution les jeunes, favorisent l’acquisition d’habiletés par la pratique,<br />

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centre d’amitié Kikinahk Friendship Centre à La Ronge en Saskatchewan fait participer <strong>de</strong>s jeunes à <strong>de</strong>s<br />

activités traditionnelles, notamment la façon <strong>de</strong> découper et <strong>de</strong> préparer la vian<strong>de</strong> d’orignal, <strong>de</strong> sécher<br />

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et ils ont enseigné aux jeunes la façon traditionnelle <strong>de</strong> s’en servir. <strong>Le</strong>s adolescents apprennent à faire<br />

<strong>de</strong>s tâches traditionnelles avec les grands-parents rattachés au centre, notamment installer un filet <strong>de</strong><br />

pêche sur la glace, [tra<strong>du</strong>ction] « se servir d’une turlutte, d’une cor<strong>de</strong> et <strong>de</strong> leurs muscles. Pour faire<br />

un trou dans la glace, ils apprennent à se servir d’un ciseau à glace – il faut faire <strong>de</strong>ux trous. » 161 <strong>Le</strong>s<br />

responsables <strong>du</strong> projet rapportent que la gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s jeunes n’ont jamais rien appris <strong>de</strong> leur<br />

culture et c’est pourquoi ceux qui participent au programme sont très désireux d’apprendre.<br />

Dans un milieu urbain, mettre sur pied un cercle <strong>de</strong> <strong>guérison</strong> en y intégrant le partage <strong>de</strong> nourriture<br />

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un repas, c’est en partie parce que ce moment <strong>de</strong> partage correspond aux valeurs traditionnelles<br />

autochtones et qu’il suscite <strong>de</strong>s sentiments associés aux repas en commun (une fête). Manger<br />

ensemble permet aussi d’atteindre <strong>de</strong>s objectifs <strong>du</strong> programme liés à l’établissement <strong>de</strong> relations<br />

<strong>de</strong> groupe et à la satisfaction <strong>de</strong> besoins fondamentaux. <strong>Le</strong> fait d’offrir un repas stimule au départ<br />

les gens à participer à la séance jusqu’à ce que le groupe atteigne un point où leur engagement<br />

et leur motivation seront suffisamment développés pour les inciter à venir participer. 162<br />

En résumé, les interventions culturelles ont été pleinement et consciemment intégrées aux programmes<br />

<strong>de</strong> <strong>guérison</strong>. <strong>Le</strong>s activités culturelles ont été i<strong>de</strong>ntifiées comme pratiques <strong>de</strong> <strong>guérison</strong> prometteuses plus<br />

souvent que n’importe quelle autre intervention ou approche, sauf les métho<strong>de</strong>s traditionnelles. Bien que<br />

la culture soit <strong>de</strong> toute évi<strong>de</strong>nce un bon moyen <strong>de</strong> <strong>guérison</strong>, la démarche holistique – particulièrement en<br />

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ciblées, dirigées. Dans la section suivante, nous examinons la façon dont les projets ont appliqué les<br />

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