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Réconciliation - Fondation autochtone de guérison

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Mon père a rencontré sa <strong>de</strong>uxième femme, Etheline Victoria Blind, lors d’un bingo<br />

organisé à Edmonton Sud. Oui, il a rencontré son épouse <strong>autochtone</strong> lors d’un bingo,<br />

<strong>de</strong>vant un kiosque avec une vitrine en verre où <strong>de</strong>s morceaux <strong>de</strong> bannock frits, mieux<br />

connus sous le nom <strong>de</strong> « kill-me-quicks » (une mort rapi<strong>de</strong>) luisaient sous la lumière<br />

<strong>de</strong>s néons.<br />

Je travaillais pour une organisation environnementale à cette époque. Comme la<br />

plupart <strong>de</strong>s organisations caritatives <strong>de</strong> l’Alberta, nos levées <strong>de</strong> fonds se faisaient<br />

principalement par le biais <strong>de</strong> bingos et dans les casinos. Mon père était l’un <strong>de</strong> nos<br />

principaux bénévoles. Il était retraité, fiable et toujours <strong>de</strong> bonne humeur, même s’il<br />

n’entendait plus trop bien. Etheline, par contre, était sur la liste <strong>de</strong> bénévoles qu’on<br />

appelait en <strong>de</strong>rnier recours. Elle était la mère d’un ami d’école d’un collègue. Je ne la<br />

connaissais pas, mais je l’ai appelée un soir, par pur désespoir.<br />

Je ne me souviens pas avoir vu voler d’étincelles entre mon père et Etheline. Il avait<br />

soixante-cinq ans à l’époque et ne semblait pas vouloir raviver les braises <strong>de</strong> sa<br />

vie amoureuse. Mais Etheline l’avait invité à jouer au Scrabble et c’est ainsi qu’a<br />

commencé leur histoire.<br />

Mon père entretenait une relation quelque peu acariâtre avec Etheline, à mon avis.<br />

Ils ont vécu séparément pendant <strong>de</strong> longues années — Papa dans un appartement<br />

situé sur Rainbow Valley Road et Etheline dans un duplex fatigué à cinq minutes <strong>de</strong><br />

là — mais ils se sont rapprochés, petit à petit, tant sur le plan géographique que sur le<br />

plan spirituel. Il l’a finalement épousée, quelques jours après la Saint-Valentin, huit<br />

ans après qu’ils se sont rencontrés. Je suis venu <strong>de</strong> Whitehorse en avion avec mon fils,<br />

âgé d’un an à l’époque. Il était le seul à porter un complet, un smoking une pièce en<br />

daim. Et c’est ainsi qu’Etheline est <strong>de</strong>venue ma belle mère indienne.<br />

Les excuses présentées par Stephen Harper aux survivants <strong>de</strong>s pensionnats ont<br />

constitué un événement politique d’envergure. Comment ne pas être ému par la<br />

présence <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux survivantes, la plus âgée et la plus jeune, côte à côte, leurs pieds<br />

foulant le sol du Parlement — une femme <strong>de</strong> 104 ans et l’autre <strong>de</strong> vingt ans à peine.<br />

Les discours étaient superbes, l’optique parfaite.<br />

Et pourtant, j’avais l’impression qu’on m’avait joué un tour, car ces excuses<br />

diluaient l’histoire complexe <strong>de</strong> l’assimilation en une politique unique et la faisaient<br />

disparaître, comme dans un trou noir, en la résumant en un problème d’un mot :<br />

pensionnats. Des excuses qui négligeaient d’abor<strong>de</strong>r la plupart <strong>de</strong>s maux. En<br />

nous excusant pour la création <strong>de</strong>s pensionnats, nous pouvions oublier toutes<br />

les autres façons dont le système avait privé — et continuait à priver — les peuples<br />

<strong>autochtone</strong>s <strong>de</strong> leurs vies et <strong>de</strong> leurs terres. Le gouvernement était à l’origine du<br />

problème, personne ne disait le contraire, mais en avait maintenant aussi accepté la<br />

responsabilité et gérait le problème, en aidant avant tout les survivants à se rétablir.<br />

Si ces <strong>de</strong>rniers avaient été victimes <strong>de</strong> mauvais traitements, il leur suffisait d’évaluer<br />

leurs souffrances dans un document <strong>de</strong> trente pages, <strong>de</strong> faire le total <strong>de</strong>s points <strong>de</strong><br />

368 | Mitch Miyagawa

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