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Réconciliation - Fondation autochtone de guérison

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Mon père, Martin Semchuk, m’a <strong>de</strong>mandé « Peux-tu t’imaginer ce que ce pays<br />

serait si nous n’étions pas arrivés? » Il s’en souciait et il a fait ce qu’il a pu pour<br />

contrecarrer la colonisation même s’il y participait. Comme Ukrainiens, nous<br />

sommes venus en tant que les pions <strong>de</strong>s Britanniques pour occuper les terres, pour<br />

poser les fon<strong>de</strong>ments d’une nation en morcelant le territoire. Nous avons pris<br />

possession <strong>de</strong>s terres en les rendant semblables à celles <strong>de</strong>s vieux pays, fécon<strong>de</strong>s<br />

par l’agriculture en éliminant « la laine ou scripe » <strong>de</strong>s Prairies et en défrichant la<br />

terre. Nous avons amené nos animaux, nos plantes, nos croyances, nos craintes et<br />

nos espoirs d’un nouveau départ, une chance <strong>de</strong> survivre et d’exister. À cette époque,<br />

l’existence <strong>de</strong> l’Ukraine était reniée. C’est tout juste si nous avons apprécié ce qu’il<br />

y avait ici tellement nous étions centrés sur ce que nous avions perdu et sur tout ce<br />

que nous continuerions sans cesse à perdre pendant <strong>de</strong>s siècles. Nous avons essayé<br />

<strong>de</strong> recréer notre patrie d’origine parce que c’était ce que nous connaissions, ce que<br />

nous désirions, ce qui avait subvenu à nos besoins, nous avait nourris. C’était ce<br />

pourquoi nous nous étions battus, avions perdu notre vie, avions souffert… été<br />

violés, torturés et étions morts. En 1885, quand Poundmaker a paré au massacre <strong>de</strong><br />

son peuple, mis en déroute la milice d’Otters et a forcé les soldats à s’enfuir, l’Empire<br />

austro-hongrois a aboli le servage <strong>de</strong>s Ukrainiens. Malgré cela, nous étions encore<br />

liés par contrat à la terre, les pionniers (pions) d’autres nations qui se sont emparés<br />

du blé que nous produisions comme paiements <strong>de</strong>s petits arpents <strong>de</strong> terre qui<br />

pouvaient à peine subvenir aux besoins <strong>de</strong> nos enfants, <strong>de</strong> nos petits-enfants et <strong>de</strong><br />

nos arrière-petits-enfants, leur bâtir un avenir. Nous étions encore esclaves. Il nous<br />

fallait racheter notre propre terre <strong>de</strong>s conquérants.<br />

Ici nous avons pris <strong>de</strong> l’essor. Il m’a été dit que vos gens étaient forcés <strong>de</strong> se replier<br />

dans <strong>de</strong>s réserves et d’avoir à utiliser <strong>de</strong>s laisser-passer pour aller à l’extérieur. Dans<br />

votre réserve, accordé par le Traité 6, Thun<strong>de</strong>rchild Reserve, le territoire a été repris<br />

et vendu à <strong>de</strong>s acheteurs étrangers alors que vos populations étaient à nouveau<br />

chassées, transplantées sur <strong>de</strong>s terres moins fertiles. Quels ont été les effets <strong>de</strong> cela<br />

sur la vie <strong>de</strong> ta mère, ta vie à toi Elwood?<br />

Il y a peu d’écologies au mon<strong>de</strong> aussi complètement transformées qu’en<br />

Saskatchewan — à notre époque par la charrue. Nous avons inscrit notre nom sur<br />

ces terres avec les semences que nous avions apportées. Le blé a généré un monopole,<br />

il s’est étendu au détriment <strong>de</strong> la flore, <strong>de</strong> la faune et du savoir du pays.<br />

Nous ne savions pas que nous étions comme les Écossais qui avaient connu en<br />

Écosse la dépossession paysanne et étaient venus au Canada pour se bâtir une vie<br />

nouvelle; nous étions aussi complices en recréant les échos <strong>de</strong>s violences <strong>de</strong> jadis ici<br />

dans ce nouveau pays. Après tout, nous étions invités, attirés par les promesses d’un<br />

pays libre.<br />

À qui les terres?<br />

Cultiver le Canada | 63

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